Professional Documents
Culture Documents
A 89
Douleur abdominale
aiguë de l’enfant
Orientation diagnostique
DR Didier STAMM
Service d’urgence et de réanimation pédiatriques, hôpital Édouard-Herriot, 69437 Lyon Cedex 03.
Interrogatoire
aliments ou, à l’inverse, une disparition des douleurs objective de la température, du rythme cardiaque, de la
peuvent être observées. Existe-t-il un pyrosis ? pression artérielle est réalisée. L’appréciation de la
Comment la douleur évolue-t-elle après la prise d’antal- marche renseigne sur l’importance de la douleur.
giques ? Le nourrisson exprime sa douleur par une À l’arrivée aux urgences, l’enfant qui a mal est anxieux.
agitation, des pleurs incessants, des cris plus ou moins Il convient d’avoir une approche calme, rassurante avec
inexpliqués. les parents, source d’une augmentation de la confiance
de l’enfant. Le dialogue avec celui-ci est essentiel, il sait
3. Signes associés expliquer où et comment il a mal si les questions sont
L’interrogatoire s’attache également à rechercher la précises, positives, lui faisant comprendre que nous
présence de signes généraux tels qu’une fièvre, une alté- appréhendons sa douleur. Pour le bébé, il faut être parti-
ration de l’état global, une perte de poids ; de signes culièrement attentif à ce que racontent les parents en
digestifs tels que des nausées, des vomissements bilieux essayant de faire l’examen en dehors des périodes de
orientant sur une occlusion intestinale ou sanglants pleurs. L’essentiel de l’examen abdominal est la patience.
évocateurs d’un ulcère ou de prise de salicylés ; de Le déclenchement de cris ou de pleurs réduit la valeur
troubles du transit tels que des diarrhées ou une consti- de l’examen, d’autant plus que l’enfant est jeune.
pation ; de signes urinaires tels que des brûlures mic- L’abdomen doit être examiné chez un enfant déshabillé,
tionnelles, une dysurie ou une pollakiurie ; de signes en décubitus dorsal et les jambes demi-fléchies.
pubertaires (premières règles) ; sans oublier d’autres L’installation de façon confortable est un élément sus-
signes respiratoires, avec la présence d’une toux ou de ceptible de le rassurer, un coussin sous les genoux peut
douleurs thoraciques en particulier basithoraciques, permettre de relâcher les muscles abdominaux. L’enfant
neurologiques tels que des céphalées, des troubles de la prend d’ailleurs spontanément une position antalgique
conscience, d’arthralgies, de myalgies ou de purpura. La pouvant aider au diagnostic. La palpation de l’abdomen
présence d’une infection de la sphère ORL de même que se fait avec une main réchauffée qui explore d’abord les
l’existence d’hématomes disséminés sur le corps sont zones qui ne sont pas douloureuses avant de se rapprocher
également d’une grande aide. de la zone sensible. Tous les temps de l’examen doivent
être respectés. L’inspection apprécie la présence d’un
Examen clinique météorisme, d’une respiration abdominale. La palpation
recherche la localisation de la douleur, son réveil ou sa
Il est lui aussi fondamental et doit déjà être orienté par majoration. Elle permet également d’apprécier la pré-
les éléments recueillis au cours de l’interrogatoire. Il sence d’une défense, d’une contracture. Elle peut mettre
doit être complet et général, en débutant autant que faire en évidence une masse abdominale telle qu’un fécalome,
se peut par les zones non abdominales pour ne pas un boudin d’invagination, une tumeur. Le retrait de la
réveiller, dès le début de l’examen, les douleurs qui main qui palpe, la présence d’une position antalgique,
perturberaient le bon déroulement de la démarche dia- de contractures ou d’une douleur non médiane sont
gnostique. Il convient de ce fait d’apprécier l’état de autant de signes en faveur de l’organicité du symptôme.
l’enfant, son teint pâle, gris ou ictérique. Une mesure L’évaluation du volume du foie et de la rate est également
Examen clinique
✓ Rassure l’enfant
Anormal normal
✓ Approche calme
✓ Patience
importante. La palpation doit explorer l’abdomen depuis Origine chirurgicale suspectée ou probable
les fosses iliaques pour ne pas méconnaître une viscéro-
mégalie majeure. Elle peut être plus aisée chez un enfant Devant toute anomalie de l’examen abdominal (défense,
couché sur le côté gauche pour la recherche de l’hépato- contracture, masse, douleur vive localisée réveillée par
mégalie, sur le côté droit pour la recherche d’une splé- la palpation), l’avis d’un chirurgien pédiatrique s’impose
nomégalie. On ne doit pas omettre de vérifier les orifices en urgence. L’indication d’intervention immédiate ou de
herniaires et les fosses lombaires. surveillance en environnement chirurgical à compétence
La percussion recherche un tympanisme ou une matité pédiatrique est alors précisée.
déclive. L’auscultation évalue la présence de bruits En présence d’un tableau occlusif, une appendicite ou
hydroaériques. Enfin, le toucher rectal doit être réalisé une péritonite doivent être évoquées, a fortiori s’il existe
en fin d’examen. Il ne peut, chez l’enfant, être systématique une défense ou une contracture. La constatation d’une
et doit être réalisé en fonction des hypothèses étiologiques. cicatrice abdominale, devant le même tableau, oriente
Il faut parfois savoir s’en passer si l’avis chirurgical vers une bride, la présence de sang frais sur le doigtier
paraît indispensable compte tenu des autres éléments ou une fosse iliaque droite vide vers une invagination
anamnestiques et cliniques. Il paraît difficilement tolérable intestinale. Un état de choc doit conduire à envisager
de réaliser deux touchers à quelques minutes d’intervalle. une péritonite devant un tableau fébrile, une rupture
Celui-ci peut montrer des matières fécales orientant plutôt d’organe en cas de traumatisme, un diverticule de
vers une constipation, une douleur vive plus fréquemment Meckel, une invagination intestinale compliquée, une
déclenchée à droite en cas d’appendicite aiguë, la pré- entérite nécrosante en présence de rectorragies ou de
sence de sang rouge sur le doigtier en cas d’invagination melæna. Une masse pelvienne douloureuse chez une
intestinale aiguë. Autant que faire se peut, l’enfant doit fille entraîne la recherche d’une torsion de kyste de
être vu conjointement par le médecin et le chirurgien. La l’ovaire et, chez le garçon, un scrotum douloureux
réalisation d’une bandelette urinaire est indispensable, impose d’éliminer une torsion de testicule.
la description de signes cliniques est en effet difficile Souvent, les situations ne sont pas aussi nettes et il
chez le nourrisson et le jeune enfant. convient de savoir demander un 2e examen, réalisé par
un chirurgien d’autant plus expérimenté que l’enfant est
jeune ou que les manifestations sont imprécises.
Attitude pratique au terme Dans le doute, mieux vaut une intervention redressant le
de l’examen clinique diagnostic qu’une chirurgie réalisée tardivement chez un
enfant présentant alors un état précaire.
Les douleurs abdominales peuvent conduire à un éventail
très large de causes. Elles constituent donc une situation Origine médicale probable ou certaine
difficile, où il faut distinguer les cas qui nécessitent une
attitude thérapeutique immédiate. Trois éventualités L’urgence chirurgicale éliminée, quelques examens
sont possibles au terme de l’interrogatoire et de l’examen complémentaires aident parfois à confirmer le diagnostic.
clinique. Le renvoi à domicile avec une thérapeutique adaptée ou
2 Attitude pratique au terme de l’examen clinique devant des douleurs abdominales aiguës.
de tableaux chroniques pour lesquels les contextes parfois des niveaux liquides au niveau de la fosse iliaque
familial et scolaire sont souvent particuliers ; droite ou un éventuel coprolithe appendiculaire.
– le tableau clinique peut rester identique, ne permettant De par l’âge, l’examen chez le nourrisson (moins de 2 ans)
pas de lever les incertitudes ; il conduit à rechercher à peut être égaré par des troubles digestifs fréquents à
tout prix une origine chirurgicale, en retenant comme cette période de la vie (vomissements, diarrhées, distension
suspecte une douleur de topographie fixe, s’accompa- abdominale). Souvent, l’enfant n’est pas examinable et
gnant de vomissements persistants, d’une paroi abdo- retire la main de l’examinateur lors de l’abord de la
minale difficile à examiner. L’intervention chirurgicale fosse iliaque droite.
de sécurité ou la cœliochirurgie préconisée actuelle- Nombreuses sont les formes atypiques qui occasionnent
ment par quelques équipes peuvent alors révéler une des difficultés extrêmes.
cause organique. De par sa localisation inhabituelle (forme rétrocæcale,
pelvienne…), le diagnostic peut à tort s’orienter vers
3. Autre possibilité une origine urinaire ou gynécologique. Enfin, certaines
Une 3e possibilité se présente fréquemment à une formes sont particulièrement trompeuses ; il s’agit des
époque où les services de pédiatrie sont fréquemment formes neurologiques chez un enfant ayant fait un
pleins et où tous les services d’urgence en particulier malaise voire exceptionnellement un coma. Dans de
pédiatrique n’ont pas de lit de surveillance. En cas de telles circonstances, les examens paracliniques sont par-
doute quant à la bénignité des douleurs, quelques examens fois utiles, l’échographie abdominale peut avoir sa place
paracliniques sont alors demandés immédiatement, l’enfant si l’appendice est suffisamment inflammatoire pour être
est gardé pendant 2 ou 3 h aux urgences le temps d’obtenir diagnostiqué ou en cas de forme abcédée.
l’ensemble des résultats. Une telle attitude impose en Enfin, certains enfants ayant eu un parcours traînant au
premier lieu qu’un 2e examen clinique soit réalisé par un cours des dernières heures peuvent se présenter avec un
2e examinateur, afin d’éliminer toute hypothèse chirur- tableau de contracture généralisée évoquant alors le
gicale. Une numération formule sanguine et une CRP diagnostic de péritonite appendiculaire.
(délai de positivité d’une dizaine d’heure après le début
de la fièvre) sont réalisées dans le but d’éliminer un 2. Invagination intestinale aiguë
tableau infectieux sévère. La bandelette urinaire est sys- Ce diagnostic doit être évoqué chez un nourrisson âgé
tématique, de même que la réalisation de l’examen de de 6 à 18 mois, qui vomit, refuse le biberon, a des accès
l’abdomen sans préparation. L’indication d’une écho- subits de pleurs ou de cris survenant classiquement sur
graphie est large, faut-il encore pouvoir en disposer un rythme répétitif avec des intervalles critiques asympto-
d’une manière aisée et rapide. matiques. Ces épisodes ont tendance à se rapprocher et
Une telle attitude doit cependant rester exceptionnelle et sont souvent accompagnés d’accès de pâleur. L’âge
expose à un risque médico-légal en cas d’erreur diagnos- n’est pas un facteur limitant au diagnostic, de tels
tique. Au moindre doute, cette attitude ne peut être retenue tableaux ont été constatés chez des nouveau-nés âgés de
et l’enfant doit être gardé en surveillance hospitalière. 15 jours à 3 semaines. Le diagnostic est parfois plus dif-
ficile en cas de forme neurologique, avec troubles du
comportement, convulsions ou lors d’accès de pâleur
Diagnostic étiologique répétitifs isolés sans épisode de cris.
La palpation abdominale réveille la douleur lorsqu’elle
est réalisée en phase intercritique. Elle peut permettre de
Origine chirurgicale probable ou certaine percevoir une masse abdominale (boudin d’invagina-
tion) au sein d’une fosse iliaque droite vide. Enfin, le
1. Appendicite aiguë toucher rectal est taché de sang lorsque les parents n’ont
Il s’agit avant tout d’un diagnostic clinique. Dans sa pas spontanément constaté de rectorragies.
forme typique, chez un enfant âgé de plus de 2 ans, le Le radiologue tient alors une place essentielle dans la
début est aigu, l’enfant est le plus souvent sub-fébrile prise en charge diagnostique et même thérapeutique.
(37,5 à 38 °C). L’enfant arrive plié en 2, lorsqu’il n’est L’échographie réalisée par un radiologue compétent en
pas porté par ses parents, position qui traduit le psoïtis. pédiatrie confirme l’invagination intestinale aiguë en
Il a des nausées ou des vomissements, la douleur est visualisant un aspect en pince de crabe ou de cocarde
permanente. La palpation abdominale déclenche à la selon la coupe, témoin du boudin d’invagination. Le
pression de la fosse iliaque droite ou à la décompression lavement aux produits hydrosolubles ou à l’air confirme
(signe de Blumberg) une douleur vive. Celle-ci s’ac- les images échographiques et permet une réduction de
compagne d’une défense. La langue est classiquement l’invagination intestinale. Cet examen doit être réalisé
saburrale. Le toucher rectal déclenche une douleur à avec douceur, en présence du chirurgien. Il est contre-
droite, sa valeur est d’autant plus fiable que l’âge de indiqué cependant lorsque l’état général de l’enfant est
l’enfant est élevé. Les examens complémentaires sont altéré ou lorsque l’échographie montre la présence d’un
de peu d’appoint et montreraient une hyperleucocytose épanchement péritonéal déjà conséquent.
avec polynucléose au stade de diffusion de l’infection Dans un tel cas ou en cas de récidive de l’invagination
appendiculaire. L’abdomen sans préparation montre après réduction radiologique, les enfants étant gardés en
d’une dysphagie, d’adénopathies cervicales ou sous- Le subictère, les arthralgies, les urines foncées facilitent
mandibulaires et d’amygdales érythémateuses ou éry- le diagnostic. Le dosage des transaminases oriente le
thémato-pultacées oriente vers une angine. Il convient diagnostic, la mesure d’un temps de prothrombine normal
de ne pas oublier qu’avant l’âge de 3 ans, celles-ci sont rassure sur la sévérité de l’infection.
virales. L’examen des tympans paraît indispensable, il • La pyélonéphrite aiguë doit être évoquée en cas de
est cependant difficile et requiert une expérience impor- douleurs abdominales, parfois localisées à la fosse lombaire
tante. Mieux vaut alors le remplacer par une simple ou à l’hypocondre, et (ou) en présence d’une fièvre. La
pression successive sur chaque conduit auditif externe, réalisation d’une bandelette urinaire doit être systéma-
pression qui déclenche une douleur vive, entraîne des tique chez l’enfant fébrile. La constatation de nitrites et
pleurs et le retrait brutal de la tête, témoin d’une otite. (ou) de leucocytes chez un enfant correctement désinfecté
Les douleurs abdominales intégrées dans ces cadres sont permet d’affirmer le diagnostic. La performance de cet
fréquentes et leur physiopathologique n’est pas expliquée ; examen est comparable à celle de l’examen cytobactério-
une adénolymphite mésentérique est parfois mise en logique urinaire mais est fortement dépendante de la
évidence. Ces mêmes douleurs peuvent se retrouver désinfection préalable. La mise en place d’une poche à
devant un tableau de rhinopharyngite, l’examen buccal recueil d’urines ne doit pas excéder les 20 min, délai au-delà
montrant un rhinopharynx entièrement érythémateux. duquel le nettoyage doit être renouvelé et la poche changée.
• Une cause pulmonaire peut être génératrice de douleurs Les tableaux de douleurs abdominales devant les infections
abdominales. Le plus souvent, il s’agit d’une pneumonie urinaires basses sont plus rares.
franche lobaire aiguë. Le tableau associe la notion d’une • Pour le purpura pétéchial rhumatoïde, le diagnostic
toux volontiers sèche, d’une asthénie chez un enfant très est posé devant l’association d’arthralgies et d’un purpu-
fébrile (> 39 °C), parfois d’un battement des ailes du nez. ra déclive situé sur les membres inférieurs, les fesses, les
Quelques autres signes sont évocateurs d’une pneumonie lombes et parfois sur les avant-bras. L’éruption est
tels que la poussée d’herpès labial ou la présence de symétrique, la survenue d’un œdème localisé n’est pas
pommettes rouges. L’auscultation pulmonaire doit être exceptionnelle. Le tableau est parfois trompeur lorsque
particulièrement soigneuse, à la recherche d’un souffle les douleurs abdominales sont inaugurales. La présence
tubaire. La radiographie pulmonaire confirme le diagnostic. d’une protéinurie avec ou sans hématurie est évocatrice.
Il est licite, à l’heure où les conférences de consensus La persistance du tableau abdominal aigu doit faire
recommandent de ne pas faire de radiographie pulmonaire éliminer de manière systématique une invagination
en l’absence de signe auscultatoire, de demander la intestinale, complication classique.
radiographie si le tableau clinique s’avère complet en • Pour le rhumatisme articulaire aigu, des tableaux
dehors d’une auscultation normale. L’hyperleucocytose abdominaux sont possibles, mais l’angine ancienne et
avec polynucléose est un bon élément d’orientation. La les arthralgies débutantes permettent le diagnostic.
défervescence rapide sous pénicilline reste habituelle.
La constatation d’une matité et d’une diminution du 2. L’enfant n’est pas fébrile
murmure vésiculaire en regard évoque une pleurésie. • En ce qui concerne les parasitoses intestinales, il
• Les gastro-entérites aiguës sont révélées par la faut évoquer avant tout l’oxyurose et l’ascaridiose. Elles
présence de selles liquides, fortement évocatrice du peuvent en imposer pour un tableau chirurgical. La réa-
diagnostic. L’examen de l’abdomen sans préparation lisation d’un scotch test et la surveillance des selles
peut montrer dans ce contexte quelques niveaux s’imposent et peuvent conduire à un traitement d’épreuve.
hydroaériques. La présence d’une diarrhée ne doit pas • Les douleurs annexielles peuvent être constatées à la
obligatoirement rassurer, la préoccupation d’un problème phase prémenstruelle et sont classiques chez la jeune
chirurgical reste entier. fille. Après la puberté, les dysménorrhées sont à rechercher.
Les toxi-infections alimentaires se retrouvent avec un • Dans la gastrite à Helicobacter pylori, les douleurs
tableau bruyant et brutal. Plusieurs cas familiaux ou peuvent être réelles, même en l’absence d’ulcère vrai.
scolaires sont contemporains. Les signes cliniques sont • L’ulcère gastroduodénal présente des douleurs qui
précoces (1 à 6 h) après une ingestion alimentaire sus- vont s’intégrer dans un syndrome abdominal chronique.
pecte, plus tardif (8 à 48 h) en cas de salmonelle. Les Bien qu’imprécise, la douleur apparaît proprement épi-
vomissements sont violents. L’aliment contaminant ou gastrique, à recrudescence nocturne, souvent associée à
le « contaminateur » doivent être recherchés. des vomissements. Le diagnostic est le plus souvent
• L’adénolymphite mésentérique présente un tableau posé devant une complication hémorragique.
fébrile douloureux, apparu au décours d’un contexte de • Les autres troubles digestifs sont dus à une banale
virose des voies aériennes. Une surveillance étroite est indigestion, des vomissements acétonémiques peuvent
nécessaire car le tableau clinique ne permet parfois pas être évoqués.
d’éliminer l’appendicite aiguë. L’échographie abdominale Une dilatation aiguë de l’estomac s’accompagne d’une
est parfois utile. intolérance à toute alimentation, parfois de vomisse-
• L’hépatite virale est révélée par des vomissements, ments répétés. Elle se caractérise par un ballonnement
des douleurs abdominales, dans un contexte modérément épigastrique, sans péristaltisme. Elle est plus fréquemment
fébrile, à la phase préictérique. L’examen clinique observée chez un enfant en état de coma mais peut se
retrouve parfois une sensibilité de l’hypocondre droit. rencontrer après une fracture, une intervention chirurgicale
abdominale ou thoracique. La mise en place d’une sonde Une porphyrie présente des douleurs concomitantes des
nasogastrique en aspiration douce et la correction des crises hémolytiques avec émission d’urines porto.
troubles hydro-électrolytiques assurent une évolution Une hypertension artérielle se manifeste quelquefois par
favorable. des douleurs abdominales toujours associées à des
• Les causes urinaires ou biliaires telles les lithiases céphalées, parfois des troubles visuels. La prise de la
sont rares mais possibles. Elles s’intègrent souvent dans pression artérielle, la palpation et l’auscultation des axes
un tableau de douleurs répétitives. La recherche des anté- vasculaires sont indispensables. La mise en évidence de
cédents en particulier urinaires peut aider au diagnostic. sueurs fait penser au phéochromocytome.
Un syndrome de la jonction pyélo-urétérale peut expliquer L’insuffisance surrénale doit être évoquée devant un
de tels tableaux. De même qu’un syndrome néphrotique amaigrissement récent, une soif, une fatigabilité. La
ou une glomérulonéphrite avec présence d’un syndrome confirmation est apportée par l’hyponatrémie avec
œdémateux et d’une oligurie. La bandelette urinaire hyperkaliémie, l’hypoglycémie entre autres anomalies.
montre une protéinurie voire une hématurie. Des douleurs aiguës peuvent se voir dans un contexte de
• Une crise drépanocytaire doit être évoquée chez un douleurs abdominales récurrentes. Le diagnostic est
enfant noir. La douleur est souvent résistante aux antal- difficile lors de la première crise. Il s’agit de :
giques simples. L’interrogatoire familial est essentiel. – constipations, souvent méconnues par la famille ; les
• Une intoxication par les anti-inflammatoires non douleurs sont fréquemment localisées à l’hypocondre
stéroïdiens est source de douleurs abdominales. Le gauche, la distension colique est parfois nette ; l’exis-
dosage du paracétamol doit être largement demandé en tence de fécalome est fortement évocatrice, de même
cas de doute, l’institution précoce de son antidote qu’une éventuelle encoprésie ;
(Fluimucil) contrecarrant le plus souvent le risque – douleurs abdominales d’origine psychogène, peu spé-
majeur d’insuffisance hépatique. cifiques et souvent périombilicales, qui ne réveillent
La prise accidentelle de caustique passe rarement inaperçue. jamais l’enfant ; le contexte est la constatation d’une
Au cours de l’automne, une intoxication aux champi- sensibilité, d’une anxiété et d’un perfectionnisme qui
gnons peut être évoquée. Le contexte familial du tableau sont évocateurs ; une tension scolaire et (ou) familiale
et l’interrogatoire facilitent le diagnostic. est parfois retrouvée. ■
• De multiples autres tableaux peuvent présenter des
douleurs abdominales.
Une anémie hémolytique aiguë est associée à une pâleur POUR EN SAVOIR PLUS
cutanée et des conjonctives, une tachycardie, une asthénie
Bourrillon A, Dehan M. Pédiatrie pour le praticien. Paris : Masson,
importante plus ou moins brutale, parfois une splénomé- 1996.
galie. La numération sanguine, le taux de réticulocytes, Huault G, Labrune B. Pédiatrie d’urgence. Paris : Médecines-Sciences
le dosage de l’haptoglobine et de la bilirubine complètent Flammarion, 1993.
le tableau. La transfusion est alors réalisée le plus vite Soupre D. Douleurs abdominales et urgences. MT pédiatrie 1999
possible, mais seulement de manière concomitante à la
réalisation du bilan d’hémolyse pour assurer le diagnostic
et ne pas aggraver l’anémie.
Lors d’un diabète sucré, devant un syndrome polyuro- Points Forts à retenir
polydipsique, une perte de poids importante, une som-
nolence voire un coma, la glycosurie et la glycémie • Les formes cliniques d’appendicite aiguë
posent le diagnostic. Chez un diabétique connu, les douleurs sont nombreuses et souvent trompeuses.
abdominales reflètent le déséquilibre thérapeutique. • Le traitement d’une invagination intestinale
Les migraines à expression abdominale s’associent souvent aiguë relève actuellement le plus souvent
à des céphalées, des vomissements. Le début et la fin de de la radiologie.
l’épisode sont souvent brutaux. L’interrogatoire permet • Toute douleur scrotale impose, dans le doute,
en général de mettre en évidence des antécédents familiaux. une intervention urgente.
Un contexte ethnique oriente parfois. La maladie pério- • Il faut penser à une pneumonie lombaire
dique souvent accompagnée de fièvre et d’un syndrome aiguë devant toute douleur abdominale
inflammatoire net biologiquement doit être évoquée hautement fébrile.
chez un enfant israélite du bassin méditerranéen. • La réalisation d’une bandelette urinaire
Une tumeur abdominale engendre des douleurs consécutives impose une désinfection soigneuse, pour éviter
à la compression de différents organes ou plexus nerveux. de nombreux faux positifs.
Elle est très souvent associée à la constatation d’une disten- • Une topographie non périombilicale
sion abdominale, la palpation retrouve la masse tumorale. de la douleur est évocatrice d’une organicité.
Une pancréatite aiguë quoique rare est de diagnostic • Une décision de surveillance à domicile impose
difficile en dehors d’un tableau antérieur d’oreillons. d’avoir éliminé toute hypothèse chirurgicale.
Un œdème angioneurotique par déficit en C1-estérase a Un second examen par un second examinateur
un diagnostic facilité par l’association à un œdème de est indispensable.
Quincke.