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Problèmes de
linguistique générale, 2
gallimard
y
Emile Benveniste
Problèmes
de linguistique
générale
II
Gallimard
© Éditions Gallimard, 1974.
Avant-propos
M . D j. M oïnfar.
I
Transformations de la linguistique
CHAPITRE PREMIER
Structuralisme et linguistique *
La communication
CHAPITRE III
Sémiologie de la langue *
Ferdinand de Saussure *.
• Semiotica, L a lîa y e, Mouton & Co., I (1969), I, pp. 1-12 et 2, pp. 127-
*35·
1. Note manuscrite publiée dans les Cahiers Ferdinand de Saussure,
15 (i9S7)> P· 19·
2. Charles S. Peirce (1839-1914); Ferdinand de Saussure (1S57-
»9 1 3 )·
44 Problèmes de linguistique générale
1. a ... the w ord or sign w hich man uses is the man him self. F or, as the
fact that every thought is a sign, taken in conjunction w ith the fact that
life is a train o f thought, proves that man is a sign ; so that ev ery thought is
an e x t e r n a l sign proves that man is an external sign » (Peirce, op. cit.,
p. 71).
2. « E verything in w hich w e take the least interest creates in us its
particular em otion, how ever slight this em otion m ay be. T h is emotion
is a sign and a predicate o f the thing » (Peirce, op. cit., p. 67).
3. F . de Saussure, Cours de linguistique generate ( C .L .G .) , 40 éd., p. 21
46 Problèmes de linguistique générale
i . C .L .G ., p. 25.
48 Problèmes de linguistique générale
1. Ci-dessus, p. 47.
2. C .L .G ., p . 35.
La communication 51
II
des divisions (an, mois, jour) s’aligne dans une série infinie
dont tous les termes sont identiques et constants, qui n’admet
ni inégalité ni lacune, de sorte que l’événement à situer est
exactement localisé dans la chaîne chronique par sa coïnci
dence avec telle division particulière. L ’an 12 après jf.-C.
est le seul qui se place après l’an 11 et avant l’an 13; l’an 12
avant J .-C . se place aussi après l ’an 11 et avant l’an 13, mais
dans une visée de direction opposée, qui, comme on dit,
remonte le cours de l’histoire.
Ce sont ces repères qui donnent la position objective des
événements, et qui définissent donc aussi notre situation par
rapport à ces événements. Ils nous disent au sens propre où
nous sommes dans la vastitude de l’histoire, quelle place est
la nôtre parmi la succession infinie des hommes qui ont
vécu et des choses qui sont arrivées.
L e système obéit à des nécessités internes qui sont contrai
gnantes. L ’axe de référence ne peut être déplacé puisqu’il est
marqué par quelque chose qui est réellement survenu dans
le monde, et non par une convention révocable. Les inter
valles sont constants de part et d’autre de l’axe. Enfin le
comput des intervalles est fixe et immuable. S ’il n’était pas
fixe, nous serions perdus dans un temps erratique et tout
notre univers mental s’en irait à la dérive. S ’il n’était pas
immuable, si les années permutaient avec les jours ou si
chacun les comptait à sa manière, aucun discours sensé ne
pourrait plus être tenu sur rien et l’histoire entière parlerait
le langage de la folie.
Il peut donc sembler naturel que la structure du temps
chronique soit caractérisée par sa permanence et sa fixité.
M ais il faut bien se rendre compte en même temps que ces
caractères résultent de ce que l’organisation sociale du temps
chronique est en réalité intemporelle. On n’énonce ici aucun
paradoxe.
Intemporel, ce temps mesuré par le calendrier l’est en
vertu de sa fixité même. Les jours, les mois, les années sont
des quantités fixes, que des observations immémoriales ont
déduites du jeu des forces cosmiques, mais ces quantités sont
des dénominations du temps qui ne participent en rien à la
nature du temps et sont par elles-mêmes vides de toute
temporalité. Compte tenu de leur spécificité lexicale, on les
assimilera aux nombres, qui ne possèdent aucune propriété
Im communication 73
des matières qu’ils dénombrent. Le calendrier est extérieur
au temps. Il ne s’écoule pas avec lui. Il enregistre des séries
d’unités constantes, dites jours, qui se groupent en unités
supérieures (mois, ans). Or comme un jour est identique à
un autre jour, rien ne dit de tel jour du calendrier, pris en
lui-même, s’il est passé, présent ou futur. Il ne peut être
rangé sous l’une de ces trois catégories que pour celui qui vit
le temps. « 13 février 1641 » est une date explicite et complète
en vertu du système, mais qui ne nous laisse pas savoir en
quel temps elle est énoncée; on peut donc la prendre aussi
bien comme prospective, par exemple dans une clause garan
tissant la validité d’un traité conclu un siècle plut tôt, ou
comme rétrospective et évoquée deux siècles plus tard. Le
temps chronique fixé dans un calendrier est étranger au temps
vécu et ne peut coïncider avec lui; du fait même qu’il est
objectif, il propose des mesures et des divisions uniformes où
se logent les événements, mais celles-ci ne coïncident pas
avec les catégories propres à l’expérience humaine du temps.
x. L e détail des faits de langue que nous embrassons ici d ’une vue
Bynthétique est exposé dans plusieurs chapitres de nos Problèmes de lin
guistique générale, I (Paris, 1966), ce qui nous dispense d 'y insister.
84 Problèmes de linguistique générale
te u r p a r le lie n d e q u e lq u e s e n tim e n t, s o c ia l o u a u tr e . U n e fo is d e
p lu s le la n g a g e e n c e tte fo n c tio n n e n o u s a p p a r a ît p a s c o m m e u n
in s tr u m e n t d e r é fle x io n , m a is c o m m e u n m o d e d ’ a c tio n .
Structures et analyses
CHAPITRE VI
Convergences typologiques *
« T h e first te rm o f a c o m p o u n d is u s u a lly a b a re n o u n s te m ,
c o n tra c te d i f th e n o u n is o f th e c o n tra c t c la ss, o r it m a y b e a n o u n
w ith a b s o lu tiv e su ffix in fo r m - t i - (th is t y p e is a sso cia ted to d a y
w ith d e r iv e d v e r b a l n o u n s, a lso fo u n d in o ld p e tr ifie d c o m p o u n d s ),
o r an a d je c tiv e , u s u a lly in a d v e r b ia l fo r m w it h s u ffix - k a - I f th e
fin a l is a tr a n s itiv e v e r b th e a n te c e d e n t m a y r e fe r to its o b je c t
( ‘ in c o r p o ra te d o b je c t ’) in w h ic h case th e v e r b is in fle c te d lik e an
in tra n s itiv e , w ith o u t p ro n o m in a l o b je c t, e .g ., m e p a m - p o ’ p o w a
* w e e d s a g a v e -r o w (s) \ < m e p a m i‘ -X < m c-X * a g a v e p a m i‘-X
* r o w ’ . B u t th e a n te c e d e n t is b a sic a lly a m o d ifie r , a n d its e q u i
v a le n c e to an o b je c t is c o n d itio n e d b y g r a m m a tic a l lo g ic ; e .g .,
Xe. - k w e p o ' n i (in tra n sitiv e v e r b , n o o b je c t) * b u rsts fro m the a ction o f
fire (Xe‘ X) \ C l X a -so ci, - i , k wilo w a (tra n sitiv e w ith tr a n s itiv e in fle c
tio n ) ‘ p a in ts o r e n g r a v e s s o m e th in g (Xa-) zvith flo w e r s , flo ral d e sig n s
(SoëiX ‘ flo w e r ’) * ».
Mécanismes de transposition *
gance » (aussi «fin diseur >'), et à « beau joueur » pour « qui jonc
(et qui sait perdre) avec élégance », ce qui est tout différent de
« bon joueur » — « qui joue bien ». Néanmoins les deux quali
fications « bon joueur »et « beau joueur » ont pour terme opposé
le même « mauvais joueur » qui, selon les cas, signifiera « qui
joue mal » ou « qui perd de mauvaise grâce ». Avec joueur, on
peut donc coupler trois adjectifs :
« bon joueur » < « qui joue bien »
« gros joueur » < « qui joue gros »
« beau joueur » < « qui joue beau » l .
A cette courte liste d’ajectifs transposés d ’adverbes, on
ajouterait haut dans haut-parleur. Ce spécimen unique a bien
la même structure que grand buveur, et théoriquement haut-
parleur renvoie à « qui parle haut ». Mais deux raisons le
mettent à part : i° C ’est un terme technique complètement
fixe et lexicalisé, ce que l’orthographe indique, un nom d ’instru
ment forgé ad hoc et non une caractérisation d ’individu;
2° Et surtout, haut-parleur n’a pas été créé en français et ne
pouvait guère l’être en l’abscncc de tout modèle analogue. La
ligne des innovations lexicales dans ce domaine technique
en français va bien plutôt à des termes comme amplificateur
(de son) qu’à un nom descriptif, imagé, et personnifiant
l’instrument, comme haut-parleur. En fait, on sait que haut-
parleur est une traduction, introduite vers 1923, de l ’anglais
loud-spcaker. L e calque était d ’autant plus aisé que loud-
speaker est formé par le même procédé de conversion : loud-
speaker < « speaks loudly ». La liaison serrée entre les deux
membres ( *loud-and-clear-speaker serait impossible) d ’une
part, la diffusion rapide des techniques de la voix, de l’autre,
ont aussi facilité l’emprunt.
Les mêmes observations valent pour l’expression unique,
bien plus ancienne d ’ailleurs, libre-penseur, où libre- fonctionne
comme exposant adverbial, « qui pense librement ». M ais on
connaît l’histoire de cette notion; libre-penseur a été créé au
X V IIe siècle pour calquer l’anglais free thinker (de même que
plus tard libre-échangiste pour calquer free-trader, à partir
de free-trade > libre-échange).
Il vaut la peine de signaler à ce propos les analogies entre le
français et l’anglais dans le mécanisme de cette transposition.
1. T ran sp osition théorique où * beau » d oit être pris au sens indiqué plus
haut.
Structuras et analyses 1-25
A la différence de l’allemand où, l’adjectif et l’adverbe ayant
même forme, on passe sans changement île « er isst viel » à
« ein Vielesser », l’anglais, comme le français, convertit
l’adverbe en adjectif quand le verbe est transposé en nom
d’agent en -er. Cette transformation est parallèle à celle qui
a été décrite pour le français et elle a pour signe, en partie,
des adjectifs de même sens. On y recourt surtout pour carac
tériser un comportement habituel dans une fonction phy
sique. Les adjectifs les plus communs sont pour la qualifi
cation, « good (opp. bad) » : « a good (bad) driver »; pour la
quantification on dispose degreat («agreat eater »), mais aussi
de heavy : « a heavy drinker (srnoker, sleeper) » < « he drinks
(smokes, sleeps) heavily »; et de hearty : « a hearty eater » <
« eats heartily ». On peut ainsi différencier en anglais par des
lexèmes explicites les valeurs diverses de qualité et de quantité
impliquées en français par « bien manger » et qu’ « un bon
mangeur » ne peut transposer complètement.
Ces remarques ont fait ressortir la diversité des valeurs qui se
révèlent à l’examen dans la classe des noms d’agent en -ciir,
habituellement traitée comme unitaire. C'est en replaçant
chacune de ces valeurs dans le cadre syntaxique dont elle
relève et en partant de la construction verbale qu’elle transpose
qu’on peut mettre en lumière les mécanismes qui produisent
et qui différencient ces catégories nominales.
CHAPITRE IX
11
Tli
net... » 1.
Le rôle de vor demeure le même dans cet emploi spécifique.
1. G rim m , p. 788-789.
140 Problèmes de linguistique générale
Fonctions syntaxiques
CHAPITRE XI
11
i
LES CO M PO SÉS SAVAN TS
II
COM POSITION ET SYNAPSIE
1. Loc. cit., p. 5.
2. Loc. cit., p. 10.
3. Loc. cit. pp. 1 i - i z .
4. C ’est le titre de son article publié dans les Mélanges C h. B ally (1939),
p p . 153-183.
5. Op. cit. p. 160.
6. L . T esn ière a touché au problèm e des « tem ps com posés » dans p lu
sieurs passages de ses Éléments de syntaxe structurale (1959), pp. 47, 159«
398, mais il se borne à renvoyer à l'article cité.
Fonctions syntaxiques 179
que ce soit avoir et non un autre verbe, qui ait etc choisi pour
auxiliant du parfait actif. Son sens propre doit aussi entrer en
ligne de compte.
De cette observation on tirera une conclusion qui n’est
paradoxale qu’en apparence : c’est en réalité par son sens que
l’auxiliant, et par sa forme que l’auxilié, se complètent pour
réaliser la valeur propre du parfait.
Ainsi l’examen du rôle à assigner aux deux membres du
syntagme d ’auxiliation temporelle nous amène à introduire
une distinction entre i) la fonction propre de chacun d’eux;
2) la fonction de leur somme.
L ’auxiliant « avoir » (a être ») a en propre la fonction de
flexion : il porte en quelque sorte les désinences et indique la
personne, le nombre, le mode, la voix.
L ’auxilié (participe passé) a en propre la fonction de déno
tation : il identifie lexicalement le verbe, dont il porte en
quelque sorte le radical.
Mais seule la somme de l’auxiliant et de l’auxilié, associant
le sens spécifique de Vauxiliant à h forme spécifique de Yauxilié,
assure la fonction de temporalité et produit la valeur de parfait.
L ’auxiliation de temporalité est ainsi le procédé d’auxiliation
qui confère à la forme verbale composée qui en est le produit,
le trait distinctif de « fait acquis » qui caractérise le parfait.
En somme, le rôle et la relation des unités conjointes peu
vent se définir ainsi :
le parfait est la forme temporelle scindée en deux unités
autonomes et séparables, dont la première, dite auxiliant,
porte les désinences sous la forme fléchie du verbe « avoir »
(« être »), et la seconde, le sens lexical du verbe sous la forme
fixe du participe passé, la jonction de l'auxiliant et de l’auxilié
produisant la valeur spécifique de « fait acquis ».
il a eu chanté
H d ___! I
II
III
IV
dir. _ le les
je vie te vous
indir. — lui leur
dir. le les
nous WONS te vous
indir. — lu i leur
dir. _ le les
tu me tlOUS te
indir. — lui leur
dir. _ le les
vous me nous vous
indir. — lui leur
dir. le les
il vie nous te vous se
itidir. lui leur
dir. le les
ils me nous te vous se
indir. lui leur
M o d e im p é r a t if
dir. le les
2e sg. moi nous toi
indir. — lui leur
dir. — — le les
I re pl. nous
indir. — lui leur
dir. _- le les
2e pl. moi nous vous
indir. — lui leur
L'homme dans la langue 207
le le le U U
Je me — te vous — — lui leur
les Us Us Us Us
le U le U le
noua — nous te vous — — lui leur
les Us Us Us Us
le le U le Ie
tu me nous te — — — lui leur
les les les Us Us
le le le U le
vous me nous — vous — — lui leur
les les Us les Us
le le le U U U U
il me nous te vous se — lui leur
les les les Us Us les Us
le le le U le U U
ils me nous te vous — se lui leur
les Us Us les Us Us Us
M ode im pé r a tif
il il il il üi
+ je - j- n o u s + tu - )- v o u s + >ia -f-ilsü
ils ils ils ils ils j ils i
le le le te le
2 e S g. moi nous toi — lu i leur
les les les les les
le U le
I er p l. — nous — — lu i leur
les les les
le U le le le
2 e p l. moi nous — vous lu i leur
les les les les les
L'homme dans la langue 209
on devrait avoir :
3e *je le le ... — *tu te le ... — *il le le ...
lui, il, le. C ’est juste l’opposé des autres personnes qui pour
trois formes au singulier en ont une seule au pluriel : m o i ,
je me (repose); t o i , tu te (reposes) ~ nous, nous nous (repo
sons); vous, vous vous (reposez).
De plus, l’antonyme Eux est aussi la forme régie par une
préposition, ce qui limite leur à la fonction grammaticale
d ’objet indirect du verbe, sans distinction de mode ni de
genre.
Ce dédoublement eux/leur du pluriel en face de l’unique lui
du singulier ne nous paraît susceptible d’aucune explication
synchronique. Des raisons d’euphonie (je le leur... pour
éviter *je le eux...) ou d’attraction phonétique (leur avec
la même initiale que lui) ne seraient pas suffisantes. L ’histoire
des formes peut seule en rendre compte.
On ne peut également que constater la coïncidence formelle
de leur, pronom objet indirect du pluriel, avec leur possessif.
Mais ici la coïncidence est sans portée; l’examen montre que
les deux formes sont complètement différentes par leur
statut et leurs fonctions. En regard du tableau (p. 208) qui
situe le pronom leur dans le paradigme pronominal, il ne sera
pas inutile de présenter leur dans le paradigme des adjectifs
dits possessifs.
Singulier Pluriel
je mon mes
nous notre nos
tu ton tes
vous votre vos
il son 1 ses
ils leur leurs
Entre l’adjectif leur et le pronom leur les différences décou
lent de leur statut respectif :
i° L ’adjectif possessif est un qualifiant à double relation
de nombre, à la fois avec l’objet (possédé) et avec le sujet
(possédant) : leur coordonne un possédé singulier et un
possédant pluriel de 3e personne.
Le pronom leur se réfère exclusivement à un pluriel et
seulement comme objet indirect.
DISCUSSION
Lexique et culture
CH APITRE XVI
hic sui dat pignus oris, ut ferunt, orarium \ avec figure étymo
logique, orarium sui oris. D ’autres exemples de la latinité
chrétienne, plus récents, sont cités par R o n sch 2.
On peut donc voir dans le choix de orarium chez les pre
miers traducteurs des Évangiles pour le aouSâpi-ov de Jean n ,
44, un reflet de l’usage commun, et dans le sudarium que la
Vulgate y substitue, le souci du bien dire. C ’est un fait du
même ordre que le remplacement de Iauacrm:i qui était le
premier terme latin pour « baptême » par baptisma (-mus).
Mais l’apparition de orarium dans l’Itala n’intéresse pas
seulement l’histoire du vocabulaire latin. Elle a eu au dehors
des conséquences qui n’ont pas encore été aperçues.
La version gotique des Évangiles nous est conservée pour
deux des passages, cités plus haut, où grcc cro'jSâp'.ov et latin
sudarium se répondent. 11 est intéressant de voir comment
Wulfiia le traduit.
Le premier exemple est Luc ig, 20 « (ta mine que j ’ai
gardée enveloppée) âv couSapio), in sudario », en gotique :
(sa shatts peins panei habaida galagidana) in fanin. Ce mot
gotique fana rend ailleurs (M t 9, 16; M e 2, 21) gr. pa/.oç, lat.
pannus « pièce de tissu (pour réparer un vêtement) ». Le tra
ducteur a donc pris ici sudarium non dans son sens propre,
mais dans son acception contextuelle de « pièce d ’étofle,
linge (à envelopper un objet quelconque) ».
Le second exemple gotique est, par chance, Jean n , 44,
« son visage était enveloppé d ’un linge (oouSapuo) », le pas
sage même où l’Itala donne orarium et la Vulgate sudarium.
Il est traduit : zolits is auralja bibundans. L e terme gotique
n’est plus fani, mais aurait qui, comme on l’a reconnu depuis
longtemps, est pris du latin orarium 3. On constate donc un
La blasphémie et Vcuphcmie *
offert par l’article minutus du Thesaurus linguae latinae ( V III , p . 1038 sq.),
nous avons choisi qu elqu es citations caractéristiques. D ’autres nous ont
été fournies par nos propres lectures.
2. C om m e le d it E rn ou t-M eillet, p. 405 a. Il y a eu quelques su b stitu
tions de minutus à parvus, m ais seulem ent au sens figuré, et C icéron les
condam ne : « ab u tim u r saepe verbo, u t cum grandem orationem pro m agna,
minutum anim um pro parvo dicim us » (in Orat. 27).
3. F ragm en t d ’une E pistula L atin a de V arron ap. N on iu s 141, i3-T/esens
a été élucid é par H . D ahlm nnn, Museum Helveticum V I I (1950), p. 211 sq.
qui renvoie à Suétone A ug. 83 ludebat cum pueris minutis, et fait une
observation ju ste, mais som m aire et incom plète, sur l’o pposition minutus/
maior.
4. V arron, R .R . III, 17, 6
5. V arron , op. cit., I l, 7, 4
Lexique et culture 261
1. Varron, L .L ., V II, 1.
2. Ibid. IX , 8.
3. Acad. II, 120. L e grammairien Apulée dit aussi de M yrm ecides :
« F u it sculptor admirandus in minutis marmoreis operibus formandis »
(Orthogr. 57).
4. C f. Elien, V . H . l , J 7;A th . X I, 782 b, Pline, V II.2 I, 2 i, X X X V I , s, i s .
5. C f. Blüm ner, Dcr M aximaltarif des Diokleitian, p. 106.
6. Varron, R .R . III, 1, 10.
7. Pline X V I , 225 éd. et trad. André.
268 Problèmes de linguistique générale
1. C f. L iv. X X X V , 41, io .
2. C elles que nous donnons son t prises au D ictionn aire de G od efroy,
sous les m ots en question. C f. aussi T o b le r-L o m m a tzsc h , A ltfr. Wb. I,
P- 3 4 i ; V , p . 1455 m -
Lexique et culture 269
1. V o ir sur cette formation G . Redard, Les noms grecs en -tés, -tis (Paris,
1949), p. 20 sq.
2. Parfois, mais très rarement, politês se dit du « concitoyen ». Normale
ment politës ne se prête pas à la construction avec un pronom de personne
278 Problèmes de linguistique générale
civitas polis
t.
civis
±
polîtes
I l a é lim in é le m o d è le la tin , p u is q u e c ’e s t l ’a n c ie n d é r iv é
s e c o n d a ir ecivitas q u i e s t d e v e n u d a n s le s la n g u e s r o m a n e s le
t e r m e p r im a ir e : fr. cité, it. città, e s p . ciudad, s u r le q u e l s ’e s t
c o n s t r u it le d é r iv é n o u v e a u fr . citoyen, ita l. cittadino, e s p .
ciudadano. U n b in ô m e n o u v e a u cité : citoyen a s u c c é d é a u
b in ô m e in v e r s e la tin civis : civitas. I l v a u d r a it la p e in e d e
r e c h e r c h e r e n d é t a il s i c e t t e r e c r é a tio n a p r o c é d é d e c a u s e s
m é c a n iq u e s : r é d u c t io n p h o n é t iq u e d e civitas d a n s le s la n g u e s
r o m a n e s e t é lim in a t io n d e civis, o u s i e lle a e u u n m o d è le
( c e q u i e s t le c a s d e v . s la v e grazdaninü, im it é d u g r e c polîtes).
T o u t e l ’h is to ir e le x ic a le e t c o n c e p t u e lle d e la p e n s é e p o lit iq u e
e s t e n c o r e à d é c o u v r ir .
Index
à (joncteur), 17 2 , 174 sq. auxilié, 179 sq., 192 .
actif, 185 sq. sur-, 185 .
adjectifs, 113 sq. (en -eur), 1 6 1 , avestique, 134 , 15 2 , 154 , 158 1.
162 , 248 . avoir, 180 sq.
allemand, 107 , n o , 12 5 , 137 sq., aztec, 109 sq., 135 .
146 , 159 , 245 (v.h.a.), 248 , bahuvrïhi, 150 a, 155 sq.
278 , 280 . binarité, 223 .
altaïques, 136 . blasphémie, 254 sq.
(a)mcnuiser, 258 , 269 sq. catégories, 126 sq.
anglais, 107 , 1 1 2 , 124 , 12 5 , 146 , chinook, 7 5 .
149» 1 5 1 » 1 5 2 , 155. 159. 230 , cité, 273 sq.
245 (vieux — ), 269 l, 280. communication, 86 , 1 0 1 , 227 ,
anthropologie, 38 . communion p ha tique, 86 , 87 ,
antonyme, 200 sq., 2 10 . composition, 145 sq., 163 sq.,
aoriste, 7 5 , 130 . 171 sq.
arbitraire, 4 9 , 50 , 14 7 , 2 25 . composé(s), 103 sq., 145 sq.
[arabe], 1 5 7 . — conglomérés, 1 7 1 .
argument, 180 . — exocentrique, 156 .
art(s), 27 , 28 , 56 sq. — savants, 163 sq.
assomption (modalisants d' — ), — de dépendance, 149 .
192 . — possessif, 15 6 .
arménien, 242 , 246 , 2 6 4 5, concept, 247 , 248 , 250 .
276 . conceptualisation, 247 .
assertion, 84 . condition (directive, mesura-
auxiliaire, 177 sq. tive, stative), 7 1 .
auxiliant, 179 sq. conglomérés (composes), 1 7 1 .
quasi-, 192 , 193 . connexion, 225 .
sur-, 192 , 19 3 . coordination, 14 7 .
auxiliarité, 1 7 7 sq. culture, 22 sq., 28 , 60 , 92 , 9 3 ,
auxiliation, 127 sq., 179 , 180 , 96 , 98 , 238 , 272 .
186 , 190 , 227 . corpus, 18 , 3 1 .
— de diathèse, 179 , 185 sq., culturologie, 2 6 .
190 , 193 . dalmate, 242 .
— de modalité, 17 9 , 187 sq. de (joncteur), 172 sq.
— de temporalité, 179 sq., 185 démonstratifs, 69 .
sq. dépendance (composé de — ),
s u r — , 184 , 185 , 188 sq., 192 . 14 9 .
284 Problèmes de linguistique générale
I. Structuralisme et linguistique.................................... 11
il. Ce langage qui fait l'histoire..................................... 29
II. LA COMMUNICATION
n i. Sémiologie de la langue................... 43
IV. Le langage et l'expérience humaine........................... 67
v. L'appareil formel de l'énonciation............................. 79
I V. FONCTIONS SYNTAXIQUES
in d e x 283
Volumes parus
1 3 8 7 0 8
EMILE BENVENISTE
Problèmes de
linguistique générale, 2