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Retour aux Fondamentaux: Pour une République Civique (Manuel à l’usage du citoyen)
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Ebook684 pages7 hours

Retour aux Fondamentaux: Pour une République Civique (Manuel à l’usage du citoyen)

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Les valeurs de la République sont universelles. « République », du latin res publica, au sens propre « chose publique », désigne l’intérêt général, le gouvernement, la politique et enfin l’État. La république (Politeia) de Platon, Le politique (Politikie) d’Aristote et De la république (De re publica) de Cicéron traitent tous des formes de gouvernement. Res désigne la cause plaidée. Historiquement il s’agit de la cause de la plèbe, plaidée par le tribun - représentant des « tribus » - devant le Sénat romain composé des patriarches des familles connues de Rome.
En 1576 Jean Bodin la définit dans Les six livres de la République comme le « droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine ». Jean-Jacques Rousseau, dans Du contrat social, comme « tout État régi par des lois, sous quelque forme d’administration que ce puisse être ; car alors seulement l’intérêt public gouverne et la chose publique est quelque chose. Tout gouvernement légitime est républicain. »
République prend alors le sens de communauté d’esprit ou d’idée, dans le sens d’une recherche du bien commun dans un domaine donné.
Un des objets privilégiés du modèle républicain est l’approfondissement des notions de : nationalité fondée sur la citoyenneté, intégration, laïcité, éducation civique, mission fondatrice de l’Ecole, égalité de tous devant la loi, prévalence de l’intérêt général, organisation territoriale équilibrée, garantie des libertés publiques, définition et rôle des services publics, civisme versus « montée des communautarismes » etc., ainsi que le développement, à partir de ces notions, du dialogue entre les cultures et entre les nations. A l’heure des communautarismes, de la désintégration du tissu social et de l’espace public, ce modèle républicain est de pleine actualité.
A partir des valeurs républicaines, il s’agit d’ouvrir un chemin d’universalisation et de fonder la paix sur le dialogue des cultures, les échanges et la reconnaissance mutuelle des différentes nations.
LanguageFrançais
Release dateOct 13, 2017
ISBN9782312055923
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    Retour aux Fondamentaux - Etienne Palle

    cover.jpg

    Retour aux Fondamentaux

    Étienne Palle

    Retour aux Fondamentaux

    Pour une République Civique

    (Manuel à l’usage du citoyen)

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2017

    ISBN : 978-2-312-05592-3

    Avertissement aux lecteurs

    Le présent recueil est une compilation dont l’objet est de rappeler, informer, expliquer au lecteur les règles et les principes fondamentaux du système républicain qui fondent notre société, comment en restant d’actualité, ils peuvent aujourd’hui apporter, dans l’intérêt du bien commun, des réponses et des solutions aux difficultés du vivre ensemble.

    L’intention de l’auteur par son choix et sa méthode est de décrire ces différentes notions au travers d’extraits de textes d’auteurs qui ont participé par leurs écrits, leurs conférences, leurs discours ou leurs interviews au débat sur les valeurs de la République.

    Avant-propos

    RES POPULI

    Les valeurs de la République sont universelles.

    « République », du latin res publica, au sens propre « chose publique », désigne l’intérêt général, le gouvernement, la politique et enfin l’État. La république (Politeia) de Platon, Le politique (Politikie) d’Aristote et De la république (De re publica) de Cicéron traitent tous des formes de gouvernement. Res désigne la cause plaidée. Historiquement il s’agit de la cause de la plèbe, plaidée par le tribun – représentant des « tribus » – devant le Sénat romain composé des patriarches des familles connues de Rome.

    img1.jpg

    En 1576 Jean Bodin la définit dans Les six livres de la République comme le « droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine ». Jean-Jacques Rousseau, dans Du contrat social, comme « tout État régi par des lois, sous quelque forme d’administration que ce puisse être ; car alors seulement l’intérêt public gouverne et la chose publique est quelque chose. Tout gouvernement légitime est républicain. »

    République prend alors le sens de communauté d’esprit ou d’idée, dans le sens d’une recherche du bien commun dans un domaine donné.

    Un des objets privilégiés du modèle républicain est l’approfondissement des notions de : nationalité fondée sur la citoyenneté, intégration, laïcité, éducation civique, mission fondatrice de l’École, égalité de tous devant la loi, prévalence de l’intérêt général, organisation territoriale équilibrée, garantie des libertés publiques, définition et rôle des services publics, civisme versus « montée des communautarismes » etc., ainsi que le développement, à partir de ces notions, du dialogue entre les cultures et entre les nations. À l’heure des communautarismes, de la désintégration du tissu social et de l’espace public, ce modèle républicain est de pleine actualité.

    À partir des valeurs républicaines, il s’agit d’ouvrir un chemin d’universalisation et de fonder la paix sur le dialogue des cultures, les échanges et la reconnaissance mutuelle des différentes nations.

    Civilizatio

    CIVILISATION COMMUNE

    La civilisation caractérise l’état d’évolution d’une société donnée, tant sur le plan technique, intellectuel, politique que moral, sans porter de jugement de valeur. À ce titre, on peut parler de civilisations au pluriel et même de civilisations primitives.

    Elle développe des normes de comportements en société, comme la chevalerie. Une société définit souvent son type d’homme idéal (l’« homme de bien » de Confucius, l’« honnête homme » du XVIIe siècle européen, le « gentleman » de l’Angleterre victorienne…).

    Le comportement civilisé est celui qui permet aux hommes de vivre ensemble pacifiquement. Un mythe rapporté par Platon dans Protagoras distingue les apports de la technique de ceux de la civilisation. Prométhée a apporté aux hommes les arts et les sciences, mais les hommes ne parviennent pas à s’entendre et à profiter de ces présents : ils continuent à vivre comme des animaux. Zeus leur fournit alors la pudeur et la justice, c’est-à-dire la possibilité de prendre en compte les autres membres de la société et de régler les différends de manière pacifique et ordonnée : les hommes peuvent alors construire la vie en Cité. La civilisation apparait comme étant le moyen pour les hommes de s’élever au-dessus de la condition animale.

    Jusqu’au XVIIIe siècle, l’idée de civilisation s’exprime par la « politesse » et la « civilité ». Ces comportements contiennent une connotation, justifiée ou non, de supériorité morale : de la classe noble sur les classes populaires, de l’Europe sur les « barbares ». Saint-Simon, en 1717, est fasciné par le mélange chez le tsar Pierre Ier, en visite à Paris, d’une « politesse » remarquable et de « cette ancienne barbarie de son pays qui rendait toutes ses manières promptes, même précipitées, ses volontés incertaines ». La civilisation s’observe non seulement dans la vie de la Cité, mais aussi dans toutes les circonstances de la vie quotidienne : manières de table, contrôle de son corps en société… Norbert Elias a étudié ce « processus de la civilisation » : selon lui, les classes les plus élevées de la société ont dû apprendre peu à peu à maîtriser leurs pulsions pour s’adapter à un monde dans lequel les contacts entre les individus sont de plus en plus importants, condition d’apparition de l’État moderne.

    La civilisation suppose donc l’existence de lois et de règlements destinés à éviter que les gens ne deviennent violents. Mais la possession de forces autorisées à recourir à la violence, telle que la police ou l’armée ne disqualifie pas une culture qui prétend être civilisée. Le pays « civilisé » se distingue par la manière dont la violence est utilisée : dans un État moderne, toute force armée doit relever de l’État, qui a le « monopole de la violence légitime » selon l’expression de Max Weber.

    L’Europe, et les États-Unis aujourd’hui, se pensent en modèle et ce qui s’affiche continuellement dans les médias fait état d’un seul monde occidental qui incarne cette base de références culturelles, politiques, économiques. Malgré la polysémie qui se cache derrière ce terme, c’est une notion qui, dans son sens englobant, oriente les recherches académiques, les réflexions politiques, les débats journalistiques.

    La conception d’un monde occidental a un caractère mythique, car reposant sur une soi-disant homogénéité, elle nie les différences qui ont toujours structuré le continent européen. Il n’y a pas de continuité historique qui voit une Europe homogène et pacifique. Claude Prudhomme, historien, a soulevé que l’évolution du monde occidental va vers le triomphe d’une véritable « essentialisation » du terme géographique au profit de valeurs et de comportements. On essaie de mettre avant un caractère mystifié d’un monde occidental dominant, pacifiste, homogène. S’en élèvent plusieurs risques : « Dérive ethniciste et raciste, qui attribue le succès du monde occidental à des données démographiques et biologiques ; dérive culturaliste qui affirme la supériorité du modèle par son fondement religieux (chrétien en l’occurrence) ou philosophique (l’avènement de la raison). Le raisonnement tiré de l’analyse historique est alors effacé au profit de l’affirmation de vérités ontologiques qui attribuent au monde occidental le privilège d’avoir fait triompher la raison et la science et revêtu une signification et une valeur universelles ». Il faut alors se détacher de cette idéalisation de l’histoire du continent européen qui aurait trouvé une unité culturelle, philosophique, voire politique. L’existence et la mise en place du marché commun participe de cette volonté.

    Ceci souligne l’épineuse question des aires d’influence religieuse, qui participe, elle aussi, à la définition de la civilisation occidentale. Il faut nuancer ces particularités trop généralisatrices du monde occidental, vu comme homogène. La situation tend à se compliquer dans le monde moderne, précisément parce que l’un des traits caractéristiques de la « civilisation occidentale » contemporaine est, surtout en Europe, l’athéisme, ou plus justement une forme croissante d’indifférence religieuse. De ce point de vue, la confrontation actuelle entre le monde occidental et le monde musulman est moins un choc entre christianisme et islam, qu’un frottement entre une civilisation occidentale où la religion tend, comme l’a fait remarquer Marcel Gauchet (Le Monde, 13 mars 2006), à n’être plus envisagée que sur le mode de la croyance privée, voire de la dérision, et des sociétés où le religieux reste structurant à tous les niveaux de l’organisation sociale.

    Comme ceux de culture, de religion ou de Société, le terme civilisation est devenu un concept clé ou un « maître-mot » pour penser le monde et l’histoire à l’époque des Lumières. Victor Riqueti de Mirabeau, le père de Mirabeau le révolutionnaire, écrit en 1758, dans L’Ami des Hommes : « La religion est sans contredit le premier et le plus utile frein de l’humanité : c’est le premier ressort de la civilisation. » De façon similaire, en 1795, dans Esquisse d’un tableau des progrès de l’esprit humain de Condorcet, l’idée de civilisation désigne les progrès accomplis par l’humanité dans une nation donnée lorsqu’il fut possible de passer de l’état de barbarie à celui de citoyen, de civil ou de civilisé.

    Au XIXe siècle la civilisation, alors envisagée comme un idéal à atteindre et comme un processus de transformation de la société vers cet idéal, fut la principale légitimation donnée à la colonisation. Il s’agissait de « civiliser » les peuples du monde dans une vision hiérarchique et évolutionniste des degrés de civilisation auxquels ceux-ci avaient accédé.

    Aujourd’hui les vues sur la civilisation sont plus égalitaires de sorte que le terme désigne davantage un état de fait historique et social à valeur constante qu’un processus de transformation des sociétés. L’idée a cessé de fonctionner en opposition avec celles de barbarie ou de sauvagerie, tandis qu’était affirmé le principe du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Par suite, c’est dans l’égalité ou l’équivalence de ces entités supposées que peut se jouer l’affrontement, le dialogue ou l’entente des civilisations.

    L’idée de civilisation reste cependant problématique car pour pouvoir désigner des civilisations, qui n’ont dans les faits ni structure précise, ni représentation institutionnelle, il faut sélectionner parmi les faits observables ceux que l’on juge aptes à définir les civilisations envisagées. Ainsi, on se fondera sur des faits linguistiques, éthiques, géographique, culturels, religieux ou politiques, mais, en procédant ainsi, il n’est pas plus aisé de savoir ce qu’est une civilisation qu’une religion ou une culture, des idées par ailleurs elles aussi assez vagues et qui sont parmi celles les plus employées pour décrire ce que sont les civilisations. Pour Bertrand Binoche « Après avoir prédit le triomphe de la civilisation, on peut bien annoncer le choc des civilisations, mais cela ne contribue pas à y voir plus clair. »

    L’exemple de l’Empire romain d’Occident illustre non seulement un positionnement géographique, mais déjà une notion politique. Cette dimension politique est celle qui prévaut aujourd’hui dans le langage courant. La notion de monde occidental renvoie à l’Europe ainsi qu’à l’Amérique du Nord et plus généralement aux membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). C’est donc un point de vue politique et aussi culturel. Souvent utilisée dans les médias et les discours politiques pour l’opposer par exemple aux pays en voie de développement, à l’Islam ou aux pays du Moyen-Orient, la notion de monde occidental décrit donc l’Europe de l’Union européenne et les États-Unis, présentés dans ce cas comme un monde occidental homogène, démocratique, développé et chrétien dans sa majorité. C’est une construction géopolitique et culturelle.

    Depuis la chute de l’Union soviétique, la délimitation des « pays occidentaux » en tant qu’espace de culture commune s’est élargie, mais elle reste mouvante selon les circonstances et les points de vue. Les pays ou les régions qui constituent à l’heure actuelle le monde occidental ne peuvent pas être identifiés de manière arrêtée et fixe : ceci en raison du fait que la notion même de monde occidental renvoie à des dimensions culturelles, idéologiques, politiques, économiques et sociales diverses.

    Par exemple, d’un point de vue géopolitique, économique et militaire, le Japon est souvent assimilé au monde occidental ; or sa population n’est pas liée aux populations originaires d’Europe occidentale. Néanmoins, c’est aussi un pays d’Extrême-Orient qui s’est développé sur le modèle occidental et en a adopté les valeurs et la vision du monde. A contrario, les pays d’Europe centrale et de l’Est, qui sont désormais considérés comme des pays occidentaux au sens propre étaient, il n’y a encore qu’une vingtaine d’années, dans la phraséologie de l’époque, les « pays de l’Est ».

    Toutefois, on peut distinguer plusieurs caractéristiques communes aux nations occidentales :

    – une langue et une culture européenne ;

    – des institutions politiques démocratiques (élections tenues régulièrement, stabilité des institutions…) ;

    – un système juridique basé sur l’État de droit (présomption d’innocence, plaidoirie ou non de culpabilité, jugement par un juge et/ou un jury, etc.) où la jurisprudence est très importante ;

    – une séparation de l’Église et de l’État (principe de laïcité) ;

    – une organisation économique capitaliste.

    Bien que ce soit l’Europe qui, dans sa construction historique, a principalement participé à entretenir cette étiquette de monde occidental moderne et avancé, par rapport à d’autres régions qui s’en démarquaient du point de vue culturel, idéologique, politique, confessionnel, les pays non compris dans cette aire géographique participent à cette catégorisation.

    À l’heure où l’histoire a montré le rôle d’une Europe occidentale puissante et moderne dans la dynamique des interventions militaires, scientifiques et religieuses dans de nombreuses régions de la planète, il faut constater que le monde occidental devient aussi une catégorie (ré)utilisée par les pays qui ne s’y incluent pas, afin de s’en démarquer, afin de revendiquer certains droits ou dénoncer des pratiques occidentales qui les menacent. Notamment dans les régions colonisées où l’homme occidental, perçu comme barbare et étranger s’impose avec des valeurs et des pratiques différentes et exerce inévitablement une influence sur les populations partagées entre le rejet et l’attirance.

    C’est parfois en tant que victimes que les personnes concernées par le clivage monde occidental – reste du monde discutent de cette partie du globe située à l’Ouest de manière générale. C’est donc un processus qui va dans les deux sens et qui participe de ce besoin de s’identifier en s’opposant à un autre monde, à une autre vision du monde. Dans ce sens, il faut souligner l’idée d’Edward Saïd qui affirme que l’Orient est lui-même une pure construction issue du monde occidental. Prudhomme note aussi que lorsque le monde occidental prétend ne plus savoir ce qu’il est, les autres viennent lui rappeler ce qu’il représente pour eux.

    La civilisation s’observe non seulement dans la vie de la Cité, mais aussi dans toutes les circonstances de la vie quotidienne : manières de table, contrôle de son corps en société… Norbert Elias a étudié ce « processus de la civilisation » : selon lui, les classes les plus élevées de la société ont dû apprendre peu à peu à maîtriser leurs pulsions pour s’adapter à un monde dans lequel les contacts entre les individus sont de plus en plus importants, condition d’apparition de l’État moderne.

    La civilisation suppose donc l’existence de lois et de règlements destinés à éviter que les gens ne deviennent violents. Mais la possession de forces autorisées à recourir à la violence, telle que la police ou l’armée ne disqualifie pas une culture civilisée. Ce qui distingue le pays « civilisé », c’est plutôt la manière dont la violence est utilisée : dans un État moderne, toute force armée doit relever de l’État, qui a le « monopole de la violence légitime » selon l’expression de Max Weber.

    SOCIÉTÉ COMMUNE

    La société occidentale est le milieu humain qui résulte des institutions, des organisations, des normes, des lois, des mœurs, des coutumes et des valeurs propres au monde occidental. Entre les XVe et XXe siècles, la colonisation, puis l’impérialisme et l’hégémonie économique des pays occidentaux a permis la diffusion de plusieurs aspect du mode de vie occidental sur l’ensemble des continents, ce phénomène est appelé l’occidentalisation.

    Elle est basée sur les idées de la société grecque antique, de la société romaine antique et du christianisme occidental (catholicisme et protestantisme), dont la synthèse est mise en valeur par les écrivains du siècle des Lumières au XVIIIe siècle.

    Ses valeurs fondamentales sont la liberté, l’égalité, la justice, le droit au bonheur et le progrès. La société occidentale se fonde sur les principes de l’individualisme, conception structurante dans laquelle la liberté individuelle est considérée comme un droit que les institutions doivent protéger. La liberté individuelle structure notamment le secteur économique à travers la liberté d’entreprendre et la protection de la propriété privée, bases du libéralisme économique dont les effet négatifs sont contrebalancés par l’existence de l’état-providence. Ce dernier a essentiellement pour but de garantir l’égalité des chances et d’assurer des fonctions sociales dont l’étendue est variable selon les pays.

    Dans la vision occidentale, les institutions religieuses sont séparées des institutions politiques, ce principe est appelé laïcité ou sécularisme selon le pays concerné. Le pouvoir politique est entre les mains des individus, appelés citoyens, selon l’héritage de la démocratie athénienne, il est exercé dans le cadre de l’état de droit, selon l’héritage du droit romain. Les pratiques religieuses ou philosophiques font partie des libertés individuelles et l’État est le garant de la liberté des individus de croire ou de ne pas croire. D’une manière plus générale, la liberté de conscience qui englobe la liberté de religion est garantie par l’État et l’individu est libre d’exprimer ses opinions au sujet de toute idéologie religieuse, philosophique ou politique. Cette liberté est appelée liberté d’expression.

    La société occidentale est matérialiste et hédoniste – tournée sur le bonheur et le bien-être personnel. Ses fondations sont la sécularisation, le capitalisme, le marché libre et la modernité. Elle met l’accent sur l’individualisme, le libéralisme économique, et marginalise l’impact de la religion sur l’État et la sphère publique.

    Partir du passé pour aller vers le futur est une dynamique centrale de la société occidentale, et la liberté est considérée comme une chose à laquelle tout un chacun a droit.

    Les valeurs et les institutions politiques de la société occidentale du XXIe siècle sont héritées des idées lancées par des écrivains du XVIIIe siècle qui ont promu une société démocratique, libérale, séculaire, rationnelle, équitable et humaniste dont les valeurs fondamentales sont la liberté, l’égalité, la justice, le bonheur et le progrès.

    Libérale et rationaliste : Dans le régime économique capitaliste, orienté sur la recherche de profits (accumulation de capital) et l’entreprise privée, qui existe en Europe de l’Ouest depuis le XIVe siècle, la doctrine du libéralisme affirme que la liberté dans l’exercice du capitalisme permet de le rendre plus efficace. Le rationalisme donne la souveraineté à la connaissance acquise par raisonnement, au profit des dogmes et des à priori. Selon les philosophes du XVIIIe siècle, « Dans une société rationnelle tout parait simple, coordonné, uniforme et équitable ; la société se fonde sur des règles simples et élémentaires puisées dans la raison et les lois naturelles ».

    Humaniste et hédoniste : L’humanisme est un anthropocentrisme réfléchi qui met en valeur l’humain, et une vision du monde dans laquelle l’humain a la possibilité de se réaliser par les seules forces de la nature. Au XVIe siècle l’humanisme ouvre la voie à un renouvellement des modes de connaissance, une refonte de la pédagogie, et une critique libératrice des traditions et des institutions. L’hédonisme, quant à lui, est une doctrine qui met en valeur les loisirs et incite le citoyen aux plaisirs.

    L’hédonisme met en valeur l’otium de l’Empire romain, cette période de temps privilégiée qu’avaient les riches Romains, où ils pouvaient pratiquer des activités de détente, de divertissement et de développement personnel. En particulier des jeux, des spectacles, des soins du corps, des repas et des fêtes.

    Sécularisée et démocratique. La sécularisation est un processus de libération, dans lequel l’individu acquiert une certaine autonomie vis-à-vis de la religion, prend en main sa destinée, et obtient le droit de penser, de juger indépendamment du religieux. Une société sécularisée devient autonome sur le plan politique, moral et scientifique et élabore ses propres lois plutôt que d’être régie par des lois sacrées. Dans un régime politique démocratique l’État, porteur du pouvoir politique, est un instrument de médiation au service de la population. L’individu a une place centrale, et c’est à lui que revient la gestion de sa destinée individuelle et collective.

    La structure de la société occidentale est marquée par la modernisation, qui implique industrialisation, urbanisation, usage accru des écoles et des médias, croissance économique, mobilité, transformations culturelles, développement politique et économique, mobilisation sociale, intégration et transformation des relations internationales. Cette structure a été façonnée par la réforme, les révolutions nationales, la révolution industrielle, et la guerre froide.

    MODERNITÉ

    Dans la société occidentale, les projets futurs sont une dynamique centrale de la société. La société est orientée sur le contrôle rationnel et déterministe de l’environnement naturel et social et chaque individu est un moteur de ce processus. Être moderne c’est de savoir que le destin de toute chose est de finir dépassée.

    À la modernité est associée la notion du progrès : partir du passé pour aller vers le futur, dans un processus de constant changement. La modernité offre l’espoir du progrès, de la civilisation et de l’émancipation, et est indissociable de la nostalgie, du déracinement, de la fragmentation et de l’incertitude. Héritage du siècle des lumières, la responsabilité d’aller vers un futur meilleur va de pair avec la nature humaine considérée comme éternelle et absolue.

    Certains produits culturels ou technologiques sont couramment qualifiés de moderne : films, avions, bâtiments. Ces objets, reconnus comme porteurs de modernité suggèrent que la modernité est plus un fait culturel qu’une période de l’histoire.

    La modernisation est un pilier de la société occidentale. La révolution industrielle a non seulement formé mais accéléré la modernisation en étroite collaboration avec l’idéologie occidentale, les systèmes économiques, politiques et financiers. La globalisation de l’économie est marquée par une interdépendance technico-économique qui place l’information en tant que bien le plus précieux.

    À l’aube du XXIe siècle, les valeurs du progrès n’ont jamais été si fortes, et la perspective du futur est un sujet qui passionne. En même temps des problèmes sociaux et économiques tels que surpopulation, épuisement des ressources naturelles et détérioration de l’environnement naturel apparaissent et ont tous pour origine l’avancée de la science et la technologie. L’humain, qu’il soit sage, cupide, ou violent, se retrouve aux commandes de machines qui accroissent ses capacités et permettent de façonner la nature selon ses attentes et à son image.

    Apparus au milieu du XXe siècle, les ordinateurs ont profondément changé la société occidentale. Ces machines sont utilisées dans les entreprises, les milieux scientifiques, l’administration publique et de nombreuses familles. De nombreuses entreprises déclarent être devenues dépendantes de ces machines qui sont également utilisées dans les milieux scientifiques pour accélérer la recherche et le progrès.

    LIBERTÉ

    La liberté est une valeur forte dans la culture occidentale, et le mot est utilisé comme slogan dans le discours politique et économique. Dans le monde occidental la liberté est considérée comme quelque chose de naturel, quelque chose que chaque être humain recherche, du simple fait qu’il est un humain. Comparativement, en dehors du monde occidental, la liberté est une valeur loin d’être souhaitable, face à d’autres valeurs de bien plus grande importance telles que l’honneur, la gloire, la piété ou l’harmonie avec la nature, à tel point que le mot liberté n’existe pas dans certaines langues. Dans les langues du Japon et de la Corée, le mot liberté est emprunté du chinois, et a le sens péjoratif de l’absence de règles, la dérobade et l’égoïsme.

    Dans la société occidentale il existe une entente générale sur la valeur de la liberté, mais des approches différentes concernant sa définition, qui s’articule autour des libertés personnelles, de la souveraineté et des droits civiques :

    – La liberté individuelle est que tout un chacun peut faire ce qu’il désire sans être gêné ou limité par autrui du moment qu’il reste dans les limites dans lesquelles il ne gêne pas autrui de faire de même.

    – La souveraineté d’un peuple ou d’une nation est que le peuple peut faire ce que les membres veulent, sans tenir compte des volontés des autres peuples.

    – Le droit civique est la liberté pour tout un chacun de participer à l’exercice de la vie politique de la nation. Le droit civique nécessite des institutions politiques adaptées, la plus courante étant la démocratie.

    De nombreux historiens citent la civilisation grecque comme étant à l’origine de certains aspects de la liberté, notamment la démocratie et la sécularisation des polis – les villes-états de la Grèce antique. La liberté, notion d’origine grecque, était une valeur appréciée des Romains, qui l’ont répandue dans tout leur empire – en Europe de l’Ouest. Plusieurs siècles plus tard, au Moyen Âge, lors de la montée du christianisme, ce sont encore les Romains qui l’ont répandue, en remodelant la religion chrétienne de manière à en faire la seule religion du monde qui fait passer la liberté comme un point central de sa théologie.

    La liberté a été érigée comme une valeur fondamentale au début du XVIIIe siècle, en réponse à l’esclavage. Les sociétés occidentales ont joué un rôle prépondérant dans la mise en valeur de la liberté. Le fait de faire passer la liberté comme un droit naturel pour chaque être humain a diabolisé l’esclavage, le faisant passer comme un fléau moral et économique de la société occidentale et le phénomène a rapidement disparu à la fin du XVIIIe siècle.

    ÉCONOMIE

    Dans les sociétés occidentales, Le gouvernement contrôle les institutions militaires, légales, administratives, productives et culturelles, tandis que la société civile est composée de collectivités privées contrôlées par des volontaires et régulées par le marché libre : entreprises, collectivités, associations culturelles, religieuses et médias. La société civile dépend de l’économie, dont la vitalité permet la création de collectivités. La liberté d’association crée des liens entre les individus et évite l’aliénation et la désorganisation dans cette société propice à l’individualisation, la compétition et la solitude.

    Plusieurs aspects du marché libre tels que le matérialisme, le consumérisme et la richesse sont devenus une quasi religion dans les sociétés occidentales. D’une manière générale, la vitalité économique des pays d’Europe de l’Ouest était élevée et la croissance économique forte. Un des signes de changement depuis 1945 est l’apparition de la société de consommation et le déplacement vers les milieux urbains. Le nombre de personnes travaillant dans l’agriculture a fortement diminué et l’industrie s’est développée. Quelques années plus tard le secteur de l’industrie décline alors que se développe le marché des services.

    Les changements sur le marché du travail ont permis aux personnes des basses classes sociales d’acquérir des biens autrefois uniquement propriétés de la classe moyenne : télévision, machine à laver, aspirateur, et stéréo. Les changements ont également amené une augmentation des salaires, et une diminution du temps de travail, ce qui a ouvert la voie au marché des loisirs. Les faits de culture populaire tels que la musique, le sport et les médias sont devenus objets de commerce, et ce sont développés les concerts, les événements sportifs et le tourisme de masse. Le symbole le plus visible du changement de la société est l’automobile : avant la Seconde Guerre mondiale seules les personnes aisées en possédaient une ; le nombre de voitures en circulation en Europe a passé de 5 millions en 1948 à 45 millions en 1960.

    DÉMOCRATIE

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    Les régimes politiques démocratiques d’Europe de l’Ouest sont fondés sur une compétition de partis politiques : des collectivités qui effectuent des actions politiques en vue de promouvoir leurs propres intérêts. Les partis recherchent à obtenir le soutien de la population leur permettant de recruter des membres pour l’assemblée nationale ; le collectif qui exerce le pouvoir en commun avec d’autres institutions.

    Tous les pays d’Europe occidentale font appel à des partis politiques comme intermédiaires entre le peuple et le gouvernement. Les personnalités recrutées par les partis, responsables des décisions politiques nationales, ont un impact majeur sur la société. Même des petits pays comme la Suisse passent par des intermédiaires. Le régime politique de ce pays permet aux habitants de prendre des décisions politiques sans passer par les partis, cependant telle procédure est trop lourde pour être utilisée pour la totalité des décisions gouvernementales.

    Dans la politique de masse de l’Europe de l’Ouest, les partis politiques sont mis en concurrence par les avis secrets de chaque votant au suffrage universel. Les divergences d’opinion sont relevées par les votes et sont à l’origine de l’organisation politique de la nation. Il existe des divergences entre les propriétaires du capital (entrepreneurs, patrons) et les ouvriers, les institutions religieuses et judiciaires (tous deux auteurs de normes sociales), les acteurs des secteurs primaires et secondaires – localisées en régions citadine et campagne, et la culture dominante et les minorités (ethniques, linguistiques ou religieuses). Le développement d’une société industrielle à l’intérieur d’une société rurale peut également créer des divergences d’opinion dans la population, qui se reflètent dans les résultats des votes démocratiques.

    La Grèce puis Rome ont contribué à former une culture politique et juridique commune aux pays européens (puis aux pays qui sont ou qui ont été sous influence politique européenne), avec des éléments marquants comme la notion de démocratie, la centralisation et la codification des textes, etc.

    À partir du Moyen Âge, une pensée politique et juridique commune s’est développée sur tout le continent (avec des auteurs de référence reconnus dans tous les pays : Saint Thomas d’Aquin, Machiavel, Hobbes, Locke, Montesquieu, Rousseau, etc.), alors même que les États étaient politiquement divisés et en conflit entre eux.

    La philosophie européenne moderne a inspiré les Constitutions de tous les États du continent (et souvent celles d’autres États, avec plus ou moins de succès), et aussi les institutions européennes (UE, Conseil de l’Europe…). Des valeurs fondamentales, exprimées dans la Convention européenne des droits de l’homme, sont reconnues par presque tous les pays du continent à l’heure actuelle.

    SOCIÉTALISME

    À la base la société civile est « le domaine de la vie sociale civile organisée qui est volontaire, largement autosuffisant et autonome de l’État ». C’est le corps social, par opposition à la classe politique. Elle regroupe l’ensemble des associations à caractère non gouvernemental et à but non lucratif, si on généralise la définition établie par l’UNESCO pour le domaine de l’éducation. Il s’agit donc de l’auto-organisation de la société, en dehors de tout cadre institutionnel (au sens politique du terme), administratif ou commercial.

    Littéralement, la « communauté politique », notion dont les plus anciennes traces se trouvent chez Aristote et chez Cicéron (« societas civilis »), servait à définir l’unité politique de la Cité.

    La société civile est avant tout la totalité des citoyens d’une commune, d’une région, d’un État-nation ou, maintenant, de l’Union européenne. Toutefois, dans la pratique, ceux-ci n’agissent pas individuellement mais dans le cadre associatif. Une telle association peut être considérée représentative à condition qu’elle ait été constituée sur la base de la volonté et des propres intérêts des citoyens se déclarant formellement et juridiquement membres de l’association.

    Le Livre Blanc de la gouvernance de l’Union européenne donne cette définition : « La société civile regroupe notamment les organisations syndicales et patronales (les partenaires sociaux), les organisations non gouvernementales (ONG), les associations professionnelles, les organisations caritatives, les organisations de base, les organisations qui impliquent les citoyens dans la vie locale et municipale, avec une contribution spécifique des Églises et communautés religieuses ».

    Pour qu’une telle association ou organisation soit une partie active et l’expression de la volonté de citoyens, il s’avère nécessaire qu’elle dispose d’une structure et d’une forme d’action intérieure tout à fait démocratique. Cette nécessité exclue par conséquent des organisations qui ont été constituées par l’État, l’économie ou des églises.

    Il n’en reste pas moins qu’une association traduit une perception des questions de société qui lui est spécifique, avec une certaine manière d’appréhender la globalité qui n’est pas nécessairement représentative de la société dans son ensemble.

    D’après le projet du Traité constitutionnel de l’UE, article I-47 : Principe de la démocratie participative, la société civile européenne – donc la totalité des citoyens européens – joue un rôle principal comme l’acteur de la démocratie participative : « Les institutions de l’Union entretiennent un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile. »

    Dans le prolongement de la société civile, s’est développé le concept de sociétalisme représentant un mouvement citoyen mondial qui préconise, pour l’essentiel, l’instauration d’un système économique et politique basé sur les Droits de l’Homme et le respect de l’environnement, la réappropriation de la création monétaire par la collectivité, la gestion planétaire des biens communs non renouvelables ou nécessaires à la vie, la répartition des enrichissements collectifs nationaux sous forme de dividendes distribués équitablement à chaque citoyen, la démocratie participative locale et régionale dans un cadre de subsidiarité.

    La finalité du sociétalisme est l’existence de « la société humaine » au travers de son épanouissement, ce qui conditionne réciproquement l’épanouissement de chacun des individus la composant.

    CIVILISATIONISME

    La civilisation comme identité culturelle, associée pour chaque individu à « la plus grande subdivision de l’humanité à laquelle il peut s’identifier », représente donc un groupe plus étendu que la famille, la tribu, la ville de résidence, la région ou encore la nation.

    Le projet de Huntington est d’élaborer un nouveau modèle conceptuel pour décrire le fonctionnement des relations internationales après l’effondrement du bloc soviétique à la fin des années 1980. Toutefois, il ne prétend pas donner à son modèle une validité qui s’étend forcément au-delà de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle[3] et s’appuie sur une description géopolitique du monde fondée non plus sur des clivages idéologiques « politiques », mais sur des oppositions culturelles plus floues, qu’il appelle « civilisationnelles », dans lesquelles le substrat religieux tient une place centrale, et sur leurs relations souvent conflictuelles.

    Un monde multipolaire et multicivilisationnel

    La chute du mur de Berlin en 1989 annonce le passage d’un monde caractérisé par des clivages idéologiques, entre communisme et capitalisme, ou impérialisme et anti-impérialisme, à un monde marqué par des clivages culturels. « Pour la première fois dans l’histoire, la politique globale est à la fois multipolaire et multicivisationnelle. » À l’appui de sa thèse, Huntington montre que la chute des idéologies s’est accompagnée d’une résurgence des sentiments identitaires, que ce soit dans le monde musulman, avec le réveil de l’islam radical, qu’en Asie ou dans les pays d’Europe orientale (comme la Pologne par exemple), qui ont fait leur révolution au nom de leur nation et de leur culture.

    L’identité d’une nation est de moins en moins définie par son appartenance à une seule et unique nation. Nous sommes passés d’un monde bipolaire basé sur l’opposition entre le monde occidental, démocratique et plus riche, et le monde communiste, plus pauvre, à un monde multipolaire.

    Dans le monde multipolaire, les oppositions ne sont plus idéologiques, économiques et politiques, mais culturelles. Les civilisations, en cherchant à répondre à la question « qui sommes-nous ? », se définissent en termes de religion, de langue, d’histoire, de valeurs, d’habitudes et d’institutions. Si l’État-nation est toujours au centre de l’organisation du monde, les préférences culturelles se mêlent à la politique et des groupes culturels se forment aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale, modifiant considérablement la nature des relations internationales. Ainsi, on observe des guerres ethniques au Rwanda qui affectent l’Ouganda, la République démocratique du Congo et le Burundi mais pas au-delà, tandis que les conflits des Balkans viennent cristalliser des tensions entre Occident et Russie et pays de culture musulmane. Pour Huntington, qui cite Václav Havel, les conflits futurs seront de plus en plus d’ordre culturel et de moins en moins d’ordres idéologique et économique.

    Parce que les principes philosophiques, les valeurs fondamentales, les relations sociales, les coutumes et la façon de voir la vie en général diffèrent entre les civilisations, des conflits d’ordre culturel sont hautement probables. La réussite économique de l’Extrême-Orient prend sa source dans la culture asiatique, de même que son incapacité à se doter de systèmes politiques démocratiques stables. La culture musulmane explique pour une large part l’échec de la démocratie dans la majeure partie du monde musulman. Pour Huntington, il n’y a pas de civilisation universelle ; accepter cet état et identifier les différentes civilisations permet de comprendre les différences et atténuer les chocs. L’on se définit d’abord en définissant ce que l’on n’est pas.

    En résumé, le monde d’après la guerre froide comporte 9 grandes civilisations ; les affinités et les différences culturelles déterminent les rapports, les antagonismes et les associations entre les États-nations. Les pays les plus importants au monde sont issus de civilisations différentes, les conflits locaux qui ont le plus de chances de s’élargir ont lieu entre civilisations différentes. Les formes de développements économiques diffèrent pour chaque civilisation. L’Occident n’est plus le seul à être puissant : la politique internationale est devenue multipolaire et multicivilisationnelle.

    Après la guerre froide, le modèle bipolaire n’est plus pertinent pour expliquer la nature des relations internationales et d’autres modèles ont émergé. Le modèle le plus célèbre est celui de Francis Fukuyama qui a avancé la thèse de la fin de l’histoire. Fukuyama, en développe les thèses dans un livre controversé publié en 1992, La Fin de l’Histoire et le dernier homme, dans lequel il défend l’idée que la progression de l’histoire humaine, envisagée comme un combat entre des idéologies, touche à sa fin avec le consensus sur la démocratie libérale qui tendrait à se former après la fin de la Guerre froide. Mais pour Huntington si le monde est devenu différent après la chute du mur, il n’est pas devenu pacifique et l’harmonie n’est qu’une illusion déjà rencontrée à la fin de la Première Guerre mondiale avec le concept de « der des der » qui n’a pas empêché la montée du fascisme et des nationalismes ayant débouché sur la Seconde Guerre mondiale qui elle-même a engendré la guerre froide.

    Huntington rejette également la vision d’un monde résultant d’une dichotomie entre « eux et nous », entre les pays riches et les pays pauvres, les pays du nord et les pays du sud ou encore entre les possédants et les possédés. Cette vision dichotomique n’est pas pertinente car elle suppose une homogénéité des sociétés non-occidentales qui n’existe pas en réalité. Les sociétés japonaises, chinoises, hindouistes ou musulmanes sont beaucoup trop différentes pour être considérées comme une même entité. Cette dichotomie est donc un mythe. La théorie « réaliste » est également critiquée de même que la théorie du chaos international dont les livres Out Of Control de Zbigniew Brzezinski et Pandaemonium de Daniel Patrick Moynihan reflètent cette image. Pour lui une vision du monde à 9 civilisations permet de condenser ces 4 théories et d’en tirer les avantages sans en prendre les inconvénients.

    Huntington n’aborde pas encore le soutien de l’Occident aux formes de pouvoirs despotiques en raison de préoccupations d’ordre économique et géostratégique. Ainsi, il n’y a pas forcément d’Occident démocratique et d’ennemis de l’Occident non démocratiques. La situation économique d’un pays est influencée par la nature de sa culture. Les pays riches sont issus de la tradition chrétienne et les pays pauvres d’autres cultures. Cette théorie est partiellement remise en question par la crise financière actuelle notamment par les crises des dettes occidentales.

    Le deuxième temps de la « thèse du grand seigneur » d’Huntington consiste à avancer que ce réveil identitaire ne s’affirme plus par le biais des nations, comme au XIXe siècle et au XXe siècle, ni celui des ethnies, mais à l’échelle civilisationnelle, du fait de la mondialisation des échanges. Or, pour Huntington, les

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