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BUREAU DE RECHERCHES GEOLOGIQUES ET MINIERES

74, rue de la Fédération - 75 - Paris 15* Tel 783-94-00

DIRECTION DU SERVICE GÉOLOGIQUE NATIONAL

Boite postale 818 45 - Orléans-La Source Tél. 87-06-60 à 64

RESSOURCES EN EAU SOUTERRAINE

et

BILAN DES NAPPES

par

J. MARGAT

Département d'Hydrogéologie

45 - Orléans-La Source

BP. 818 - Tel 87-06-60 à 64

69 SGL 208 HYD JUILLET 1969


RESUME

L'exploitation de l'eau souterraine pose au-delà des problèmes

techniques ponctuels de son captage, la question de savoir de quelles quan¬

tités d'eau on peut disposer : la notion de ressources en eau souterraine

procède de cette préoccupation plus quantitative et plus globale. L'équilibre

qu'il est implicitement admis de rechercher entre les ressources et l'ex-^

ploi ta tion, par analogie avec la relation revenu/dépense, a conduit à le

rapprocher de celui réalisé dans le bilan d'eau d'une nappe. L'établissement

du bilan des nappes souterraines a pris une certaine importance en étant

considéré comme un moyen d'évaluation des ressources.

Confronter la notion de ressources en eau souterraine qui appelle

une clarification, avec la signification du bilan d'eau des nappes est l'ob¬

jet du présent exposé.

Réalisé dans le cadre des "Etudes générales d'hydrogéoloçfie" de

caractère méthodologique entreprises par le département d'hydrogéologie,

cet ouvrage dérive de plusieurs conférences faites sur ce sujet en 1968 et

1969 : au Seminario de hidrogeologia organisé par la F.A.O. à Madrid

(Mars 1968), à la Faculté des Sciences de Montpellier (Avril 1968), au

"Cours international d'hydrologie et d'aménagement des eaux" (Paris-Mars

1969), à l'Ecole nationale supérieure de géologie appliquée de Nancy, et

au "Curso de hidrología subterránea" à Barcelone (Juin 1969).


TABLE

Introduction

1 . RESSOURCES EN EAU SOUTERRAINE

1.1. Définition

1.2. Notions interférentes

1.2.1. Ressources et débit d'une nappe

1.2.2. Ressources et réserve

1.2.3. Capacité régulatrice

1.2.4. Renouvellement

1.2.5. Exploitation et surexploitation

1.2.6. Ressources et équilibre

1.3. Evaluation des ressources

1.3.1. Principes

1.3.2. Interaction ressources et besoins

1.3.3. Conditions de l'évaluation

1.3.4. "Organigramme" de l'évaluation

1.4. Ressources en eau selon les types de système aquifère

1.4.1. Notion de système aquifère

1.4.2. Nappes libres

1.4.3. Nappes captives

2. BILAN DES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE

2.1, Rappel de notions générales. Définitions et conditions de validité

2.1.1. Délimitation du domaine

2.1.2. Choix de la durée

2.1.3. Unité du bilan

2.2. Composition du bilan


2.3. Moyens d'évaluation indépendante des composants du bilan

2.3.1. Echanges avec les eaux de surface

2.3.2. Echanges avec la zone non saturée

2.3.3. Echanges avec les nappes limitrophes

2.3.4. Prélèvements et rejets

2.3.5. Différence de réserve

2.4. Approximation s

2.5. Possibilités pratiques d'établissement des bilans selon les types de nappes

2.5.1. Nappes libres

2.5.2. Nappes captives

2.6. Simulation du bilan

2.7. Portée et utilité du bilan

3. EXEMPLES DE BILANS DE NAPPES (tableau)

4. CONCLUSION
INTRODUCTION

Les préoccupations globales et quantitatives relatives aux eaux sou¬

terraines se sont progressivement développées et ajoutées aux points de vue

initialement surtout ponctuels et qualitatifs, sur deux plans : celui de leur ex¬

ploitation, sous la nécessité de satisfaire des demandes d'eau croissantes et

d'employer à bon escient des moyens d'action de plus en plus puissants, et

celui de leur étude. Ces deux démarches distinctes, pratique et scientifique,

ont naturellement interféré, conduisant en particulier à assimiler trop simplement

des objectifs et des notions qu'il convient de dissocier ; c'est ainsi que l'évalua¬

tion des ressources en eau souterraine et l'établissement des bilans des nappes

souterraines sont souvent confondus dans l'esprit des praticiens aussi bien que

des chercheurs. Un essai d'éclaircissement de ces notions, dont la signification

doit être bien comprise, et leur confrontation font l'objet principal de cet exposé.

Rappelons d'abord les deux cheminements indépendants qui ont conduit

aux notions de ressources en eau souterraine et de bilan de nappe.

1. Puiser et capter de l'eau souterraine est une pratique très ancienne, et au cours

des âges les procédés techniques mis en action à cette fin se sont perfectionnés

et diversifiés.

Il a été naturellement observé depuis longtemps que les possibilités

d'atteindre et d'exploiter de l'eau souterraine, de même que les débits que l'on

peut extraire sont extrêmement variés selon les points . Mais cette exploitation

de l'eau souterraine a été pendant longtemps, et est encore souvent aujourd'hui

considérée et traitée comme un problème ponctuel se résumant en une tactique

de captage. Le perfectionnement des techniques de captage a pris assez géné¬

ralement une avance sur le progrès des conceptions sur l'origine des eaux

prélevées et l'effet réel des captages, sur celui de la connaissance des lois

exactes qui régissent le mouvement des eaux souterraines.

Il est vrai que cet empirisme n'a pas entraîhé en général d'inconvénient

majeur dans le passé (il y a eu cependant des exceptions) : cela tint à ce que

les débits prélevés sont restés le plus souvent petits par rapport aux disponi¬

bilités naturelles et que l'exploitation est demeurée extensive, donc que


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les effets des captages ont été peu sensibles ; en outre, des contraintes écono¬

miques ont heureusement limité, dans la plupart des cas, les exploitations exces¬

sives que les moyens modernes rendent aujourd'hui techniquement possibles et

faciles.

Mais désormais l'accroissement très rapide des besoins et des consom¬

mations d'eau entraînés par de nombreuses et diverses activités humaines, aussi

bien que les progrès récents des méthodes de recherche et des techniques d'action

appelés et soutenus par cette demande, en développant des exploitations intensives,

concourent à élever du niveau ponctuel au niveau global les problèmes à résoudre

pour satisfaire ces besoins en eau : de l'objectif qualitatif de la recherche de

l'eau ("où et comment trouver de l'eau ?") et de l'objectif quantitatif ponctuel des

techniques de captage (productivité), on passe à l'objectif quantitatif global de

l'évaluation des ressources en eau souterraine ("de quelle quantité d'eau peut-on

disposer et pendant combien de temps ?").

La notion de ressources née de la prise de conscience que des limites

s'imposent aux possibilités d'exploitation globales d'une nappe , a été liée d'a¬

bord au souci de ne pas "dépenser plus que son revenu", ce qui a donc conduit

naturellement à fixer comme objectif majeur aux études hydrogéologiques de compta¬

biliser les disponibilités en eau .

Les progrès de l'hydrologie, comme celui de toutes les sciences physiques et

naturelles, se sont largement fondés sur les efforts faits pour passer de la des¬

cription "naturaliste" aux mesures, c'est-à-dire sur ce plan scientifique comme

sur le plan pratique précédent, à passer du qualitatif au quantitatif.

C'est ainsi que dans le schéma classique, mais progressivement compli¬

qué du "cycle de l'eau", on s'est efforcé d'introduire des valeurs numériques. Ce

cycle est complexe, et ses "étapes" successives sont inégalement saisissables ;

de plus, son étude appelle des méthodes de recherche appartenant à des disci¬

plines scientifiques différentes (souvent d'ailleurs insuffisamment liées entre

elles), aussi chaque partie est-elle considérée séparément.


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Mais dès que l'on isole une partie du cycle de l'eau de l'ensemble, on

lui définit nécessairement une "entrée" (un amont) et une "sortie" (un aval) dont

la confrontation constitue un bilan d'eau . L'hydrogéologue, pour sa part, s'est

ainsi naturellement préoccupé du bilan des nappes souterraines en s'efforçant

de déterminer par diverses méthodes indépendantes, les quantités d'eau entrant

et sortant aux limites d'un réservoir aquifère défini, et de parvenir ainsi à une

évaluation indirecte -quand elle n'est pas possible directement- de l'alimenta¬

tion des nappes souterraines ou d'une autre inconnue.

Le bilan d'eau global (ensemble des eaux de surface et souterraines)

d'un bassin s'est cependant avéré généralement plus commode à établir que le

bilan d'eau particulier d'un réservoir aquifère, dont l'équation comporte souvent

plusieurs inconnues empêchant d'en tirer par différence une valeur significative.

Dans tous les cas -il convient de le souligner dès le début- les bilans d'eau ont

été établis dans un esprit déterministe. Ils constituent des schémas quantitatifs

de description des échanges d'eau entre le domaine considéré et l'extérieur,

plutôt qu'un instrument de prévision dès lors que des composants non négligeables

ont un caractère aléatoire, ce qui appellerait des modèles proba bilis te s.

Le souci commun des praticiens et des chercheurs, d'ailleurs souvent

confondus, de "chiffrer", a tout naturellement conduit à assimiler les objectifs

des deux démarches précédentes. L'égalité nécessairement comprise dans la no¬

tion du bilan d'eau (qui s'écrit comme une équation) a été confondue avec l'équi¬

libre "budgétaire" implicitement admis par la notion de ressources, que l'exploi¬

tation ne pourrait dépasser sans se transformer en "surexploitation".

On tend ainsi couramment à assimiler les ressources ou disponibilités

en eau souterraine à l'alimentation des nappes, et on voit dans l'établissement

du bilan le moyen d'évaluer cette alimentation, donc les ressources elles-

mêmes .

Etablir un bilan d'eau est de ce fait considéré trop souvent maintenant

comme un objectif essentiel de toute étude hydrogéologique quels qu'en soient

les buts pratiques et la durée. L'hydrogéologue se trouve par suite dans l'obli¬

gation de choisir entre un souci de rigueur scientifique amenant à constater


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souvent une impossibilité d'établir un bilan significatif -et partant à ne pouvoir

fournir de réponse- et celui d'avancer des valeurs numériques frappées d'appro¬

ximations risquant d'être insuffisamment perçues par l'utilisateur auquel les

résultats sont livrés , d'où un danger de conclusions mal fondées sur le plan

pratique .

En fait il est moins important de perfectionner les moyens de dresser

les bilans que de mieux considérer leur utilité, donc leur place comme objectif

d'étude : cette place est à restreindre dans beaucoup de cas. Il faut dissocier

la notion de ressources en eau souterraine de celle d'alimentation des nappes,

donc de ne pas subordonner son évaluation à l'établissement du bilan. Les

ressources en eau souterraine doivent moins faire l'objet d'une connaissance

absolue que d'un choix opérationnel . Les définir c'est décider "jusqu'où il ne

faut pas aller trop loin" dans l'exploitation d'un réservoir. Cette question ne

se réduit pas simplement à celle de connaître l'alimentation d'une nappe.

L'objectif principal de l'exposé qui suit sera de le montrer.


- 5 -

1. RESSOURCES EN EAU SOUTERRAINE

Un aquifère souterrain est à la fois un système conducteur et un réservoir:

il diffère essentiellement en cela d'un système de cours d'eau de surface, dans

lequel la fonction conductrice assurée par le réseau hydrographique est relati¬

vement distincte de la fonction de stockage assurée par divers réservoirs de

surface naturels (lacs, glaciers) ou artificiels, et par les aquifères souterrains

eux-mêmes.

Rappelons que cette dualité de fonctions d'un aquifère (1) qui s'exprime

par les deux paramètres fondamentaux "transmissivité" T et "emmagasinement"

S, a pour conséquence une double propriété : un aquifère est à la fois conducteur

d'eau (selon T) et conducteur d'influence (selon T/S). La distinction claire de

ces deux phénomènes est au centre des conceptions de l'hydrogéologie moderne

et c'est sur elle que doit être fondée toute considération sur les ressources en

eau souterraine.

L'opposition rappelée ci-dessus entre les systèmes aquifères souterrains

et les systèmes de cours d'eau de surface, a naturellement imposé des modalités

pratiques de l'exploitation des eaux différentes dans les deux cas. Et celles-ci

ont conduit à des conceptions distinctes et souvent indépendantes des ressources

en eau, mises parfois en compétition ou crues additionnables. Cette manière de

voir ne peut plus être retenue dès que les prélèvements d'eau souterraine ne sont

plus négligeables au regard des débits naturels. Les ressources en eau souter¬

raine appellent une définition relative, comprise dans celle des ressources en

eau globales .

1.1. Définition

On doit entendre par ressources en eau souterraine : la quantité

d'eau maximale prélevable dans un réservoir aquifère délimité pendant une

durée définie, dans des conditions techniques et économiques acceptables

(1) Ces deux fonctions ne sont toutefois entièrement confondues que dans un aquifère
parfaitement homogène. Dans les conditions réelles un aquifère comporte souvent

des couches privilégiées plus transmissives qui accaparent la fonction de conducteur

pour l'ensemble, tandis que les autres parties de l'aquifère assurent surtout la fonc¬

tion de réservoir.
- 6 -

(pour le lieu et le moment), en n'entraînant sur les débits d'émergence naturelle

du système aquifère que des répercussions jugées admissibles, y compris au-

delà de la période envisagée, et compte tenu des restitutions possibles.

Commentaires

1.1.1. Relativités de la notion

Les ressources sont relatives au temps : leur évaluation doit se

référer à une durée définie.

Elles sont relatives aussi à la notion complémentaire de "res¬

sources en eau de surface" : l'interdépendance entre les eaux de surface

et les eaux souterraines empêche de définir et d'évaluer séparément deux

ressources en eau distinctes ; elle conduit plutôt à choisir entre diverses

répartitions possibles (compte tenu des réutilisations partielles de l'eau).

Ceci étant dit, d'un point de vue strictement quantitatif, on ne

perdra pas de vue pour autant les grandes différences de qualité qui sépa¬

rent généralement les eaux de surface des eaux souterraines et valorisent

ces dernières pour tous les usages nobles. Les critères de quantité et de

qualité ne peuvent pas être séparés et leur prise en considération combinée

peut largement infléchir le choix en conduisant à accroître la proportion

d'eau, dans un domaine donné, à prélever dans les réservoirs aquifères

avant qu'elle ne s'écoule dans les rivières.

Il faut bien noter aussi que l'eau souterraine exploitée "pour la

première fois" n'est généralement pas consommée entièrement et que les resti¬

tutions se font le plus souvent au profit des eaux de surface. Des recycla¬

ges et des réutilisations diverses sont possibles, de sorte qu'une certaine

fraction des "ressources en eau souterraines" peut être additionnée aux

"ressources en eau de surface", du point de vue quantitatif.

1.1.2. Caractère conventionnel

Notion liée à diverses contraintes (physiques, technologiques,

économiques). En particulier les ressources ne peuvent être définies de

manière indépendante des besoins (en qualité, en localisation, en distri-


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bution dans le temps), car les modalités d'exploitation commandées par

l'utilisation déterminent les effets aux limites.

1.1.3. Caractère prévisionnel

Nécessitée pour la programmation de l'exploitation donc pour dresser

des projets, la définition des ressources est liée à la prévision des effets

aux limites -sur les débits naturels- de captages projetés. Mais cette pré¬

vision ne peut être exclusivement déterministe puisque l'évolution des condi¬

tions aux limites à influencer est sous la dépendance de phénomènes en

partie aléatoires. Cette prévision doit donc prendre aussi un caractère proba-

biliste analogue aux prévisions d'utilisation d'eaux de surface basées sur

différentes garanties de fréquence de débit.

1.1.4. Caractère global

Ne pas confondre ressources et productivité ("débit d'un puits") : la pro¬

ductivité d'un aquifère dépend de ses caractéristiques physiques (paramètres

T, S) et commande le rendement initial d'un ouvrage de captage ponctuel ;

c'est l'une des contraintes intervenant dans la définition des ressources, mais

celles-ci n'ont pas un caractère ponctuel mais global.

1.2. Notions interférentes

La définition des "ressources en eau souterraines" a été souvent compliquée

ou déviée sous l'influence de diverses notions courantes plus ou moins réalistes,

dont les relations sont parfois entachées de confusion. Aussi a-t'il paru utile de

tenter un effort de clarification en vue de mieux situer la notion de ressources

par rapport à celles de débit de nappe, de réserve, de capacité régulatrice, de

renouvellement, et d'équilibre d'exploitation.

1.2,1, Ressources et débit d'une nappe

La notion de débit d'une nappe ne doit pas être confondue, comme elle

r a été et l'est encore souvent dans l'esprit du public, avec celle de débit

de production ponctuel, réel ou possible, d'un captage : en toute rigueur


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elle ne peut s'appliquer qu'à un écoulement naturel, normal à une section

aquifère déterminée, à un moment donné. Ce débit se définit normalement en

régime permanent par le produit T x 1 x i (T étant la transmissivité moyenne,

1 la longueur de la section, et i le gradient moyen).

Plus généralement, on peut aussi dénommer débit global d'une nappe

la somme des quantités d'eau sortant du réservoir, exprimées en débit moyen

pour la période de référence :il équivaut au terme "émissions d'eau" du bilan

(c'est le "débit" au sens comptable opposé à "crédit").

En l'absence d'exploitation, ce débit est égal à long terme à l'alimenta¬

tion naturelle de la nappe.

Mais un débit moyen ne peut suffir à caractériser les écoulements sor¬

tants d'un réservoir aquifère qui, s'ils sont certes moins irréguliers que le

débit d'un cours d'eau de surface en raison de la grande inertie de la plupart

des nappes souterraines, n'en sont pas moins variables. Aussi la connaissance

du débit moyen doit être complétée par des estimations de variance et de fré¬

quence des divers débits définissant des "risques de défaillance" d'après l'ana¬

lyse statistique des historiques dont on dispose (ce qui est facilité lorsqu'il

s'agit de sources).

On considérera les débits moyens de séries de jours consécutifs plus

longues que dans le cas des eaux de surface (au moins 30 jours), ayant diverses

probabilités de survenir (par exemple d'être dépassé pendant 90 % ou 95 % du

temps) .

Les ressources en eau offertes par une nappe souterraine délimitée étant

une quantité d'eau disponible pendant un temps fixé, elles s'expriment aussi

naturellement comme un débit , mais elles ne sauraient être assimilées au

débit naturel d'une nappe défini plus haut. Telle qu'on a définit les ressources,

on doit poser :

ressources ^^ débit global de la nappe


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En général, dans le cas des nappes libres, les ressources sont une

fraction du débit moyen global de la nappe, rarement supérieure à 1/3 en prati¬

que. Les ressources peuvent cependant être très supérieures au débit naturel si

le captage a un effet de réalimentation, où s'il n'y a pas lieu de rechercher un

équilibre et qu'un épuisement de réserve est admissible. Les ressources ne

doivent pas être assimilées au "revenu en eau" naturel de la nappe.

1.2.2, Ressources et réserve

La réserve est le volume d'eau (libérable) contenu dans un réservoir aqui¬

fère à un instant donné. Sa variation est liée à celles de l'ensemble des niveaux

piézométriques dans le réservoir,

La réserve a la fonction régulatrice d'un volant permettant la transforma¬

tion des débits discontinus et irréguliers d'apport naturel en débit continu et

plus régulier d'écoulement aux émergences naturelles. Toute la réserve est régu¬

latrice et non seulement sa fraction non permanente (la différence de réserve

entre les états de hautes et basses eaux) dénommée parfois "réserve régulatrice"

(1) et assimilée parfois à tort au volume (moyen) débité par la nappe entre les

dates de ces deux états. (C'est seulement dans le cas-limite d'un régime de vi¬

dange non influencé que le volume débité serait égal à la diminution de réserve.

Les notions de réserve variable et de réserve permanente sont pafois

présentées d'une manière qui les fait concevoir comme s'il s'agissait de deux

réservoirs distincts superposés, l'inférieur étant toujours plein et passif, et le

supérieur seul actif, étant le siège principal des échanges d'eau et du renouvel¬

lement. Ce qui conduit à rapprocher trop simplement la variation de réserve du

débit d'une nappe. Mais cett^'image physique" est erronée : la surface piézo¬

métrique correspondant aux bas-niveaux ne sépare absolument pas deux parties

différentes d'une même nappe et on sait que la totalité de l'eau est en mouvement

avec des vitesses certes différentes, dans un réservoir aquifère.

(1) Cette partie variable de la réserve est aussi dénommée "ressources régulatrices"

par les auteurs soviétiques (PLOTNIKOV, 1946, 1962) qui parlent de "volumes de

ressources régulatrices". Mais le terme de ressources est impropre ici à notre sens

pour désigner des volumes, et il crée la confusion.


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La réserve non jjermanente ne doit être comprise que dans le sens d'une

proportion. La réserve intervient dans la définition des ressources par la possi¬

bilité qu'elle offre d'amplifier plus ou moins sa fonction de. stockage entre les

irrégularités d'apports naturels et le régime des sorties d'eau modifié par les

captages dans le sens d'une régularité plus grande ou non. Il Importe donc de

connaître non seulement le volume de la fraction non i)ermanente(pour une période

donnée) de la réserve (A Vj. du bilan) mais plutôt la variabilité de la réserve

totale (fig . 1 ) .

r max . , à^r
^ ou encore 1 -t- -r; 7
V^ min Vj- min

Entre ces valeurs extrêmes de la réserve peuvent se situer une réserve

moyenne (Vj-j^j = ^ 5 ) ou médiane et différents états de réserve

selon des fréquences,, sl l'on dispose de séries d'observation assez longues.

Toujours rapportée à la même période, la réserve peut aussi fournir en

elle-même des ressources limitées dans le temps en régime d'épuisement, lorsque

cela est jugé possible : c'est le cas général des exploitations de nappes captives.

itn^a

Fig.l. Variation de la réserve. (période ti.tg )


Ae est la réserve non permanente ( Vt max -Ve min)
pour cette période.

1.2.3. Capacité régulatrice

La possibilité d'amplifier artificiellement la variabilité de la réserve

-dans une mesure qui dépend de son volume moyen absolu- peut être dénommée
- 11 -

capacité régulatrice (1) . Il faut l'entendre moins comme une capacité de régu¬

lariser davantage la somme des débits sortants d'une nappe (naturels et

captés) , que comme une possibilité offerte dans une mesure plus où moins

grande, de régler les variations du débit capté sur celles- de la demande en

déterminant sur les limites d'émergences soit un effet permanent, soit un effet

modulé voulu.

Il faut pour cela que la variabilité de la réserve (ou la "réserve non

permanente) soit assez petite par rapport à la "réserve permanente" : le rap¬

port A r/Vj- min pourrait, d'une certaine manière, exprimer la "capacité

régulatrice" ifig. 2) . En pratique la fraction effectivement utilisable d'une

réserve de nappe libre peut difficilement dépasser 1/3 de son volume total.

Cette fraction est négligeable dans le cas d'une nappe captive.

@ ®

Fig. 2. Variabilité de la réserve totale Vt.:

un rapport de la réserve non permanente At â la réserve permanente Vimin


assez petit (1/5 en @ ) indique une capacité régulatrice plus grande
qu'un rapport plus grand (4/3 en (g) )

(1) Cette expression a aussi été employée pour traduire une notion différente définie

par les auteurs soviétiques (PLOTNIKOV 1946) le débit moyen fictif correspondant

à l'écoulement du volume de la réserve non permanente. Par exemple, pour A r

annuel de 100 10^ m3, cette "capacité régulatrice" serait de c¿ 3 m3/s . Mais
cette notion de débit constant régularisé théorique ne peut servir de base réaliste

pour définir les ressources, et elle introduit une confusion avec la régularisation

du débit d'écoulement total de la nappe.


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Mais cela dépend aussi et surtout des dimensions et des paramètres de l'aqui¬

fère qui permettent une implantation plus ou moins facile des captages dont on

escompte l'effet "régulateur".

On notera bien que ces conceptions ne s'appliquent que dans la

perspective d'une exploitation en équilibre, dans laquelle les variations de

réserve, tout en s 'amplifiant, restent compensées à long terme.

1.2.4. Renouvellement

La confrontation entre le volume d'eau (Vq) reçu -et débité-

par une nappe, et le volume moyen (Vrjj^) de la réserve pendant une période

donnée (série pluri-annuelle par exemple exprimable en année moyenne) abou¬

tit à la notion de renouvellement de la réserve qui équivaut au rapport entre le

"budget" et la" trésorerie" .

Le rapport Vq/Vr est le taux de renouvellement (moyen annuel)

tandis que le rapport inverse Vr /Vq qui peut s'exprimer en années, est la durée

de renouvellement .

Le renouvellement peut exprimer aussi, d'une certaine façon, la

capacité d'une nappe à admettre plus ou moins un régime d'exploitation indépen¬

dant de celui des apports, donc plus ou moins adaptable à celui des besoins.

En général, il suffit que le taux de renouvellement annuel moyen soit

de quelques dixièmes (de 0,1 à 0,5) pour que la capacité régulatrice de la nappe

soit suffisante. Des taux plus petits n'améliorent pas en pratique cette capacité;

par contre des taux plus grands (de 0,5 à 1 ou >1) indiquent une mauvaise capa¬

cité régulatrice. Ce taux de renouvellement ne doit pas être confondu avec la

"capacité régulatrice" exprimée par le rapport A r/Vr^j^j^^^ qui n'introduit aucun

débit. La variabilité de la réserve d'une nappe est indépendante de son débit

moyen global.

On soulignera bien que le taux de renouvellement de même que le

rapport /\r/Vr. ne sont pas des paramètres physiques servant à des calculs,

mais seulement des index commodes de classement des nappes. En particulier

on ne devra pas perdre de vue que le taux de renouvellement n'est qu'une compa-
- 13 -

raison de volumes ne préjugeant en rien de la manière dont l'eau du réservoir

se renouvelle effectivement. Par exemple, un taux de renouvellement de 0,1

exprime le fait qu'en 10 ans un volume d'eau égal à celui de la réserve a

transité dans le réservoir, mais cela.n'a pas la signification physique que

toute l'eau du réservoir aurait été remplacée dix fois. On ne peut donc tirer de

la notion de renouvellement aucune donnée sur les vitesses d'écoulement réelles

d'une nappe (1). A l'inverse. des données sur les vitesses acquises indépendam¬

ment (par exemple par traçage ou datation, lorsque des trajectoires d'écoule¬

ment sont connues) ne peuvent être converties en indications sur le renouvelle¬

ment. L'intérêt pratique de la notion de renouvellement pour l'évaluation des

"ressources en eau souterraine" est donc assez limité, bien qu'il ait parfois été

mis en avant, notamment par les opérateurs de méthodes basées sur des analy¬

ses "isotopiques", c'est-à-dire sur des traçages naturels.

1.2.5. Exploitation et surexploitation.

Exploiter une nappe consiste à surimposer au régime naturel une

"sortie d'eau" supplémentaire plus ou moins variable sur commande. en inte¬

raction plus ou moins différée ou étalée sur le régime naturel. Toute exploita¬

tion d'eau souterraine a un effet à la fois sur le débit et sur la réserve : c'est

en même temps un captage (c'est-à-dire un détournemen-^et un prélèvement

(une extraction ) . Toute action sur les niveaux (rabattement) donc sur la réserve,

a une répercussion plus ou moins différée sur les débits naturels (entrant ou

sortant) aux limites. Inversement aucun effet sur les débits n'est possible sans

intervention sur les niveaux. L'exploitation d'une nappe souterraine diffère en

cela de celle d'un réservoir d'accumulation de surface, où les débits dérivés

n'on aucune action sur les débits entrant naturels, et où les débits sortant

peuvent être commandés indépendamment de l'état de la réserve (au moins

temporairement) .

(1) Ce ne serait théoriquement possible que pour une nappe idéale en milieu parfaite¬

ment homogène, en régime permanent, au débit rigoureusement conservé entre uiî-e

limite d'alimentation et une limite d'émergence, ce qui élimine les nappes libres

et la plupart des nappes captives.


- 14 -

Cas-limites :

- captaqe d'un débit permanent très près d'une limite d'émergence (source)

ou d'alimentation avec rabattement faible stabilisé. Action sur la réserve

négligeable .

- épuisement de la réserve d'une nappe sans action notable sur la limite.

Exemples : Réservoir karstique en période d'arrêt d'écoulement aux émergen¬

ces temporaires, nappes captives sans drainance.

L'opposition entre exploitation et surexploitation a donc un caractère

relatif : la surexploitation est une notion relative au temps, traduisant tou¬

jours une diminution de réserve au cours de la période considérée (cf. fig.

3 et 4). Elle ne consiste pas dans l'inégalité :

débit capté ^ débit d'alimentation naturelle de la nappe

mais dans lïnégalité :

r diminution du débit sortant ) ,, .r ^


j'U'4. *.-^ l sous l'effet
deb.it capte S-' ou ^
\ 4. 4.' J j'1-4. Jl X Í des captages
jaugmentation du debit d apport

1.2.6. Ressources et équilibre

Les ressources sont souvent considérées comme le débit-limite global

à fixer aux captages, à ne pas dépasser sans provoquer un "déséquilibre"

du compte "recettes - dépenses" c'est-à-dire une diminution des réserves à

long terme par surexploitation. Le maintien de cet équilibre suppose le respect

(à terme plus ou moins long) de l'égalité :

débit capté = diminution des débits sortant naturels

ou encore le "suréquilibre" réalisé par l'égalité

débit capté = augmentation des débits d'apport

les deux effets de rééquilibre ne s'excluant d'ailleurs pas.


14 a

Fig.3a- Evolution delà surface

piézométrique de la nappe de la
San Joaquin Valley(CalifDrnle,LlSA)

(d'après Poland et Davis, 1956,


cité par Todd in VEN TE CHOW, 1964
'Handix>okot applied hydrologyT)

Fig -3 b. Evolution du niveau

piézométrique delà nappe


de la craie à Esquerchin( Nord)

(archives B.R.G.M.)

Fig. 3c- Evolution des niveaux observés


en quelques puits du Souss ( Maroc):

baisse pluriannuelle.

(d'après R.Diion,1968) )

S 0nn*

Fig-3. Exemples de diminution des réserves de nappes libres sous l'effet de surexploitation
14 b

Fíg_4a» Evolutions de niveaux piézométriques d'une nappe


captive degrés cambro. ordovicien exploitée dans la
région de CHICAGO (U. S. A) (d'après WALTON. 1964)

Rg.4b. Evolutions de niveaux piézométriques

d'une nappe captive exploitée dans des


sables éocènes au Texas (U.S.A)
(d'après SCALAPIN0.1963)

ltST'39 '39 '40 '4f '4t '4S '44 '4S V< ^4/ U» '4t ' 60 'SI

^ Fig.4c- Evolutions du niveau piézométrique


rabattu delà nappe captive des sables

albiens dans la région parisienne, exploitée


- o débit variable depuis 1840_

(dbprèsCI. SARROCCHIel H.LEVY.LAMBERT.1966)

Rg-4.d.Evolution du niveau piézométrique rabattu


/l/iifO¥ ¡niflm/

d'une nappe captive exploitée en Ukralne( Jurassique),


selon des débits croissants.
( d'après PLOTNIKOV, 1946)

-1 I I I I r
tf/t/M^

5 225 S

Fig. 4- Exemples de déclins de pression observés dans des nappes captives exploitées
- 15 -

Mais les ressources ne sont pas nécessairement toujours subordonnées

au maintien de cet équilibre ; aussi son évaluation impose d'abord un choix

entre la sauvegarde de l'équilibre (c'est-à-dire la conservation de la réserve)

à long terme ou non. Autrement dit la surexploitation n'est pas systématique¬

ment à exclure.

Dans le cas du régime d'équilibre les ressources dépendent en pratique

de la mesure dans laquelle il est physiquement possible de diminuer les

émissions d'eau naturelles du système, ou plus rarement d'accroître son

alimentation, et aussi de la mesure dans laquelle on admet que l'influence sur

les modes d'exploitation préexistants ne porte pas de préjudice.

Dans le cas d'un régime non équilibré les ressources dépendent du temps

et de la réserve : elles peuvent être alors bien supérieures aux modifications

des débits aux limites que l'exploitation peut déterminer.. Cette"surexploitation"

est normale et inévitable dans le cas général de l'exploitation des nappes

captives.

On notera encore que la transition entre un régime naturel (exploitation

d'eau souterraine nulle ou négligeable) et un régime d'exploitation équilibré

dans le sens défini plus haut, se fait nécessairement en régime déséquilibré

temporaire : la superposition des captages, aux conditions d'émergence natu¬

relle initiales d'une nappe détermine en général un abaissement définitif des

niveaux sur une aire plus ou moins étendue, donc une certaine diminution dé¬

finitive de réserve, équivalant à une surexploitation temporaire. Il peut être

difficile de distinguer l'évolution transitoire observable pendant une telle

période tendant vers un rééquilibre, de l'évolution transitoire, indiquant une

surexploitation définitive conduisant à un épuisement de réserve.

1.3. Evaluation des ressources

1.3,1, Principes

Evaluer les "ressources en eau souterraine", c'est répondre à une deman¬

de qui procède d'une double préoccupation et peut se formuler par deux

questions :
- 16 -

- le souci de conservation demande de fixer un maximum au débit total

(moyen annuel) des captages à pratiquer ou à autoriser (sans faire appel

à une réalimentation artificielle). C'est le souci de savoir "jusqu'où il

ne faut pas aller trop loin" sous peine de' surexploitation", à terme pluri¬

annuel

- le souci -d'optimisation de l'utilisation d'un réservoir aquifère, demande

de définir le régime et les dispositifs de captage les mieux propres à ré¬

gler l'exploitation d'eau souterraine pour satisfaire une demande d'eau

variable et dispersée, compte tenu de la "capacité régulatrice" du réser¬

voir.

Evaluer les"ressources en eau souterraine" dans un domaine défini

revient donc à faire un choix. C'est choisir à la fois :

a) la limite supérieure de la fraction de l'écoulement souterrain total moyen

qu'il est préférable d'exploiter par captage dans le réservoir, avec des

avantages techniques et économiques, sans risque de surexploitation

relative au cas considéré ni de préjudice (y compris sur des domaines

limitrophes et sur les cours d'eau de surface, compte tenu des restitutions

possibles). Cette limite s'exprime par un débit global moyen .

b) un programme optimal d'exploitation, compte tenu de la répartition spatiale

et de la distribution dans le temps des besoins réels ou potentiels, qui

peut être elle-même en partie aléatoire.

Ces deux objectifs ne sont naturellement pas indépendants.

1.3.2. Interaction ressources et besoins

L'évaluation des "ressources" telle qu'on vient de la définir, ne peut

être conduite de la même manière, selon que les contraintes créés par les

besoins sont prédéterminées et plus ou moins fixes et rigides ou bien qu'elles

ont un caractère potentiel et peuvent se plier à une "offre". Si le dispositif

et le régime des exploitations sont commandés par une utilisation préexistante

l'évaluation de la ressource se ramène à déterminer les limitations qu'il faut

imposera la croissance des exploitations.


- 17 -

Le souci de conservation l'emporte :

- conservation des productivités unitaires des captages qu'il faut protéger

contre des risques d'influences réciproques pouvant abaisser les rendements

au-dessous d'un "seuil de rentabilité".

- conservation des niveaux piézométriques en certains secteurs d'une nappe,

ou conservation de débits minimaux aux limites (étiages de sources ou de

cours d'eau par exemple).

Dans les deux cas cette conservation doit néanmoins tolérer un certain

risque de défaillance à choisir.

Si par contre la demande est encore potentielle, elle peut dans une cer¬

taine mesure être orientée et adaptée à r"offre" que constitue un projet d'ex¬

ploitation réglée pour optimiser les effets aux limites. Le souci de rationaliser

et planifier l'exploitation prédomine alors. Entre le cas-limite de l'exploitation

en régime quasi permanent, sans variation de réserve, équilibrée par effet

(positif) sur une limite d'alimentation ou (négatif) sur une ligne d'émergence, et

celui de l'exploitation en régime transitoire pur, non équilibré à long terme,

par épuisement progressif de réserve (exploitation " minière" de l'eau souter¬

raine), se placent de nombreux cas intermédiaires : exploitation en régime

transitoire, à débit constant ou variable, mais aux variations de réserve compen¬

sées à moyen ou long terme : captage à débit constant d'une nappe à alimenta¬

tion variable, captage à débit variable ou discontinu d'une nappe à alimentation

plus régulière ou combinaison des deux cas.

1.3.3. Conditions de l'évaluation

Pour opérer les choix définis plus haut (1.3.1.) deux conditions doivent

être remplies :

1.3.3.1, Il faut savoir et pouvoir déterminer les effets probables de différents

programmes d'exploitation sur les limites du système aquifère considéré

cela implique :

- une connaissance suffisante des caractéristiques et des conditions


- 18 -

aux limites de ce système, notamment de leur évolution naturelle.

- des calculs basés sur le principe de la superposabilité des effets des

captages sur l'évolution naturelle.

Les méthodes de simulation (modèles analogiques ou mathémati¬

ques) peuvent contribuer efficacement à cette recherche d'optimisation, en

facilitant la comparaison d'un assez grand nombre de projets de programme

d'exploitation.

1.3.3.2. Il faut connaître -ou décider conventionnellement- quel est le "seuil pré¬

judiciable- que l'on impose aux effets des captages admissibles, princi¬

palement sur les cours d'eau de surface dans le domaine considéré et à ses

limites. Ce seuil peut dépendre de différentes contraintes extérieures,

c'est à dire que le choix précédent ne peut s'opérer indépendamment d'une

politique d'ensemble d'utilisation des ressources en eau globale, qui peut

comprendre notamment une conservation plus ou moins complète des débits

d'étiage des cours d'eau. Les données économiques intervenant dans les

coûts comparés de différentes solutions pour satisfaire une demande d'eau

sont également des facteurs à considérer. Autrement dit, un "modèle

économique" de gestion, rustique ou raffiné est à élaborer.

En dernière analyse, l'évaluation des ressources se confond

avec une stratégie de l'exploitation, dans laquelle les captages"d'eau

souterraine" ne peuvent être considérés indépendamment de l'utilisation

des "eaux de surface", et qui suppose une possibilité de prévision pro-

babiliste du régime naturel de la nappe à exploiter.

1 .3. 4. "Organigramme" de l'évaluation.

L'enchaînement des opérations successives aboutissant à l'évaluation

des "ressources en eau souterraine" est représ enté par le tableau schématique

ci-contre.
- 19 -

Les points de départ indépendants sont :

a - les observations hydrogéologiques, y compris les données sur les paramètres

de l'aquifère et les observations piézométriques réparties dans l'espace et le

temps.

b - les données hydrométriques et leur analyse statistique.

c - les schémas de système aquifère que l'on sait traiter actuellement.

d - l'état actuel des utilisations d'eau de surface et les projets d'utilisation

supplémentaire, incluant une définition conventionnelle d'étiage à conserver

(durée et débit) .

e - l'état actuel des exploitations d'eau souterraine et les besoins contribuant

à définir des programmes d'exploitation d'eau souterraine future.

1.4. Ressources en eau selon les types de système aquifère

Dans cette recherche du meilleur programme d'exploitation à laquelle se

ramène l'évaluation des ressources, la base de départ essentielle est une défini¬

tion correcte du type de système aquifère auquel on a affaire, c'est-à-dire des

conditions hydrogéologiques .

Selon ces conditions, les conceptions que l'on pourra avoir des "ressources

en eau souterraine" seront nécessairement très différentes. Il convient de distin¬

guer principalement les systèmes aquifères à :

- nappes libres :

- nappes libres (alluviales surtout) très liées aux rivières (à faible capacité

régulatrice)

- nappes libres étendues, drainées principalement par les cours d'eau, à capa¬

cité régulatrice satisfaisante

- eaux des réservoirs karstiques à émergences parfois temporaires et à capacité

régulatrice souvent réduite

- nappes libres sans drainage appréciable par des cours d'eau, à aire d'évapo-

ration, en zone aride

- nappes captives.
Organlnramme d'éTaluation des resaources en eau souterraine

Utilisation ProductiTitë ETUDE HYDROGEOLOGIQUE Hydromètrie Utilisation actuelle


actuelle d' eau des captages ou projetée
Mesure des paramètres
souterraine des eaux de surface.
de l'aquifère
Observations piézomël
(espace et tempe
Hydrodynamique

souterraine.

I ï
Projets Schémas de Définition
de programóles systèmes aquifères du système
d 'exploitation pouvant être traités aquifère
(dispositif et régime) (y compris par simulation) Conditions (et régi
aux limites

Restitution
possible aux
Système aquifère
cours d'eau
simplifié.
(ou modèle)

Imposition des

ef fets,notamment

aux limites

Confrontation

Détermination
d' influences

probables

Choix

d'un programme d'exploitation


optimal

=:ressource<en eau

souterraine

1. Âsaiistoir» d»pr4'f4rtn<M par tuploiiation d'eau 6out»rraina

t. £n moyenne et selon direr3os friijuenees - O

3. Compte-tenu d'i/n risaved» dèlal/Jance admis


- 21 -

1.4.1. Notion de système aquifère

La définition donnée initialement (supra 1.1.) des ressources en

eau souterraine s'est référée à la notion de système aquifère : on doit

entendre par là le domaine constituant le cadre logique de l'évaluation

de la ressource, basée sur l'appréciation et la prévision des influences

acceptables.

En hydrogéologie, deux sortes de domaines peuvent être considérées

et doivent être distinguées : le bassin hydrogéologique et le système aqui-

fère, aussi doit-on rappeler leurs définitions.

1.4.1.1. Bassin hydrogéologique et système aquifère

Le bassin hydrogéologique (1) est le domaine dans lequel

l'ensemble des écoulements souterrains aboutit à une émergence

(ou à un ensemble d'émergences) définis.

C'est l'extension au milieu souterrain de la notion de

bassin-versant. Il est, comme ce dernier, délimité par une ligne

de partage qu'aucun débit ne traverse : une ligne de partage des

eaux souterraines.

Son type le plus simple est le "bassin d'alimentation

d'une source" .

Le système aquifère (2) est le domaine dans lequel on

peut considérer que les mouvements d'eau sont indépendants

des conditions régnantes à l'extérieur. En d'autres termes, c'est

le domaine dans lequel tout captaqe en un point quelconque peut

avoir une influence sur l'ensemble, mais n'en aura pas au-delà

de ses limites, même au bout d'un temps très long (à l'échelle

humaine du moins) .

(1) l'expression et sa première définition sont dues à IMBEAUX (1930)

(2) dénomination proposée parE. BERKALOFF (1967)


- 22 -

En toute rigueur un système aquifère devrait être circonscrit

seulement par des limites étanches ou par des limites (d'alimentation

ou d'émission) à potentiel imposé, faisant donc obstacle aux trans¬

ferts d'influence.

Ce qui différencie les deux types de domaines tient donc dans

la nature de leurs limites :

- ligne de partage à débit nul, mais à potentiel variable dans le pre¬

mier cas (bassin)

- ligne de drainage (ou éventuellement d'alimentation) à débit variable

mais à potentiel imposé Constant ou peu variable) dans le second cas

(système aquifère) .

Les premiers sont des unités d'écoulement, les seconds, des

unités vis-à-vis des propagations d'influence.

En transposant en termes d'hydrologie de surface, cela re¬

viendrait à opposer les bassins versants aux domaines d'interfluves.

Les bassins hydrogéologiques et les systèmes aquifères ne coïncident

généralement pas.

Le "bassin hydrogéologique" se prêtera mieux à la mesure

effective des débits aux émergences, facilitant en pratique l'établis¬

sement de bilan. Mais le "système aquifère" est le plus approprié à

l'évaluation des ressources en eau dès lors qu'elle se ramène à la

recherche de l'influence optimale des captages sur les limites d'émer¬

gence.

1.4.1.2. Conditions aux limites

La définition correcte des conditions aux limites du domaine,

quel qu'il soit, devant servir de cadre à l'évaluation de ressources

en eaux souterraines est donc essentielle.


- 23 -

Ces limites se définissent par les conditions hydrau¬

liques, qui y régissent les échanges d'eau entre le réservoir

et l'extérieur, donc sur une base à la fois géologique et hydro¬

dynamique.

La plupart des réservoirs ayant une hauteur petite au

regard de leur étendue, on est conduit à distinguer des surfaces-

limites et des lignes-limites périphériques .

- les surfaces-limites sont le toit et le mur étanches ou semi-

perméables de la couche -ou de l'ensemble de couche-aquifère.

Dans le cas d'une nappe libre, la surface supérieure est la

surface libre de la zone saturée d'eau.

- les lignes-limites étanches, à débit nul mais à potentiel va¬

riable, sont en général imposées par les conditions géologiques,

- les lignes-limites "ouvertes" laissent passer des débits varia¬

bles, mais ont un potentiel imposé constant ou presque : ce

sont des lignes d'alimentation (limite amont) ou de drainage

(limite aval) correspondant en général aux cours d'eau dans le

cas des nappes libres.

- les lignes de partage sont bien à débit nul mais à potentiel

variable non imposé : aussi, à moins de coiïicider avec des

limites étanches, elles n'arrêtent pas des transmissions d'in¬

fluence et peuvent elles-mêmes être déplacées. Elles peuvent

donc délimiter des bassins mais non des systèmes aquifères.

1.4.2. Ressources en eau des nappes libres

L'exploitation optimale des nappes libres suppose généralement le

maintien d'un équilibre moyen, c'est-à-dire la conservation de la réserve,

mais à terme plus ou moins long, qui dépend du régime de l'alimentation

et des émissions d'eau, donc de la variation de la réserve et de sa capa¬

cité régulatrice.
- 24 -

On a vu que cet équilibre peut être atteint, soit par un accroisse¬

ment des apports (action des captages sur la limite d'alimentation) soit par

une diminution des émissions (action sur les limites d'émergence).

Selon les cas, des régimes d'exploitation très différents sont

donc possibles et sont d'ailleurs effectivement réalisés.

1.4,2,1. Les nappes libres à faible réserve mais à taux de renouvellement

(moyen annuel) élevé (0,5 à 1, ou ^ 1), à proximité de cours

d'eau de surface qui les soutiennent, permettent des captages en

régime quasi- permanent entretenus par une réalimentation induite.

C'est le cas de nombreuses nappes d'alluvions, qui

comptent parmi les plus exploitées en beaucoup de pays, et

notamment en France. De tels captages peuvent fournir des débits

très supérieurs à ceux de l'alimentation naturelle propre à ces

aquifères. A la limite l'exploitation d"'eau souterraine" se ramène

à l'utilisation de la capacité filtrante d'un milieu poreux pour

capter, en l'épurant, de l'eau de surface.

Dans ce mode d'exploitation d'eau souterraine en régime

de "suréquilibre", on cherche à maximiser les effets à la limite

à niveau imposé constituée par le cours d'eau, qui de limite

d'émergence à l'état naturel le plus fréquent (drainage) est trans¬

formée en limite d'alimentation.

Mais la conservation du débit d'étiage peut dans cer¬

tains cas conduire à minimiser au contraire périodiquement cet

effet aux limites en étalant sur une période plus longue les ré¬

percussions de prélèvements saisonniers plus ou moins synchro-

niques de l'étiage à conserver. Cela impose d'éloigner les points

de captage du cours d'eau, ou de décaler plus ou moins la période

d'exploitation, dans des mesures calculables et liées aux para¬

mètres de l'aquifère ; d'où la possibilité de fonder des interven¬

tions réglementaires ou économiques.


- 25 -

L'alimentation artificielle pratiquée parfois dans de tels systèmes

poursuit moins un but de régularisation que de renforcement de la réa¬

limentation induite "naturelle" : c'est le cas, par exemple, en France

à Croissy (vallée de la Seine, en aval de Paris).

On ne joue alors que sur une faible variation de réserve possible.

1.4.2.2. Les nappes libres plus étendues, à réserve importante et à taux de

renouvellement plus faible (ordre de 0,1 à 0,5), permettent différents

degrés de régularisation, annuelle ou pluri-annuelle des débits pro¬

duits par rapport à la variation des apports, ou, au contraire, des

captages de débit à variabilité imposée, en fonction de la configura¬

tion du système aquifère, du régime des émergences naturelles et de

la distance aux lignes d'émergence des diverses parties de la nappe.

Dans certains cas l'exploitation peut permettre un renforcement

des débits d'étiage des cours d'eau (par rejet en rivière) : il faut que

l'effet des prélèvements synchroniques de l'étiage, soit assez différé

et étalé sur le reste de l'année, mais à peu près nul au terme du cycle

annuel pour que l'opération soit répétitive. Là encore on cherche à

minimiser l'effet aux limites.

L'alimentation artificielle, lorsqu'elle est possible, permet

d'utiliser au maximum les capacités de stockage d'eau du réservoir.

Mais dans l'ensemble, l'exploitation n'agit pas sensiblement sur les

modalités de l'alimentation, c'est-à-dire que le débit moyen total cap-

table (rapporté à une durée assez longue, au moins pluri-annuelle)

pourrait être au plus égal en théorie au débit moyen des émissions

d'eau naturelle du système, et se réduit en pratique à une fraction

admissible de ce débit, A la limite, un tarissement complet et perma¬

nent des écoulements aux émergences naturelles peut être atteint.

Cette évolution indique alors que l'équilibre à long terme est près

d'être, sinon déjà, rompu.


- 26 -

Il est rare qu'une telle situation puisse être acceptée et avoir

été déterminée délibérément. Pourtant dans certains cas une maximi¬

sation de l'effet aux limites d'émergence peut être recherchée ; notam¬

ment si l'on veut substituer des captages à des émergences non utili¬

sables directement (par exemple : écoulement à la mer ou à des cours

d'eau polluée), ou encore si l'on cherche à abaisser le niveau à une

limite, pour supprimer des plans d'eau libres de surface (marais) et

réduire ainsi des "pertes" par evaporation.

1.4.2.3. Des nappes libres à limites étanches, à réserve également faible, mais

alimentées très irrégulièrement et dépourvues d'émergences permanentes,

comme celles des zones arides déjà envisagées où l'évaporation est

souvent le principal facteur des émissions d'eau, ne permettent géné¬

ralement que des captages en régime transitoire prolongé. Les débits

exploitables sont alors limités par la nécessité de ne pas épuiser la

réserve entre deux périodes d'alimentation et de maintenir la produc¬

tivité des captages à un minimum acceptable, malgré les effets des

limites. Les captages dans de telles nappes exigent donc seulement

la réalisation d'un équilibre entre les quantités d'eau prélevées d'une

part, la résultante entre la diminution des émissions d'eau du système

et l'accroissement des apports provoqués par les rabattements consé¬

cutifs à l'exploitation d'autre part, donc à un terme -pluri-annuel en

général- qui est fonction de la périodicité des alimentations.

On peut dans les nappes de ce type, chercher à maximiser les

rabattements de niveau sur des aires assez grandes, à la fois pour

réduire des "pertes" par évapotranspiration -lorsque la frange capil¬

laire est proche du sol- (effet sur une limite d'émergence diffuse) et

pour accroître la capacité d'emmagasinement dans le réservoir au moment

d'apports possibles par infiltration d'eaux de surface (crues), (effet

sur une limite d'alimentation temporaire).


- 27 -

L'alimentation artificielle peut contribuer à améliorer la produc¬

tion d'eau dans les nappes de ce type s'il existe des capacités de

stockage suffisantes au moment où des eaux de surface sont disponi¬

bles. Elle peut avantageusement se combiner avec les exploitations

temporaires capables de réduire les pertes par evaporation, en abais¬

sant la surface piézométrique. Mais le régime optimal de ces inter¬

ventions est difficile à fixer et d'application délicate.

1.4.2.4. Dans le cas particulier des réservoirs karstiques, il est relativement

rare que des captages importants soient possibles assez loin des émer¬

gences naturelles (sources à débit élevé, mais souvent très irrégulier,

et parfois temporaire) , en raison de la profondeur généralement grande

des niveaux piézométriques et du rendement très aléatoire des forages.

Aussi les possibilités d'action sur les réserves de ce type d'aqui¬

fère peuvent être restreintes à des interventions sur les points d'émer¬

gence, ou à proximité immédiate, ce qui revient à modifier temporaire¬

ment le niveau de la limite d'émergence :

- rabattement temporaire en période d'étiage, produisant un accroisse¬

ment de débit (facilité dans le cas de source vauclusienne à tarisse¬

ment saisonnier) à condition qu'un réservoir noyé assez volumineux

subsiste au-dessous du niveau d'émergence.

- vannage, ou "serrement", en période de crue, pour réduire temporai¬

rement le débit et accroître d'autant le débit en étiage, ce qui est

rarement réalisable en pratique.

Dans cet ordre d'idée, on peut envisager l'obturation de sources

sous-marines .

Dans les deux cas, l'effet à la limite d'émergence est immédiat

et maximal. C'est l'action sur son niveau qui accélère ou ralentit la

vidange naturelle de la réserve, une compensation s 'opérant pendant

le reste du temps par diminution ou accroissement. On peut alors

considérer comme "ressource en eau souterraine" le débit moyen ajouté


- 28 -

au débit d'étiage naturel pendant ^ mois par an.

Lorsque des exploitations "classiques" par forage sont

néanmoins possibles, on est ramené au cas général des nappes

libres envisagé en 1.4» 2., 2. ,.

On doit souligner qu'en définitive les réservoirs karstiques,

s'ils fournissent bien des débits d'eau souterraine très importants

à leurs émergences permanentes ou temporaires (dans les domaines

karstiques, l'écoulement de surface peut être nul ou négligeable),

peuvent n'offrir cependant que des ressources en eau souterraine,

telles qu'on les a définies^assez restreintes. Les prélèvements

aux sources ou à proximité, lorsqu'ils sont seuls possibles, ont

en effet une répercussion immédiate sur les débits des écoulements

d'eau de surface qui en proviennent : ils se ramènent de ce point

de vue à des prélèvements en rivière et sont soumis aux mêmes

contraintes .

1.4.3. Ressources en eau des nappes captives

L'évaluation des ressources fournies par l'exploitation des

nappes captives ne peut être subordonnée à 'l'institution d'un équilibre qui

irtipliquerait une conservation de la réserve à long terme. L'exploitation des

nappes captives s'adresse précisément aux réserves, et elle s'assimile plus

à une extraction d'eau qu'à des captages. On sait que dans ce cas la "ré¬

serve" qui intervient est liée à la pression d'eau dans la couche- réservoir

et non à la quantité d'eau effective qu'elle contient (et qui ne peut être en¬

tamée de façon appréciable dès que la couche est assez profonde) ; c'est

donc cette pression qu'il faudrait conserver ce qui est contradictoire avec

la possibilité d'une exploitation d'eau précisément produite par la décom¬

pression.

En fait, l'exploitation de l'eau des nappes captives n'est

possible qu'en régime transitoire (même si l'évolution très lente de ce

régime et les "paliers" qu'elle peut comporter peuvent le faire confondre


- 29 -

avec un régime qua si- permanent) . On n'a pas la possibilité de choisir entre

une exploitation présumée "équilibrée" et une exploitation en régime non

équilibré : on se trouve toujours dans le second cas, c'est-à-dire dans ce¬

lui de l'exploitation "minière" de l'eau souterraine (épuisement progressif

des réserves), ce qui ne l'empêche pas de durer très longtemps et de décroî¬

tre lentement si les réserves sont considérables : toute exploitation de nappe

captive est en soi une surexploitation et on peut seulement en choisir l'in¬

tensité.

Il découle de ces remarques que les ressources en eau considérées

sont nécessairement temporaires, et que l'on est ramené à évaluer des réser¬

ves, de la même manière que s'il s'agissait d'un gisement minier ou pétrolier.

Il convient cependant de distinguer plusieurs types de nappes

captives:

1.4.3.1. Nappe captive très étendue à limites (mur et toit) étanches

Elle répond au schéma classique le plus souvent considéré,

mais assez rarement réalisé dans la nature. La réserve exploitable

est restreinte à la quantité produite par l'abaissement de pression

techniquement et économiquement possible (qui peut différer selon

les secteurs).

Même si la couche aquifère affleure localement (par exemple

à la périphérie d'un bassin sédimentaire) et comporte là une nappe

libre, les exploitations en des points éloignés ne peuvent l'influen¬

cer -du moins à l'échelle humaine- et tout se passe comme si on

mettait en exploitation un réservoir non alimenté.

1.4.3.2. Nappe captive peu étendue en continuité avec une nappe libre

Dans ce cas les prélèvements dans la nappe captive peuvent

influencer au bout d'un certain temps (mais réalisable à l'échelle

humaine) les limites d'émergence de la nappe libre, et atteindre

ainsi un régime d'équilibre. On est ramené indirectement à un cas

d'exploitation de nappe libre.


- 30 -

1.4.3.3. Nappe captive plus ou moins étendue, à limites non étanches (mur

ou toit semi- perméables)

Dans ce cas, le plus général dans les conditions naturelles

des bassins sédimentaires, les captages font appel à une réserve

beaucoup plus importante que celle liée à 1' "emmagasinement" de

la seule couche aquifère exploitée, car les dépressions produites

provoquent des réalimentations (par drainance) à partir d'autres

couches aquifères, y compris à partir d'une nappe libre supérieure.

Les déclins de pression dans la couche exploitée peuvent

alors être fortement ralentis ou même stoppés pendant une durée

assez longue, un régime quasi- permanent se trouvant réalisé.

En ce cas on est ramené à une exploitation indirecte de réservoirs

contigils à celui d'où on tire l'eau.

Il est important de noter que, dans tous les cas, la définition des

ressources ne dépend pas d'une estimation (plus ou moins approximative,

mais le plus souvent illusoire), de l'alimentation naturelle de la nappe, ni

des débits sortants naturels, en général minimes lorsqu'il s'agit de nappes

captives.

Globalement, pour l'ensemble d'un système aquifère, la définition

des ressources se ramène au choix du déclin des pressions jugé le plus ad¬

missible en fonction des divers critères (y compris l'appréciation des progrès

techniques ou de l'évolution du coût de l'énergie raisonnablement prévisibles

au cours des prochaines décennies. Il s'agit de régler l'évolution des débits

de production de sorte qu'elle soit compatible avec la durée choisie pour la

production globale, et avec les durées minimales nécessaires à la rentabili¬

sation de chaque forage. Ce "réglage" suppose la possibilité de prévoir des

évolutions à assez long terme.


- 31 -

Le souci de maintenir à tout prix une production d'eau à son niveau

actuel à très long terme, dans un but "conservatoire", pourrait dans certains

cas restreindre sans utilité le débit globalement exploitable à présent. La

recherche d'un équilibre supposé à terme rapproché entraînerait en fait une

"sous-exploitation" d'un gisement. En dernière analyse, les ressources

dépendent avant tout du temps auquel on référera l'exploitation d'une réserve,

et leur définition a un caractère prospectif.

Mais dans une nappe très étendue, le choix doit en pratique être

fait secteur par secteur. Dans un secteur donné (de l'ordre de quelques

dizaines à quelques centaines de km2) la limitation des quantités d'eau pré¬

levables sera imposée par les interactions des forages, qui abaisseraient,

plus ou moins rapidement suivant leur densité, leurs productions respectives

au-dessous d'un seuil de rentabilité. Le débit total produit est, sauf momen¬

tanément, indépendant du nombre de forages productifs : cf. les exemples

cités dans le tableau ci-dessous. Autrement dit, une limite à la possibilité

technique et économique de prélèvement d'eau sera très généralement atteinte

bien avant qu'un "épuisement" se manifeste. C'est en fin de compte en fonction

de cette limite pratique, qui dépend des caractéristiques de l'aquifère et de

la réserve que les "ressources en eau", qu'il vaudrait mieux dénommer "pro¬

duction d'eau optimale", sont à définir.


- 32 -

Exemples d'évolutions de la production dans quelques aires d'exploitation

intensive de nappes captives.

Nappe Année Débit de Nombre de Débit de produc

exploitée production forages tion moyen par

total en m3/s productifs forage productif

Nappe des Sables 1890 1,15 40 28,7

éocènes d'Aquitaine,
1950 0,80 85 9,4
dans la région de

Bordeaux (France) 1967 1,10 146 7,4

Nappe des Sables verts 1930 0,26 12 21,6

albiens du Bassin de 1936 1,14 35 ) 38,3 )

Paris, dans la région 1940 0,80 36 ,)(2) 22,2 ) (2)

parisienne (France) 1964 0,60 42 ) 14,3 )

Prévision(l)

2000 0,46 42 10,9

2050 0,28 42 6,6

Nappes du système 1910 3,5 775 4,5

multicouche tertiaire
1915 4,2 2030 2,1
de l'Oued Rhir,

(Sahara occidental. 1930 5,4 1190 4,5

Algérie)
1954 5,0 900 5,5

(forages

jaillissants)

(1) Calcul par simulation (modèle mathématique) dans l'hypothèse où les forages
actuels "vieilliraient" sans être remplacés.

(2) Valeurs surestimées, ne tenant pas compte de la fermeture de certains forages


- 33 -

2. BILAN DES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE

2.1. Rappel de notions générales - Définition et conditions de validité

Comme tout bilan d'eau, un bilan de nappe souterraine

est une équation analogue au bilan comptable pouvant s'écrire :

avoir initial -t- recette = dépense -i- avoir final

ou plus simplement :

recette = dépense -h différence d'avoir

En termes hydrauliques un bilan d'eau quelconque s'écrira

alimentation = émission d'eau _+_ A réserve

(ou volume entré) (ou volume sorti)

La connaissance de la valeur absolue de la réserve n'étant

pas nécessaire ni généralement possible avec une précision comparable

à celle de sa variation.

Par définition un bilan ne peut être qu'équilibré.

La dénomination de "bilan non équilibré" est parfois appli¬

quée, mais à tort :

- soit lorsque la différence de réserve n'est pas prise en compte (elle est

ensuite assimilée à la différence des deux termes, à condition que cette

différence soit significative) .

- soit en ne considérant que les volumes d'eau à état liquide, un "déficit"

étant alors assimilé à l'évapotranspiration globale, ce qui revient à

omettre un composant du terme "dépense".

- soit lorsque les évaluations indépendantes des deux termes aboutissent

à une inégalité ; mais dans ce cas (fréquent) ou bien la différence n'est

pas significative, compte tenu des approximations introduites, ou bien

un composant a été omis ou évalué avec une erreur notable.


- 34 -

Un bilan d'eau n'a de sens que pour une durée et un do¬

maine aquifère définis, communs à tous ses composants.

Son établissement impose donc une définition correcte :

- des limites dans l'espace du domaine aquifère considéré et des condi¬

tions à ces limites.

- des limites dans le temps de la période prise en compte, à laquelle

toutes les évaluations doivent se référer.

2.1.1. Délimitation du domaine

Un bilan de nappe souterraine, qu'il ne faut pas confondre

avec le bilan d'eau global d'un bassin, exige une délimitation

précise et logique du réservoir auquel se rapporteront les quan¬

tités d'eau (entrant et sortant) à confronter, et dans lequel les

variations de niveau piézométrique détermineront la différence

de réserve d'eau à prendre en compte.

On a défini plus haut (1.4.1.) deux types de domaines

aquifères délimitables : le bassin hydrogéologique et le système

aquifère . Le second est plus approprié à l'évaluation des ressour¬

ces, ainsi qu'on l'a montré. Mais le premier convient mieux pour

l'établissement du bilan, car il se prête mieux à la détermination

des débits aux émergences, surtout s'il s'agit d'aquifères à nap¬

pes libres drainées par des rivières.

De même que pour un système aquifère, les conditions

aux limites d'un bassin hydrogéologique devront être définies le

plus exactement possible. En principe il s'agira surtout de :

- lignes de partage des écoulements souterrains, donc à débit nul

- limites étanches, également à débit nul

- limites d'émergence.
- 35 -

Un domaine comportant des limites non étanches d'alimen¬

tation, ou à écoulement vers un aquifère limitrophe, ne constitue¬

rait pas un bassin hydrogéologique, mais une partie de bassin,

dans lequel l'établissement du bilan sera plus difficile et plus

approximatif.

Enfin, il n'est pas exclu de tenter d'établir aussi le bilan

d'un système aquifère, pouvant réunir des parties de plusieurs

bassins différents adjacents.

Le choix du domaine commandera en définitive la com¬

plexité plus ou moins grande de la composition du bilan, mais

son établissement est envisageable dans tous les cas. La seule

règle imperative est que tous les composants du bilan se rappor¬

tent bien au même domaine et exclusivement aux échanges d'eau

se produisant aux différentes limites de ce domaine.

2.1.2. Choix de la durée de référence

L'écoulement des nappes souterraines ne se faisant géné¬

ralement pas en régime permanent, il est nécessaire de référer

le bilan à une durée définie pour y inclure une différence de ré¬

serve significative, ou pouvoir la négliger.

Le choix de la période doit être fonction du but recherché,

mais il est souvent contraint par les données disponibles.

Le cas le plus général est celui des nappes libres dont

le régime est subordonné à celui des facteurs climatiques de

l'alimentation, dont la périodicité la plus nette est le plus sou¬

vent annuelle. L'année est donc en général la plus courte période

pour laquelle les variations de réserve peuvent le mieux se com¬

penser, à condition de la définir par le mois d'étiage le plus

fréquent. Le bilan annuel est donc le mieux adapté à la recherche

de l'alimentation d'une nappe pour une période courte. Mais un


- 36 -

bilan annuel unique est difficilement extra polable, même en

tenant compte de la représentativité de l'année sur le plan cli¬

matique .

Un bilan pluri-annuel améliore l'évaluation du débit moyen

et de l'alimentation moyenne de la nappe, en permettant de tenir

pour négligeables les différences de réserve si la période est

assez longue (à partir de 10 ans en général). On l'exprime le

plus souvent par commodité en bilan moyen annuel. Mais ce que

le bilan moyen gagne en précision pour l'évaluation des apports

moyens à une nappe, il le perd naturellement en signification

pour la connaissance du régime de variation pluri-annuelle de ces

apports.

S'il s'agit d'une nappe captive exploitée, un bilan incluant

une différence de réserve n'a de sens que pour une période pluri-

annuelle très longue (plusieurs dizaines, voire une centaine d'an¬

nées) ,

Une succession de bilans annuels enchaînés permet de

déterminer la variabilité de l'alimentation, si celle des émissions

d'eau et des réserves peut être évaluée ou estimée indépendam¬

ment. Elle contribue donc à évaluer la capacité régulatrice inter¬

annuelle du réservoir (les reports de différence de réserve d'une

année à l'autre) relative à la durée totale considérée.

Le bilan sur une période plus courte que l'année, notam¬

ment sur celle de plus grande différence de réserve (entre les bas

et hauts niveaux piézométriques par exemple) peut être envisagé

pour approcher une estimation de la distribution dans le temps de

l'alimentation et de la vidange du réservoir au moins par saison.

Mais la précision des mesures impose une limite inférieure de

durée à la validité des bilans. Dans le cas de nappe libre, la

surface de la nappe dont les fluctuations définissent la variation

de réserve est assimilable à la surface piézométrique si la hau¬

teur de la frange capillaire est petite. Si cette condition n'est


- 37 -

pas remplie, la difficulté d'évaluer la différence de réserve est

d'autant plus grande que la durée du bilan est plus courte.

Négligence du temps .

Le temps est négligé, lorsqu'on admet que tous les mou¬

vements d'eau dans le réservoir aquifère et à ses limites sont en

régime permanent, ce qui implique qu'il n'a pas de variation de

réserve.

Cela revient à assimiler le système aquifère à un conduit

à débit constant entre une section amont et une section aval (ou

des ensembles de section) et le bilan, en quelque sorte "instan¬

tané", revienta écrire :

flux entrant = flux sortant

Il serait préférable alors de parler d'équation de flux ,

plutôt que de bilan. C'est le cas pour les "bilans" considérés

dans certains modèles analogiques simulant des nappes en ré¬

gime supposé permanent (cuves rhéoélectriques notamment) . En

fait si un régime rigoureusement permanent ne se trouve jamais

réalisé dans les conditions naturelles, un régime "quasi- perma¬

nent" peut s'en rapprocher assez pour que l'assimilation soit

acceptable en pratique dans quelques cas (partie aval de certaines

nappes libres soutenues en fin d'étiage prolongé, nappes cap¬

tives non influencées ni exploitées) .

Le temps est négligé d'une autre manière dans le cas des

bilans moyens établis sur une période assez longue pour que la

différence de réserve finale puisse être tenue négligeable (par

exemple : le bilan moyen annuel d'une série pluri-annuelle assez

longue) .

L'expression du bilan est alors analogue à celle de

l'équation de flux en régime permanent précédente, mais on ne

doit pas les confondre : il ne s'agit pas dans ce cas d'un bilan
- 38 -

d'année réelle,, mais d'année fictive, correspondant à une période pluri-

annuelle réelle.

2.1.3. Unité du bilan

2.1.3.1. Eviter les "recyclages"

Lorsque les apports ou les prélèvements d'eau dus à

l'intervention humaine doivent être introduits dans le bilan

les rejets d'eau prélevée dans le système ne doivent pas être

pris en compte, sous peine d'être comptés 2 fois (dans chacun

des termes). Il faut donc déduire des quantités d'eau prélevées,

les restitutions, et non les compter comme apport. Il est

d'ailleurs préférable de ne comprendre explicitement dans le

bilan que les "exploitations d'eau consommées ou exportées" ,

plutôt que les exploitations brutes.

Les "recyclages" ont certes leur intérêt, mais pour un

autre type de "bilan" : celui que l'on peut dresser entre les

besoins et les ressources.

2.1.3.2. Eviter les fractionnements

Une erreur assez souvent commise est l'addition séparée

des termes "alimentation" et "émission" respectifs des bilans

partiels de fraction d'un même ensemble, lorsque certains com¬

posants des émissions des unes sont comptabilisés comme ali¬

mentation des autres (par exemple si l'on dresse d'abord des

bilans de parties amont, médiane et aval d'une même nappe,

additionnés ensuite).

Dans ce cas on surévalue, parfois dans une très grande

mesure, le "chiffre d'affaire" réel du bilan de l'ensemble, de

la même façon que dans le cas précédent du "recyclage".

SeuJsles échanges d'eau à travers les limites de l'ensem¬

ble du domaine considéré sont à prendre en compte.


- 39 -

2.2. Composition du bilan d'une nappe

Comme tout bilan d'eau, le bilan d'une nappe souterraine est

l'équation des deux termes alimentation et émission, l'un ou l'autre étant

accru de la différence de réserve, selon son signe.

Chaque terme est la somme de plusieurs composants pouvant

se ramener de part et d'autre à quatre, dans le cas général : ils se cor¬

respondent deux à deux, au signe près, traduisant les quatre types

d'échange d'eau possibles entre le réservoir et l'extérieur :

a - échange direct avec des eaux de surface (liaison hydraulique)

b - échange avec la zone non saturée, à travers la surface libre

c - échange avec des aquifères limitrophes, par écoulement souterrain

d - échange provoqué par l'intervention humaine.

Un bilan de nappe comprend ainsi quatre "lignes budgétaires"

communes aux recettes et aux dépenses, et son équation générale peut

s'écrire ainsi que le présente le tableau ci-contre.

N.B. Cette équation peut aussi bien s'écrire :

y alimentation -Tlémission d'eau = + A Réserve

ou encore :

y alimentation -T émission d'eau +^ Réserve = 0

Cette dernière écriture est la meilleure lorsque l'on

s'est efforcé d'évaluer tous les composants de manière indépendante

l'équation n'est alors généralement pas égale à 0, mais à un résidu

des diverses approximations.


BILAN GENERAL D'UNE NAPPE SOUTERRAINE

Type d'échange
Alimentation Emissions d'eau
définissant les
(entrées d'eau) (sorties)
composants

Echanges directs avec des Apport reçu de "pertes" Débit aux émergences

eaux de surface d'eau de surface à travers (sources, drainage par


une limite d'alimentation les cours d'eau)

Echanges avec la zone non Apport reçu par infiltration Fourniture d'eau à la zone

saturée, à travers la surfa¬ "efficace" à travers la non saturée et évapotrans¬

ce libre zone non saturée piration directe

Echanges avec des aquifères Ecoulement souterrain en¬ Ecoulement souterrain

limitrophes par écoulement trant, y compris par sortant, y compris par

souterrain à travers les li¬ drainance drainance

mites non étanches

Echanges provoqués par Alimentation artificielle Prélèvements d'eau

l'intervention humaine ou rejet d'eau importé consommée ou exportée

de l'extérieur du domaine

V fémi
BILAN
I alimentation ssions
]
-i- A réserve I = 0

o
- 41 -

Il n'est pas nécessaire de définir ici plus complètement chacun

de ces composants. Cette composition du bilan appelle seulement quel¬

ques remarques.

1. Le bilan d'une nappe pourrait se ramènera une somme de "bilans élé¬

mentaires", selon les quatre types d'échanges d'eau définis, dont la

résultante devrait être nulle, à A R et aux approximations près. C'est

d'ailleurs ce qui est fait souvent implicitement pour l'évaluation in¬

dépendante de 1'" infiltra tion efficace", comme résultante des échanges

nappe/zone non saturée.

Mais une telle présentation n'aurait pas d'utilité particulière pour

tout le bilan, et il n'y a pas lieu d'affecter spécialement certaines re¬

cettes à certaines dépenses.

2. Les précipitations et l'évapotranspiration (réelle) au sol n'interviennent

pas directement dans le bilan d'une nappe, mais seulement par leurs

effets indirects sur la réserve, à travers la zone non saturée surmontant

la surface libre de la nappe. Seuls les flux d'eau traversant la surface

libre sont à prendre en compte. Le bilan d'une nappe doit bien se dis¬

tinguer du bilan global d'un bassin, dans lequel il peut s'intégrer.

En particulier l'apport à une nappe par sa surface libre -ou "infil¬

tration efficace"- ne peut être assimilé rigoureusement à l'infiltration

considérée en hydrologie de surface que si une conservation de la ré¬

serve d'eau de la zone non saturée peut être supposée, ce qui est

d'autant moins possible que la période de référence sera plus courte.

3. En principe, on doit chercher d'abord à évaluer chacun des composants

indépendamment les uns des autres. C'est seulement en second lieu

que la mise en équation pourra conduire à estimer une inconnue (soit

un composant, soit globalement l'un des termes) à condition que la

différence soit significative : on reviendra sur ce point.


- 42 -

4. Selon les cas, les proportions entre les composants de chaque terme

sont très variables, et l'un ou l'autre peut être négligeable voire nul.

L'évaluation de chaque somme sera naturellement d'autant plus préci¬

se que la proportion de composants évaluables avec les meilleures

approximations sera plus grande.

Inversement, les erreurs commises sur les composants ne ré¬

présentant qu'une fraction petite de l'un ou l'autre terme (moins de 10 %)

n'ont qu'une incidence secondaire.

La composition du bilan a donc une grande incidence sur l'ap¬

proximation globale des sommes calculées et sur la signification de

l'écart pouvant apparaître.

2.3. Moyens d'évaluation indépendante des composants du bilan

L'établissement d'un bilan significatif doit être basé sur un

minimum de données numériques assez précises, imposant -pour celles

qui sont variables- un contrôle durant toute la période de référence. Les

valeurs introduites doivent donc provenir autant que possible, directement

ou indirectement de mesures .

On rappellera ici très sommairement comment les différentes

techniques utilisées en hydrogéologie appliquée interviennent selon les

composants du bilan, groupés suivant les quatre types d'échange précé¬

demment définis.

2.3.1. Echanges avec les eaux de surface ("pertes" et émergences)

Les évaluations de débit peuvent être souvent directes et relè¬

vent des techniques classiques de l' hydromètrie. Leur précision

avoisine 5 à 10 %, mais les possibilités d'évaluation par diffé¬

rence entre deux sections à une même date dépendent de la valeur

absolue des débits jaugés. De même les diverses méthodes de dé¬

composition d' hydrogramme, pour en isoler r"écoulement souter¬

rain", sont basées sur des hypothèses simplificatrices plus ou


- 43 -

moins admissibles.

2.3.2. Echanges avec la zone non saturée

Aucune méthode directe pratique ne permet encore d'évaluer

globalement les débits traversant la surface libre d'une nappe, dans

un sens comme dans l'autre. Les méthodes proposées et essayées

sont trop ponctuelles pour être valablement extrapolables à une aire

étendue, ou reposent sur des simplifications excessives (sonde à

neutron, traçage, méthode du chlore, formule de Kamensky).

Les méthodes indirectes sont basées sur des bilans d'eau

du sol et de la zone non saturée, au moyen de diverses formules

semi-empiriques surtout statistiques, selon des "modèles" plus ou

moins simplifiés (hypothèses sur la réserve d'eau du sol et les

effets de l'évapotranspiration).

Ces bilans d'eau globaux sont conçus surtout pour calculer

-donc extrapoler- un déficit d'écoulement lorsque son évaluation di¬

recte d'après la mesure de l'écoulement n'est pas possible. Ils per¬

mettent donc une estimation probabiliste de l'écoulement -assimilé

au surplus des précipitations sur un défi cit extrapolé- mais cet

écoulement ne peut lui-même être assimilé à une "infiltration effi¬

cace" que si le ruissellement est nul ou négligeable pendant la pé¬

riode considérée. Cette méthode doit naturellement rester indépen¬

dante de l'analyse des débits d'écoulement réels.

En pratique, on peut considérer que cette façon de procéder

revient à supposer que la réserve d'eau de la zone non saturée est

invariable et à transposer à sa limite supérieure (sol) les échanges

d'eau qui se produisent à sa limite inférieure, ce qui n'est admis¬

sible que si la durée de référence est assez longue (l'année au

minimum) .
- 44 -

2.3.3. Echanges avec les nappes limitrophes

Les évaluations de débit d'écoulement souterrain à travers

une section aquifère définie reposent sur la connaissance de la

transmissivité et du gradient (Q = T.L.i) et de leur variation dans

le temps ; elles peuvent difficilement être affectées d'une appro¬

ximation meilleure que 100 %.

Ce calcul s'applique aussi aux flux de "communications

entre nappes" par drainance à travers des couches semi-perméables

qui peuvent constituer l'essentiel des échanges d'eau des nappes

captives. Mais la difficulté d'évaluation de la perméabilité verti¬

cale des couches semi-perméables qu'elles nécessitent, limite

en pratique les possibilités d'opérer ces calculs.

2.3.4. Prélèvements et rejets

L'application des méthodes hydrométriques, voire des

compteurs, apportant une précision de mesure très suffisante, ne

soulève pas de difficulté technique. Mais le défaut des concours

et des moyens économiques nécessaires peut imposer le recours

à des méthodes indirectes ou à des estimations plus approximatives,

2.3.5. Différence de réserve

Evaluation possible d'après le contrôle des variations

piézométriques dans la mesure où l'emmagasinement est connu ou

estimé.

2,4. Ap proxi ma ti on s

On ne saurait trop insister sur les approximations intro¬

duites dans un bilan. Leur méconnaissance, encore trop répandue, est l'un

des principaux écueils à éviter pour pouvoir apprécier la validité d'un

bilan.
- 45 -

On a déjà indiqué que les approximations affectant les valeurs

introduites sont très différentes selon les composants et selon les mé¬

thodes d'évaluation. Rappelons aussi qu'on ne peut considérer comme de

même valeur, les résultats de mesure et ceux de calculs basés sur des

formules reposant sur des hypothèses ou des statistiques.

Le seul composant évaluable avec une approximation assez bonne

(ordre de 10 %) est le débit d'émergence, si sa mesure séparée est possible

et si les mesures sont assez fréquentes. La validité d'ensemble d'un bilan

est finalement fonction surtout de la part des émergences à débit contrôla¬

ble dans les émissions d'eau du système.

Sauf si cette part est faible ou nulle, l'évaluation des émissions

d'eau est presque toujours plus précise -souvent de beaucoup- que l'esti¬

mation indépendante des apports : l'évaluation des émissions d'eau est,

dans la plupart des cas, la base la plus sûre d'un bilan.

Un bilan basé au contraire surtout sur une estimation directe des

apports est en général beaucoup plus incertain.

On doit considérer comme hypothétique, tout bilan dont un ou

plusieurs composants essentiels seraient calculés, et à fortiori s'il

s'agit de l'un des deux termes tout entier.

Le seul cas où les deux termes du bilan sont évalués avec des

approximations semblables (mais également médiocres) est celui où des

écoulements souterrains constituent la part prédominante des apports et

des émissions d'eau.

Validit_éjdes différences

La comparaison des deux termes du bilan, compte tenu de la

différence de réserve, fait généralement apparaître une différence non

négligeable (sauf par chance), si les évaluations de tous les composants

ont bien été faites séparément : le bilan se présente apparemment "en dé¬

séquilibre". En pratique on obtient toujours :

Alimentation -
-t émissions d'eau + A Réserve # 0
- 46 -

Mais cet écart résiduel est affecté de toutes les erreurs commises

sur l'ensemble des composants : la différence trouvée n'est significative

que si elle est d'un ordre supérieur à celui des marges d'erreur. C'est

seulement dans ce cas qu'il est justifié de chercher à rectifier certaines

évaluations, ou d'interpréter cet écart résiduel.

Il en est de même si l'.on cherche à tirer du bilan l'évaluation

par différence d'une inconnue (unique) : l'un des termes du bilan ou un

composant d'un des termes, ou A réserve. Cette recherche est admissi¬

ble si les composants connus le sont avec une assez bonne approximation :

on a noté que c'est le cas pour l'évaluation des émissions lorsqu'elle

repose surtout sur des jaugeages.

Si l'estimation de la différence de réserve n'est pas affectée

d'un intervalle de confiance de l'ordre de grandeur du débit sortant, l'é¬

valuation de l'alimentation tirée du bilan sera presque toujours plus pré¬

cise que celle tentée directement.

2.5 . Possibilité pratique d'établissement du bilan selon les types de nappes

L'évaluation indépendante d'au moins 2 des 3 éléments (alimen¬

tation, émission, ^ réserve) est une obligation. Noter que A réserve

peut être négligé en régime naturel dès que la période est assez longue

(5 à 10 ans).

La composition du bilan, donc la possibilité de l'établir avec une

approximation plus ou moins grande, est commandée par le type de nappe

considérée c'est-à-dire par le "modèle" admis cité plus haut (2.2.) déter¬

miné lui-même par :

- les conditions géologiques : caractéristiques du réservoir, nature des

limites

- les dimensions et la forme du système (étendue, épaisseur)

- les relations entre eaux souterraines et eaux de surface (degré d'inter¬

dépendance)
- 47 -

- les facteurs climatiques de l'alimentation et des émissions d'eau

- les conditions hydrauliques aux limites.

Les multiples combinaisons entre ces différents facteurs déter¬

minent une grande variété de modèles hydrogéologiques de systèmes aqui¬

fères, correspondant à autant de types de bilan, se distinguant par une

facilité plus ou moins grande d'établissement et des degrés divers de

validité et de précision.

Le critère le plus important pour classer les réservoirs aquifères

à ce point de vue est le mode d'émission d'eau du système.

Comme précédemment pour l'évaluation des ressources (1,4,), on

distinguera : des systèmes à nappe libre limités par une ligne d'émergence

perchée ou soutenue (à niveau constant ou variable), des systèmes à émer¬

gences temporaires (karst), des systèmes à nappe libre déchargée princi¬

palement par évapotranspiration, des systèmes à nappe captive sans

exutoire, ou à nappe semi-captive subissant des "fuites" par drainance ,

2,5,1. Réservoirs aquifères à nappe libre

2.5.1.1. Réservoirs aquifères à substratum défini, bien délimité

par des limites étanches (ou des lignes de partage sup¬

posées fixes) et des lignes d'émergence, à alimentation

directe par la surface libre exclusive ou prédominante

(infiltration des pluies ou d'eaux de surface) et à émission

par émergences très prépondérante (sources, drainage par

cours d'eau), donc à écoulements souterrains négligeables

aux limites.

Le bilan se ramène à :

Infiltration (efficace) = débit aux émergences + û réserve


- 48 -

Dans ces cas, l'essentiel est d'évaluer les débits aux

émergences. On y parvient assez facilement et avec une appro¬

ximation acceptable (souvent 10 %) s'il s'agit de sources ou de

collecteur exclusif d'émergences (nappe perchée),

La principale difficulté est de séparer les débits d'émer¬

gence des écoulements de surface dans les cas -très répandus- de

nappe souterraine drainée par un cours d'eau (problème de décompo¬

sition d 'hydrogramme) , L'évaluation directe est impossible si

la nappe est soutenue par un cours d'eau important (émergence

inférieure à l'erreur commise en jaugeant) ou la mer.

Solution : calcul du débit selon une -ou des- équipotentielles

proches de la limite aval d'après T et i (méthode plus approxi¬

mative) , Ce calcul peut être tenté numériquement ou s'appuyer

sur une simulation si les conditions aux limites du système sont

nettement définissables,

2.5.1.2. Réservoirs aquifères à limites en partie non étanches :

- à alimentation en partie -ou principalement- indirecte (apports

par écoulements souterrains latéraux ou du substratum)

- à émission en partie -ou principalement- par écoulement souter¬

rain (émergences réduites ou négligeables).

Exemples : nappes de plaines alluviales encaissées entre des

massifs calcaires, nappes de débordement Continuées par des

nappes captives) ; plus généralement nappes de domaine où les

bassins versants et les bassins hydrogéologiques diffèrent sen¬

siblement.

Le bilan s'écrit :

écoulement souterrain entrant + infiltration fefficace) =

écoulement souterrain sortant -i- débit aux émergences +/iréserve


- 49 -

L'évaluation directe assez précise des composants de

chaque terme est difficile : le calcul des débits selon des équi¬

potentielles proches des limites amont et aval, d'après T et i,

est la seule possibilité (il exige une connaissance assez précise

de la surface piézométrique et des transmissivités). L'emploi de

modèles peut faciliter ce calcul, si, en régime transitoire, l'évo¬

lution des niveaux piézométriques est assez connue ; mais la

variabilité de T et S dans le temps risque souvent d'être inférieure

à l'approximation de leur évaluation moyenne.

Dans ce cas, l'évaluation des émissions d'eau peut être

aussi imprécise que celle de l'alimentation. Le bilan risque d'être

très hypothétique et l'attention doit être portée surtout sur l'éva¬

luation directe de la variation de réserve.

Cette difficulté est due surtout au fait que l'on cherche

dans ce cas à dresser le bilan séparé d'une partie d'un système

aquifère complexe plus étendu. On tend alors à évaluer un composant

du bilan d'après le bilan d'un système contigli, mais qui n'est pas

toujours réellement indépendant.

2.5.1.3. Réservoirs karstiques : ils constituent un cas particulier des deux

types précédents, surtout du second (2,5.1.2.), car il est souvent

difficile de délimiter un réservoir de telle sorte que des écoulements

souterrains soient négligeables aux limites.

Le bilan se formulera en général :

Infiltration (efficace) débit aux émergences

+ pertes de cours d'eau de

surface issus de l'exté

rieur de l'impluvium du

réservoir = + écoulement souter + A réserve

rain sortant
+ écoulement souterrain

entrant
l ml u _
- 50 -

L'établissement du bilan d'un réservoir karstique impose :

- de tenir compte des pertes de cours d'eau de surface pouvant pro¬

venir de bassins extérieurs au domaine karstique. Leur mesure

directe par jaugeage n'est possible que s'il s'agit de pertes tota¬

les. Sinon on est contraint de les évaluer par différence par rap¬

port à un écoulement de surface sortant, mais dans ce cas les

évaluations ne sont pas indépendantes de celles des débits aux

émergences : on ne connaît qu'une résultante, dont la significa¬

tion peut être variable selon les conditions du réservoir considéré.

- de pouvoir évaluer de manière indépendante les écoulements sou¬

terrains entrant et sortant aux limites, ce qui est généralement im¬

possible de manière directe : la recherche de ces composants fera

plutôt l'objet du bilan (évaluation par différence) si tous les autres

peuvent être déterminés.

- de pouvoir évaluer de manière indépendante une différence de ré¬

serve. Mais cette évaluation ne peut être en général abordée qu'à

partir de l'évolution du débit aux émergences en période de tarisse¬

ment (dans l'hypothèse où il n'est pas influencé) ; elle n'est donc

pas indépendante. Il sera donc préférable de considérer des durées

assez longues pour pouvoir négligeigiA réserve.

2.5.1.4. Réservoir aquifère à limites étanches, à alimentation directe par

infiltration ou indirecte, mais à émission prédominante par éva¬

potranspiration (débit d'émergence et écoulement souterrain réduits

ou négligeables). Ces cas sont fréquents en domaine aride ou semi-

aride.

Le bilan peut se ramener à :

Infiltration (+ écoulement souterrain entrant = évapotranspiration

réelle (+ prélèvements non restitués) + A réserve


- 51 -

L'évaluation directe des émissions n'est pas possible.

La variation de réserve est la donnée accessible avec l'approxi¬

mation la moins mauvaise. Si les aires respectives d'alimentation

et d'évaporation sont assez distinctes le calcul du débit d'écou¬

lement de la nappe intermédiaire peut théoriquement s'envisager,

si T et i sont connus, selon une ou plusieurs équipotentielles.

Dans le cas le plus simple ou la zone d'évapotranspiration serait

bien délimitable, sa limite est assimilable à une ligne à potentiel

constant, comme la rive d'un "lac souterrain".

Mais les deux aires se confondent souvent en grande

partie, la composante verticale prédominant dans les transferts

d'eau du système : à la limite, on peut se trouver dans les condi¬

tions d'un bilan uni-dimensionnel de type "lysimétrique" .

2.5.1.5. Réservoirs aquifères en formations de faible perméabilité et peu

puissantes, généralement peu étendus (systèmes à limites étanches

ou bassins délimités par des lignes de partage). Alimentation di¬

recte prédominante, par infiltrations des pluies. Emission surtout

par drainage des cours d'eau (réseau souvent dense).

C'est le cas de la plupart des nappes localisées dans les

formations d'altération des roches éruptives ou schisteuses, dans

les sables argileux, les molasses, ou autres roches semi-perméables,

Le bilan s'écrit, comme dans le 1 er type (2.5.1.1.) :

Infiltration efficace = débit aux émergences + A réserve

Mais dans les systèmes de ce type, la hauteur de la

frange capillaire peut être importante et d'un ordre proche de celle

de la nappe au-dessous de la surface piézométrique. La variation

de celle-ci ne suffit pas à définir la variation de réserve, celle-ci

incluant une part non négligeable et difficile à évaluer d'eau capil¬

laire.
- 52 -

L'incertitude sur la variation de réserve impose d'établir

des bilans relatifs à des durées assez longues pour que cette va¬

riation ne puisse être tenue pour négligeable. Le bilan devrait en

somme s'appliquer à l'ensemble des zones saturées et non satu¬

rées, la surface du sol constituant la limite supérieure du système,

car les transferts d'eau entre les deux zones s'opèrent dans les

deux sens et ne sont pas directement évaluables. Seul un bilan au

minimum annuel est significatif.

2.5.2. Réservoirs aquifères à nappe captive

L'établissement du bilan de nappes captives exige une définition

précise et complète des conditions aux limites notamment des échanges

d'eau à travers le toit et le mur, et il doit tenir compte d'une évolution

de réserve (qui est toujours une diminution), c'est-à-dire admettre un

régime transitoire si la nappe est exploitée. Ce régime évoluant lentement,

le bilan doit se référer à une durée assez longue.

Il serait contradictoire d'admettre le régime permanent, donc une

réserve invariable, et de compter en même temps les débits d'exploitation

comme sortie d'eau du réservoir.

Un bilan de nappe captive doit donc s'écrire :

Alimentation = émissions + ^ réserve

+ débit
Ecoulement souterrain Ecoulement souter-
prélevé
entrant aux limites rain sortant par

(nappe libre) et par drainance + émergences

drainance éventuelles

En l'absence d'exploitation, le bilan se ramènerait à l'équation

de flux en régime permanent déjà indiquée. Mais l'absence de donnée ne

permet pas dans ce cas de l'établir.

En régime d'exploitation, par contre, le bilan se ramène en pra¬

tique à confronter - ^ réserve (d'après les baisses de pression)et le

volume d'eau extraite, sur une période assez longue.


- 53 -

Les termes (A réserve + débit prélevé) ne peuvent donc être dis¬

sociés, sous peine de fausser l'équilibre du bilan.

Il est en général très difficile -et presque impossible économique¬

ment- d'évaluer avec une approximation qui ne soit pas illusoire les débits

d'échange d'eau par drainance et les proportions dans lesquelles -pour

l'ensemble d'une nappe- les débits exploités sont à attribuer à la diminu¬

tion de réserve (hauteur de baisse de la surface piézométrique x coeffi¬

cient d'emmagasinement) et à une diminution des "pertes d'eau" à travers

les épontes, voire à une réalimentation par drainance à partir d'autres

nappes du même "système multicouche".

Etablir le bilan d'une nappe captive revient en fait à établir le

bilan fractionné d'une partie d'un système aquifère complexe : c'est ce

qui en fait la difficulté. Mais il n'est pas justifié de passer outre en re¬

venant au schéma classique de nappes captives indépendantes exploitées

en régime permanent : le bilan risque alors d'être d'autant plus faussé que

les forages d'exploitation qui le rendent apparemment possible par les

données qu'ils fournissent sont plus nombreux.

2.6. Simulation du bilan

L'introduction en hydrogéologie des méthodes de simulation des

systèmes aquifères par des modèles analogiques ou mathématiques a permis

d'aborder l'étude des bilans d'une manière plus globale.

La condition préalable est naturellement que le modèle établi soit

représentatif du système aquifère : la configuration géométrique, les paramètres

de l'aquifère et les conditions aux limites doivent s'écarter de peu de celles

réalisées dans la nature.

Tout modèle est élaboré au moyen d'un certain nombre de données

acquises, inégalement précises, et d'hypothèses diversement exactes. La pre¬

mière application d'un modèle est précisément de contraindre à la cohérence entre

les données et les hypothèses introduites. Il oblige donc à réviser des hypothèses

incompatibles soit entre certaines conditions aux limites supposées, soit entre
- 54 -

celles-ci et des faits observés (répartition des transmissivités admise,

régime observé, etc. . .) ce qui peut conduire à des observations complé¬

mentaires dirigées à bon escient.

Cela s'applique tout particulièrement aux composants du bilan :

la cohérence entre les évaluations de débits aux limites, les informations

disponibles sur les paramètres du terrain et les fluctuations piézométriques

peut être vérifiée. La simulation peut conduire à resserrer les fourchettes

de certaines évaluations ; de même elle permet la recherche de la valeur

inconnue d'un composant compatible avec les autres conditions, ou au

contraire elle peut mettre en évidence des lacunes ou des impossibilités.

Les modèles peuvent donc constituer un outil efficace notamment pour

évaluer l'alimentation globale d'une nappe et rechercher sa distribution

dans le temps et dans l'espace, mais ils ne constituent pas des moyens

d'évaluation indépendante d'un composant du bilan.

L'emploi de modèles en régime permanent, comme les cuves rhéo¬

électriques, utile surtout pour des recherches de transmissivité, est mal

adapté au traitement des nappes libres en régime variable : il se borne

à vérifier, à une date où le régime est jugé quasi-permanent, la cohérence

entre l'équation des débits et les conditions du système, et à faire appa¬

raître la répartition des débits entrant et sortant la plus probable pour cet

état.

Ces modèles conviennent mieux au traitement des nappes captives,

à condition que les transferts d'eau par drainance à travers les épontes

soient négligeables et que les captages soient en régime permanent : ces

conditions sont, on l'a vu, très restrictives.

Les modèles en régime transitoire (réseau résistance-capacité,

modèles mathématiques conviennent naturellement mieux à la simulation

des nappes, libres notamment, pour l'étude du bilan. En particulier, ils

permettent d'aborder la recherche des apports ou des pertes d'eau par la

surface libre, ainsi que l'évaluation des flux traversant les surfaces-li¬

mites des nappes semi-captives dans le cas de drainance.


- 55 -

2.7. Portée et utilité du bilan

L'établissement d'un bilan de nappe dans un but scientifique im¬

pose de chercher à évaluer d'abord tous les composants discernés indé¬

pendamment les uns des autres, puis les sommes des deux termes, ainsi

que A réserve. L'interprétation de l'écart -ou de l'absence d'écart-

résultant de la confrontation de ces termes, c'est-à-dire de la mise en

équation proprement dite, vient ensuite.

Mais on doit aussi se demander dans quels cas cette recherche

indépendante des deux termes du bilan est utile et significative dans un

but pratigue.

En général on considère que l'objectif pratique de l'établissement

du bilan d'une nappe serait moins de comparer une alimentation à une

sortie d'eau (+ A réserve), pour vérifier l'une par l'autre (?) des éva¬

luations indépendantes, que de permettre si les conditions s'y prêtent,

une évaluation indirecte, par différence, de l'alimentation (définie comme

la somme des sorties d'eau + A réserve) avec une précision meilleure que

par les méthodes d'évaluation directe.

On a vu en effet que pour aboutir à des bilans d'une précision

acceptable c'est bien sur l'évaluation directe des débits sortants et des

variations de réserve que l'effort principal doit être porté. En somme de

ce point de vue le bilan devrait être abordé "par l'aval" et s'écrire :

sortie d'eau + A réserve - alimentation

Cette recherche indirecte de l'alimentation permettrait ensuite de

la relier, par des voies analytiques ou statistiques à ses facteurs directs

définis ou présumés, notamment aux précipitations, et de la relier à divers

"index" (climatiques, géologiques, etc ...).

Mais le fait de convertir en "alimentation", par l'écriture du bilan,

une évaluation d'émission d'eau n'est somme toute qu'une commodité de


- 56 -

langage n'ajoutant pas d'information indépendante, s'il s'agit en définitive

du même "chiffre d'affaire" de la nappe, évalué par le terme le plus acces¬

sible (en général le débit sortant) qu'il suffirait de comparer directement

aux facteurs de l'alimentation si l'on considère des moyennes.

En pratique, la recherche de l'alimentation des nappes par la voie

indirecte du bilan n'est pas un objectif réaliste : elle n'aurait d'intérêt

que pour des périodes assez courtes (ordre du mois) pour lesquelles les

approximations atténuent fortement la validité des bilans possibles ; quant

aux périodes longues, tirer l'évaluation de l'alimentation d'un bilan est

possible mais n'a plus d'utilité.

Sous condition que les valeurs numériques introduites dans le bilan

ne soient pas affectées d'approximations qui lui enlèveraient toute signi¬

fication, le bilan a d'abord pour intérêt de chiffrer en valeurs absolue

et relative les divers "postes" concourant à renouveler l'eau du réservoir

(entrées et sorties), ce qui facilite l'extrapolation à des nappes de "mo¬

dèle" similaire.

Il est plus rare que le bilan puisse avec assez de sécurité permettre

d'estimer par différence A réserve lorsqu'on ne peut l'évaluer directement.

En résumé, l'utilité du bilan devrait être restreinte aux objectifs

suivants :

- estimer indirectement les émissions d'eau (surtout en débit moyen) d'un

système, lorsque leur évaluation directe serait moins précise ou impos¬

sible

- estimer indirectement des variations de réserve, lorsque leur évaluation

directe serait moins précise ou impossible, à condition que l'évaluation

de l'alimentation et des émissions d'eau soit faite indépendamment

- permettre une extrapolation (des débits sortant surtout) à d'autres sys¬

tèmes, selon une validité à apprécier dans chaque cas.


380 : vd eur indépendoite
3 EXEMPLES DE BILAN DE HAPPES SOUTERRAINES Voinr. e>priii<e.s m, 10'm3/an. romanMs à l'onnM moyenne de la période éh«lié..
(51) : voleur déduite por différence

A
ALIMENTATION EMISSIONS

Résarvoir aquifère Superficie Durée RESERVE OBSERVATIONS

Apport Infiltrotion Ecoulement Alimento- Débits Apport à Ecoulement Exploitation


(km 2) (on) Totol Total
d'e<ude efficace souterrain tion aux la zone non souterrain nette

surface o-tificielle émergences solurée et


pertes par
(pertei) lO'mVar mm et droinoge rn'mVan mm
évapotrons-
pirotion

FRANCE

Oou - alluvions quaternaires 520 I 23 (367)' (390) (750) 390 20 30 380 731 as -HO 1-5-62/30-4-63 - P = 554mm
IP-ETrTurc) (13 à 26) (S à 20) * infiltration provenant des irrigations
Nappe libre

Bassin de l'Eyre Sables 2023 1 4 534 534 264 269 235 504 249 (+30) 1961-62 - Ruissellement admis nul. P=958mm.
des Landes - Noppe libre (P-ETr)

Bassin de lo Vanne - 480 6 (50) (50) (104) 50 50 104 as 0 1952-57 - P-ETr Turc = 110, ruissellement
Oaie, nappe libre déduit ; 60- AR admis nul.

Bossin du haut-Escaut - 2021 1 (493) (493) (244) 376 57 16 449 222 -I-44 1-9-60/31-8-61 - P=750mm - 0 P-ETr co

Sensée el Scarpe - Croie, P-ETr Coutogne = 566. 10» ml/ an


nappe libre

Haut bassin de la Loue 160 5 165 (239) (404) (2525) 404 404 2525 2Í 0 Ruissellement et AR négligeables par hypothèse.
(amont Mouthier) - domaine (P-ETr Turc)

karstique

Haut bassin du Doubs 340 5 394 394 1159 231 (163) (394) (1159) ^0 -id.-

(amont Pontvlier) - domdne (P-ETr Turc

karstique

Beauce - Nappe du calera re S9M 2 1042 13 1055 177 474 (202) 30 (706) (118) 361 1966-68 - ETr Turc - Bilan du réservoir aquifère
deBeoüce établi pour une réserve facilement utilisoble de

75iiiB. AR évalué à partir des observotions piézo-

métriqjes - Ecoulement souterrain sortant calculé


par différence.

Haute Somme - Nappe de la 1140 précipi¬ 228 13,7 241,7 212 170 29,7 199,7 175 (43)

craie - noppe libre. tation*

13ant
' IP-ETrTurc)

débit!

7 on»

Paris (nappes superposées 525 ? (10) 19 60 (89) (169) 90 90 171 -0,4 Infiltration efficace = P-ETr Turc sur les surfaces
du Bartonien, Lutétien et alimmto- IP-ETrTurc) (olimento- où rinfiltrotion est possible soit 40% de ta surface

Yprésien). tion par lo ion latérale totale.

Seine

Bassin de to Dommel 1725 12 386 14 400 232 310


-
9 83 402 233 =£ 0 1953-64 P =°712mm - Ruissellement admis nul et
(Pays-Bos) Sables, nappe P-ETr AR observé négligeable, écort : 2, non si^ificetif

libre Penmon

Vallée du Donube 4000 1 1612 216 1828 457 64S 1132 1780 445 + 48 10/62- 10/63 - Calcul p<F formule Lebedev-
Batto- Verde/ C iocane sti (coleulé)> Komenski - AR2¿ écart non significatif

(Roumoiie)

Tafilolt(MorDc)- Alluvions 6X 10 55* :n 1 14 70 111 3 (51) 2 14 (70) (111) seo Année moyenne - A R négligeable

quaternaires, nappe libre Apport par pertes d'eau de surface comprenont


l'infiltration d'eau d'irrigation épsidue.

Triffd (Maroc) - Alluvions 250 5 3 14,4 22 16,8 56,2 225 II 2,3 47,3 60,6 242 -4 Ecart : 0,4 non significatif
calcaires quaternaires
Noppe libre

Souss (Maroc) Alluvions 4000 2f 10 (210/240) 30/60 80/120 :320/420 (80/105) 100/150 30/50 20/30 200/250 350/480 87/120 -50/60

quaternaires - Nappe libre décennole (1950-60) - Surexploitation probable.

Mitidjo (Algérie) Alluvions 1300 ~ 12 40 208 248 191 120 265 385 296 (-137) Armée moyenne 1945-56 environ - Ruissellement
quaternaires - Nappe libre (P-ETr Turc) négligeable - Surexploitation probable.

Nappe captive de Zorzis- 5000 70 1900 1900 380 1800 600 2400 480 (-500) Totaux sur 70 ons, en 10' m3
Djerba (Tunisie)

Bassin de Korhogo (Côte- 3,6 3 6(+«) 6(+x) 1667-Kx) 5,4 »(?) 5,4 (-1- X 1500 + (x) + 0,6 Valeurs cumulées de 3 ois.
d'Ivoire) - Arènes granitiques
Noppe libre
- 58 -

Références des bilans cités

FRANCE

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nappe de la Crau.

(Rapport BRGM inédit DS. 66. A. 125)

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(Bull, techn. Génie rural n° 70, C.R.E. G.R.)

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Jurassique et le Crétacé de l'Yonne.

(Mém. BRGM n° 25, Thèse Paris 1960)

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Sensée, Scarpe
Réserves hydrauliques des bassins de la Sensée

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Contribution à l'étude du bassin du Doubs,

Climatologie, hydrologie et déficit d'écoulement

rapportés aux unités géologiques,

(Thèse doct. 3è cycle Géodynamique, Univers. Paris)

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et MARTINS Cl. (1969)

Etude hydrogéologique du calcaire de Beauce (Esson¬

ne, Seine-et-Marne, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Loi¬

ret) . Synthèse géologique et bilan.

(Rapport BRGM inédit 69 .SGL. 199 .BDP)


- 59 -

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Contribution à l'étude hydrogéologique du bassin

de la Somme.

(Thèse 3è cycle. Université de Paris)

Paris DIFFRE Ph. (1969)

Hydrogéologie de Paris et de sa banlieue,

(Thèse 3è cycle. Université de Paris)

AUTRES PAYS

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A brief study to evaluate the optimal groundwater

withdrawal in a relatively large river basin in the

Nederlands.

(C.R. Ass. Gén. U.G.G.I. Berne, A.I.H.S.,

publ. n° 77, 1968, pp. 181-191)

Danube (Roumanie) ENEA I., FRUGINAE. (1967)

Considérations sur le bilan des eaux phréatiques

de la vallée du Danube.

(C.R. Ass. Gén. U.G.G.I. Berne, A.I.H. S.,

publ.n° 11 , 1968, pp. 149-153)

Tafilalt (Maroc) MARGAT J. (1962)

Mémoire explicatif de la carte hydrogéologique au

1/50 000 de la plaine du Tafilalt.


(Notes et mém. Serv. Géol. Maroc, n"^ 150 bis,

Rabat)

Triffa (Maroc) MORTIER F. (1958)

Eléments pour l'établissement du bilan de la nappe

phréatique de la plaine des Triffa (Maroc oriental) .

(C.R. Ass. Gén. U.G.G.I. Toronto, A.I.H. S.,


publ. n° 44, H pp. 115-124)
60 -

Souss (Maroc) DIJON R. (1969)

Etude hydrogéologique et inventaire des ressources

en eau de la vallée du Souss.

(Notes et mém. Serv. Géol. Maroc, n° 214, Rabat)

Mitidj a (Algérie) TRENOUS J. Y. (1962)

Contribution à l'étude hydrogéologique de la plaine

de la Mitidj a (Algérie) .
(Rev. géogr. phys. géol. dyn. 2, pp. 287-297, Paris)

Zarzis (Tunisie) DANIEL J.M. (1965)

Etude des répercussions d'une exploitation de

longue durée sur un système aquifère artésien.

Etude de l'évolution de l'exploitation de la nappe

artésienne de Zarzis-Djerba.

(Terres et Eaux n° 45, 2è trim. 1965 et Chronique

d'hydrogéologie n° 11, juin 1967)

Korhogo (CÔte FORKASIEWICZ J. , MARGAT J. (1968)

Bilan d'eau de la nappe d'arènes du bassin de

Korhogo (Côte d'Ivoire).

(Bull. BRGM, section III, n° 2, 1968, publ. 1969)


- 61 -

4. CONCLUSION : ressources en eau souterraine et bilan de nappe

Dans quelle mesure l'établissement du bilan d'une nappe est-il

une contribution utile et un préalable nécessaire à l'évaluation des ressources

en eau qu'elle peut offrir ?

Le "modèle" de système aquifère impliqué par l'établissement du

bilan a pour intérêt, en définissant et en chiffrant les importantes respectives

des facteurs d'alimentation et d'émission d'eau, d'indiquer sur lesquels, donc

avec plus ou moins de facilité et dans quelle proportion, l'effet à attendre de

captages sera générateur de la ressource.

Or on a vu que dans la majorité des cas, la ressource provient

d'une réduction des émissions d'eau. La connaissance de la composition et

de la valeur du terme émissions d'eau suffit en elle-même comme base d'éva¬

luation moyenne de la ressource, lorsqu'elle est accessible avec une meilleure

précision que le terme alimentation, ce qui est le cas le plus fréquent. L'in¬

formation ajoutée par l'écriture du bilan, le plus souvent illusoire, est alors

de toute manière inutile.

Le bilan n'a pas non plus d'utilité pratique dans les deux cas-limites

suivants où les débits produits sont indépendants du renouvellement naturel :

- nappe libre très liée à une rivière, où la ressource provient en cas d'exploi¬

tation intense en régime quasi-permanent de réalimentation induite (renou¬

vellement artificiellement accru)

- nappe captive mise en "exploitation minière" (renouvellement naturel négli¬

geable).

Le bilan est par contre utile s'il permet d'évaluer indirectement

les sorties d'eau d'une nappe lorsque leur évaluation directe est difficile ou

impossible :

- soit dans les cas, assez rares, où une évaluation directe de l'alimentation

pourrait être plus précise (A réserve étant accessible également, ou pouvant

être négligé) .

- soit dans les cas où le défaut de données conduit à extrapoler à un domaine


- 62 -

les résultats tirés d'un domaine analogue, "indexés" sur des facteurs

d'alimentation (avec d'éventuels correctifs selon le "modèle" de com¬

paraison) ; les évaluations d'alimentation ont alors surtout le sens d'un

indice.

Mais il ne suffit pas de considérer les ressources moyennes

définies en fonction du débit moyen des nappes. La recherche du régime optimal

d'exploitation, donc de variation imposable aux débits captés peut nécessiter,

si la capacité régulatrice est assez faible (taux de renouvellement élevé)

de connaître la variation absolue de la réserve, et les risques de défail¬

lance de l'alimentation selon diverses fréquences.

Lorsque cette variation de réserve ne peut être évaluée direc¬

tement, il est rare que le bilan alimentation/émission puisse contribuer à

estimer avec une approximation acceptable la différence de réserve, et

encore faut-il en outre connaître la grandeur absolue de la réserve pour un

état donné. On ne peut pas non plus attendre du bilan des indications pré¬

visionnelles de caractère probabiliste. Un bilan est d'autant plus exact

qu'il sera moyen, et par là même moins utile.

La portée pratique du bilan des nappes pour l'évolution des res¬

sources en eau souterraine paraît donc devoir être restreinte à quelques cas

particuliers. Aussi son établissement ne s'impose pas aussi généralement

qu'on ne l'a considéré dans les études d'hydrogéologie appliquée. L'intérêt

pratique attaché abusivement au bilan semble bien provenir d'une confusion

avec la notion de l'équilibre dont la rupture entraînerait la "surexploitation".

Mais plutôt que le bilan d'eau descriptif entre l'alimentation d'une

nappe et ses débits sortants, il importerait davantage, du point de vue prati¬

que, de dresser le "bilan" confrontant les quantités d'eau prélevées avec les

modifications (en -i- ou -) déterminées par l'influence des captages aux débits

naturels entrant ou sortant aux limites. Ceci revient à comparer la composi¬

tion du terme "émissions d'eau" dans les conditions initiales, à la "recompo¬

sition" pouvant résulter de nouveaux captages. C'est le déséquilibre de ce

bilan qui équivaut à une surexploitation, se manifestant par la diminution de

la réserve.
- 63 -

De plus, on a vu que la définition des ressources en eau sou¬

terraine ne doit pas toujours être subordonnée au souci d'éviter la "surex¬

ploitation", puisque dans certains cas c'est la seule forme possible d'ex¬

ploitation : nappes captives notamment.


- 64 -

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- 67 -

RAPPEL DES RAPPORTS B.R, G. M. ANTERIEURS SUR CE SUJET

DS 65 A 25 J. MARGAT "Quelques recommandations pour l'établissement

des bilans d'eau".

DS 65 A 42 J. MARGAT "Possibilités d'exploitation saisonnière des

réserves régulatrices des nappes. Note

préliminaire".

DS 65 A 88 J. MARGAT 'Age des eaux souterraines et renouvellement

des réserves des nappes. Réflexions sur les

bases de l'hydrochronologie".

DS 66 A 125 G. DUROZOY "Un exemple de bilan d'eau annuel d'une nappe

J. MARGAT libre : la nappe de la Crau".

DS 67 A 52 G. CASTANY "De la notion de ressource en eau souterraine.

J. MARGAT Des tactiques de captage à une stratégie d'uti¬

lisation optimale des eaux souterraines^

DS 67 A 85 J. MARGAT "Le bilan des nappes captives".

69 SGL 123 O.DELAROZIERE- "Contribution à l'étude des circulations karsti¬

HYD BOUILLIN ques par la méthode des bilans hydrologiques

partiels" .

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