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Revenue management : fermeture

d’allotements et coût d’opportunité dans le


tourisme B to B

par Joseph Kaswengi13

Résumé

Le coût d’opportunité et le B2B restent des sujets moins clairs en revenue


management. Cet article étudie l’impact des allotements fermés sur
le coût d’opportunité dans le tourisme B2B. Sur un échantillon de 132
hôtels et un tour opérateur français au cours de la période 2006-2007, les
résultats montrent que le coût d’opportunité est associé positivement et
significativement à la fermeture d’allotements, au lieu et à la catégorie d’un
service à forte demande.

Abstract

The opportunity cost and the B2B are still unclear topics in revenue
management. In this article, we test the closed allotments impact on the
opportunity cost in B2B tourism. On a sample of 132 French hotels and a
tour operator during a period of one year (2006-2007), empirical findings
suggest that opportunity cost is positively and significantly associated with
allotments closure, place and service category with high demand.

Les chercheurs en revenue management s’intéressent en permanence au


problème de réservation des clients dans plusieurs classes tarifaires (Belobaba,
1987, 1989 ; Weatherford et al. 1993 ; Lovejoy, 2000). De plus, la capacité
contrainte (i.e. celle qui n’est pas disponible dans son intégralité) doit être
allouée entre plusieurs classes de clients concurrentes. A cet effet, le problème
traditionnel du revenue management demeure celui de l’allocation des capacités
avec deux préoccupations majeures : quand faut-il ouvrir ces capacités et quand
faut-il les fermer ? Dans l’industrie aérienne par exemple, le problème du contrôle
de l’inventaire des sièges d’un avion consiste à déterminer le nombre à rendre
disponible pour chaque classe tarifaire à partir d’un inventaire commun ou partagé
à l’instar de la cabine de l’avion.

Le problème de réservation dans les compagnies aériennes est similaire à celui


que connaissent les hôtels aujourd’hui (Venkat, 2007). Les prix des chambres
sont souvent sujets à débats entre les analystes de revenus et les équipes de
vente à partir d’une perspective de la demande axée sur l’ensemble prix/nuitée/
13. Joseph Kaswengi, ATER Université Nancy 2, LOG, joseph.kaswengi@univ-nancy2.fr

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chambre. Les hôtels sont plus que jamais préoccupés de savoir comment allouer
une capacité limitée (les chambres) entre différents segments de clients. Dans
l’allocation des capacités qu’ils attribuent à leurs clients, les hôtels décident
de vendre certains contingents de chambres à tarifs réduits bien avant la date
d’arrivée afin de garantir les premières ventes et de les fermer quelques jours
avant cette date. Les chambres récupérées au risque de gâchis sont censées
être vendues aux tarifs plus élevés à des clients consentant à payer plus cher.
Ceci participe à la stratégie du mix optimal des clients dont le but est de maximiser
le profit (Biyalogorsky et al., 1999 ; El-Haber et El-Taha, 2004). Suite à toutes
ces considérations, les managers se sont intéressés à développer des politiques
efficaces pour mieux contrôler les capacités dans un système (Savin et Cohen,
2001).

Le contrôle d’un système ne se déroule pas sans entraîner des coûts tant internes
qu’externes (auprès des partenaires de l’entreprise). Les entreprises prestataires
des chambres appliquent les principes du revenue management en prévoyant
la demande et en calculant le booking limit (i.e., limite de réservation) pour les
chambres à tarif réduit dans le but d’accroître leur revenu global (Weatherford,
2003). Le plus grand incovénient pour certains tours opérateurs est que plusieurs
hôtels ferment les allotements qui leur sont alloués bien avant l’échéance des
rétrocessions et rejettent toute réservation ultérieure. Par conséquent, ces
fermetures entraînent un certain nombre d’inconvénients comme les délogements,
les annulations et surtout un ensemble de coûts financiers ou commerciaux (e.g.,
la compensation financière, l’atteinte à la notoriété et à l’image de marque, etc.).
Mais parmi ces coûts, le plus important est le coût d’opportunité (i.e., manque
à gagner), qui est au cœur du revenue management (Andersson et Blair, 2004,
p. 356). A cet effet, les tours opérateurs s’interrogent sur plusieurs aspects
dont l’impact de la fermeture d’allotements sur leur rentabilité et les moyens
de le gérer. Est-ce que la fermeture d’allotements par un fournisseur entraîne
nécessairement le coût d’opportunité chez son distributeur ? La problématique
de cet article s’appuie sur ces considérations pour examiner le lien entre la
fermeture d’allotements et le coût d’opportunité. En plus, l’article examine aussi
l’influence de la localisation et de la catégorie de l’hôtel sur le coût d’opportunité.
A notre connaissance, peu d’études (Dobbs, 1995 ; Hendler et Hendler, 2004) ont
mené des investigations sur ce dernier champ de recherche.

Depuis ses débuts (Rothstein, 1971  ; Littlewood, 1972) et surtout son


développement (Belobaba, 1987) après la dérégulation du transport aérien
aux Etats-Unis en 1978, le revenue management a été appliqué dans plusieurs
domaines. Chiang, Chen et Xu (2007, p. 100) démontrent que le transport aérien,
l’industrie hôtelière et la location de voiture représentent les trois champs majeurs
et traditionnels dans l’application du revenue management. Des domaines plus
récents ont fait leur apparition  : les casinos, les cargos, Internet, la location
d’appartements, etc. D’une façon générale, les recherches sur les domaines

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tourisme B to B

classiques et récents se focalisent principalement sur les relations B2C. Chiang


et ses collègues (2007) pensent que le revenue management doit davantage
se développer dans d’autres secteurs. La littérature récente (cf. Kimes, 2003 ;
Chiang, Chen et Xu, 2007) ne mentionne nullement les travaux dont l’intérêt
porte explicitement et à la fois sur le tourisme B2B, le rôle joué par les tours
opérateurs dans cette relation, l’impact des allotements fermés dans les coûts
d’opportunité, et la pertinence des données collectées dans un environnement
français. Notre article est le premier à relever un tel challenge et à trouver des
résultats pertinents ; d’où son intérêt.

L’apport de cet article se situe à trois niveaux. Sur un plan théorique, l’objectif
principal de cet article est de montrer l’intérêt des concepts de fermeture de service
(allotement) et de coût d’opportunité dans un champ d’application nouveau, le
tourisme B to B, au travers d’un cas empirique. Cela contraste avec la plupart
des recherches en revenue management et le coût d’opportunité qui, s’intéresse
au contexte B to C (Belobaba, 1987 ; McGill et Van Ryzin, 1999). En outre, cette
recherche adapte la théorie économique de coût d’opportunité dans ce nouveau
domaine qu’est le revenue management. Par ailleurs, notre étude suggère que la
fermeture d’un service sous contingent, sa catégorie ainsi que sa situation spatiale
sont des déterminants du coût d’opportunité. Du point de vue méthodologique,
nous proposons d’associer, au sein d’une même étude, des mesures marketing
et financière relatives à cette relation B2B. Au niveau opérationnel, comprendre
le lien particulier entre le coût d’opportunité et la fermeture d’allotements est une
approche qui entre en phase avec l’évolution du revenue management qui tient
compte de ces variables pour mesurer la performance des services. De plus,
nous fournissons aux entreprises de services et aux managers des informations
sur l’influence des variables marketing sur la performance financière dans les
rapports inter-entreprises. Enfin, les résultats de cette étude suggèrent que le
coût d’opportunité est un indicateur qui estime avec beaucoup plus de simplicité,
de clarté, de précision et d’efficacité le revenu qu’une firme cliente perd du fait
de la fermeture d’allotements par ses fournisseurs. Les fournisseurs peuvent,
dans certains cas, utiliser cet outil pour mieux négocier les prix avec leurs
distributeurs.

L’architecture de cet article se présente de la manière suivante : dans la première


partie, nous présentons la revue de littérature. La deuxième partie expose le
modèle de recherche, la troisième partie la méthodologie, et la quatrième partie
les résultats et leur interprétation. Enfin, l’article conclut quant aux implications
théoriques et pratiques ainsi qu’aux perspectives futures de recherche.

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1. Revue de littérature sélective

A la suite du modèle de Littlewood (1972), plusieurs autres modèles d’optimisation


de ressources ou de contrôle de l’inventaire ont vu le jour. Tous ces modèles ont
en commun la détermination du nombre de capacités à rendre disponibles à plein
tarif par opposition aux tarifs réduits (Weatheford, 2004). Le principal demeure
donc l’allocation de la bonne capacité au bon client et au bon prix (Smith et al.,
1992). Dans la pratique, les entreprises mettent en place des stratégies et des
systèmes orientés vers le mix optimal des clients dans le but de maximiser le
profit. Dans ce mix tarifaire, les tarifs réduits sont appelés à être fermés plus tôt
que les segments les plus profitables, c’est-à-dire ceux à plein tarif (Henderson
et Hendler, 2004).

Dans l’industrie du tourisme et plus précisément dans celle des capacités de


l’hôtellerie, le revenue management implique l’allocation de l’inventaire des
réservations aux différentes classes de clients qui sont en compétition pour
les mêmes chambres dans le même hôtel (Smith et al., 1992 ; Subramanian et
al., 1999 ; Gallego et Van Ryzin, 1994). Quand le nombre de réservations total
équivaut à la capacité, les nouvelles demandes ne sont autorisées que lorsque
les autres réservations ont été annulées. Aussi, ouvrir les ventes à plusieurs
tarifs réduits entraîne le déplacement des passagers à plus hauts revenus, tandis
que permettre peu de ventes à tarif réduit conduit les capacités, c’est-à-dire les
chambres à rester vides (risque de gâchis).

Selon Smith et ses collègues (1992), le revenue management a ouvert une


troisième voie, c’est-à-dire celle qui a permis d’assortir profondément les tarifs
réduits à une portion d’inventaire et de fermer profondément l’inventaire quand il
est profitable de sauver des capacités pour les clients réservant tard et ayant plus
de valeur. Ce modèle est applicable dans le cas où il existerait des différences
élevées dans le consentement à payer des consommateurs : c’est-à-dire les cas
où les consommateurs à fort pouvoir d’achat arrivent tard sur le marché et où le
nombre de consommateurs est incertain. L’établissement d’un booking limit est
une politique optimale pour les sociétés gérant les capacités. Une fois que le
booking limit est atteint, les tarifs réduits sont fermés. Les ventes des billets plein
tarif sont alors acceptées jusqu’à ce que la capacité soit pleine. Ce principe, ancré
dans l’industrie aérienne, s’applique logiquement dans l’industrie du tourisme. La
fermeture d’allotements des chambres par les hôtels devrait être consécutive
soit à la réalisation du booking limit par son entreprise cliente soit à l’expiration
de l’échéance de la rétrocession des chambres par ce client, en l’occurrence le
tour opérateur. Cependant dans la réalité, ce principe est loin d’être appliqué par
les hôtels qui, dans plusieurs cas, ferment les allotements peu de temps après
l’ouverture de la classe de réservations, c’est-à-dire bien avant l’arrivée de ces
échéances.

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tourisme B to B

1.1. Le booking limit et la fermeture d’allotements

Le booking limit (limite de la capacité optimale pour chaque classe tarifaire)


est une politique traditionnelle du revenue management consistant à protéger
l’inventaire pour le vendre aux tarifs les plus élevés. En d’autres termes, il s’agit
d’un phénomène de fermeture-ouverture des capacités qui vise à les protéger
pour les vendre au prix le plus cher possible. Ce même phénomène est étudié
dans l’industrie aérienne à travers le concept de « recapture de la demande »
(Gallego et Van Ryzin, 1994). Pour les entreprises de services, la fermeture
des classes tarifaires résulte des problèmes d’optimisation des capacités. La
fermeture d’allotements peut être appréhendée à partir de la notion d’indicateur
du segment fermé (SCI ou Segment closed indicator). En effet, le SCI est un
indicateur qui, dans les systèmes de contrôle de réservation, indique qu’une
classe tarifaire est fermée aux réservations d’un segment particulier. La même
classe de réservation peut être ouverte aux réservations sur d’autres segments
d’un même vol (McGill et Van Ryzin, 1999).

La fermeture d’allotements n’est pas sans entraîner des problèmes non


seulement dans le cadre du commerce B to C, mais surtout B to B. Ce dernier
cas est celui que rencontrent souvent les tours opérateurs qui doivent faire face
quotidiennement à de nombreuses conséquences de la fermeture d’allotements
de la part des hôtels avec lesquels ils sont sous contrat. La politique d’allotements
est une politique de gestion des capacités par les entreprises de services qui
consiste à allouer les capacités relatives au plein et tarif réduit en fonction des
jours (Gallego et Van Ryzin, 1994). Pour Hendler et Hendler (2004), la plupart
des compagnies fonctionnent avec le système de « bloc ». C’est-à-dire qu’elles
retiennent un certain nombre de chambres pour certains clients. Le problème de
fermeture d’allotements se pose souvent avec acuité dans les services commercial
et financier des distributeurs de chambres d’hôtels. Cette problématique rentre
dans le cadre général de la gestion des capacités vendues à tarif réduit. En
l’occurrence, les tours opérateurs s’intéressent aux conséquences de ces
allotements qu’ils achètent à prix net. Pour des prestataires de services tels que
les hôtels, cette problématique participe à la minimisation du risque de dilution
des revenus par rapport aux clients qui consentent et sont prêts à payer le plein
tarif (Talluri et Van Ryzin, 2004). Par conséquent, le sujet mérite une investigation
plus poussée.

Depuis l’essor du revenue management dans les années 80, le management des
allotements continue d’attirer l’attention de certains chercheurs. Subramanian et
al. (1999) expliquent le booking limit comme le nombre maximal des réservations
à accepter pour une période donnée. L’optimum du booking limit dépend du
nombre des clients ayant déjà réservé dans chaque classe. Gallego et Van Ryzin
(1994) estiment que fermer une classe tarifaire équivaut mathématiquement

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à fixer le prix pour le produit correspondant à un prix élevé. Par conséquent,


l’espérance du taux de la demande est égale à zéro, et la classe tarifaire est
effectivement fermée. Dans la pratique, les fournisseurs tels que les hôtels
répondent aux clients que les capacités ne sont plus disponibles. D’après ces
auteurs, lorsque plusieurs tarifs sont offerts sans pour autant différencier le
produit, la fermeture d’un tarif réduit équivaut mathématiquement à le positionner
sur le tarif subséquent le plus élevé. Toutefois, cela peut générer une hausse de
la demande sur le prochain tarif le plus élevé du fait que les clients consentant à
acheter au tarif réduit sont aussi prêts à acheter au tarif le plus élevé qui suit quand
l’ancien tarif n’est plus disponible. Comme nous l’avons souligné précédemment,
plusieurs travaux dans la littérature du revenue management se sont focalisés sur
l’optimisation des modèles visant à déterminer le booking limit pour une classe
tarifaire et pour un seul segment de capacité (e.g., une seule destination pour
les vols ou une seule nuitée pour les hôtels). Plus récemment, ces modèles ont
migré vers l’optimisation des segments connectés en réseaux. Tous ces travaux
de recherche émettent l’hypothèse que chaque classe de revenu a une valeur
distincte. De plus, chaque classe tombe toujours dans un ordre hiérarchisé, c’est-
à-dire A>B>C>D etc. (Weatheford, 2004).

Reece et Sobel (2000) décrivent d’abord une version simplifiée de l’allocation


des capacités avant d’aboutir à la notion de fermeture de tarif. Premièrement,
le vendeur doit segmenter le marché en groupes de clients avec différentes
demandes. Deuxièmement, le vendeur doit créer des barrières séparant les
catégories de services offerts aux groupes de clients. Troisièmement, le vendeur
doit établir le prix pour chaque catégorie basée sur la demande anticipée. Ceci
revient à dire que les sièges à tarifs réduits et très réduits vont en priorité aux
clients loisirs et que les clients affaires qui ne veulent pas rencontrer des barrières
paient le plein tarif. Contrairement au plein tarif, le tarif réduit ne doit pas rester
disponible très longtemps. Finalement, le vendeur alloue son inventaire fixe entre
les catégories. En principe, les prix peuvent rester constants au cours du temps
alors que la disponibilité des catégories tarifaires change quand les capacités
des catégories à tarif réduit deviennent remplies et que la catégorie devient non
disponible.

Quand une entreprise telle qu’une société aérienne ferme ses classes de
réservation, le choix du client est limité. Dans le cas où le vol ou la classe
tarifaire ne serait pas disponible, la compagnie aérienne rejette la demande. Le
client doit alors se reporter sur d’autres vols de la même compagnie ou des
compagnies concurrentes. Dans de tels cas, trois situations se présentent. Le
client peut décider soit de dévier, c’est-à-dire aller chez le concurrent ou annuler
sa demande, réserver un autre vol (recapture), ou payer plus pour avoir accès
à la classe supérieure. Dans l’industrie du tourisme et en particulier hôtelière,
lorsqu’un établissement ayant déjà vendu une capacité qui au final se révèle
non disponible, les clients sont servis par des alternatives : ils sont orientés vers

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d’autres hôtels de même standing voire supérieur. En plus, ils peuvent obtenir
des compensations tels que des tickets de restaurant, une course gratuite en
taxi, ou encore une remise (e.g., une nuit gratuite). Si le booking limit entraîne la
fermeture d’allotements, celle-ci génère à son tour des coûts d’opportunité pour
les clients.

1.2. Le Coût d’opportunité 


La notion de coût d’opportunité est inhérente à celle du contrôle de l’inventaire.
En effet, c’est toujours les compagnies aériennes qui avaient reconnu que si
elles ne mettaient pas en place des contrôles, un passager consentant à payer
seulement un tarif réduit pourrait, en réservant à l’avance, soustraire un siège
d’un passager consentant à payer plus cher pour le même siège. C’est pour
prévenir de telles pertes que ces compagnies mirent en place la procédure de
contrôle connue sous le nom de yield management (Reece et Sobel, 2000).

Concernant l’espérance du coût de déplacement dû à la fermeture des sièges


additionnels dans un itinéraire demandé, McGill et Van Ryzin (1999) affirment
que pour maximiser l’espérance des revenus, la demande doit être acceptée
si la valeur du tarif de l’itinéraire demandé est égale ou excède l’espérance du
coût de déplacement. McGill et Van Ryzin (1999, p. 247) définissent le coût
de déplacement comme le coût d’une réservation incluant tous les revenus
futurs qui pourraient être perdus si la réservation est acceptée. Le cas échéant,
le coût d’opportunité inclut la valeur potentielle des revenus des réservations
futures déplacées dans le réseau aérien et les coûts du goodwill provenant de
ce déplacement. Ces coûts peuvent être évalués à partir de la dynamique des
annulations et de l’overbooking ainsi que des conditions de l’espérance des coûts
de survente.

Pour Hendler et Hendler (2004, p. 76), les augmentations d’occupation et les


baisses du tarif moyen journalier dans les hôtels traditionnels peuvent diminuer
les marges de profit et augmenter le point mort. Dans certaines circonstances, il
serait mieux de maintenir les tarifs très élevés même avec des baisses de taux
d’occupation, non seulement pour obtenir un RevPAR (Revenue Per Available
Room) plus élevé mais aussi éviter des coûts opérationnels additionnels. Selon
eux, par définition, les coûts d’opportunité sont associés aux offres. Dans l’industrie
du casino par exemple, le coût d’opportunité est compris comme la perte de
revenu d’une chambre qui survient si cette dernière est donnée gratuitement
à un client du casino au lieu de la vendre à un client qui paierait cash. Chaque
casino doit identifier l’ensemble des coûts qui est associé à une offre dont le coût
d’opportunité des chambres, le transport, etc. Un client n’est éligible pour une
chambre gratuite que lorsque le coût d’opportunité de la chambre plus le coût de
tous les autres articles compris dans l’offre (autres dépenses qu’offre l’entreprise
au client) est inférieur ou égal au montant réinvesti. En d’autres termes, la

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chambre donnée en récompense n’est rendue disponible pour le client que si le


montant réinvesti dépasse toutes les dépenses liées à ce client.

Subramanian et al. (1999) expliquent le coût d’opportunité en établissant un


modèle de décision d’allocation de capacité qui intègre les annulations, les no-
shows, et la surréservation. Pour eux, le rejet ou l’acceptation d’une réservation
dans une classe tarifaire sont soumis d’abord au calcul de l’espérance du
revenu net tirée de la réservation en déduisant l’espérance du coût marginal
de l’annulation à partir du revenu brut récolté. Le revenu net espéré est ainsi
comparé au coût d’opportunité de la réservation, et la demande de la réservation
est acceptée si et seulement si le premier excède le second. Subramanian et
al. (1999) considèrent que le coût d’opportunité est un effet externe, dans ce
sens qu’il représente l’espérance de la perte des revenus des futurs clients,
perte causée par l’acceptation de la demande du client qui se présente. Par
conséquent, la politique optimale est celle qui admet un client (acceptation de
la demande de la réservation) si et seulement si le tarif brut excède la somme
des effets internes et externes (e.g., effets des annulations sur de possibles
capacités futures). De façon plus générale, la performance de la politique des
réservations devient déterminante à la fois lorsque le temps qui reste à courir
jusqu’à l’utilisation du service diminue et que la capacité baisse. Ainsi, le coût
d’opportunité d’une réservation courante peut dépendre en même temps de la
capacité résiduelle ainsi que du nombre des capacités déjà réservées ; le but de
cette politique étant la minimisation de la capacité non usitée.

Dobbs (1995) a étudié le coût d’opportunité dans l’industrie de location et du
leasing avec des prix non linéaires. Selon l’auteur, de longues durées de location
prorogent les futures locations, mais le coût d’opportunité de cette pratique est
réduit grâce aux baisses de tarifs très élevés. En définitive, lorsque la capacité
est infiniment fixe, il est probable que le client qui se présente ne trouve pas
d’unités disponibles à louer. Mais quand la fréquence des arrivées est faible,
le coût d’opportunité associé à la rupture de stock est aussi bas parce qu’il y a
peu de probabilité que le prochain client ne soit pas servi. Dans ce cas, la firme
maximise sa rentabilité sur le nouveau client. Autrement dit, la politique optimale
est proche de la solution atemporelle (capacité non contrainte).

En guise de récapitulation, nous relevons que les études évoquées dans le cadre
du coût d’opportunité n’ont pas abordé les relations B to B, mais plutôt B to C.
Pour Anderson et Blair (2004), le revenue management est un processus de
management d’un équilibre entre les revenus et les pertes. Si le prix discount
est très agressif et fixé très à l’avance, les revenus sont bas. Inversement, si
ce prix est écourté, les ventes pourraient être faibles et l’inventaire gâché. Ces
principes ne doivent pas seulement s’appliquer dans le cadre B to C, mais aussi
B to B. En s’appuyant sur ces conclusions, cet article s’intéresse simultanément
à l’antécédent, la fermeture d’allotements par les fournisseurs (hôtels) et aux

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conséquences, c’est-à-dire les coûts d’opportunité au niveau des clients (i.e.,


tour opérateur).

2. Hypothèses de recherche

Dans le cadre de cette recherche, notre article se focalise sur la mise en exergue
de l’impact de la fermeture d’allotements (i.e, variable d’intérêt) sur le coût
d’opportunité qu’enregistre une entreprise dans le contexte B to B. En même
temps, elle inclut deux autres variables (i.e., variables de contrôle) : la catégorie
et la localisation du service mis en allotement. La figure 1 résume le lien entre les
variables sus mentionnées.

Figure 1. Modèle conceptuel de la recherche

A travers la structure de ce modèle, nous voulons démontrer le lien qui existe


entre les variables sources (fermeture d’allotements, catégorie et localisation du
service sous allotements) et le coût d’opportunité comme variable résultat. Plus
précisément, ce cadre conceptuel propose de montrer combien les dimensions
d’un service (allotements des chambres d’hôtel) sont des déterminants importants
des coûts d’opportunité.
La fermeture d’allotements
El-Haber et El-Taha (2004) soulignent que pour maximiser l’espérance du profit,
la fermeture d’allotements est un problème important à prendre en compte lors
de l’établissement du booking limit optimal. Le dilemme entre le booking limit et la
maximisation des revenus est souligné par la littérature en revenue management.
MacGill et Van Ryzin (1999) montrent que deux courants de recherche s’affrontent
à propos du booking limit et des réservations. Le premier courant affirme que
les classes tarifaires sont indépendantes (Littlewood, 1972) et qu’elles doivent
être fermées lorsque le nombre de leurs réservations est atteint. Par contre,
le deuxième courant considère que les classes tarifaires sont imbriquées
(Williamson, 1992) et qu’il est impératif de protéger les classes tarifaires haute

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contribution par rapport aux classes basse contribution lorsqu’un service réalise
un certain nombre de réservations toutes classes confondues. L’imbrication des
classes tarifaires implique la fermeture des classes tarifaires basse contribution
en premier lieu. Etant donné que les allotements sont généralement vendus à
des prix préférentiels, par conséquent, ils appartiennent aux classes tarifaires
basse contribution. Cette position les expose souvent à des fermetures brusques
et unilatérales.

Le but du revenue management est de maximiser les revenus d’une entreprise


(Belobaba, 1987). Cette optimisation passe notamment par la performance aux
niveaux technique, financier et marketing. De nombreux travaux en marketing
montrent que le but de toute entreprise est de satisfaire les besoins de ses clients
quelque soit leur typologie. La performance marketing peut en effet être mesurée
par des critères tels que la perception de la qualité, la fidélité des consommateurs
ou plus particulièrement la satisfaction des clients. Cependant, certains
chercheurs démontrent que la stratégie qui maximise la performance marketing
d’une entreprise ne maximise pas forcément sa performance financière et vice
versa (Srivastava, Shervani et Fahey, 1998 ; Barwise, March et Wensley, 1989).
L’article de Furrer et Sudharshan (2003) démontre empiriquement que la stratégie
qui maximise la performance en marketing d’une entreprise ne maximise pas sa
performance financière. Suite à cette différence, la poursuite par une entreprise
d’une stratégie visant à maximiser sa performance en marketing crée des
coûts d’opportunité en termes de performance financière, mieux actionnariale.
Partant de ces arguments, nous supposons que l’optimisation des revenus par
une entreprise touristique puisse occasionner l’insatisfaction des entreprises
clientes laquelle, à son tour, peut se manifester par des coûts d’opportunité dus
à des fermetures d’allotements dont l’intensité peut varier. Ainsi, nous pouvons
émettre l’hypothèse d’un lien positif entre la fermeture d’allotements et les coûts
d’opportunité, et tester empiriquement l’hypothèse suivante :
H1 : plus la fermeture d’allotements est élevée, plus le coût d’opportunité lié
à cette fermeture est élevé
La catégorie du service en allotements

Selon la théorie du bid price ou prix plancher (Talluri et Van Ryzin, 1998 ; McGill
et Van Ryzin, 1999), lorsque le nombre des capacités disponibles baisse, il
convient d’augmenter les prix tout en fixant des prix planchers. L’application de
ce principe conduit les entreprises à vendre les capacités restantes en fonction
du willingness to pay (Steenkamp et al., 2010) des go-show (i.e., clients qui
se présentent sans avoir préalablement réservé) ou d’autres clients à forte
contribution qui se présentent en dernier lieu. Ainsi, la fixation du bid price est
parallèle à la détermination des capacités à rendre disponibles et à la fermeture
des capacités à tarif réduit. Ces capacités peuvent appartenir à plusieurs
catégories de services.

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tourisme B to B

Bon nombre de travaux suggèrent que la catégorie d’un service est l’un des
facteurs pertinents qui affecte les pratiques managériales (Gil et al., 2001), et
l’une des caractéristiques pertinentes qui influencent le prix (Espinet et al., 2003).
Les recherches en marketing montrent que les catégories des biens ou services
sont diverses. Certaines études focalisent leur attention sur les catégories
promotionnelle (Kalyanam et Putler, 1997 ; Putsis et Dhar 1999 ; Assunçao et
Meyer 1993), saturée (Danaher et Brodie, 2000), concentrée (Morrin, 1999;
Norman et al., 2008 ; Strickland et Weiss, 1976). Dans le même ordre d’idées,
les allotements fermés à la vente peuvent appartenir à plusieurs catégories de
services dont celle caractérisée par une forte demande. Lesourd et Roll (2008)
montrent qu’en 2007, l’hôtellerie 2 et 3 étoiles occupait à elle seule 68,4% de
parts de marché, soit 33,0% pour les 2 étoiles et 35,4% pour les 3 étoiles. Ainsi,
nous nous attendons à ce que les profits d’un prestataire, tirés par les fermetures
des contingents dans le tourisme B to B, puisse créer des manques à gagner
auprès de l’entreprise cliente impliquée dans les transactions. Par conséquent,
la catégorie d’un service peut aussi influencer le coût d’opportunité qu’entraîne la
fermeture de ce service. Nous proposons que lorsque les fermetures d’allotements
par un fournisseur concernent les catégories de services à forte demande,
elles augmentent les coûts d’opportunité des distributeurs à la hauteur des prix
pratiqués sur ces services. Dès lors, l’hypothèse ci-après peut être proposée :
H2 : plus la catégorie du service concerné par la fermeture d’allotements
est très demandée, plus le coût d’opportunité lié à cette fermeture est
élevé

La localisation du service en allotements

Les travaux issus de l’application des théories de la psychologie environnementale


en marketing suggèrent que le lieu dans lequel se trouve le consommateur
influence non seulement ses émotions, mais aussi ses réponses. Les résultats
de ces études démontrent que le lieu constitue un facteur difficile à attaquer ou
à neutraliser (Achabal et al., 1982), un critère crucial de pérennité ou de faillite
d’une entreprise (Colomé et Serra, 2001), un attribut important qui influence la
fréquentation des clients (Donthu et Rust, 1989), un facteur déterminant qui peut
apporter des revenus élevés de ventes, une augmentation de part de marché
et des profits très élevés (Durvasula et al., 1992). C’est également la posture
adoptée par Grewal et ses collègues (1998) qui démontrent qu’il existe une
relation positive entre l’image du magasin et l’intention d’achat.

Quant aux clients, la littérature marketing montre que les motivations de ces
derniers, à propos de la localisation, sont diversifiées. De plus en plus, des travaux
soutiennent que les motivations du consommateur ne sont pas que d’ordre
économique (gain de temps) ; mais également d’ordre spatial, psychologique,
sociologique, philosophique et situationnel. Bon nombre de résultats empiriques

67
43

montrent que le lieu influence le choix des magasins par les consommateurs
(Singh et al., 2004 ; Rajagopal, 2006) et constitue un facteur clé pour mieux
appréhender le coût total des achats (Ailawadi et Keller, 2004). Trois notions sont
alors essentielles à la compréhension du lieu, à savoir l’économie du temps, la
réduction des efforts (Scholderer et Grunert, 2005), et des coûts (Ailawadi et
Keller, 2004). En appliquant le concept de lieu à l’industrie du tourisme, nous
suggérons que le lieu de prestation d’un service influence non seulement le choix
du client, mais surtout ses coûts, en particulier les coûts d’opportunité. En nous
appuyant sur les théories du booking limit et du bid price, nous supposons que
lorsque les capacités résiduelles sont référencées dans un lieu très demandé,
leur fermeture produit des prix de plus en plus élevés et les coûts d’opportunité
correspondants sont aussi élevés. Par conséquent, nous faisons l’hypothèse
que :
H3 : plus le lieu où est situé un service concerné par la fermeture d’allotements
est très demandé, plus le coût d’opportunité lié à cette fermeture est
élevé

3. Méthodologie

Notre étude repose sur une démarche quantitative fondée sur l’analyse des
données secondaires fournies par un tour opérateur français de type incoming
(i.e., qui reçoit par opposition au tour opérateur outgoing, c’est-à-dire qui envoie).
Ces données portent sur la fermeture d’allotements relatifs aux chambres d’hôtels.
Nous allons consécutivement exposer les motifs du choix de cette catégorie de
service et des industries impliquées, la présentation du modèle et les mesures
ainsi que les données.

3.1. Catégorie de service et des industries retenues


Nous avons choisi les chambres d’hôtels pour plusieurs raisons. D’emblée, les
chambres d’hôtels constituent des ressources rares (Hendler et Hendler, 2004). Il
s’agit d’un service connu de tous les individus. Ce service est la principale prestation
d’un hôtel et l’un des premiers services qu’un tour opérateur achète/vend, en plus
du fait qu’il représente l’un des besoins fondamentaux du consommateur selon
la théorie des besoins de Maslow (Udechukwu, 2009). L’industrie hôtelière et
celle des tours opérateurs sont fortement liées ; les actions menées par l’une se
répercutent dans l’autre et vice versa. Ces secteurs d’activités constituent deux
acteurs majeurs dans l’industrie touristique, en particulier en France. En outre, dans
l’industrie hôtelière, les coûts fixes sont importants et les marges assez faibles,
ce qui constitue sans doute l’une des motivations de fermeture d’allotements.
Enfin, la grande partie des travaux antérieurs sur le revenue management ont
été appliqués aux secteurs réputés classiques : aérien (Belobaba, 1987 et 1989),
hôtelier (Hendler et Hendler, 2004), restauration (Kimes, 1999), etc. A notre

68
Revenue management : fermeture
d’allotements et coût d’opportunité dans le
tourisme B to B

connaissance, le secteur des tours opérateurs est très peu étudié. Nous nous
intéressons principalement à un tour opérateur incoming d’autant plus que cette
catégorie est celle qui achète et réserve le plus d’allotements auprès des hôtels.
Les marques des hôtels et du tour opérateur sont confidentielles (cf. Mela, Gupta
et Lehmann, 1997), toutefois le tour opérateur a son siège à Paris.

3.2. Présentation du modèle, variables de l’étude et leurs


mesures
Modélisation du coût d’opportunité

Pour tester les hypothèses portant sur l’impact de la fermeture d’allotements par
les fournisseurs (i.e., hôtels) sur le coût d’opportunité d’une entreprise cliente
(i.e., tour opérateur), nous utilisons le modèle de régression multiple. Il s’agit
d’un modèle où la variable dépendante (exemple, le coût d’opportunité) est
quantitative (Cook, 1977). L’efficacité de ce modèle est reconnue par plusieurs
chercheurs (Kirby et al., 1997 ; Desmet, 1996 ; Rakoto, 2005). L’équation de la
régression est la suivante :

dans laquelle :
COPT = Coût d’opportunité du tour opérateur i en période d
AF = Nombre d’allotements fermés dans l’hôtel i en période d
CAT = Catégorie de l’hôtel i sous allotements en période d
LOC = Localisation de l’hôtel i sous allotements en période d
α = Ordonnée à l’origine
β = Coefficients des variables indépendantes
ε = Terme d’erreur
i = Indice associé aux variables
d = Indice de la période (2006-2007)
Les variables de l’étude et leurs mesures
Cet article met en relation une variable financière (coût d’opportunité) et des
variables marketing (allotements fermés, catégorie et localisation de l’hôtel). Le
coût d’opportunité (COPT) est la variable dépendante. Anderson et Blair (2004)
affirment qu’il est le cœur des systèmes de revenue management. Il constitue
aussi une mesure dont l’importance est capitale. D’une part, il montre le gain
d’opportunité qui aurait été fait sur les hôtels initiaux (ceux sous distribution).
D’autre part, il révèle le supplément de capacités à gagner (c’est-à-dire celles
négociées avec les hôtels alternatifs) qui aurait augmenté les revenus du tour
opérateur.

69
43

Le coût d’opportunité représente le manque à gagner. Il constitue l’ensemble de


charges que supporte le tour opérateur du fait de la fermeture d’allotements par
un hôtel initial (c’est-à-dire celui dont les demandes de réservation continuent
pourtant d’arriver de la part des tours opérateurs outgoing). Dans ce contexte, le
coût d’opportunité peut être étudié à partir de deux types de mesures. D’un point
de vue général, le coût d’opportunité correspond à la différence entre le prix de
vente d’une chambre d’un hôtel initialement distribué et le prix de vente d’une
chambre des hôtels alternatifs plus les charges connexes dues au délogement du
client. Il peut s’agir également de la différence entre le prix de vente d’une chambre
d’un hôtel initialement distribué et le prix de vente d’une chambre de catégorie
supérieure/égale d’un hôtel de même catégorie ou de catégorie supérieure. D’un
point de vue strict, il équivaut à la différence entre le prix de vente minimum d’une
chambre d’hôtel et le prix maximum de la même chambre, ce dernier correspondant
au willingness to pay du client (Steenkamp, Van Heerde et Geyskens, 2010).
C’est cette dernière mesure que nous retenons pour trois raisons. Premièrement,
il n’existe pas une mesure unique du coût d’opportunité. Ensuite, il constitue
une mesure simple, pratique, facile à calculer et précise. Enfin, il est l’outil le
plus approprié pour montrer que plus les fermetures d’allotements augmentent,
plus le coût d’opportunité doit être important. En effet, contrairement à d’autres
mesures à caractère global comme le chiffre d’affaires, le coût d’opportunité peut
facilement être traité en le dissociant de certaines variables. Nous proposons
cette mesure du coût d’opportunité comme une alternative à celles retenues par
les études mentionnées plus haut. Ainsi, cette mesure peut s’écrire :

où COPT est le coût d’opportunité qui correspond au prix de vente maximum


(PMAX) d’un allotement fermé moins le prix de vente minimum (PMIN) du
même allotement (c’est-à-dire de la même chambre d’hôtel distribuée par le tour
opérateur).

La fermeture d’allotements (AF), la catégorie (CAT) et la localisation de l’hôtel


(LOC) sont des variables indépendantes et de type marketing. La fermeture
d’allotements correspond au nombre total d’allotements fermés au cours d’une
année. Ses valeurs sont discrètes. Nous avons deux catégories d’hôtel, 2 et 3
étoiles, qui sont respectivement codés 1 et 2. Enfin, la localisation renvoie à la
ville ou au lieu où est situé l’hôtel réservé. Paris est codée 1, 0 sinon.

3.3. Données
Nous avons décidé d’appliquer le modèle de notre recherche et ses analyses
sur des données récentes et collectées sur le territoire national. Deux raisons
principales justifient la sélection de la France. Tout d’abord, ce pays constitue
la première destination touristique au niveau international (Yeoman, Bras et
McMahon-Beattie, 2007). Deuxièmement, il existe une présence importante

70
Revenue management : fermeture
d’allotements et coût d’opportunité dans le
tourisme B to B

des tours opérateurs et des hôtels ainsi qu’une concurrence bien établie. Les
données sélectionnées pour l’analyse proviennent d’un tour opérateur réceptif
français. Ces données ont été collectées de 2006 à 2008, sachant que l’exercice
budgétaire dans la plupart des entreprises de tourisme commence au mois de
novembre et prend fin au mois d’octobre. Ce sont des données relatives à la
fermeture d’allotements et qui ont été collectées sur toute la France avec une
prépondérance des données provenant de Paris et l’Ile-de-France. Cela reflète le
fait que Paris et sa région restent le symbole de la première destination touristique
au monde (Lesourd et Roll, 2008).

Notre étude porte sur 208 hôtels répartis sur toute la France. Ces hôtels ont
accueilli un nombre total de 16 954 clients dont 14 935 sur la ville de Paris. Le
nombre de nuitées s’élève à 85 912 pour Paris contre un total de 101 566 nuitées
sur tout le territoire français. Plusieurs données ont servi de base à la sélection
des variables pertinentes. Il s’agit notamment de : l’année, le mois, le nombre
de dossier, le nombre de clients, la catégorie de l’hôtel, le nombre de nuitées,
le montant des achats, le nom de l’hôtel, la ville, les prix maximum, minimum et
moyen d’une chambre, le type de lit acheté, le nombre d’allotements fermés et la
date de fermeture des allotements. Nous nous sommes focalisés sur la fermeture
d’allotements au niveau des hôtels disposant de deux et trois étoiles. En effet,
ces deux catégories d’hôtel rassemblent la majeure partie des réservations. Dans
le but d’affiner les données, nous avons d’abord commencé par l’élimination des
doublons, ensuite nous avons sélectionné les variables les plus pertinentes après
certains calculs intermédiaires (e.g., sur le total des allotements). Finalement,
nous avons retenu l’exercice 2006-2007 et un échantillon de 132 hôtels.

4. Analyses et résultats

4.1. Statistiques descriptives et corrélations entre les variables


indépendantes
Le Tableau 1 montre que les écarts types des allotements fermés (σ = 120,314)
et du coût d’opportunité (σ = 29,919) sont très élevés (distribution large). Cela
indique que leurs valeurs absolues ont des grandes différences les unes des
autres. Les résultats du test de corrélation révèlent que la fermeture d’allotements
et la catégorie de l’hôtel sont négativement et faiblement corrélées (r = -0,218, p
= 0,012).

71
43

Tableau 1 – Statistiques descriptives

Par contre, il n’existe pas de relation significative entre la fermeture d’allotements


et la localisation (r = 0,027, p = 0,761), de même qu’entre la catégorie de l’hôtel
et la localisation (r = 0,008, p = 0,926). Par conséquent, nous concluons que les
corrélations entre les variables indépendantes ne sont pas problématiques. Ces
résultats sont conformes à nos attentes.

4.2. Les régressions


L’analyse linéaire présentée au Tableau 2 expose les résultats et les seuils de
signification associés pour chacune des variables de contrôle. Ce dernier tableau
confirme les résultats de celle des corrélations. Le modèle est globalement
significatif et classe 79,5% des observations.

Tableau 2 – Régressions sur le coût d’opportunité

Impact de la fermeture d’allotements : Conformément à l’hypothèse 1 le coefficient


positif et significatif des allotements fermés (β = 0,666, p = 0,000) indique que
les fermetures d’allotements et le coût d’opportunité varient dans le même sens.
Le coefficient du coût d’opportunité est inférieur à 1, mais il est très largement
supérieur à ceux de la catégorie de l’hôtel et de la localisation, ce qui signifie
que pour cet échantillon le coût d’opportunité s’explique plus par la fermeture
d’allotement que les deux autres variables. Une fermeture supplémentaire accroît
le coût d’opportunité de 66,6%. Ces résultats sont cohérents avec ceux du Tableau
1 qui signale des différences importantes dans la fermeture d’allotements. De

72
Revenue management : fermeture
d’allotements et coût d’opportunité dans le
tourisme B to B

plus, ils suggèrent que les fournisseurs (i.e., les hôtels) pratiquent régulièrement
la discrimination tarifaire.

Impact de la catégorie de service : La catégorie de l’hôtel est également


positivement et significativement liée au coût d’opportunité (β = 0,079, p = 0,013).
Le coefficient de la catégorie de l’hôtel est non seulement inférieur à 1, mais il
est en même temps plus bas que ceux de la fermeture d’allotements et de la
localisation du service sous allotement. Toutefois, ce résultat confirme l’hypothèse
2 selon laquelle la catégorie d’un service sous allotement et à forte demande
génère des coûts d’opportunité conséquents. Chaque fermeture additionnelle
dans les hôtels deux et trois étoiles augmente le coût d’opportunité de 7,9%.
Cette validation confirme deux tendances du marché. Premièrement, les hôtels 2
et 3 étoiles captent la majeure partie des clients qui visitent la France (Lesourd et
Roll, 2007). Deuxièmement, les hôtels abandonnent de plus en plus un mode de
gestion archaïque pour une gestion centrée sur le revenue management.

Impact de la localisation du service : Tel que prévu à l’hypothèse 3, le lieu a un


impact positif et significatif sur le coût d’opportunité. Le coefficient du lieu dont
le service est sous allotement (β = 0,134, p = 0,000) est inférieur à 1. Même si
ce coefficient est inférieur à celui de la fermeture d’allotements, il est néanmoins
supérieur à celui de la catégorie de l’hôtel. Car toute fermeture de plus dans
les lieux les plus attractifs génère une hausse de 13,4% du coût d’opportunité.
Ceci suggère que le lieu, tout comme la catégorie du service et la fermeture
d’allotements, constitue des déterminants importants du coût d’opportunité.

Conclusion

Cet article a étudié empiriquement l’influence de la fermeture d’allotements, de la


localisation et de la catégorie d’un service sur le coût d’opportunité. A travers le
cas du commerce B2B mettant en relation un tour opérateur incoming et les hôtels
en France, les résultats indiquent qu’il existe une relation positive et significative
entre le coût d’opportunité et la fermeture d’allotements, le lieu et la catégorie
d’un service à forte demande. Ces résultats sont intéressants car ils suppléent
le manque d’études (cf. Chiang et al., 2007) ciblant un environnement français
en revenue management. Par ailleurs, ils mettent en évidence des apports
scientifiques et managériaux et ouvrent plusieurs perspectives de recherche.
Du point de vue scientifique, nous réaffirmons comme la recherche classique
en revenue management que pour maximiser les revenus, il faut optimiser deux
leviers  : les capacités et le prix. A cela, nous ajoutons qu’il faut minimiser le
coût d’opportunité. Car la fermeture d’allotements crée des coûts d’opportunité
importants. A cet effet, nous proposons le coût d’opportunité comme un outil
d’aide à la décision devant figurer dans les tableaux de bord des entreprises de
services. L’intérêt est qu’il peut servir d’outil autant pour prévoir (diagnostiquer et
anticiper les fermetures d’allotements), définir les stratégies en termes de revenue

73
43

management (par exemple diversification de portefeuille des fournisseurs), que


pour une gestion en temps réel. Une bonne maîtrise des coûts permet en même
temps une meilleure anticipation et une meilleure gestion des risques. Enfin, à
l’inverse du revenue management classique qui se focalise sur le B2C, notre
approche montre que les relations B2B sont légitimes dans les problématiques
relatives au revenue management.

Sur le plan managérial, nos suggestions concernent aussi bien les distributeurs
que les fournisseurs. Nos résultats montrent qu’il est important pour les
responsables de services de gérer au mieux la demande liée à deux facteurs-clés
de revenus : la catégorie et la localisation. Ces facteurs leur procurent un pouvoir
de négociation. Nous proposons aux distributeurs (tours opérateurs) de gérer le
risque des coûts d’opportunité en améliorant les termes des contrats avec les
hôtels (e.g., au niveau des rétrocessions des chambres), diversifiant davantage
leur portefeuille de fournisseurs, et en proposant des packages de services en
plus des offres simples. Car pour assurer sa pérennité, il est impératif pour toute
entreprise de développer sa stratégie sur la base de ses forces et faiblesses
afin de profiter des opportunités issues de l’environnement concurrentiel et de
se protéger des risques liés à ce même environnement (Furrer et Sudharshan,
2003).

Bien que les résultats obtenus dans cette étude aient répondu totalement à nos
attentes, nous estimons que davantage d’efforts restent à faire dans le cadre de
recherches sur l’industrie touristique au niveau du commerce business to business.
Si cette étude a vérifié avec succès les hypothèses dans le cadre des données
issues de la relation entre un tour opérateur incoming et différents hôtels répartis
sur toute la France, la généralisation des résultats demeure l’un des problèmes à
résoudre lors de recherches futures. Etendre les recherches sur plusieurs tours
opérateurs à la fois incoming et outgoing, de même que sur d’autres entreprises
de services, constitue une piste très intéressante. Notre étude n’a retenu que
les hôtels 2 et 3 étoiles. Nous ne disposons d’aucun résultat sur les hôtels 4 et
5 étoiles qui, de par leur gamme (i.e., haute), pourraient davantage confirmer
les effets démontrés voire expliquer l’hétérogénéité des coûts d’opportunité. Par
ailleurs, notre recherche n’a retenu que les données d’un exercice touristique. Il
serait intéressant de pratiquer une étude longitudinale sur plusieurs années. En
dépit de ces limites, cette recherche montre que le coût d’opportunité est influencé
par la fermeture d’allotements. Par conséquent, le revenue management et les
entreprises du tourisme devraient en tenir compte dans les relations B2B.

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