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Février James Germain. L'inscription punique de Pyrgi. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et
Belles-Lettres, 109ᵉ année, N. 1, 1965. pp. 9-18;
doi : 10.3406/crai.1965.11792
http://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1965_num_109_1_11792
COMMUNICATION
L'INSCRIPTION PUNIQUE DE PYRGI, PAR M. JAMES FÉVRIER
Dans un cas au moins le point est remplacé par une petite barre
verticale, pour séparer deux phrases et non plus deux mots. Subtilité
grammaticale rare, mais qui se retrouve au milieu du ixe siècle sur
la stèle de Mésa, roi de Moab. L'écriture est encore très proche de
l'écriture phénicienne ; elle rappelle la graphie de deux inscriptions
puniques gravées sur des trônes de pierre (n08 5684 et 5685 du
CIS, i) et qu'on attribue aux environs de 500 avant notre ère. Le
texte a déjà été étudié par deux éminents sémitisants italiens,
MM. Levi délia Vida et Garbini. J'ai pu omettre de les citer aussi
souvent qu'il aurait été nécessaire, je les prie de m'en excuser.
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l'inscription punique de pyrgi 11
Traduction.
Commentaire.
suffixe : yod, aleph (avec valeur o) et mêm (avec valeur -im). Ma thèse
(Revue d'assyriologie, xlvi, 1952) a été adoptée et reprise par le
grand grammairien du punique, Joh. Friedrich (ZDMG, 1957,
p. 290-292). Nous avons affaire ici à une graphie archaïque pour o ;
elle est déjà attestée dans l'inscription de Yehimilk au xe siècle à
Byblos. Donc le temple était édifié sur un haut lieu et contenait
lui-même le « lieu saint ».
Au début de la ligne 2 le démonstratif 'z est écrit avec un aleph
prosthétique. G. Levi délia Vida a signalé avec raison cette
particularité à Chypre, mais elle se retrouve dans le monde punique et y a
persisté jusqu'à l'époque néo-punique (NP 54).
La fin du nom de Tiberie, comme celle de Kisrie (= Caere) est
écrite en orthographe phonétique. L'emploi de Y aleph comme mater
ledionis avec valeur e me paraît être spécifiquement punique,
encore que Mark Lidzbarski semble l'admettre en certains cas en
phénicien (Ephemeris, n, p. 9-10)1. La transcription punique du
mot Tiberie, à savoir T(i)b(e)rie, a beaucoup intrigué M. Pallottino.
Dans les deux textes étrusques nous avons defarie, avec un thêta
et un f. Le problème est de savoir si nous avons affaire à une
véritable transcription phonétique ou à une simple translittération,
plus ou moins arbitraire. En tout cas la forme punique implique
que le taw n'est pas spirantisé puisqu'il est à l'initiale. Pour le bet
je n'ose rien affirmer, mais je serais étonné qu'il l'ait été à aussi
haute époque.
L'expression mlk *l kysry' « roi sur caere » a embarrassé les
commentateurs : la formule « roi sur » (et non pas : « roi de »)
pourrait indiquer, suggèrent-ils, que notre Tiberie n'était pas un roi
véritable, mais une sorte de « tyran » au sens grec du mot. On peut
supposer aussi que mlk est ici un participe « régnant sur Caere »,
construction très correcte. La date nous est donnée simplement
par l'indication du mois : « dans le mois du sacrifice du Soleil » ou
à la rigueur : « du sacrifice au Soleil ». M. G. Levi délia Vida a corrigé
sms « soleil » en ssm « soixante ». Dans cette inscription le mêm ne
diffère du shin que par l'adjonction d'une haste oblique ; dans
l'inscription de Mesa, ligne 4, il faut sans doute aussi corriger slkn,
qui n'a aucun sens, en mlkn « rois ». Clermont-Ganneau comparait
le mois du « sacrifice des Soixante » à Y Hekatombaiôn grec et voulait
en faire le premier mois de l'année phénicienne (RAO, ni, p. 16,
n. 1). Mais il est possible que le mois du « sacrifice au Soleil » se
retrouve dans une inscription phénicienne de Chypre (CIS, i, 13).
temps après la dédicace du « lieu saint », car c'est sans doute dans
ce lieu saint que se célébrait le mystère. Cette date est indiquée
comme étant la troisième année du règne, dans le mois de Karar,
le jour de la sépulture du dieu. Assurément dans la première partie
de la formule on attendrait bsnt sls lmlky plutôt que lmlky snt
sls ; mais j'estime avec M. Levi délia Vida qu'il n'y a pas lieu de
s'arrêter à cette objection. Une autre objection, bien plus grave,
peut être faite : comment admettre que le mariage de la déesse ait
pu être célébré le jour même de l'ensevelissement de la divinité ?
Cette objection ne vaut que si on admet que le terme elim «
divinité » s'applique ici à Astarté ; auquel cas on pourra alléguer, avec
M. Levi délia Vida, qu'il existait à Paphos un tombeau d'Aphrodite.
Mais il est aisé de répondre que le mot elim « divinité » s'applique
aussi bien à un dieu qu'à une déesse. Il peut donc s'agir — et à mon
avis il s'agit — non point des funérailles de la déesse, mais de celles
du dieu mâle qui lui était associé. Aux environs de 500 la religion
carthaginoise était encore toute proche de celle de Tyr, métropole
de Carthage. On songe donc tout naturellement à Melqart, le « Roi
de la Ville », appelé « maître de Tyr » sur une inscription de Malte
(CIS, i, 122). Une onomastique extrêmement riche nous montre
quelle fut à haute époque la popularité de Melqart à Carthage
même. Or Melqart fut, selon l'expression d'un de ceux qui se sont
occupés de lui le plus récemment, un dieu « de la fécondation et de
la procréation ». C'était aussi un dieu « renaissant » : nous savons
par Ménandre, cité par Josèphe (Ant., vin, 5, 3) qu'on célébrait à
Tyr au mois de Peritios (mars) l'éveil d'un Héraklès, c'est-à-dire
de Melqart : tou 'HpaxAéouç è'yepatv ; cet éveil ou ce réveil ne pouvait
être que la suite d'une mort momentanée. Mais comment expliquer
le mariage d'Astarté avec son époux mort ? Il peut s'agir d'un
hieros logos proprement phénicien, mais une influence égyptienne
n'est pas exclue. On connaît des représentations figurées qui nous
montrent Isis, ayant pris la forme d'un faucon femelle, posée sur
le corps inerte d'Osiris et fécondée par lui (temple de Séti ier à
Abydos).
♦*♦
LIVRES OFFERTS
Son Ëminence le Cardinal Eugène Tisserant a la parole pour un hommage :
« J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Académie le deuxième volume
de la Bibliographie des Archives du Vatican, dont j'ai présenté le premier volume
le 25 janvier 1963. Ce volume contient les mentions d'articles et de livres publiés
à partir du 1er janvier 1921. Plus de 800 volumes ou articles ont été dépouillés ;
la reproduction des fiches en format réduit, avec les indices, remplit 850 pages.
Le troisième volume est en cours d'impression ».