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L’Amour médecin
Molière
Livret pédagogique
correspondant au livre de l’élève n° 76
SOMMAIRE
R É P O N S E S A U X Q U E S T I O N S ................................................................................. 3
Le Médecin volant, scènes première à III (pp. 13 à 15) ............................................................................................................................ 3
Le Médecin volant, scènes IV à VIII (pp. 24 à 26) ...................................................................................................................................... 6
Le Médecin volant, scènes IX à XVI (pp. 38 à 40) ...................................................................................................................................... 9
L’Amour médecin, acte I (pp. 58 à 61) ................................................................................................................................................. 12
L’Amour médecin, actes II et III (pp. 92 à 94)........................................................................................................................................ 16
Retour sur les œuvres (pp. 95 à 98) ..................................................................................................................................................... 20
P R O P O S I T I O N D E S É Q U E N C E S D I D A C T I Q U E S .............................................................. 22
E X P L O I T A T I O N D U G R O U P E M E N T D E T E X T E S .............................................................. 23
P I S T E S D E R E C H E R C H E S D O C U M E N T A I R E S ................................................................ 24
B I B L I O G R A P H I E C O M P L É M E N T A I R E ....................................................................... 25
Les liens de parenté sont posés. On apprend en effet que Sabine est la cousine de Lucile (son nom ne
sera pas prononcé au cours de la pièce) et donc la nièce de Gorgibus.
Les liens peuvent aussi être professionnels : Sganarelle est le valet de Valère.
Ajoutons ce qui concerne les sentiments : Valère et Lucile s’aiment. Quant à Villebrequin, il n’est pas
question de sentiment et on peut supposer que son mariage avec la fille de Gorgibus est une question
d’intérêt plus que d’amour.
À propos de l’intrigue :
Inspirée de la comédie latine autant que de la farce, l’intrigue est centrée sur la question du mariage de
Lucile. La jeune fille aime Valère d’un amour réciproque et pourtant son père a décidé de la marier au
plus vite avec Villebrequin. Désir et sentiments d’un côté, autorité paternelle de l’autre. C’est le ressort
de nombreuses comédies, et il faudra attendre le XVIIIe siècle et Marivaux pour que la question du
mariage soit posée différemment. Le conflit des générations et des points de vue sur le mariage (amour
contre intérêt, liberté contre autorité) dynamise la pièce et, comme plus tard dans Le Médecin malgré lui,
sert de canevas aux scènes comiques. L’urgence de la situation, comme dans L’Amour médecin, oblige la
jeune fille à recourir à un stratagème destiné à retarder le mariage fixé, dans l’espoir d’un revirement du
père. Lucile (comme Lucinde) est presque séquestrée et il s’agit pour son amant de détourner
l’attention du père pour l’approcher malgré l’interdiction. D’où la ruse du médecin, destinée à occuper
Gorgibus et à l’amener à placer sa fille dans un lieu (« ce pavillon qui est au bout de notre jardin ») où la
rencontre (voire davantage : « vous pourriez l’entretenir à l’insu de notre vieillard, l’épouser ») avec Valère
sera possible.
at L’exposition consiste également à présenter les personnages au fur et à mesure de leur entrée en
scène. Ainsi, lorsque Sganarelle fait son entrée (scène II), il a été présenté à la fin de la scène première
comme le valet de Valère que Sabine songe à faire passer pour un médecin. Les derniers mots de la
scène commentent son entrée : « Mais le voici tout à propos ». Aucun doute pour le spectateur : le
comédien qui entre en scène vêtu d’un costume de valet est au service de Valère et va devoir jouer le
rôle d’un médecin.
Dans sa tirade de la scène première, Sabine a présenté la feinte maladie de Lucile et le projet de
mariage de son père. Elle a aussi expliqué que son oncle l’avait envoyée « quérir un médecin ». Ainsi,
lorsque le personnage qui fait son entrée dans la scène III s’exclame : « Allez vitement chercher un
médecin ; car ma fille est bien malade, et dépêchez-vous », le public comprend qu’il s’agit de Gorgibus,
dont le nom a été prononcé dans la scène II ; il en déduit également que le personnage qui
l’accompagne, habillé en valet, est à son service.
ak
Le mot « médecin », au cœur des trois scènes d’exposition (cf. question précédente), est le premier
mot du titre. Le spectateur comprend que l’intrigue va être centrée sur le stratagème du faux médecin
destiné à tromper Gorgibus et à faciliter les amours de Valère et de Lucile.
al Le titre et son adjectif verbal fantaisiste « volant » continuent de susciter la curiosité des spectateurs
car, si l’on a compris que la médecine serait au cœur du stratagème, on ne voit ni comment ni
pourquoi Molière va faire voler son faux médecin.
an Le valet au théâtre est un rôle et non une simple imitation de la réalité sociale. Sganarelle, le
domestique, ne peut contrefaire le médecin, car ce n’est pas dans ses attributions professionnelles ; mais
Sganarelle, le valet de comédie, en est, lui, tout à fait capable comme en témoigne la fin de la scène II.
En rapprochant Sganarelle et Gros-René, deux figures du valet de comédie, on peut en déduire
quelques caractéristiques du rôle :
– Le valet est intéressé. Il suffit en effet à Valère de parler de donner dix pistoles à son valet pour que
ce dernier se sente à la hauteur de la mission qu’il avait tout d’abord refusée. Le ressort de l’argent
fonctionne de la même manière dans le premier acte du Médecin malgré lui.
– Le valet aime profiter de l’existence (valet épicurien) : « je croyais refaire mon ventre d’une bonne
carrelure, et m’en voilà sevré », se plaint Gros-René dont le nom même suggère l’appétit.
– Le valet peut s’opposer à son maître : « vous vous moquez de moi ! » dit Sganarelle à Valère, qui lui
demande d’endosser l’habit de médecin ; « Que diable aussi ! » répond Gros-René à son maître. Et il
n’hésite pas à lui montrer ses torts : « Pourquoi vouloir donner votre fille à un vieillard ? »
– Le valet peut faire preuve d’autorité (inversion carnavalesque des rôles caractéristique de la culture
populaire) : « Laissez-moi faire », « Venez seulement me faire avoir un habit de médecin » (Sganarelle).
– Le valet incarne le bon sens populaire ; pour preuve, les remontrances adressées à Gorgibus par Gros-
René et les références de Sganarelle aux proverbes : « On dit un proverbe d’ordinaire ».
ao
Sabine, personnage qui ne réapparaîtra pas dans la suite de la pièce, fait preuve d’ingéniosité car
c’est à elle que Valère doit le stratagème du faux médecin. Elle a aussi conseillé à sa cousine de feindre
d’être malade pour retarder son mariage avec Villebrequin. Elle est à la fois la confidente de Valère et
celle de Lucile – un rôle souvent attribué à la servante dans la comédie. Ici, Sabine fait figure
d’entremetteuse – ce qui est aussi un emploi au théâtre.
ap
Dans la scène première, Gorgibus est présenté comme avare (« l’avarice ») et « crédule » (la crédulité).
aq
La première réplique de Gorgibus porte toutes les marques de l’insistance : « vitement », « bien »,
« dépêchez-vous », si bien que l’on pourrait croire le père inquiet de la maladie de sa fille. La seconde
réplique de Gorgibus nous montre qu’il n’en est rien. L’inquiétude du « vieillard » ne porte pas sur la
santé de Lucile, mais sur l’éventuel retard du mariage fixé. Le père apparaît comme insensible et
égoïste, seulement préoccupé de son propre intérêt.
Le rapprochement des deux répliques contribue à révéler le caractère du barbon de comédie tout en
produisant un effet comique dû à la surprise.
Étudier le genre
ar
Cette question vise à attirer l’attention des élèves sur la note attachée à la didascalie « galimatias ».
Molière ne voit pas la nécessité de développer la réplique de Gros-René et ses considérations sur le
mariage ; il compte sur le comédien pour improviser la suite de la réplique. On voit là que le texte est
bien destiné à être plus joué que lu et que Molière s’inspire de la commedia dell’arte, le théâtre italien qui
accorde une place importante à l’improvisation à partir d’un canevas.
as
Dans la scène première, le spectateur découvre un Valère désorienté, incapable de résoudre le
problème qui le bouleverse. C’est Sabine qui lui conseille le stratagème, le guidant par une
interrogation totale (« si vous faisiez habiller votre valet en médecin »). Valère se montre même incapable
de trouver son valet (« Où diable trouver ce maroufle à présent ? ») quand Sganarelle fait miraculeusement
son entrée.
Les scènes première et III montrent également que Gorgibus n’est pas capable de trouver lui-même un
médecin pour sa fille. Il confie d’abord cette mission à Sabine (compte-rendu de la scène première),
puis à Gros-René (scène III).
On pourra approfondir la réflexion sur le repérage des types en insistant sur le fait que le personnage de
la comédie ou de la farce est stylisé, caricaturé et qu’en cela il est plus proche d’une marionnette de
Guignol que d’un personnage réel.
bt On peut relever :
– Scène première : « une bonne invention », « contrefait la malade », « qui fût de notre intelligence », « à
l’insu de notre vieillard », « si vous faisiez habiller votre valet en médecin », « si facile à duper ».
– Scène II : « il faut que tu contrefasses le médecin », « faire le médecin » (2 fois), « se laissera étourdir de ton
discours ».
bk L’adverbe qui exprime l’autorité de Gorgibus sur sa fille est : « résolument ».
Réponses aux questions – 6
Les expressions qui insistent sur l’urgence de la situation sont : « tellement avancées », « ils eussent été
mariés dès aujourd’hui », « à l’extrémité ».
L’adverbe et l’expression de l’urgence créent une tension dramatique qui dynamise l’exposition. Le
« dès aujourd’hui » n’est pas sans rappeler la règle de l’unité de temps que Boileau formulera dans son Art
poétique en 1674.
bl Le registre comique, qui ira en s’intensifiant au cours de la farce, est d’ores et déjà annoncé dans les
scènes d’exposition. Plusieurs éléments peuvent être observés :
Comique de situation :
– l’arrivée opportune, mais peu vraisemblable, de Sganarelle : « Mais le voici tout à propos » ;
– les services (l’heure, le prix du beurre…) que Sganarelle propose au regard de ce que le spectateur sait
du projet de Valère ;
– l’effet inverse que produisent les efforts répétés de Gorgibus pour trouver un médecin : alors qu’il
s’agit pour lui de rendre possible le mariage de sa fille avec Villebrequin, il ne fait que faciliter l’amorce
du stratagème de Sabine. Le spectateur, au courant de la feinte maladie de Lucile comme de la
fourberie prévue, ne peut que rire de l’empressement de Gorgibus dans la scène III.
Comique de caractère :
– le contraste entre le désarroi de Valère et la maîtrise dont fait preuve Sabine ;
– le brusque revirement de Sganarelle dès lors que Valère propose dix pistoles ;
– le personnage de Gros-René : son nom associé à son intérêt pour la nourriture.
À vos plumes !
bm
On attend des élèves les connaissances et les compétences suivantes :
– connaissances : la scène première de la pièce et le stratagème initié par Sabine, la mise en forme
(répliques, didascalies) d’une scène de théâtre ;
– compétences : insérer un récit dans un dialogue, utiliser à bon escient les didascalies.
L e M é d e c i n v o l a n t , s c è n e s I V à V I I I ( p p . 2 4 à 2 6 )
Avez-vous bien lu ?
u C’est Sabine, l’entremetteuse, qui introduit Sganarelle auprès de Gorgibus.
v C’est également Sabine qui introduit Lucile. On remarquera que, lorsque Lucile entre en scène,
Sabine n’intervient plus. Le stratagème qu’elle a initié est en marche et elle n’a plus sa place dans le
mécanisme enclenché.
w Suivant le plan de Sabine, Sganarelle propose que Lucile prenne « un peu l’air » et qu’elle se
divertisse « à la campagne » (scène V).
x L’Avocat se présente comme un ami de la famille de Gorgibus qui a entendu parler de la maladie de
Lucile et qui vient prendre des nouvelles.
L’effet produit : ces hyperboles visent à mettre en avant les qualités extraordinaires du prétendu
médecin. Il s’agit de persuader Gorgibus de l’accepter pour soigner sa fille. Il s’agit également de faire
rire les spectateurs qui connaissent la supercherie : l’hyperbole est une caractéristique de l’éloge, mais
aussi de la caricature – et c’est le cas ici.
Ces hyperboles sont d’ailleurs reprises par Sganarelle à son compte : plus loin, il se présente comme un
médecin hors du commun, pourvu de « talents particuliers ».
Bien sûr, on ne peut attendre des élèves de 6e qu’ils identifient eux-mêmes les moyens grammaticaux
des hyperboles. Mais une étude en classe à partir du relevé des élèves peut permettre de dégager ces
procédés grammaticaux. Cette réplique peut aussi servir de support pour une étude de la caractérisation
(adjectifs épithètes et relatives).
ao Le comique de la consultation repose également sur le caractère de Gorgibus, personnage « crédule »
comme l’avait annoncé Sabine au début de la pièce. Il ne voit pas que Sganarelle est un ignorant, qui
ne connaît du latin que ce qu’il a entendu à l’église (« Per omnia sæcula sæculorum ») et qui ne sait
même pas écrire (« Y a-t-il quelqu’un qui sache écrire ? »). Parfois – et cela contribue à faire rire le
spectateur – Gorgibus semble sur le point de découvrir la supercherie ; mais il se contente de s’étonner
sans tirer de ce qu’il constate les conclusions nécessaires : « Hé, quoi ! Monsieur, vous l’avalez ? », à
propos des urines ; « Est-ce que vous ne le savez point ? », à propos du fait que le médecin ne sait pas
écrire.
ap Sganarelle fait rire les spectateurs en se faisant passer pour un médecin, car l’on devine bien qu’il a
du mal à combler le fossé qui sépare sa condition de valet de celle d’un médecin. Il énonce des
évidences : « une personne ne se porte pas bien quand elle est malade » et donne ainsi l’impression de
combler le vide de son ignorance par des paroles qui n’ont pas de signification, soit parce que celles-ci
disent ce que tout le monde sait, soit parce qu’elles ne veulent rien dire. Il fait appel, par exemple, au
Cid de Corneille ou au latin d’église. Profitant de la naïveté de Gorgibus, il va même dans un jeu de
double énonciation (deux sens selon que l’on considère que le père ou le public est le destinataire)
jusqu’à révéler la supercherie : « Ne vous imaginez pas que je sois un médecin ordinaire, un médecin du
commun » ; « J’ai des talents particuliers ».
l’écart entre théorie et pratique, ainsi que par le fait que l’Avocat, qui ne s’est pas aperçu de
l’ignorance de Sganarelle, ne tient donc aucun compte des faits. On peut aussi penser que Molière a
voulu distinguer son médecin de comédie de ce que sont ordinairement les médecins, tels que l’Avocat
les présente.
C’est l’image que donne Sganarelle qui domine, car l’Avocat s’en va sans s’être aperçu que le médecin
auquel il avait tenu son savant discours n’était qu’un valet.
bl Les quatre répliques qui suivent le départ de l’Avocat ferment la parenthèse de son intervention
savante et déconnectée (de la réalité comme de l’intrigue). Elles ont un effet comique car elles
soulignent la naïveté de Gorgibus qui, au lieu de demander à l’Avocat ce qu’il pense du médecin,
s’adresse à Sganarelle : « Que vous semble de cet homme-là ? » On retrouve ici le procédé de l’inversion
caractéristique de la farce ; c’est en effet Sganarelle qui devient ici le savant : « Il sait quelque petite chose.
S’il fût demeuré tant soit peu davantage, je l’allais mettre sur une matière sublime et relevée. »
Lire l’image
bm
Dans le texte de Molière, rien n’indique que Sganarelle donne à boire à l’Avocat l’urine de Lucile,
qu’il a goûtée dans la scène IV. Dario Fo s’autorise cette liberté car Molière envisage le théâtre comme
les comédiens italiens et accorde une place à l’improvisation. De plus, le fait de donner à boire de
l’urine à l’Avocat relève bien du comique de la farce : répétition de ce qui s’est passé dans la scène III
et exagération des contrastes entre le grotesque (l’urine que l’on boit) et le sérieux de l’Avocat.
bn
L’Avocat est placé au centre de la scène, car c’est son attitude qui est source de comique. Il tient
son verre avec délicatesse – ce qui est en opposition avec le contenu. En homme du monde habitué à
tenir élégamment un verre, il semble se désintéresser de ce qu’il va boire – ce qui réjouit le spectateur
qui guette la réaction du personnage.
De chaque côté, les deux personnages, Sganarelle et Gorgibus, adoptent une attitude opposée :
Sganarelle semble inviter l’Avocat à boire, tandis que le maître de maison exprime un dégoût mêlé de
curiosité. Le geste de ce dernier aurait dû alerter l’Avocat, mais, trop occupé à parler, il ne jette pas un
regard à sa gauche.
À vos plumes !
bo
Les élèves devront à la fois montrer leur connaissance du dialogue théâtral (forme du texte, oralité,
didascalies) et imiter la farce de Molière en transposant le déroulement d’une situation ordinaire
(consultation ou leçon) de façon à souligner l’ignorance du spécialiste. On valorisera les copies qui
auront su recourir à différents procédés comiques et on pourra proposer aux élèves de mettre en scène
ensuite les dialogues qu’ils jugent les plus réussis.
L e M é d e c i n v o l a n t , s c è n e s I X à X V I ( p p . 3 8 à 4 0 )
Avez-vous bien lu ?
u Narcisse est le prétendu jumeau de Sganarelle médecin. Il tente de se réconcilier avec son frère. On
expliquera aux élèves (voir note) le choix du prénom Narcisse. Sganarelle, valet de Valère, est un
ignorant qui ne sait pas écrire (cf. scène V) ; pourtant le prénom qu’il choisit pour son jumeau
témoigne d’une certaine culture. On y verra bien sûr un clin d’œil de l’auteur et on pourra montrer
que le théâtre n’accorde pas priorité à la vraisemblance.
v Gros-René découvre la supercherie de Sganarelle en ramassant la robe de médecin qu’il a laissée
tomber à la fin de la scène XV.
w Gorgibus, quand il apprend que Sganarelle l’a trompé pour favoriser une rencontre entre Valère et
Lucile, menace de pendre Sganarelle : « mais tu seras pendu, fourbe, coquin ! ».
x Valère et Lucile viennent demander grâce à Gorgibus, qui leur pardonne la supercherie utilisée pour
faciliter leur rencontre et accepte le mariage.
y La réplique a est prononcée par Gorgibus, la b par Gros-René et la c par Valère.
ensuite, quand Gorgibus l’a aperçu sans sa tenue de médecin, il feint d’être Narcisse, son jumeau, pour
justifier sa présence et donner à Valère le temps de rencontrer Lucile.
V Sganarelle et Gros-René se montrent plus intelligents que leurs maîtres respectifs.
Valère se contente de remercier son valet et de louer ses qualités sans faire preuve d’esprit d’initiative,
sauf lorsqu’il demande pardon à la toute fin de la pièce. Gorgibus se montre incapable de voir que
Narcisse et Sganarelle ne font qu’un.
Gros-René est plus fin que son maître car il a très rapidement des doutes quant à l’histoire des jumeaux
imaginée par Sganarelle : « il faut que je demeure ici, et que je voie à quoi tout cela aboutira ». Il pousse
Gorgibus à mettre Sganarelle en difficulté pour le démasquer : « Ma foi, ils ne sont qu’un ; et pour vous le
prouver, dites-lui un peu que vous les voulez voir ensemble. » À la fin, c’est Gros-René qui, ayant ramassé la
robe de médecin, révèle la fourberie : « Voilà le coquin qui faisait le médecin ». Mais l’intelligence de
Gros-René n’est pas aussi aiguisée que celle de son collègue Sganarelle, puisqu’il se laisse prendre un
moment à son jeu habile : « Ah ! par ma foi, il est sorcier ». Sganarelle, quant à lui, fait preuve
d’inventivité et de réactivité dans sa fourberie. Il a toujours réponse aux demandes que Gros-René
souffle à Gorgibus.
W Gorgibus est un personnage plutôt sympathique et on a tendance à oublier son intention de marier
sa fille à Villebrequin, car il n’est rapidement plus question de ce dernier. On le voit même tenter de
réconcilier Sganarelle et son prétendu jumeau Narcisse : « Je vous cherchais partout pour vous dire que j’ai
parlé à votre frère. Il m’a assuré qu’il vous pardonnait. » À la fin de la pièce, après avoir demandé la
pendaison de Sganarelle, il finit par accepter sans difficulté le mariage de Valère et de Lucile. Ses
dernières paroles – il a le dernier mot – marquent son bon caractère : « Je vous pardonne, et suis
heureusement trompé par Sganarelle, ayant un si brave gendre ». La pendaison annoncée est heureusement
remplacée par un festin : « Allons tous faire noces et boire à la santé de toute la compagnie ».
Étudier le dénouement
ar L’événement qui déclenche le dénouement est la découverte de la supercherie de Sganarelle par
Gros-René : « Voilà le coquin qui faisait le médecin et qui vous trompe ». Cet événement est préparé par les
doutes que le valet de Gorgibus exprime, avant même que Sganarelle ne devienne le « médecin volant ».
Sceptique quant à l’histoire des jumeaux, il se pose en observateur et en critique : « comment diable on
saute ici par les fenêtres ! Il faut que je demeure ici, et que je voie à quoi tout cela aboutira ». Par la suite, il
pousse Gorgibus à demander au faux médecin de se montrer en compagnie de son frère – ce qui
alimente le comique et prépare le moment où il ramassera la robe de médecin.
as Le coup de théâtre final est le retour de Valère et de Lucile qui demandent pardon à Gorgibus. Cet
événement, qui n’était pas prévu dans le stratagème de Sabine, marque un revirement. Le mensonge et
la tromperie font place à la transparence et à l’honnêteté. Cet aveu (demander pardon suppose que l’on
a commis une faute) entraîne le revirement de Gorgibus : il n’est plus question de marier de force
Lucile au vieux Villebrequin ni de pendre Sganarelle le fourbe : « Je vous pardonne, et suis heureusement
trompé par Sganarelle, ayant un si brave gendre ».
bt Gorgibus change d’avis car il semble convaincu par les arguments de Sganarelle :
– « C’est un parti sortable pour elle, tant pour la naissance que pour les biens » ;
– « Ne faites pas un vacarme qui tournerait à votre confusion ».
Il se montre également sensible au revirement de Valère et de Lucile, qui viennent demander pardon.
En réalité, il s’agit pour Molière de terminer la farce rapidement car l’intérêt des spectateurs ne porte
pas sur une intrigue, qui n’est que l’armature nécessaire aux scènes comiques : celles de la consultation
fantaisiste et du « médecin volant ». Sganarelle ayant été démasqué, le comique n’a plus sa place et la
morale reprend ses droits, comme pour sauver les apparences après un temps où primaient fourberie et
mensonge.
On pourra s’étonner de ce revirement soudain de Gorgibus que l’on a vu au tout début de la pièce peu
soucieux du bonheur de sa fille. Après ne s’être inquiété de la santé de sa fille qu’en pensant à son
mariage avec Villebrequin, le voilà qui pardonne aux jeunes gens. Crainte de la « confusion » dont parle
Réponses aux questions – 12
Lire l’image
bl Les personnages sont nombreux sur scène et ils sont tous en mouvement. Tout l’espace est occupé :
à gauche et à droite, au premier et au second plan, au-dessus de la scène (au bout de la corde). Les
positions des personnages sont variées et tous bougent. On pourra opposer le personnage replié, à
genoux à droite, et celui qui vole. Un personnage apparaît de dos – ce qui manifeste le grand désordre
de la scène, tout étant ordinairement fait pour que les spectateurs puissent voir l’expression des visages.
Cette désorganisation de l’espace et des mouvements exprime le vent de folie qui souffle sur la pièce à
la fin. On retrouve bien là les lazzi de la commedia dell’arte.
À vos plumes !
bm On attend des élèves :
– une maîtrise de la forme théâtrale du dialogue, et on valorisera les devoirs qui auront accordé une
place importante aux didascalies ;
– la mise en place du décor nécessaire au double rôle ;
– un jeu de scène ;
– la construction d’une intrigue (avec prise en compte de la « bêtise »).
L ’ A m o u r m é d e c i n , a c t e I
( p p . 5 8 à 6 1 )
Avez-vous bien lu ?
u Les propositions justes sont : a, d, e, f.
v M. Guillaume suggère à Sganarelle d’acheter « une belle tenture de tapisserie de verdure ou à
personnages » pour chasser la mélancolie de Lucinde. M. Josse conseille « une belle garniture de diamants,
ou de rubis, ou d’émeraudes ». Quant à Aminte, elle propose une troisième solution : « je la marierais fort
bien, et le plus tôt que je pourrais, avec cette personne qui vous la fit, dit-on, demander, il y a quelque temps ».
Selon Sganarelle, les trois avis, comme celui de Lucrèce qui voudrait hériter de son oncle, sont
intéressés. M. Guillaume et M. Josse sont respectivement vendeur de tapisserie et orfèvre. Quant à
Aminte, elle aurait des vues sur le jeune homme qui a « quelque inclination » pour Lucinde.
w Lucinde est mélancolique, car elle est amoureuse d’un jeune homme qui semble l’aimer aussi, bien
qu’il n’ait pu lui avouer sa passion. Mais elle sait que son père est opposé à tout mariage et qu’il ne
sert à rien de lui en parler.
x Sganarelle ne veut pas que Lucinde épouse le jeune homme qu’elle aime, car il ne veut pas qu’elle se
marie avec qui que ce soit. Il tient à garder sa fille pour lui. On apprend, dans la scène première, de la
bouche d’Aminte, que Lucinde a déjà été demandée en mariage et l’on devine que Sganarelle a refusé
cette demande.
U Molière s’associe au compositeur Lully, comme il le fera, en 1670, pour le célèbre Bourgeois
gentilhomme.
V Le théâtre est destiné à être représenté et la lecture n’est qu’un pis-aller, comme l’indique clairement
la préface. Tout a pour fin le spectacle et l’auteur ne vise pas l’éternité d’une œuvre, mais la réussite
ponctuelle d’un spectacle « chez le Roi ». « On sait bien que les comédies ne sont faites que pour être jouées »,
lit-on également. Et les comédies sont jouées pour divertir : « Il se vient quelquefois délasser parmi nous. »
Le champ lexical de l’amour se compose, dans cette réplique, des termes suivants : « passion »,
« tendrement », « cœur », « sensible », « ardeurs », « tendresse ».
L’amour est souligné par des procédés grammaticaux, tel l’intensif si (« si tendrement », « si honnête
homme ») qui introduit une subordonnée consécutive (« que mon cœur n’a pu s’empêcher d’être sensible à
ses ardeurs »).
On ajoutera des procédés stylistiques : l’aveu souligné (« peut-être n’est-il pas honnête à une fille de
s’expliquer si librement » ; « mais enfin, je t’avoue »), le doublement des éléments (« aucune
conversation » / « sa bouche ne m’a point déclaré la passion », « ses regards et ses actions »), le contraste entre
la passion du jeune homme et l’intransigeance du père (« la dureté de mon père » / « toute cette
tendresse »).
an Les interrogations rhétoriques sont nombreuses dans les répliques de Lucinde ; elles expriment sa
détresse face à « la dureté de [s]on père », « inexorable », ainsi que son incapacité à trouver des solutions.
Tout se passe en effet comme si les dés étaient lancés et que rien ne pouvait arrêter le cours
« inexorable » des choses. En un sens, les héroïnes de comédie sont des avatars de leurs sœurs tragiques :
elles ne font pas rire et expriment leur souffrance, leur enfermement dans un destin tracé par les pères et
les règles de la société. Les propos de Lucinde pourraient en effet être entendus dans la bouche d’une
héroïne tragique : « Crois-tu que je n’aie pas bien prévu tout ce que tu vois maintenant ? »
On peut relever les interrogations suivantes : « Hélas, de quoi m’aurait servi de te le découvrir plus tôt ? et
n’aurais-je pas autant gagné à le tenir caché toute ma vie ? » La suite de cette réplique contient une
troisième interrogation rhétorique. On peut aussi retenir un peu plus loin : « Mais que veux-tu que je
fasse contre l’autorité d’un père ? »
ao Lucinde est, dans la tradition des jeunes filles amoureuses chez Molière, incapable de se débrouiller
seule. Muette lorsqu’il s’agit d’affronter son père, elle se contente de lui répondre par un signe à la fin
de la scène 2.
Dans la scène 3, ses répliques sont de plus en plus courtes : l’apostrophe « mon père », qui est presque
une supplication, fait place à un « mais » proche d’une interjection. Finalement, la jeune fille se tait et
laisse parler.
Dans la scène 4, elle se lamente auprès de Lisette et l’interjection « Hélas », qu’elle utilise pour
accompagner l’interrogation rhétorique « de quoi m’aurait servi de te le découvrir plus tôt ? », exprime sa
plainte.
Pour elle, aucune solution n’est possible et l’avenir est définitivement fermé : « le tenir caché toute ma
vie », « étouffé dans mon âme toute sorte d’espoir », « s’il est inexorable à mes vœux… ». La répétition
hyperbolique du « tout » scande les propos de Lucinde, exprimant la violence de son désespoir.
ap Le monologue de la scène 5 révèle les raisons pour lesquelles Sganarelle s’oppose au mariage de sa
fille avec le jeune homme qu’elle aime. Ce n’est pas, comme dans Le Médecin malgré lui ou Le Malade
imaginaire, qu’il a retenu un autre prétendant pour Lucinde. Il s’oppose à la « coutume » du mariage,
dans laquelle il voit un assujettissement à une convention sociale qui lui semble ridicule : « A-t-on
jamais rien vu de plus tyrannique que cette coutume où l’on veut assujettir les pères ? » Mais si, dans Le Jeu de
l’amour et du hasard de Marivaux, Silvia remet en cause l’institution même du mariage, Sganarelle ici
ne se situe pas sur ce terrain critique. Par deux fois, il associe sa fille et ses biens : « amasser du bien avec
de grands travaux et élever une fille avec beaucoup de soin et de tendresse », « mon bien et ma fille ». La
coordination et le parallélisme syntaxique expriment la véritable raison du refus de Sganarelle : il
considère que sa fille lui appartient au même titre que la fortune qu’il a amassée. Il ne veut céder ni
l’un ni l’autre et on peut comprendre aussi qu’il ne veut pas d’un mariage qui lui ôterait sa fille et une
partie de son argent (la dot).
aq Au début de la scène 3, Lisette est au service de Sganarelle, puisqu’on la voit qui se propose pour
l’aider à connaître la cause de la mélancolie de Lucinde : (« Monsieur, laissez-moi faire, je m’en vais la
sonder un peu »).
Cependant, dès qu’elle comprend que Sganarelle ne veut pas écouter les sentiments de sa fille, elle se
met au service de Lucinde. On le devine, dans la scène 3, lorsqu’elle répète le mot « mari » que
Sganarelle refuse d’entendre. La scène 4 explicite ce revirement et montre clairement la position de la
servante : « voilà un vilain homme, et je vous avoue que j’aurais un plaisir extrême à lui jouer quelque tour ».
Elle devient là pleinement servante de comédie. Elle affirme son autorité (principe de l’inversion de la
comédie : « laissez-moi faire » ; « je prends, dès à présent, sur moi tout le soin de ses intérêts ») et elle joue
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 15
auprès de la jeune fille le rôle de la mère absente (« Allez, allez, il ne faut pas se laisser mener comme un
oison » ; « on peut se libérer de la tyrannie d’un père »). Mais, si elle va servir les intérêts de sa maîtresse,
c’est aussi pour le plaisir de la fourberie, autant dire pour les nécessités théâtrales du comique.
ar Scène 6, Lisette met en place la première étape d’un stratagème pour tromper Sganarelle et rendre
possible le mariage de Lucinde avec le jeune « inconnu ». Cette fourberie sera dévoilée au fur et à
mesure. Dans l’acte I, le stratagème est simplement annoncé, mais le spectateur n’en connaît pas le
déroulement et il ne sait pas encore comment Lisette va s’appuyer sur la fausse nouvelle de la maladie
de Lucinde. L’effet d’attente maintient l’attention du public.
Avec l’accord implicite de Lucinde (la jeune fille n’a pas exprimé d’opposition au projet de Lisette),
Lisette joue sur les sentiments que Sganarelle éprouve pour sa fille et lui fait comprendre qu’il pourrait
la perdre. Désespérée d’être reniée par son père (il n’est pas question ici de son amour interdit), la jeune
fille serait sur le point de mourir. Elle insiste sur l’urgence de la situation : « je crois qu’elle ne passera pas
la journée ». La dernière réplique de l’acte I marque l’aboutissement de cette première étape : Sganarelle
demande qu’on « aille quérir des médecins, et en quantité ».
Étudier le comique
as Entrecoupé par les répétitions (« Lisette ») et les exclamations qui expriment toute l’inquiétude de
Sganarelle (« Hé bien ? » ; « Elle s’est jetée ? » ; « Ah, ma fille ! »), le récit de Lisette crée une tension
dramatique qui, parce que le spectateur est au courant de l’existence d’un stratagème, a un effet
comique. Différents procédés créent l’attente :
– l’accumulation des exclamations nominales : « Ah ! malheur ! Ah ! disgrâce ! » ; « Ah ! misérable
père ! » ; « Ma pauvre maîtresse ! » ; « Quelle infortune ! » ; « Quel accident ! » ; « Quelle fatalité ! » ;
– les répétitions de « Monsieur » ;
– le développement du groupe nominal centré sur le substantif « fille » : « Votre fille toute saisie des
paroles que vous lui avez dites, et de la colère où elle vous a vu contre elle ». Participe passé accompagné d’un
double complément d’agent (« paroles », « colère »), deux subordonnées relatives : tels sont les procédés
grammaticaux qui viennent amplifier le nom « fille » et ralentir la progression de l’histoire ;
– l’accumulation des hypothèses tragiques : « a ouvert la fenêtre qui regarde sur la rivière » suggère à la fois
défenestration et noyade ;
– les rebondissements : la jeune fille ne s’est pas jetée par la fenêtre, mais elle n’est pas sauve pour autant
puisque « le cœur lui a manqué ». Et si on l’a « fait revenir », elle n’en est pas non plus quitte puisque
« cela lui reprend de moment en moment ».
bt Plusieurs passages peuvent être évoqués :
– Scène première : quatre personnages interviennent successivement pour donner des conseils variés à
Sganarelle, qui ensuite démasque les avis intéressés. Le comique repose ici sur l’accumulation, la
répétition et le revirement. Il contribue à dédramatiser la situation tragique que présente Sganarelle
quand il évoque la mort de sa femme et la mélancolie de sa fille.
– Scène 3 : dans le prolongement de la scène 2, le refus de Sganarelle d’entendre la volonté de sa fille
est comique tant il est exagéré. Les stichomythies à la fin de la scène ainsi que les répétitions (« Un
mari », « Ne m’en parlez point ») participent à ce comique.
– Scène 5 : le spectateur rit au récit de Lisette et à l’inquiétude de Sganarelle car, d’une part, il sait que
le premier est faux et, d’autre part, que le père de Lucinde, homme égoïste, ne mérite pas sa pitié.
Les nombreux rebondissements du récit qui orientent le public sur de fausses pistes (la fenêtre et la
rivière) participent également au comique.
bk Dans le prolongement de la question précédente, cette question permet d’insister sur le fait que le
théâtre est destiné à être représenté. Le travail demandé suppose analyse et imagination.
Les élèves pourront s’appuyer sur l’une des trois scènes (première, 3 ou 5) présentées dans la réponse
précédente.
– Scène première : on peut imaginer une sorte de ballet des quatre personnages s’avançant
successivement pour parler à Sganarelle ou l’encerclant. On pourra imaginer des didascalies comme
« s’avançant à son tour ».
– Scène 3 : Lucinde étant incapable d’affronter son père, on pourra préciser qu’elle se bouche les
oreilles pour ne pas entendre les propos de son père en colère. Quant à Lisette, qui répète « un mari » et
qui aura le dernier mot, sans doute parle-t-elle de plus en plus fort et tourne-t-elle autour de son maître
pour le faire enrager. On peut imaginer même à la fin qu’elle finit par le frapper. L’inversion des
Réponses aux questions – 16
statuts sociaux est un des ressorts traditionnels de la farce et de la comédie. Autres suggestions : Lisette
peut se placer devant Lucinde pour la défendre et parler en son nom ; Sganarelle, entre les deux
femmes, tourne la tête à droite et à gauche, selon qu’il parle à l’une ou à l’autre. Les mouvements et les
gestes, exagérés ou répétés, sont source de comique.
– Scène 5 : on insistera sur le ton des répliques et sur les gestes de désespoir qui peuvent accompagner
les paroles de Sganarelle, quand il presse Lisette de lui dire ce qui se passe.
À vos plumes !
bo
Il s’agit là de composer un récit en jouant sur les registres. L’hyperbole, qui peut être un des
moteurs du dramatique comme du pathétique, sera ici poussée à l’extrême de façon à créer un effet
comique.
On valorisera les récits qui auront su créer, à l’instar de la scène 6, de fausses pistes.
bp
Ce sujet est un travail de réécriture qui demande de passer du récit à une scène de théâtre dont la
fonction sera informative (le récit inséré) et comique.
On valorisera les devoirs qui auront su utiliser les didascalies pour imaginer un jeu de scène ou
simplement préciser déplacements et ton des personnages.
L ’ A m o u r m é d e c i n , a c t e s I I e t I I I ( p p . 9 2 à 9 4 )
Avez-vous bien lu ?
u L’acte II comprend 7 scènes et l’acte III 8 scènes.
v Dans l’acte II, Sganarelle apparaît dans 6 scènes et, dans l’acte III, il est présent dans 5 scènes – ce
qui fait 11 scènes au total.
w La scène 6 de l’acte II est un court monologue de Sganarelle.
On veillera à ce que les élèves fassent bien la différence entre une tirade (dans la scène première de l’acte
III notamment) et un monologue.
x a) Sganarelle ; b) Tomès ; c) Maroton ; d) Clitandre en médecin ; e) M. Filerin.
y Clitandre est le jeune homme dont Lucinde est amoureuse. Il se fait passer pour un médecin sur les
conseils de Lisette.
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 17
U Clitandre est accompagné d’un notaire qui se fait passer pour un apothicaire.
V C’est Lisette qui apprend à Sganarelle qu’il a été trompé.
exagérations (notamment les propos de M. Filerin) ne sont pas crédibles. La comédie, inspirée de la
commedia dell’arte, met en scène des types et non des individus dotés d’une épaisseur psychologique.
as Les dernières scènes de la pièce constituent une comédie dans la comédie de deux manières. D’une
part, Lisette et Clitandre jouent une comédie à Sganarelle : celle du médecin qui simule un mariage
pour guérir sa patiente. D’autre part, Sganarelle, qui ne voit pas dans cette intervention une fourberie,
pense, quant à lui, jouer une comédie à sa fille en lui faisant croire que son vœu le plus cher est exaucé.
Ce procédé de théâtre dans le théâtre, fortement marqué par l’esthétique baroque et la commedia
dell’arte, contribue à divertir les spectateurs.
bt Les deux entractes font partie intégrante de da pièce et assurent la continuité du spectacle pendant
que l’éclairage est renouvelé.
Le 1er entracte est le ballet des quatre médecins ; il est introduit par la dernière réplique de Sganarelle :
« qu’on m’aille quérir des médecins, et en quantité ». L’expression « quatre médecins » figure, quant à elle,
dans la première réplique de l’acte II : « Que voulez-vous donc faire, Monsieur, de quatre médecin ? »
Le 2nd entracte prolonge la scène 6, au cours de laquelle l’Opérateur célèbre l’orviétan, remède universel
choisi par Sganarelle après que les quatre médecins ont donné des avis différents.
Dans la tradition du théâtre des Italiens, l’entracte est un ballet faisant intervenir des personnages de la
commedia dell’arte : « plusieurs Trivelins et plusieurs Scaramouches ».
Les danses sont de retour dans la dernière scène de l’acte III pour célébrer le mariage de Lucinde et de
Clitandre, et la conclusion de la pièce se fait un écho au prologue, chanté et dansé lui aussi.
bk Les deux entractes font rire les spectateurs en mettant en scène, dans le premier entracte, les
médecins réputés, attachés à la forme de leur art plus qu’au contenu et, dans le second, un médicament
populaire, dont l’universalité garantit l’inefficacité. Les deux entractes se répondent : la science puis le
savoir populaire – ce qui contribue au comique en ridiculisant ces deux types de médecines.
bl Les questions précédentes visent à dégager le caractère artificiel et avant tout spectaculaire du
théâtre. Même si Molière propose un certain point de vue sur le réel en dénonçant l’égoïsme des
médecins, qui ne pensent qu’à assurer leur fortune, et celui des pères, qui ne pensent pas au bonheur de
leurs enfants, il cherche avant tout à divertir les spectateurs en leur proposant un spectacle dont le but
n’est pas d’imiter la réalité. Les personnages se réduisent à des types ; ils ne sont pas plus crédibles que
l’intrigue.
Pour Molière, acteur et metteur en scène, le théâtre est destiné à être représenté et vu et non à être lu ;
les jeux de scène et les ballets ont autant d’importance que les répliques des personnages. La préface
présentait d’ailleurs clairement cette conception de la comédie : « on sait bien que les comédies ne sont
faites que pour être jouées ».
Lire l’image
bp Le médecin se tient debout, alors que l’homme à qui il s’adresse est assis, soumis à son autorité.
Les visages expriment la force, voire la menace (les yeux fixés), chez le médecin, et la crainte mêlée
d’incompréhension (la bouche entrouverte) chez l’autre. L’attitude du médecin, un poing sur la hanche
et un doigt tendu, est d’autant plus menaçante qu’il va presque jusqu’à toucher le front de son
interlocuteur. C’est ce dernier aspect de l’attitude du personnage qui exprime l’abus de pouvoir.
À vos plumes !
bq Il s’agit d’imaginer un triangle comique soulignant l’opposition entre deux personnages, le
troisième étant là comme spectateur et comme faire-valoir du comique.
On valorisera les devoirs qui sauront jouer sur différents ressorts du comique : mots, gestes… Bien
entendu, les didascalies, si elles sont judicieuses, seront appréciées.
R e t o u r s u r l e s œ u v r e s ( p p . 9 5 à 9 8 )
Le Médecin volant
u Les événements apparaissent dans l’ordre suivant : c, d, a, g, e, f, b.
v a) Le valet. b) Un ami. c) Le maître. d) La cousine. e) L’oncle. f) L’amant/l’amoureux.
w
L’Amour médecin
x a) Exposition. b) Monologue. c) Didascalie. d) Tirade. e) Caractère.
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 21
y a) Sganarelle (I, 2). b) Lisette (I, 4). c) Des Fonandrès (II, 3). d) Tomès (II, 3). e) Sganarelle (II, 6).
f) Lucinde (III, 6). g) Clitandre (III, 6). h) Sganarelle (III, 7).
U
1
D
E
2 B A H Y S
3 F I L E R I N
O
4 C L I T A N D R E
A
N
D
5 M A C R O T O N
E
6 T O M E S
V Le Médecin volant
Lucile Valère
Le père ne veut pas que sa fille se marie avec celui qu’elle aime. X X
Le père veut garder sa fille pour lui. X
Le père pense que sa fille est malade. X X
Le père craint que la maladie de sa fille ne retarde le mariage. X
Un faux médecin intervient. X X
Les jeunes gens qui s’aiment finissent par se marier. X X
Le père finit par accepter le mariage de sa fille. X
Le stratagème mis en place permet un jeu de théâtre dans le théâtre. X X
Proposition de séquences didactiques – 22
PROPOSITION
D E S É Q U E N C E S D I D A C T I Q U E S
ÉTUDE DE
QUESTIONNAIRES TECHNIQUES LITTÉRAIRES EXPRESSION ÉCRITE
LA LANGUE
Séance n° 1 • les types de phrases • spécificité du texte de théâtre : découpage, • écrire un dialogue théâtral en prenant
Le Médecin volant • adjectifs et adverbes didascalies… en compte les informations données
Scènes première à III • champ lexical de la tromperie • l’exposition dans l’exposition
• la comédie : personnages et intrigue
Séance n° 2 • les types de phrases • le comique grossier de la farce • écrire un dialogue théâtral en
Le Médecin volant • le langage oral • une pièce destinée à être représentée transposant la scène de la fausse
Scènes IV à VIII • les hyperboles • la satire de la médecine consultation
Séance n° 3 • les marques des personnes et • les personnages de la comédie • écrire une scène de théâtre dans le
Le Médecin volant les fonctions des pronoms • les jeux de scène théâtre
Scènes IX à XVI • le théâtre dans le théâtre
• le dénouement de la comédie
Séance n° 4 • interrogations rhétoriques • étudier une préface : la conception de • écrire un récit en racontant de manière
L’Amour médecin • champ lexical de l’amour Molière du théâtre comique un événement dramatique
Acte I • l’exposition (imitation du récit de Lisette)
• la comédie : les personnages, l’intrigue, le • écrire un dialogue théâtral dans lequel
comique se trouve inséré un récit
• comparaison des 2 pièces : intrigue et
personnages
Séance n° 5 • l’impératif • les personnages de comédie • écrire un dialogue théâtral comique en
L’Amour médecin • la satire des médecins mettant en scène des personnages
Actes II et III • la comédie-ballet contrastés
• comparaison des 2 pièces : stratagème,
dénouement, portée de la satire
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 23
EXPLOITATION
D U G R O U P E M E N T D E T E X T E S
Les textes réunis ici sont des scènes de comédie qui font rire le spectateur, tout en l’invitant à réfléchir
sur les pratiques sociales. Si nous sommes habitués au leitmotiv des médecins chez Molière, on y voit
avant tout un ressort du comique, le fond de la critique ne nous touchant plus guère aujourd’hui. Mais
la critique des médecins s’inscrit, chez le grand dramaturge du XVIIe siècle, dans une perspective plus
large : celle de la dénonciation de toutes les formes de prétention.
Le groupement de textes peut être abordé dans différentes perspectives :
◆ Étude de la comédie
En 6e, les élèves découvrent un genre et il est intéressant, en confrontant plusieurs pièces, de les amener
à identifier les marques génériques de la comédie. On pourra travailler dans plusieurs directions :
- l’étude de langue : le choix des vers (et comment le texte en vers parvient-il, malgré tout, à rester
souple et proche du langage ordinaire) ou de la prose ; le langage paysan… ;
- le dynamisme des échanges et le ressort du contraste ou de l’opposition : étude de la longueur variée
des répliques, des modalités… ;
- le comique : langue, caractère, geste, situation… ;
- les personnages stéréotypés : le père naïf ou la servante insolente.
◆ Représentation critique des médecins
Les médecins portent traditionnellement un costume et un chapeau qui les différencient des gens
ordinaires ; ils ont appris le latin et utilisent des mots savants. Un autre costume, un autre langage :
nous avons là une profession qui s’apparente à celle des comédiens…
- La dimension théâtrale : on pourra voir comment les médecins sont mis en scène dans les différentes
pièces du Molière réunies ici.
- La dimension comique : comment la représentation des médecins prête-t-elle à rire ?
- La critique des médecins : quelles critiques récurrentes Molière fait-il des médecins ?
◆ Représentation critique de la société
- La représentation des différentes couches de la société : on étudiera la représentation des classes
sociales, qu’il s’agisse de la classe populaire (le parler paysan, l’ignorance, le bon sens, la
débrouillardise), des bourgeois (maîtres, médecins, pères soucieux de leurs biens) ou de la noblesse
(bien qu’elle n’apparaisse que comme une aspiration de M. Jourdain et qu’elle n’occupe qu’une place
réduite dans la comédie). La religion (en tant qu’ordre de l’Église) n’est pas représentée dans nos
extraits : sujet tabou dans la comédie, elle vaudra à Molière l’interdiction du Tartuffe en 1664.
- Dans la société du XVIIe siècle, héritée de la structure médiévale, c’est la naissance qui permet de
distinguer les individus. On voit cependant apparaître chez Molière un autre critère de
discrimination : les connaissances. Qui est savant et qui ne l’est pas ? Qui fait seulement semblant de
l’être ?
- Molière dénonce les prétentions des médecins, mais aussi celles des précieuses, du maître de
philosophie ou des femmes savantes… On classera les différentes sortes de prétentions : prétentions
sociales ou intellectuelles. Et on verra comment elles conduisent au mépris des autres.
Pistes de recherches documentaires – 24
PISTES DE RECHERCHES
D O C U M E N T A I R E S
La commedia dell’arte :
- les personnages ;
- les canevas ;
- les lazzi ;
- l’histoire : comment ce théâtre italien a été introduit en France ;
- les représentations picturales du personnage d’Arlequin.
Le théâtre au XVIIe siècle (cf. dossier) :
- les conditions de vie des comédiens ;
- les grands dramaturges du XVIIe siècle : Corneille et Racine ;
- l’histoire de la Comédie-Française.
Le théâtre :
- les métiers du théâtre ;
- la gestion d’un théâtre ;
- l’architecture des théâtres (des tréteaux à la salle prestigieuse).
Molière :
- la satire des médecins : repérer les vrais et les faux médecins dans les pièces de Molière et réfléchir à la
mise en scène de ces passages ;
- le schéma traditionnel de l’intrigue et les personnages types (en s’appuyant sur Le Médecin malgré lui et
Le Malade imaginaire).
Les instruments de la satire :
- la satire chez Molière ;
- La Fontaine ;
- la caricature ;
- la satire aujourd’hui (presse, télévision).
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 25
BIBLIOGRAPHIE
C O M P L É M E N T A I R E
– La Vie de M. de Molière, Mikhaïl Boulgakov, coll. « Bouquins », R. Laffont, 1999.
– Commedia dell’arte : le jeu masqué, Michèle Clavilier et Danielle Duchefdelaville, Presses Universitaires
de Grenoble, 2005.
– Lectures de Molière, Jean-Pierre Collinet, coll. « U2 », Armand Colin, 1974.
– Molière ou l’Esthétique du ridicule, Patrick Dandrey, Klincksieck, 2002.
– « L’Amour médecin » de Molière ou le Mentir-vrai de Lucinde, Patrick Dandrey, Klincksieck, 2006.
– Molière, Georges Forestier, coll. « En toutes lettres », Bordas, 1990.
– Molière et « Le Misanthrope », René Jsainski, Nizet, 1983.
– La Commedia dell’arte et son Influence en France aux XVIe et XVIIe siècles, Bernard Jolibert, coll. « Univers
théâtral », L’Harmattan, 2000.
– La Dramaturgie classique en France, Jacques Scherrer, Nizet, 1950.
– Molière par lui-même, Alfred Simon, Seuil, 1957.
Site Internet :
– www.toutmoliere.net