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A 82
Lombalgies
Orientation diagnostique
Michel REVEL, Serge POIRAUDEAU
Hôpital Cochin, Université René-Descartes, Service de rééducation et de réadaptation de l’appareil locomoteur et des pathologies du rachis,
27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris.
tion, que la douleur a été syncopale et surtout qu’un héma- taines activités telles que la descente d’un trottoir, le pas-
tome est apparu dans la région lombaire. sage de la position assise à la position debout. La douleur
Toute lombalgie déclenchée par un traumatisme important fulgurante cloue le patient sur place pendant quelques
ou un effort violent est vraisemblablement due à une lésion secondes. Ils doivent être distingués du lumbago discal car
anatomique mais deux notions doivent être retenues : une ils se répètent généralement pendant plus longtemps. Ils
hernie discale résulte rarement du traumatisme seul et ne surviennent toujours sur des disques très détériorés et
justifie de toute façon pas de geste discal si elle n’entraîne témoignent soit d’une instabilité rachidienne, soit du coin-
pas de lomboradiculalgies par une compression évidente ; cement de petits fragments discaux.
la plupart des lésions, qu’elles soient disco-ligamentaires 3. Lombalgies post-traumatiques
ou musculo-aponévrotiques, cicatrisent dans des délais
Le traumatisme est toujours violent contrairement aux cir-
communs à toute autre localisation de l’appareil locomo-
constances qui déclenchent le lumbago. L’évolution est plus
teur. Au-delà d’un délai de 6 à 8 semaines, l’immobilisa-
longue et suit sensiblement celle des délais de réparation tis-
tion lombaire par corset devient illogique et la chronicité
sulaire. L’immobilisation par corset est justifiée ici.
de la lombalgie est exceptionnellement attribuable aux
conséquences seules du traumatisme. 4. Fractures sur insuffisance osseuse
Ce diagnostic doit être évoqué systématiquement devant
Lombalgies communes une lombalgie aiguë déclenchée par un traumatisme mineur
chez une personne âgée, complètement soulagée par le
Elles expriment de façon aiguë ou chronique un trouble décubitus et exacerbée dès la mise en charge.
fonctionnel ou anatomique régional. La lombalgie aiguë • Les tassements vertébraux ostéoporotiques siègent pré-
est actuellement définie comme une douleur lombaire pré- férentiellement à la jonction dorso-lombaire. Ils s’accom-
sente depuis moins de 3 mois. Seulement 10 % des patients pagnent toujours d’une perte de taille récente. Des radio-
continuent de souffrir au-delà de 2 mois et 7 % au-delà de graphies permettent de localiser le tassement, de vérifier
6 mois. Le délai de 3 mois au-delà duquel on parle de lom- l’aspect bénin et serviront de comparaison lors de lombal-
balgies chroniques est donc bien adapté pour des enquêtes gies aiguës ultérieures. L’évolution se fait vers une dispa-
épidémiologiques et des études socio-économiques. Cette rition progressive des douleurs après 3 à 6 semaines de
définition est par contre insuffisante pour l’évaluation de repos. Des douleurs résiduelles chroniques liées à la défor-
mesures thérapeutiques comme le repos ou l’exercice phy- mation peuvent persister.
sique. La cause d’une lombalgie aiguë n’est facilement éta- • Les fractures du sacrum se manifestent souvent par des
blie que dans 10 à 20 % des cas et celle des lombalgies douleurs lombosacrées. Elles ne sont pas nécessairement
chroniques dans 10 à 45 % des cas. Il faut cependant ten- déclenchées par une chute. Il faut donc penser systémati-
ter d’affiner cette classification à partir des caractéristiques quement à palper et percuter le sacrum chez une femme
de la douleur, des circonstances de survenue, du mode évo- âgée parfaitement soulagée par le décubitus si a fortiori il
lutif et des anomalies structurales associées pour amélio- existe des fessalgies associées. Il est difficile de voir le trait
rer la prise en charge thérapeutique et le pronostic. de fracture sur les radiographies standard. La scintigraphie
Lombalgies aiguës osseuse est l’examen le plus rentable. Elle montre typi-
Une bonne analyse sémiologique et une utilisation ration- quement une hyperfixation en H qui témoigne d’une frac-
nelle des examens d’imagerie permettent de distinguer plu- ture selon les lignes de force de cet os. Le trait de fracture
sieurs situations. peut cependant suivre un trajet moins typique. Le même
examen permettra de diagnostiquer une fracture parfois
1. Lumbago associée des branches ilio- ou ischio-pubiennes.
Il se caractérise par une douleur intense, déclenchée par un
banal effort de soulèvement, un geste anodin de la vie quo- Lombalgies chroniques
tidienne tel que se pencher au-dessus d’un lavabo, exacer-
bée par le moindre effort, impulsive à la toux, calmée par Toutes les structures anatomiques, excepté la région cen-
l’immobilité totale. La colonne lombaire est raide avec trale du disque intervertébral et le cartilage hyalin des pla-
appréhension à toute manœuvre d’examen. Il existe le plus teaux vertébraux et des facettes articulaires postérieures
souvent une déviation latérale dite attitude antalgique. Ce sont innervées et donc susceptibles d’être à l’origine d’une
blocage douloureux aigu cède spontanément en quelques lombalgie. La complexité fonctionnelle de la colonne lom-
jours mais il peut laisser place à un fond douloureux chro- baire impliquant simultanément disques, articulaires pos-
nique ou se répéter au rythme de 1 à 3 par an pendant térieures, muscles et ligaments, compromet la valeur loca-
quelques années. lisatrice des différentes manœuvres d’examen clinique. De
plus, il existe de nombreuses anomalies radiologiques qui
Les radiographies sont inutiles sauf si ce tableau aigu per-
ne sont pas corrélées à la douleur. Le diagnostic lésionnel
siste au-delà de 10 à 12 jours pouvant révéler un tassement
d’une lombalgie chronique souhaité par le médecin et le
vertébral sur os pathologique, le plus souvent un tassement
patient est donc difficile et de toute façon n’a d’intérêt que
ostéoporotique chez la femme ménopausée.
s’il conduit à un traitement adapté avec un rapport béné-
2. À-coups bloquants douloureux lombaires fices/risques favorable. Mieux vaut souvent traiter le symp-
Il s’agit d’épisodes répétés de douleurs aiguës, durant de tôme que de se lancer dans des traitements locaux à haut
quelques secondes à quelques heures, déclenchés par cer- risque d’iatrogénicité à partir d’une pathogénie hasardeuse.