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La cession de créance et la cession de dette – Oct. 2006
Par Aude Guiroudou
 
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 Master Pratiques Juridiques et  Judiciaires Promotion 2006-2007 – Nîmes
L’obligation est avant tout un lien de droit entre deux personnes. Pendant longtemps cette dimension a été la seule prise en compte par le droit. Tout changement de sujet actif ou passif d’un tel lien de droit paraissait impossible puisqu’il entraînait une rupture du lien. Il était seulement admis, dans le cadre de la continuation de la personne du défunt, la transmission active et passive à titre universel mais pour la cession entre vifs cela a été plus difficile. Le Droit Romain est passé par des voies détournées afin d’admettre la cession d’une créance. En effet il a crée la novation par changement de créancier. Il s’agissait de procéder à l’extinction de l’obligation existante et à la création d’une obligation nouvelle au profit du nouveau créancier. Mais il y avait des effets indésirables comme la disparition des sûretés assorties à la créance. Les Romains ont imaginé aussi de passer par un mandat avec dispense de rendre compte qui était appelé «
 procuratio in rem suam
 ». Mais son inconvénient était d’être révocable et de devenir caduc en cas de décès du mandant avant son exécution. Au fur et mesure l’idée de cession fut reconnue mais en y ajoutant certaines spécificité du à sa particularité comme la notification au débiteur lui enjoignant de payer à l’échéance au cessionnaire afin que le débiteur ne reste pas étranger à la convention et que par conséquent il s’acquitte de sa dette entre les mains du cédant plutôt que du cessionnaire. Dans l’Ancien droit cette notification tenait lieu de «
traditio
 » qui correspondait à la remise matériel de la chose et donc au transfert de propriété car à cette époque la vente n’était pas par elle-même translative de propriété. Le caractère cessible des créances fut définitivement reconnu par le Code civil avec toutes ces spécificités comme l’opposabilité au débiteur (tiers au contrat de cession) par la signification. Seules certaines variétés particulières de cessions sont dispensées de ce formalisme tel que les titres négociables et la cession fiduciaire des créances professionnelles. Mais toute cette évolution ne concerne que la cession de créance puisque le droit positif émet certaines réticences quant à la cession de dette qui n’est pas la simple symétrie de la
 
 La cession de créance et la cession de dettes – Aude Guiroudou  Master Pratiques Juridiques et Judiciaires 2006-2007 - Nîmes
cession de créance. En effet s’il parait indifférent pour un débiteur de payer à tel créancier plutôt qu’un autre, il n’en n’est pas de même pour un créancier s’il change de débiteur. Cependant même si le droit positif pose une réserve de principe quant à la cession de dette, cette dernière n’est pourtant pas interdite et les techniques juridiques ne manquent pas. Il est donc important de traiter chacune de ces deux opérations afin d’en comprendre clairement le mécanisme juridique. Il sera judicieux d’étudier tout d’abord la cession de créance (I) qui est aujourd’hui devenue une opération commune même si elle reste complexe, puis la cession de dette (II) qui est une opération particulière admise avec des réserves.
I/ LA CESSION DE CREANCE :
La cession de créance est une convention ou un créancier (le cédant) cède à un tiers (le cessionnaire) ces droits et actions contre son débiteur (le débiteur cédé). La créance est ici considérée comme un bien, une marchandise, la cession de créance peut donc être considérée comme une forme particulière de vente. Elle est d’ailleurs dans le chapitre du Code civil traitant de la vente. La cession de créance est un moyen pour le créancier de mobiliser sa créance et donc d’en percevoir sa contre valeur par anticipation, il peut la vendre, la donner, la léguer, échanger ou encore en faire un apport en société. Elle peut aussi avoir pour finalité l’extinction d’une dette et constituer un moyen de paiement (cas particulier de dation en paiement). Elle peut aussi être constitutive d’une sûreté comme par exemple la cession de garantie de la loi Dailly. Il existe différentes formes de cession, la cession de droit commun (A) réglementé par le Code civil et qui a comme terme générique la cession de créance, puis les cessions de créances simplifiées (B) caractérisée par un formalisme moins rigide. A/ Cession de créance de droit commun : Afin d’étudier clairement cette cession de créance il convient de voir les conditions (1) et les effets (2). 1)
 
les conditions de la cession de créance de droit commun : Il a été vu ci-dessus que la cession de créance pouvait être comparée à la vente donc comme pour cette dernière il est important de voir les conditions de validité de cette cession
 
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entre les parties (a) puis dans les rapports entre les parties et les tiers (b). a) les conditions de la cession de créance entre les parties : La cession de créance est avant tout un contrat ou les parties sont le cédant et le cessionnaire. Ce contrat est soumis au droit commun des obligations et il doit donc respecter les conditions de validités liées au consentement, à l’objet, la cause et la capacité. Il n’y aucune formalité requise pour sa validité entre les parties et le droit commun de la preuve
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 s’applique à la cession de créance. En ce qui concerne la créance, celle-ci doit être cessible. En principe toute créance quelle qu’en soit la nature, l’objet ou les modalités peut être cédée en totalité ou en partie. Même la possibilité d’un litige relatif à son existence ou à sa validité n’est pas un obstacle. La créance doit être certaine mais peut être futur si elle est déterminable au moment où elle prend naissance
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.L’acte de cession doit contenir tous les éléments qui permettent de déterminer la créance lorsqu ‘elle naît. Mais il existe des créances incessibles : -
 
La créance alimentaire d’origine légale ou judiciaire telles que les pensions alimentaire et certaines prestations sociales comme les allocations familiales, du fait de leur caractère personnel. -
 
Les créances de salaire et de traitements car les salariés ne peuvent céder l’intégralité de leurs salaires à une tierce personne (montant déclaré par la loi comme insaisissable
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), ceci vaut aussi pour les substituts de salaire et pension de retraite. Par contre une créance de somme d’argent peut faire l’objet d’une cession comme les loyers. Les parties peuvent aussi prévoir des clauses d’incessibilité dans leur contrat qui interdirait la cession de créance. Mais qu’en est-il de cette clause d’incessibilité ? Est-elle admise ? L’acceptation de cette clause est discutée par la doctrine mais la solution est donnée le plus souvent par la loi
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 qui valide ou pas cette clause.
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 Cf. art 1341 du Code civil.
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 Cf. Cass. civ. 1°, mars 2001, Bull. civ. I, n°76 : Des créances futures ou éventuelles peuvent faire l’objet d’un contrat, sous la réserve de leur suffisante identification.
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 Cf. art L145-2 du Code du travail.
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 Cf. art L416-1 du Code rural et art L442-6 II c) du Code de commerce qui interdisent toute clause d’incessibilité. Par contre en droit des sociétés l’incessibilité est une nécessité et ces clauses sont admises art L621-19 du Code de commerce.

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