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Cahiers de Fanjeaux
Publication annuelle d’histoire religieuse
44
du Midi de la France au Moyen Âge
Moines et religieux
dans la ville
(XIIe-XVe siècle)
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Cécile CABY
Cépam (UMR 6130), Université de Nice-CNRS / Institut universitaire de France
En effet, bien que (ou parce que) connus de tous pour être
fréquemment cités au détour de monographies urbaines ou
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collective les miracles de tel ou tel frère. Ce que je veux ajouter ici
est que ce chapitre fonctionne comme un véritable réservoir de
mythes de fondations, tout à fait insolites dans le contexte men-
diant, et qui contribuent à légitimer, sur un mode extrêmement
proche des récits de fondation monastiques, le rapport des frères
prêcheurs à leurs lieux de vie, un rapport remis en cause par la que-
relle avec les séculiers, tant en raison de la critique de la prédica-
tion itinérante que des effets déjà mentionnés de l’implantation des
couvents en matière de territorialité cultuelle des villes. Selon un
processus mémoriel bien mis en évidence pour les discours monas-
tiques 38 , ces récits s’efforcent de légitimer le choix du lieu
d’implantation des futures maisons par une révélation dont le vec-
teur principal est, en général, la vision ou le rêve soit de fidèles
pieux, soit, à l’inverse, d’hérétiques qui ne s’en convertissent que
plus rapidement. Les modalités de la révélation sont variables,
mais deux signes reviennent de façon récurrente. Il s’agit, d’une
part et sans surprise, de signes lumineux, mode par excellence de
l’irruption du ciel sur la terre, métaphore bien enracinée des
« hommes apostoliques » et élément important des rituels de dédi-
cace39 : à Bologne, « des vignerons virent beaucoup de splendides
lumières sur le site où sont maintenant les frères », à Côme, une
femme hérétique « vit dans une vision un grand feu venir du ciel
sur le lieu où les frères vivent aujourd’hui »40. Il s’agit, d’autre
part, de signes renvoyant métaphoriquement à la fonction évangéli-
satrice des Prêcheurs, comme les deux vases débordant de miel et
de vin ou la grande et claire fontaine irriguant l’ensemble de la
ville41. Je m’attarderai davantage sur un dernier type de révélation,
onirique ou visionnaire, faisant intervenir des hommes, en général
vêtus de blancs, évoluant en procession et parfois accompagnés de
choeurs angéliques (Bologne) : Géraud rapporte ce type de révéla-
tion à propos de la désignation des loca de Montpellier, de
Limoges ou de Viterbe42. Mais c’est dans un paragraphe ajouté,
après l’approbation de son œuvre par le chapitre de Strasbourg en
1260, par Géraud lui-même (1265-1271) que se trouve le récit de
fondation le plus articulé, mais aussi le plus surprenant par sa
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des rituels de consécration tels qu’ils sont fixés dans les pontifi-
caux, notamment (pour notre période) ceux d’Innocent III et
Innocent IV et celui de Guillaume Durand. On y retrouve, en effet,
le caractère processionnel – auquel renvoient également un certains
nombre d’autres récits déjà cités –, l’usage des encensements qui,
comme les lustrations, constituent une étape importante du rite de
consécration, du signe de la croix, enfin, l’importance de la figure
du cercle, notamment la procession circulaire et sa logique de
sacralisation de l’espace. Cet écho ponctuel à des gestes ayant pour
fonction de sacraliser l’espace est d’autant plus intéressant que,
indépendamment de cet exemple, les Vitae Fratrum mettent à plu-
sieurs reprises en scène la bénédiction et l’aspersion de lieux de vie
communs – notamment le dortoir – en particulier par la Vierge ou
par des processions angéliques, comme pour mieux affirmer le
caractère sacré des lieux de vie, par-delà le moment inaugural de la
fondation46.
surtout, mais aussi des laïcs, ceux que Bernard Gui nomme patrons
du lieu – en employant un terme dont il faudrait d’ailleurs appro-
fondir l’usage spécifique dans l’ordre57 – et qui procèdent très nor-
malement à la pose de la première pierre, conformément à un usage
très ancien que les pontificaux du XIIIe siècle avaient pourtant
cherché à écarter au profit de la cléricalisation de ces gestes.
disert sur les nouveaux lieux d’implantations, Bernard Gui ne dit rien
ou presque rien des sites abandonnés, alors que la législation cano-
nique, reprise d’ailleurs par Boniface VIII, ne laissait pas au hasard
le sort des lieux consacrés (en particulier les églises et les cimetières)
et interdisait notamment que ces lieux soient abandonnés à des
usages profanes 71. On apprend de fait, au détour d’une rapide
remarque, que, à Toulouse, les maisons de Pierre Seilhan, reçues en
1215 et abandonnées pour le site de Saint-Romain, ne furent pas
totalement délaissées puisque l’Inquisition y fut installée en 130372.
C’est d’ailleurs en qualité d’inquisiteur que Bernard Gui y habita
entre 1307 à 1324, s’efforçant sans doute alors d’y raviver et d’y per-
pétuer les souvenirs de la fondation de l’ordre et du séjour de saint
Dominique73. Quant au site de Saint-Romain, abandonné en raison
de son étroitesse après environ quinze ans de résidence, son église y
fut totalement délaissée par les frères, au grand regret de Bernard
Gui (prefatam ecclesiam patri nostro gratis collatam et confirmatam
filii improvide penitus deserentes) mais aussi en contradiction avec le
droit ecclésiastique 74. Dans un autre cas, celui de Montauban,
Bernard Gui évoque à regret l’abandon des dépouilles d’un prieur
sur le premier site perturbé par une crue du Tarn75, soulignant a
contrario l’usage de transférer les cimetières et l’importance de ces
espaces funéraires dans la sédentarisation des communautés, une
importance déjà signalée à propos de l’exubérance rituelle dont ces
espaces font l’objet. Ajoutons au passage que les inondations étaient
précisément un des motifs évoqués par le droit canon pour légitimer
le déplacement des cimetières76. À l’inverse, à Lectoure, on apprend
incidemment que le premier site, bien qu’abandonné, était resté entre
les mains des frères. En effet, alors que le conventus de Lectoure
avait été officiellement institué depuis 1287, sur un site occupé
depuis l’année précédente, en 1296, le prieur fait transférer sa com-
munauté infra villam77. Mais dix ans plus tard, les frères reviennent
sur le premier site en raison de l’étroitesse et sans doute des intru-
sions laïques dans le site du centre urbain78.
Bernard Gui n’évoque pas toujours les motifs explicites de ces
transferts et plus rarement encore les éventuelles difficultés de tous
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temps été perçu comme plus valorisant au point qu’on avait choisi
de s’y transférer.
Reste que Bernard Gui – qui écrit après l’intervention du pape
Boniface VIII visant entre autres à discipliner les transferts, dont
l’exemple de Millau montre toute la charge conflictuelle dont ils
étaient potentiellement porteurs, dans des villes dont les centres
étaient déjà densément construits – entend donner de ces muta-
tiones une image apaisée, aussi bien du point de vue de l’ordre
– d’où leur insertion sans heurt dans la succession des prieurs et
l’insistance sur la motivation pastorale des transferts –, que de
l’institution ecclésiale ou des communautés d’accueil. C’est en ce
sens qu’il faudrait d’ailleurs approfondir l’insistance de notre
auteur sur les rituels accompagnant ces transferts – comme les pro-
cessions solennelles, à des dates apparemment choisies pour leur
valeur symbolique –, autant de gestes créateurs d’un espace et
d’une communauté sociale unifiée autour du couvent81.
CONCLUSION
Notes
Sigles et abréviations
Sources
– Bullarium Franciscanum : Johannes Hyacinthus Sbaralea, Bullarium francis-
canum, Rome : Typis Sacrae Congregationis de Propaganda Fide, t. II, 1761,
et t. IV, 1768.
– De fundatione : Bernardus Guidonis De fundatione et prioribus conventuum
provinciarum Tolosanae et Provinciae ordinis Praedicatorum,
éd. Paul Amargier, Rome (Monumenta ordinis fratrum predicatorum historica,
24), 1961.
– Humbert, Opera de vita regulari : Humbert de Romans, Opera de vita regula-
ri, éd. J. J. Berthier, t. II, Rome : A. Befani, 1889.
– Vitae fratrum : Géraud de Frachet, Vitae fratrum ordinis Praedicatorum,
éd. Benedictus Maria Reichert, Rome, Stuttgart, 1897 (Monumenta ordinis
fratrum predicatorum historica, 1).
Travaux
– AFP : Archivum fratrum Praedicatorum.
– CF : Cahiers de Fanjeaux.
– CF 16 : Bernard Gui et son monde (1261-1331). CF 16, 1981.
– CF 36 : L’ordre des Prêcheurs et son histoire en France méridionale. CF 36,
2001.
– Caby, « Il costo dell’inurbamento » : Cécile Caby, « Il costo dell’inurbamento.
Monaci e frati a confronto », dans L’economia dei conventi, 295-338.
– Construction de l’espace : Construction de l’espace au Moyen Âge : pratiques
et représentations. Actes du XXXVIIe Congrès de la SHMES (Mulhouse, 2-4
juin 2006), Paris : Publications de la Sorbonne (Histoire ancienne et médiéva-
le, 96), 2007.
– Delisle, Notice : Léopold Delisle, Notice sur les manuscrits de Bernard Gui,
Paris : Imprimerie nationale, 1879.
– L’economia dei conventi : L’economia dei conventi dei frati Minori e
Predicatori fino alla metà del Trecento. Atti del XXXI Convegno internaziona-
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bibliographie antérieure) ; id., « The Jacobin Church of Toulouse and the Origin of
Its Double-Nave Plan », The Art Bulletin, 71, 1989, 185-207. Pour élargir aux
autres Mendiants : Wolfgang Schenkluhn, Architettura degli Ordini mendicanti :
lo stile architettonico dei Domenicani e dei Francescani in Europa, Padoue,
2003 ; Volti, Les couvents (très stimulant malgré les limites imposées par la
faible disponibilité des sources régionales), et ead., « L’explicite et l’implicite
dans les sources normatives de l’architecture mendiante », Bibliothèque de
l’École des chartes, 162, 2004, 51-73 ; Caroline Bruzelius, « The Dead Come to
Town : Preaching, Burying, and Building in the Mendicant Orders », dans The
Year 1300 and the Creation of a New European Architecture, éd. A. Gajewski,
Z. Opacic, Turnhout : Brepols, 2007, 203-224, qui renvoie notamment à l’infinie
bibliographie italienne (je remercie André Vauchez et Nicole Bériou de m’avoir
facilité l’accès à cet article). – [8] Marie-Humbert Vicaire, Dominique et ses
Prêcheurs, Fribourg, Paris, 1977, 222-265, et id., « Povertà. Predicatori », dans
Dizionario degli Istituti di Perfezione, Rome, 1983, 310-318 ; Florent Cygler,
« L’économie des frères prêcheurs dans la législation de l’ordre (XIIIe-début
XIVe siècle) », dans L’economia dei conventi, 77-118. – [9] Giulia Barone,
« L’ordine dei predicatori e le città. Teologia e politica nel pensiero e nell’azio-
ne dei Predicatori », MÉFRM, 89, 1977, 2, 609-618 ; C. Caby, « Les implanta-
tions urbaines des ordres religieux dans l’Italie médiévale. Bilan et propositions
de recherche », Rivista di Storia e Letteratura Religiosa, 1999, 151-179 (avec
renvois bibliographiques). Sur le rôle du contexte languedocien dans ce choix
urbain originel, cf. Jean-Louis Biget, « Saint Dominique, la société du
Languedoc, les bons hommes et les vaudois (1206-1217) », dans Domenico di
Caleruega e la nascita dell’ordine dei frati predicatori. Atti del XLI Convegno
storico internazionale (Todi, 10-12 ottobre 2004), Spolète : CISAM, 2005, 131-
179, ici 153-158. – [10] Par ordre de parution, voir Alain Boureau, « Vitae
Fratrum, Vitae Patrum. L’ordre dominicain et le modèle des pères du désert au
XIIIe siècle », MÉFRM, 92/1, 1987, 79-100 ; Luigi Canetti, L’Invenzione della
memoria. Il culto e l’immagine di Domenico nella storia dei primi frati
Predicatori (1221-1260), Spolète, 1996 ; Reltgen, La mémoire d’un ordre ; ead.,
« L’historiographie des Dominicains du Midi : une mémoire originale ? »,
CF 36, 395-414 ; S. Tugwell, « L’évolution des vitae fratrum. Résumé des
conclusions provisoires », ibid., 415-418 ; Markus Schürer, « Mémoire et histoi-
re dans l’ordre des Prêcheurs vers le milieu du XIIIe siècle », dans Écrire son
histoire. Les communautés régulières face à leur passé, Saint-Étienne :
Publications de l’Université de Saint-Étienne (CERCOR, Travaux et Recherches
18), 2005, 147-169 ; en revanche je n’ai pas pu consulter du même auteur Das
Exemplum oder die erzählte Institution. Studien zum Beispielgebrauch bei den
Dominikanern und Franziskanern des 13. Jahrhunderts, Münster : LIT (Vita
regularis 23), 2005. Des précisions utiles sur le parcours de Géraud dans
Régis Rech, « Géraud de Frachet : l’engagement d’un historien au XIIIe siècle.
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Humbert, Opera de vita regulari, 1-178, ici 5 : Sic nimirum invenitur quod
approbatas religiones ejusdem professionis, quod summam uniformitatem in
exterioribus praetendunt, non solum in observantiis, sed etiam in habitu et in
aedificiis et in aliis quibusdam. In quo cum gemitu quodam considerandum est
quantum in hoc adhuc distamus ab illis. Habent namque ecclesias et officinas
ejusdem formae et eodem modo dispositas ; nos autem fere quot domos, tot
varias formas et dispositiones officinarum et ecclesiarum habemus. – [37] Ibid.,
39 : Sed ordo noster trahit nomen suum a fine : melius enim nominatur una-
quaeque res a suo fine quam ab alio, sicut regula, licet aurea et ab optimo arti-
fice facta et rectissima, tramen melius trahit nomen a fine qui est regulare,
quam a materia, vel artifice, vel forma. Hinc patet quod valde sunt reprehensi-
biles fratres qui se vocant, vel vocari permittunt fratres S. Jacobi, vel S. Nicolai,
vel hujusmodi nominibus ; et magis reprehensibiles praelati qui circa istum
errorem consilium non apponunt. Ex hoc enim accidit quod in diversis locis
diversorum ordinum reputantur esse fratres diversi propter diversa nomina.
Item, accidit quod in multis nationibus nondum scitur esse aliquis Ordo fratrum
Praedicatorum. – [38] Remensnyder, Remembering ; Patrick Geary, La mémoi-
re et l’oubli à la fin du premier millénaire, traduit de l’anglais par J.-P. Ricard,
Paris : Aubier (Histoires), 1996. – [39] Cf. Catherine Vincent, Fiat lux : lumière
et luminaires dans la vie religieuse en Occident du XIIIe siècle au début du
XVIe siècle, Paris : Le Cerf, 2004, 283-290 et 312-324. – [40] Vitae fratrum , 21-
22. – [41] Vitae fratrum, 22-23 (à propos de Côme). – [42] Respectivement
Vitae fratrum, 23, 24-25 et 51. – [43] Vitae fratrum, 23-24 : Antequam in civita-
te Ulyxbonensi haberemus conventum, fratres nostri in eodem loco, ubi constitu-
tum est monasterium, consueverunt predicare. Et paulo antequam ibi poneremus
conventum, mulieres quedam, que iuxta ecclesiam beate Virginis (que in monte
sita est) super nostrum monasterium morabantur, mirabilem quandam oculis
carnalibus visionem viderunt. Cum enim (sicut mos est tempore estatis) mulieres
ille ad lune claritatem filarent, subito viderunt celum apertum et scalam quan-
dam mire pulcritudinis ex auro et argento constructam versus ad ficum quam-
dam descendentem, iuxta quam ego multociens predicavi, antequam ibi habere-
mus conventum ; una igitur extremitas scalae celum tangebat et alia ficum. Post
hanc autem scalam tres viros viderunt descendere in vestibus aureis et argenteis
mirabiliter addornatos ; quorum primus subdiaconus videbatur, qui crucem
mire pulcritudinis portabat in manibus, medius videbatur diaconus, hic portabat
thuribulum, tercius erat sicut sacerdotalibus vestibus adornatus. Hi tres descen-
dentes in terram totum locum monasterii nostri circuierunt thurificantes ipsum.
Postmodum vero redeuntes ad scalam, per eamdem progredientes introierunt in
celum, scalam interim attrahentes, et ab earum occulis est sublata. Mulieres
illas fratres nostri viderunt ; sed ego fratribus hoc ipsum credere nolui,
quousque michi viduam unam sancte conversationis adduxerunt, que ibi tunc
aderat, quum visio illa apparuerat : et hec michi totam facti seriem enarravit.
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Ego autem in brevi post hec qui habebam officium prioratus, in eodem loco
construxi monasterium authoritate generalis et provincialis capituli, in quo
fratres nostri die noctuque domino servientes. Pour comparaison, voir les récits
de consécrations miraculeuses cités dans Lauwers, Naissance du cimetière, 176-
186. – [44] Dominique Iogna Prat, La Maison Dieu. Une histoire monumentale
de l’Église au Moyen Âge (v. 800-v. 1200), Paris : Aubier, 2006 ; Mise en scène
et mémoires de la consécration de l’Église dans l’Occident médiéval, dir.
Didier Méhu, Turnhout : Brepols (Collection d’études médiévales de Nice, 7),
2007, en particulier la contribution de D. Méhu, « Historiae et imagines de la
consécration de l’église dans l’Occident médiéval », 15-50. – [45] Lauwers,
Naissance du cimetière, 67. – [46] Vitae fratrum 35-36 (anges bénissant le dor-
toir et les cellules) ; 43-44 (la Vierge accompagnée de saints passe dans le dor-
toir et bénit les frères) ; 52 (Vierge ad hostium dormitorii) ; 53-54 (la Vierge
purifie le couvent d’origine d’un apostat), 119 (la Vierge accompagnée de
jeunes filles per dormitorium euntem et aspergentem fratres et cellas eorum). –
[47] Sur ces étapes, Vicaire, Les Prêcheurs, 104-105. – [48] À propos de
Limoges, où il renvoie à un Libellum de fundatione, Bernard Gui mentionne
d’ailleurs la façon dont le second site a été miraculeusement acquis (de cujus
loci emptione et miraculosa solutione [...] plenius et diffusius est notatum in
libello de fundatione conventus Lemovicensis) : De fundatione, 58. Cf. le récent
article de J.-L. Lemaitre, « Un nouveau manuscrit des Flores chronicorum de
Bernard Gui et la bibliothèque des Dominicains de Limoges », AFP, 76, 2006,
79-101. Voir aussi De fundatione, 72-73 et 162 (à propos du miracle des abeilles
pendant la pose de la première pierre du couvent de Brive). – [49] Cum ex eo,
éd. Bullarium Franciscanum, IV, 424, no 105 (qui date la lettre de 1296). Sa tra-
dition n’est en réalité assurée que par son insertion dans le Liber sextus, 5, 6 (De
excessibus praelatorum) : Cum ex eo quod Praedicatores et Minores et religiosi
alii Mendicantes in civitatbus, castris, villis aut aliis locis ad habitandum domos
vel loca suscipiunt, seu olim suscepta dimittunt se ibidem ad alia transferentes,
diversa scandala quandoque proveniant et frequenter clamores ad sedem apos-
tolicam perferantur, nos super hoc providere volentes hoc perpetuo prohibemus
edicto ne...in aliqua civitate, castro, villa seu loco quocumque ad habitandum
domos, vel loca quaecumque de novo recipere seu hactenus recepta mutare vel
ea venditionis permutationis donationis aut cujusvis alienationis titulo quo-
cumque in alios transferre praesumant absque sedis apostolicae licentia
speciali. Cf. Maria Pia Alberzoni, « Bonifacio VIII e gli Ordini mendicanti »,
dans Bonifacio VIII. Atti del XXXIX Convegno storico internazionale, Todi, 13-
16 ottobre 2002, Spolète : CISAM, 2003, 365-412 : 385-388 ; Caby, « Il costo
dell’inurbamento », 295-338. Voir l’allusion à cette bulle à propos de la fonda-
tion de Saint-Girons, De fundatione, 231-232. – [50] Sur ce rythme et le contex-
te, voir Vicaire, Les Prêcheurs, 105-109. – [51] J’en veux aussi pour preuve la
réalisation par Bernard Gui d’une copie annotée et commentée du pontifical de
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pour les termes dominus et patronus). – [58] Respectivement Vitae fratrum, 21,
51, 23. – [59] Vitae fratrum, 78-79 : De demone quem circumeuntem officinas
invenit. Alia vice invenit sanctus [Dominicus] dyabolum omnia loca domus cir-
cumeuntem. Cumque quereret, quare hoc fecerat, respondit : «Propter lucrum,
quod inde recipio ». Dixit ei : «Quid lucraris in dormitorio ? » Respondit :
«Facio eos nimis dormire, tarde surgere, sicque a Dei officio remanere, necnon
eciam, cum possum, carnis stimulum et illusiones immitto. » Inde trait eum ad
oratorium et ait : «Quid in tam sancto loco lucrarsi ? » Respondit : “O quot feci
tarde venire, et cito exire, et se interim oblivisci. » De refectorio quoque interro-
gatus, respondit : «Quis non plus, quis non minus ? » Hinc ad locutorium duc-
tus, respondit cachinnans : «Hic locus est totus meus ; hic veniunt risus, hic
rumores, et verba proferuntur in ventum. » Cum autem ultimo traxisset eum ad
capitulum, cepit fugere et horrescere, et ait : «Hic locus michi infernus est ; et
quidquid lucror alibi, hic totum perdo ; nam hic monentur, hic confitentur, hic
accusantur, hic verberantur, hic absolvuntur ; unde hanc domum super omnes
detestor ». Voir aussi ibid, 195, à propos d’un frère poursuivi par le diable dans le
couvent et qui se réfugie au chapitre : Frater autem intravit capitulum ; et tunc ait
ei dyabolus : «In talem locum intrasti, in quem te sequi », et 197 : Frater Petrus
de Albenacio, vir sanctus et devotus, cum esset in conventu Ianue et oracioni fer-
venter instaret, vidit quadam nocte, ut sibi videbatur, multitudinem demonum
super claustrum et officinas fratrum, qui multis et gravibus aspergebant sordibus
locum. Post hec vidit castra sanctorum angelorum accurrencium ad locum ad
expellencium demones cum suo fetore. Unus autem angelus subsequens cum turi-
bulo pleno odoramentorum omnia loca circuibat fetorem expellens demonum et
fumo suavissimo cuncta replens. – [60] Outre l’inversion diabolique du rituel de
consécration, on peut reconnaître dans le parcours du démon dans les différents
lieux conventuels une pantomime des inspections des circatores dont Humbert de
Romans définit en ces termes la fonction : « Celui qui est chargé de cet office doit
circuler par toute la maison, surtout à certaines heures, comme après le dîner, à
l’heure de la sieste, après les complies, avec ou sans lumière, selon le temps,
même à l’hospice et à l’infirmerie » (Humbert, Opera de vita regulari, 270 ; tra-
duction de Daniel-Antonin Mortier, Histoire des maîtres généraux de l’ordre des
frères Prêcheurs, I. 1170-1262, Paris : A. Picard, 1903, 488-489). – [61] Cf. par
ex. la lettre d’Hélinand de Froimont à un certain Gauthier (PL 212, c. 758) qui
souligne comment parmi les autres pièces du monastère in toto corpore ecclesiae,
praeter illum locum ubi altare constituitur, nullus locus sit sanctior capitulo, nul-
lius reverentia dignior, nullus diabolo remotior, nullus Deo proximior. Voir aussi
le sermon de capitulo monachorum (première décennie du XIIe siècle) édité par
Jean Leclercq, « Le sermon de Grossolano sur le chapitre monastique », dans
Analecta monastica. 3, Rome (Studia anselmiana, 37), 1955, 138-144 : Locus
sanctus est et venerabilis, et super omnes officinas monasterii ad aedificationem
est utilis animarum. Locus enim iste quasi pater et judex totius religionis […].
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Unde merito vocatur capitulum, quia caput est omnium quae sunt in monasterio
officinarum. – [62] J’emprunte ces analyses à Franco Negri, « Il De claustro ani-
mae di Ugo di Fouilloy : vicende testuali », Aevum, 80, 2006, 389-421. Voir aussi
M.-H. Vicaire, « Positions scolaires et fonctions occasionnelles de Bernard Gui »,
dans Bernard Gui, 59-60 (désormais Vicaire, Les Prêcheurs, 179-180) qui cite
deux traités, dont un, réalisé pour la province de Provence en 1283 (éd.
Raymond Creytens, « L’instruction des novices dominicains au XIIIe siècle
d’après le ms. de Toulouse », AFP, 20, 1950, 114-193), passe allégoriquement en
revue les divers lieux conventuels, ce qui fait dire au Père Vicaire qu’il « reste
dans le sillage de l’allégorisme des moines et chanoines du siècle précédent ». –
[63] Outre Caby, « Il costo dell’inurbamento », qui renvoie à la bibliographie anté-
rieure, on trouvera de nombreux exemples de ces mouvements à l’échelle du Midi
dans les contributions de F. Guyonnet, Germain Butaud et Vincent Challet à ce
volume. Pour des comparaisons avec la France du nord, voir Volti, Les couvents,
94-96. – [64] Thomas d’Eccleston, Tractatus de adventu fratrum minorum in
Angliam, collatio X (§ 58-64), éd. Andrew G. Little, Paris : Fischbacher
(Collection d’études et de documents sur l’histoire religieuse et littéraire du
Moyen Âge, 7), 1909 : De mutatione locorum et amplificatione, en part. le § 58 :
Crescente in dies numero fratrum, non potuerunt sufficere multitudini domus et
areae, quae suffecerant paucitati : praeterea per providentiam Dei, tales intrabant
frequenter personae, quibus videbatur de iure honorificentius providendum. In
nonnullis quoque locis ita inconsiderate se collocaverat fratrum simplicitas, ut non
areas ampliari, sed ex toto domos amoveri oporteret. Hinc factum est, ut vivente
adhuc bonae memoriae fratre Agnello multa fieret tam domorum quam locorum
ampliatio… – [65] Voir la lettre encyclique de Bonaventure (23 avril 1257), interdi-
sant tout déménagement de couvent sans autorisation du maître général : Occurit
mutatio locorum frequens et sumtuosa cum quadam violentia et perturbatione ter-
rarum, cum nota inconstantiae, non sine preiudicio paupertatis... locorum vero
mutationem nullatenus concedatis alicui ante Capitulum generale. Nam de consilio
discretorum propter scandala vitanda iuxta praedecessoris mei mandatum hoc
mihi reservo, districte per obedentiam iubendo, ut nullus deinceps locum mutet sine
mea licentia speciali (Bonaventure, Opera omnia, VIII, Quaracchi, 1898, 469).
Cette décision est citée dans deux bulles pontificales (1257 et 1259) autorisant des
transferts de couvents (Bullarium Franciscanum, II, 248-249 et 309). Enfin, les
constitutions de Narbonne (1260) signalent la nécessité de la dispense des ministres
provinciaux pro edificiis construendis vel pro locis mutandis vel ampliandis...
(Constitutiones generales Narbonenses, III, 14 ; Constitutiones generales ordinis
fratrum minorum. I. Saeculum XIII, éd. Cesare Cenci, Georges Mailleux,
Grottaferrata : Frati editori di Quaracchi, 2007, 75). – [66] Vitae fratrum 198 (IV,
15) : Duo de magnis principibus nostris exierunt contra vos, unus ut prelatos et
principes conatet contra vos, alius ut vos mutacionibus locorum et edificiorum et
opinionum impediat et perturbet. – [67] Vitae fratrum, 21-22. – [68] Vitae fratrum,
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