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Volume 21/1
2017
Ouvrage publié avec le concours
de la Société des Amis de la Bibliothèque Salomon Reinach
Fascicule 1
Sommaire 5-8
Index des auteurs 9-10
Études
M. Minardi, « The Zoroastrian Funeray Building of Angka Malaya » 11-49
R. Raja, « Representations of the so-called “Former Priests” in Palmyrene
Funerary Art. A Methodological Contribution and Commentary » 51-81
H. Kahwagi-Janho, « De Baalbeck à Anjar. À propos de quelques séries
de chapiteaux antiques » 83-103
A.-K. Rieger, « Text and Landscape. The complementarity of the Papiro
Vaticano Greco 11 R (PMarm) to landscape-archaeological results
from the arid Marmarica (NW-Egypt/NE-Libya) » 105-146
Chroniques
Fr. Croissant, « Du nouveau sur les terres cuites grecques. À propos de
quelques publications récentes » 263-280
L. Martinez-Sève, « Sur la nature du pouvoir séleucide » 281-289
Chr. J. Robin, « L’Arabie à la veille de l’islam dans l’ouvrage de Aziz al-Azmeh,
The emergence of Islam in Late Antiquity » 291-320
Topoi 21 (2017)
p. 5-8
SOMMAIRE
Fascicule 2
Sommaire 325-326
Comptes rendus
Études thématiques : géographie antique et sacrée, paléobotanique
P.-O. Leroy, S. Bianchetti et al., Brill’s Companion to Ancient Geography (2016) 327-333
P.-O. Leroy, D. Dueck, The Routledge Companion to Strabo (2017) 335-339
M. Albaladejo-Vivero, Strabon, Géographie XV (éd. P.-O. Leroy) (2016) 341-343
S. Amigues, Ph. Beaujard, Histoire et voyages des plantes cultivées
à Madagascar (2017) 345-355
S. Amigues, P. Lieutaghi, Une ethnobotanique méditerranéenne (2017) 357-359
A.-C. Panissié, N. Belayche et al., Fabriquer du divin (2015) 361-367
M. Lesgourgues, P. Struck, Divination and Human Nature (2016) 369-377
M. Sartre, Y. Lafond, V. Michel, Espaces sacrés (2016) 379-384
Orient ancien, Iran, Inde
F. De Romanis, Kl. Karttunen, Yonas and Yavanas in Indian Literature (2015) 385-386
V. Lefèvre, L. Fogelin, An Archaeological History of Indian Buddhism (2015) ;
B. Ahmed, Buddhist Heritage of Bangladesh (2015) 387-396
J.-Fr. Salles, F. De Romanis, M. Maiuro, Across the Ocean (2015) 397-406
A. de Saxcé, D.A. Agius et al., Red Sea Project VI (2017) 407-412
R. Boucharlat, P. Callieri, Architecture et représentations
dans l’Iran sassanide (2014) 413-419
V. Messina, J.M. Schlunde, B.B. Rubin, Arsacids, Romans and Local Elites (2017) 421-423
V. Messina, J. Wiesehöfer, S. Müller, Parthika (2017) 425-429
C. Saliou, D. Parayre, Le fleuve rebelle (2016) 431-436
Rome et Occident
R.-M. Bérard, V. Nizzo, Archeologia e antropologia della morte (2015) 733-742
J.J. Palao Vicente, Fr. Bérard, L’armée romaine à Lyon (2015) 743-750
L’ARABIE À LA VEILLE DE L’ISLAM
dans l’ouvrage de Aziz al-Azmeh,
The Emergence of Islam in Late Antiquity
Aziz al-Azmeh, The Emergence of Islam in Late Antiquity. Allāh and his People,
Cambridge University Press (2014). 1 vol. 23,5 x 15,5 cm, xvii + 634 p., 4 cartes,
5 figures, 1 tableau hors-texte « Model for the composition of the Paleo-Muslim
Qurʾān », index, p. 615-623 (noms propres) et 624-634 (matières).
Topoi 21 (2017)
p. 291-320
292 c.j. robin
même s’il s’inspire de l’œcuménisme impérial des Romains. Une telle thèse
contredit évidemment la vision traditionnelle des musulmans.
L’ouvrage qui est divisé en sept chapitres s’ouvre avec une contextualisation
de l’Antiquité tardive et de l’islam dans l’historiographie et l’histoire (Ch. 1 :
« Late Antiquity and Islam historiography and history »). Le chapitre 2 (« God,
divine economies and emperors ») propose une modélisation des développements
religieux et impériaux des époques hellénistique et romaine et de l’Antiquité
tardive. L’objectif est de dégager un certain nombre de thématiques interprétatives
et d’outils conceptuels qui seront utiles pour l’analyse des matériaux, notamment
les structures du polythéisme, le développement du monothéisme, et le lien entre
religion et pouvoir politique.
Le chapitre 3 (« Arabia and Arab ethnogenesis in Late Antiquity ») se
concentre sur la naissance de l’identité arabe, distinguant sa dynamique interne
et l’impact de la politique des grands empires à l’égard de leurs voisins barbares.
Il traite des Arabes appelés al-ʿāriba (ceux qui sont de souche arabe) et al-
mustaʿriba (ceux qui sont devenus arabes) ; de la langue arabe ; et de l’ouverture
du Ḥijāz. Dans le chapitre 4 (« Preface to Allāh »), l’auteur se concentre sur les
développements du polythéisme, la monolâtrie, l’hénothéisme et ce qui peut être
considéré comme des formes de foi monothéiste chez les Arabes de l’Antiquité
tardive. La mise en relation de ces développements avec les conditions
sociales des pratiques cultuelles constitue l’arrière-plan sur lequel s’appuie
et auquel s’oppose la théogonie (ou le récit de la naissance) d’Allāh (ch. 5).
Avec le chapitre 6, le contexte temporel et spatial se dilate. L’auteur s’intéresse
successivement à la constitution de la principauté théocratique de Médine (« the
Paleo-Muslim polity »), à sa consolidation interne et externe, aux rouages du
stupéfiant charisme de Muḥammad et à son adresse politique, pour aboutir à
l’empire des Umayyades. L’interprétation se fonde plutôt sur les dynamiques
internes que sur l’épanouissement de potentialités latentes en Arabie occidentale.
L’une de ces dynamiques internes est la composition et la canonisation du
Coran, qui est l’héritage le plus durable du paléo-islam (ch. 7). Des modèles pour
l’interprétation de sa composition, de sa mise par écrit, et de sa canonisation sont
proposés en terme de Sitz im Leben (le milieu culturel, l’arrière-plan social ou le
contexte historique), de même que pour le statut et la nature des vaticinations de
Muḥammad. Le dernier chapitre, enfin, esquisse le modèle qui s’accomplit dans
les empires musulmans successifs, dans lesquels l’islam se cristallise finalement.
La principale visée de l’auteur est d’élaborer un discours continu, argumenté,
avec d’amples perspectives, qui balaie successivement tous les aspects de la vie
politique, institutionnelle, économique, sociale, culturelle et religieuse pour les
150 années sur lesquelles l’auteur concentre son attention. Aziz al-Azmeh le fait
sur le mode de l’affirmation sans réserve, dans une langue aux phrases longues et
au lexique volontiers abstrait, pour ne pas dire alambiqué (comme les citations de
cette recension l’illustrent).
Pour l’auteur, le principal apport réside dans une présentation profondément
renouvelée de la période formative de l’Islam qui se fonde sur une démarche
l’arabie à la veille de l’islam 293
3. Al-Balādhurī, Futūḥ al-buldān, éd. Riḍwān, p. 456-460 et trad. Murgotten, II, 270-
274 ; Ibn al-Nadīm, Fihrist, éd. Flügel, 1, p. 4-5, et trad. Dodge, 1, p. 6-9.
4. L. Nehmé, « A glimpse of the development of the Nabataean script into Arabic based
on old and new epigraphic material », dans The Development of Arabic as a Written
Language, op. cit. n. 1, p. 47-88 (cité dans la bibliographie, p. 589) ; Ch. J. Robin,
« Les calendriers de l’Arabie préislamique », dans Jerusalem Studies on Arabic and
Islam, à paraître.
Dans les deux inscriptions arabes de Ḥimà 6, les mois utilisés sont burak et
al-muʾtamir. La tradition savante arabo-musulmane les connaît : ce sont le 12e et
le 1er mois d’un calendrier que quelques traditionnistes mentionnent et attribuent
à des populations annihilées depuis longtemps. Or, si on examine la poésie
préislamique, il est manifeste que c’est ce calendrier qui était employé dans toute
l’Arabie avant l’Islam, alors que celui de Makka (muḥarram–dhu ʾl-ḥijja), qui
n’apparaît dans aucun fragment poétique assurément préislamique, ne l’était pas 7.
Dans ce cas, la tradition savante arabo-musulmane a bien transmis l’information
(le calendrier utilisé en Arabie avant l’Islam), mais a réinterprétée celle-ci dans
un sens apologétique en la rejetant dans un passé lointain. En effet, aux premiers
siècles de l’Islam, la conviction s’était installée que le temple de Makka rayonnait
sur toute l’Arabie depuis des siècles et que, en conséquence, son calendrier était
le seul qui était utilisé dans toute la Péninsule 8. Concernant le calendrier, Aziz al-
Azmeh se contente de résumer les thèses de la science contemporaine, élaborées
par Armand Pierre Caussin de Perceval et acceptées jusqu’à une date récente de
façon unanime, bien qu’il soit avéré désormais que ces thèses étaient infondées. Par
exemple, il situe le mois de rajab au printemps et celui dhū ʾl-ḥijja (le pèlerinage)
en automne, ou suppose des systèmes d’intercalation imparfaits, entraînant une
dérive du calendrier par rapport aux saisons (p. 194-197).
La perte de mémoire de traditionnistes est tout aussi grande en matière
de rites religieux préislamiques. Sur les divinités, les temples, les pèlerinages,
les cérémonies, le personnel spécialisé ou le paiement des taxes, le savoir des
traditionnistes se résume à quelques fables. Ce qui en ressort n’est plus une
interrogation sur la validité historique des informations de la tradition, mais le
constat apparemment rédhibitoire que la science musulmane ne savait plus grand-
chose du passé. Les traditions individuelles et familiales qui ont été recueillies ont
conservé des petits détails de la vie quotidienne, sans doute importants pour les
acteurs et souvent significatifs pour nous, mais dépourvus de tout cadre explicatif.
Quand les traditionnistes s’interrogent sur un aspect du passé de portée générale,
ils ne disposent d’aucune information réelle de sorte que leurs conclusions sont
de simples hypothèses personnelles dérivant de ce qu’ils croient savoir du passé.
Ce constat invite à distinguer plus clairement qu’on ne le fait dans la tradition
savante arabe les faits bruts (khabar) transmis de génération en génération et les
réélaborations par les savants de l’Islam classique.
7. Ch.
J. Robin, « Die Kalender der Araber vor dem Islam », dans N. Schmidt,
N.K. Schmid & A. Neuwirth (éds), Denkraum Spätantike. Reflexionen von Antiken
im Umfeld des Koran, Wiesbaden, Harrassowitz (2016), p. 323-326.
8. Robin et alii, « Inscriptions antiques récemment découvertes à Najrān », op. cit., n. 2,
p. 1045-1048 ; Robin, « Die Kalender der Araber vor dem Islam », op. cit. n. 7.
296 c.j. robin
10. Voir Ch. J. Robin, « Matériaux pour une prosopographie de l’Arabie antique : les
noblesses sabéenne et ḥimyarite avant et après l’Islam », dans Ch. J. Robin et
J. Schiettecatte (éds), Les préludes de l’Islam. Ruptures et continuités dans les
civilisations du Proche-Orient, de l’Afrique orientale, de l’Arabie et de l’Inde à la
veille de l’Islam, Orient et Méditerranée 11, Paris, de Boccard (2013), p. 127-270,
où est esquissée une comparaison de la carte tribale du Yémen vers 300 de l’ère
chrétienne, vers 500 et vers 1000.
l’arabie à la veille de l’islam 299
l’Arabie déserte. On peut d’ailleurs supposer que c’est de Maʿadd que ces Kindites
ont reçu l’écriture arabe et l’ont diffusée jusqu’aux abords du Yémen, dans la
seconde moitié du ve s.
Aziz al-Azmeh s’intéresse aussi aux groupes de souche arabe aramaïsés et
hellénisés, Palmyre, « les tribus d’al-Ṣafā » (c’est-à-dire les populations écrivant
en alphabet ṣafāʾitique entre la Syrie du Sud et le nord de l’Arabie séoudite ; voir
ci-dessous, p. 318), Thamūd, Hatra, Kinda et les Salīḥides.
Dans Thamūd, il croit pouvoir reconnaître « le premier exemple de la
formation d’un groupe tribal avec une cohérence communiquée par un nom
commun, utilisé selon toute probabilité de façon opérationnelle plutôt que pour
une revendication généalogique, quelle que soit la durée que cette formation a pu
avoir » (p. 109).
L’auteur est parfaitement fondé à mettre en doute l’argument généalogique,
si souvent invoqué dans les publications historiques. L’idée que les Arabes aient
manifesté une grande passion pour la science généalogique depuis des temps
immémoriaux est un mythe anthropologique, qui ne repose sur aucune donnée
déterminante. Si on interroge les inscriptions d’Arabie, les individus s’identifient
en mentionnant leur nom et, pour les personnages les plus en vue, celui du père et
celui du lignage ; s’il arrive qu’ils citent leurs ascendants sur deux générations, le
père et le grand-père, cela reste très exceptionnel.
Les groupes tribaux ne sont jamais formellement définis par l’ascendance : ils
portent un nom propre (comme Kinda ou Tanūkh) qui n’est jamais précédé par un
terme de parenté tel que banū, « fils de » (ou ʿiyāl et awlād qui ont le même sens).
Rien n’indique qu’ils se soient considérés comme les descendants d’un ancêtre
réel ou fictif. Pour autant qu’on puisse en juger, l’unité du groupe se fondait alors
sur la vénération de quelques divinités communes et sur la pratique collective
de certains rites. C’étaient les seuls lignages qui étaient fondés, du moins en
apparence, sur une ascendance commune puisque leur nom est toujours introduit
par banū, « fils de ». Par exemple, les tribus nommées Yursam (Yémen) ou Muḍar
(Arabie occidentale) avaient pour princes les banū Sukhaym et les banū Thaʿlaba.
Si l’ascendance ne jouait pas le rôle qu’on lui prête, elle n’était pas
complètement ignorée. Elle servait à légitimer les souverains qui ne manquaient
jamais de mentionner si leur père avait régné ; mais cette filiation pouvait être
naturelle ou fictive comme le prouve l’exemple d’un souverain du iiie s. de l’ère
chrétienne qui se réclame de deux pères : « Nashaʾkarib Yuʾmin Yuharḥib roi de
Sabaʾ et de dhu-Raydān, fils de Ilīsharaḥ Yaḥḍub et de Yaʾzil Bayān, rois de Sabaʾ
et de dhu-Raydān ». L’ascendance jouait également un rôle dans la transmission
de certaines charges religieuses comme l’illustre un ensemble d’inscriptions
sabéennes archaïques de Maʾrib qui enregistrent l’exercice de certaines fonctions
par les membres des mêmes lignages, de génération en génération.
C’est seulement en dehors de l’Arabie à proprement parler que l’on trouve
des identités mentionnant un très grand nombre d’ascendants ; c’est un caractère
singulier des graffites laissés par les populations du désert, dans le sud de la Syrie
300 c.j. robin
al-Kalbī (l’auteur de la Grande Généalogie qui fait référence) était engagé dans le
parti d’Ibn al-Ashʿath.
Étonnamment, Aziz al-Azmeh omet de citer des sources qui vont dans le
sens de la thèse qu’il défend, à savoir une forte intervention des empires en Arabie.
Il n’évoque pas les multiples ambassades envoyées par Justinien en Arabie ni la
tradition rapportée par Ibn Qutayba selon laquelle Quṣayy b. Kilāb, l’ancêtre de
Muḥammad à la sixième génération, aurait pris le contrôle de Makka « avec l’aide
de César » 11.
Kinda
Si Aziz al-Azmeh connaît assez bien les groupes de souche arabe aramaïsés
et hellénisés de Syrie, ce n’est plus le cas quand il traite de ceux d’Arabie, et tout
particulièrement de Kinda qui est quelque peu maltraité 12. Il affirme que Imruʾ al-
Qays (commémoré par l’inscription funéraire d’al-Namāra, conservée au Louvre,
dont la date est désormais 332 plutôt que 328 : voir ci-dessous) est un « roi de la
Kinda sudarabique », issu des banū Asad au nord-est du Najd (p. 110 ; voir aussi
p. 116 et 117). Ces affirmations résultent de deux confusions. La première est une
identification du roi enterré à al-Namāra en 332 avec le poète errant Imruʾ al-Qays
fils de Ḥujr fils d’al-Ḥārith le Roi, un prince kindite détrôné et poursuivi par la
vindicte de ses ennemis, qui meurt vers 550. Quant aux banū Asad dont Imruʾ al-
Qays serait issu, c’est une réminiscence du fait que son grand-père et son père ont
régné sur cette tribu d’Arabie du nord, que lui-même n’a pas réussi à reconquérir 13.
Le roi Imruʾ al-Qays de l’inscription d’al-Namāra est en fait, selon toute
vraisemblance, un souverain arabe de la vallée de l’Euphrate, comme le suggère
l’emplacement de son tombeau en Syrie méridionale. On l’identifie logiquement
avec l’un des Naṣrides de la tradition savante arabo-musulmane, qui régneront
plus tard à al-Ḥīra.
La localisation de l’entité politique Kinda (the polity of Kinda) « quelque
part à l’ouest de la moderne al-Riyāḍ » dans le Najd (p. 111) trahit une confiance
excessive dans les récits de « migrations » des compilateurs tardifs qui imaginent
une sorte de Big Bang tribal, provoqué par la rupture de la Digue de Marib, que
l’auteur du Coran interprète comme un châtiment divin (sourate 34, v. 15 [Flügel] /
11. Ibn Qutayba (Abū Muḥammad ʿAbd Allāh b. Muslim), al-Maʿārif, Tharwat ʿUkāsha
(éd.) [al-Qāhira] (Wizārat al-Thaqāfa wa-ʾl-Irshād al-qawmī, al-Idāra al-ʿāmma li-l-
thaqāfa) (1960) (1379 h.), p. 640-641 : wa-aʿāna-hu Qayṣar ʿalay-hā.
12. Voir notamment Ch. J. Robin, « Les rois de Kinda », dans A. Al-Helabi, D.G. Letsios,
M. Al-Moraekhi, A. Al-Abduljabbar (éds), Arabia, Greece and Byzantium.
Cultural Contacts in Ancient and Medieval Times, Riyadh (King Saud University,
Department of History) (2012) (1433 h.), p. 59-129.
13. Aziz al-Azmeh en déduit logiquement que, si Imruʾ al-Qays est issu des banū Asad,
il est « therefore not actually Kindite, but a chief over Kindites ».
302 c.j. robin
16). Avant l’Islam, au iiie s. de l’ère chrétienne, la tribu de Kinda domine l’oasis
de Qaryat al-Faʾw (à 300 km de Najrān), puis elle s’établit dans le Ḥaḍramawt
occidental quand les puits de Qaryat se tarissent. Elle passe alors sous le contrôle
des princes dhu-Yazʾan du Ḥaḍramawt et, au ive s., participe à la conquête de
l’Arabie déserte sous la direction de ces derniers. Dans la seconde moitié du ve s.
et au début du vie, les princes de Kinda sont investis du pouvoir sur les Arabes
de Maʿadd dans le Najd par les rois de Ḥimyar, si l’on en croit les traditions
arabes, mais aussi les documents diplomatiques byzantins. Les princes kindites
d’époque islamique prétendront que leurs ancêtres ont été « rois » de Maʿadd, mais
plusieurs traditionnistes en doutent, suspectant que ces ancêtres n’étaient que de
simples agents des rois ḥimyarites. En tout cas, il n’y a aucune « migration » de
Kinda en Arabie centrale, mais des princes issus de Kinda investis d’importantes
responsabilités, qui se déplacent évidemment avec leur parentèle et des troupes
recrutées dans leur tribu.
Ce mirage d’une entité tribale kindite installée en Arabie centrale conduit
Aziz al-Azmeh a des affirmations déroutantes : évoquant la bataille de dhū
Qār, vers 611, il mentionne la grande tribu de Bakr b. Wāʾil établie en Arabie
du nord-est et commente « of the Kinda » (p. 119). Si l’expression signifie “sous
l’autorité des princes kindites d’Arabie centrale”, elle est anachronique puisque
cette principauté kindite a disparu depuis plus de 60 ans. Si elle signifie “rattaché
généalogiquement à Kinda”, elle n’a aucun fondement.
Il est vrai que, un peu plus haut, l’auteur avait souligné les contradictions
des généalogies : « il faut garder à l’esprit que les généalogies de Kinda sont
variées (Maʿadd, Rabīʿa, Qaḥṭān) obscurcissant les origines ultimes : Szombathy,
Genealogy, 93 n. 230) » (n. 62, p. 110). Les sources donnent effectivement des
versions divergentes, mais toutes n’ont pas la même valeur. Il y a tout d’abord
les ouvrages spécialisés qui donnent des généalogies systématiques : tous sont
unanimes pour rattacher Kinda à Qaḥṭān. Ce n’est pas étonnant puisque le plus
ancien, élaboré par Hishām Ibn al-Kalbī (mort vers 820) a servi de base et de
modèle pour tous les autres.
Une autre source d’information est constituée par les indications
généalogiques qu’on trouve à tout propos. Quand, dans certains récits, il est
affirmé que Kinda et Rabīʿa sont apparentés, il faut examiner le contexte. Une
telle affirmation peut être la simple traduction en termes généalogiques du fait que
Kinda et Rabī’a combattaient ensemble ou qu’ils plantaient leurs tentes au même
endroit quand ils participaient au pèlerinage de Makka. Il peut arriver enfin que ce
soit un individu qui se réclame d’une parenté avec la tribu avec laquelle il entre
en affaires. On a ainsi l’exemple d’un Kindite se prévalant d’une parenté avec
Quraysh. C’est là une prétention banale pour établir des liens de confiance. En fait,
bien des contradictions disparaissent quand on hiérarchise les sources.
Aziz al-Azmeh fait mourir en 569/70 le troisième prince de Kinda en Arabie
centrale, al-Ḥārith le Roi fils de ʿAmr le Diminué (al-Maqṣūr) fils de Ḥujr le
Mangeur d’herbes amères (Ākil al-murār). Ici, il confond ce prince kindite (qui
l’arabie à la veille de l’islam 303
est tué en 527-528 par al-Mundhir d’al-Ḥira si l’on se fonde sur Jean Malalas 14)
avec le Jafnide al-Ḥārith fils de Gabala qui règne en Syrie (mentionné peu après,
p. 113).
Dans son traitement des systèmes d’alliances (« al-ʿArab al-mustaʿriba :
alliances of late antique empire »), Aziz al-Azmeh brosse de vastes perspectives
évidemment stimulantes, mais souvent minées par les approximations. C’est à
nouveau son traitement de Kinda qui étonne. Il croit pouvoir reconnaître deux
principautés kindites. L’une est « centrée sur le sud de la Syrie, avec une influence
croissante et décroissante sur le nord-est jusqu’à l’Euphrate, et une autre en Arabie
centrale, quoique ceci n’exclue pas occasionnellement une hégémonie complète
qui paraît avoir été particulièrement le cas sous Imruʾ al-Qays, dont l’influence
semble s’être étendue sur la Jazīra, et sur la région agricole irriguée de Najrān dans
le sud » (p. 116). Il ajoute un peu plus loin que la principauté kindite de Syrie a été
progressivement amenuisée par Salīḥ.
Les Salīḥ, qui ne sont connus que par la tradition savante arabo-musulmane
et sont donc assez évanescents, auraient régné sur les Arabes de Syrie avant les
Thaʿlabides et les Jafnides issus de Ghassān, c’est-à-dire avant 475 15. Or les seuls
indices de liens entre Kinda et la Syrie datent de 527-528 et de 540-550 environ.
En 527-528 le Kindite al-Ḥārith le Roi fils de ʿAmr (le phylarque Arethas) se
querelle avec « le duc de Palestine, Diomède, silentiaire » et s’enfuit « vers le limes
intérieur en direction du territoire indien » 16. On suppose d’ordinaire qu’al-Ḥārith
a trouvé refuge en territoire romain après avoir été chassé du trône d’al-Ḥīra. Dix
ou vingt ans plus tard, le successeur d’al-Ḥārith qui s’appelle Qays (« Kaisos »)
abandonne le pouvoir en Arabie centrale à la demande instante de Justinien qui
lui a envoyé plusieurs ambassades et reçoit de l’empereur « le commandement
sur les Palestines ; il amenait avec lui beaucoup de ses sujets » 17. On voit mal ce
qui fonde l’existence d’une principauté kindite « centrée sur le sud de la Syrie » et
encore moins comment les princes kindites auraient été marginalisés par des Salīḥ
qui sont antérieurs de plus de 50 ans.
Ilāf
Le terme coranique īlāf (p. 158) offre une bonne illustration des difficultés
méthodologiques auxquelles le chercheur contemporain se heurte et du parti
adopté par l’auteur. Si on organise les données chronologiquement, la source la
14. Malalas, Chronographie 18.16, éd. Dindorf, p. 434-435 ; trad. Jeffreys et alii 1986,
p. 252.
15. U. Avner, L. Nehmé & Chr. Robin, « A rock inscription mentionning Thaʿlaba, the
Saracene of the Romans », Arabian Archaeology and Epigraphy 24 (2013), p. 237-256.
plus ancienne est la sourate 106 : « À cause de l’entente des Quraysh, (2) [de] leur
entente [dans] la caravane d’hiver et d’été ! », li-īl(ā)f Quraysh (2) (ī) l(ā) fi- him
riḥlata ʾl-shitāʾi wa-ʾl-ṣayf. Or l’interprétation du texte coranique fait difficulté :
la signification du substantif īlāf dont c’est la seule occurrence dans la littérature
ancienne n’est pas connue et n’est pas vraiment éclairée par le contexte, notamment
parce que l’on ignore si la sourate 106 est une sourate indépendante ou la suite de
la sourate 105 (comme dans la recension d’Ubayy). Sur cette base, la tradition a
élaboré plusieurs schémas explicatifs, supposant le plus souvent que le « voyage
d’hiver et d’été » se référait à des expéditions commerciales, en hiver au Yémen et
en été en Syrie, puisque les récoltes se font à la fin de l’automne après les pluies
d’été (au Yémen) et à la fin du printemps après les pluies d’hiver (en Syrie). En
conséquence, on a donné à īlāf le sens de « alliance, pacte », en plus de celui de
« rapports de clients à patron » (Kazimirski). Dans le discours généralisant d’Aziz
al-Azmeh, cela devient : « C’est aussi durant cette période que Quraysh peut
être vue comme ayant été associée à un arrangement contractuel appelé le īlāf
garantissant le libre passage pour les fameux Deux voyages annuels, ceux de l’été
et de l’hiver … Les détails ne sont pas sûrs, mais l’implication commerciale ne fait
pas de doute. Le Īlāf [avec une majuscule] de Quraysh est en relation étroite avec
la cristallisation de Quraysh comme groupe clanique sédentaire » etc.
Si on se reporte aux études consacrées à ce passage, notamment celle d’Uri
Rubin qui est citée, l’implication commerciale est plausible, mais loin d’être
assurée, même si une inscription sudarabique mentionne « la caravane du sud
et du nord » (avec peut-être le sens de « la caravane yéménite et syrienne ») qui
fait peut-être écho au voyage d’hiver et d’été du Coran 18. Quant au sens précis
de īlāf, il est fort incertain. Il n’est guère douteux que sur cette question comme
sur beaucoup d’autres, les explications élaborées par les savants musulmans ne
sont pas fondées sur un savoir immémorial transmis de génération en génération,
susceptible d’éclairer les institutions du passé, mais sur des interprétations
personnelles dérivant de ce qu’on savait ou croyait savoir alors de l’Arabie
antique. Aziz al-Azmeh accorde un crédit aveugle à ces explications, ou plutôt à
celle qui lui paraît la plus pertinente. Mais rien ne permet de savoir si les trésors
d’inventivité déployés par les traditionnistes pour donner un sens aux allusions
obscures du Coran ou de la poésie préislamique ont abouti à une solution proche
du sens ancien.
18. Ch. J. Robin, « “La caravane yéménite et syrienne” dans une inscription de l’Arabie
méridionale antique », dans B. Halff, F. Sanagustin, M. Sironval et J. Sublet, sous
la responsabilité de F. Sanagustin, L’Orient au cœur, en l’honneur d’André Miquel,
coll. Orient-Méditerranée, Paris, Maisonneuve et Larose (2001), p. 206-217.
l’arabie à la veille de l’islam 305
Les cartes
Si les deux cartes sur la distribution des religions préislamiques représentent
un bel effort de traduction visuelle des données textuelles, cette traduction ne
hiérarchise pas suffisamment les données.
Pour le cœur du royaume de Ḥimyar, qui est juif de 380 à 530 puis chrétien
de 530 à 570, l’auteur signale :
– une population juive à Ṣanʿāʾ et Ẓafār (étoile de David)
– une population chrétienne à Ṣanʿāʾ et Najrān (croix)
306 c.j. robin
– une église à Ṣanʿāʾ et une autre à Ẓafār (dessin d’une église), avec le
symbole entre parenthèses pour signifier apparemment que l’existence de ces
églises est douteuse ou de courte durée
– un temple polythéiste (dessin d’un temple) ;
– enfin onze idoles mentionnées par les traditionnistes (triangle surmonté
d’un cercle).
L’impression d’ensemble est évidemment que le polythéisme est dominant
en Arabie du Sud, sauf dans trois villes qui comptent des juifs et des chrétiens.
Cela reflète bien mal les données disponibles.
– Églises : trois églises sont construites vers 340 par le roi de Ḥimyar, à
Ẓafār, à ʿAdan et dans une ville non nommée (peut-être Qanīʾ) 19 ; le roi Yūsuf
incendie une église à Ẓafār et une autre à Mukhawān en 522-523 20 ; le roi Abraha
consacre une église à Marib en 547 21, puis édifie à Ṣanʿāʾ, en 559-560, une vaste
église qui est alors le plus monument le plus important de l’Arabie (ses vestiges
sont remployés dans la grande mosquée de Ṣanʿāʾ) 22.
– Synagogues : les inscriptions qui les appellent mikrāb en mentionnent une
dizaine, dans le triangle Ẓafār-Khaywān-Marib 23.
– Temples polythéistes. On ne possède aucune trace de fréquentation d’un
temple polythéiste pour les ve et vie s. ; la dernière offrande précisément datée
remonte à 379-380. Le temple qui est mentionné sur la carte, Riʾām, est donc
un fantôme pour la période concernée, qui plus est avec un nom anachronique.
Il s’agit du temple qui, dans l’Antiquité, s’appelait Turʿat comme la montagne
sur laquelle il était édifié ; ce temple était consacré au dieu Taʾlab Riyāmum. Les
dernières inscriptions polythéistes retrouvées dans ce temple datent du iiie s.
(époque où Almaqah, le grand dieu de Sabaʾ, remplace les grands dieux propres
aux entités tribales intégrées dans Sabaʾ). Pourtant le souvenir du dieu vénéré à
Turʿat ne s’est pas perdu. Le nom épithète du dieu Taʾlab Riyāmum est devenu celui
d’une idole (Riʾām) qui elle-même a fini par désigner le temple et la montagne
(appelés aujourd’hui Riyām). La tradition savante musulmane mentionne donc un
temple ou une idole appelés Riʾām dans la région de Ṣanʿāʾ ; au xe s., le Yéménite
19. Philostorge, Histoire de l’Église, éd. Bidez, III.4 ; trad. Amidon, p. 41.
20. Ry 508 / 3-4. Pour les inscriptions sans référence bibliographique, se reporter au site
sur la Toile http://dasi.humnet.unipi.it/
22. Ch. J. Robin, « La Grande Église d’Abraha à Ṣanʿāʾ. Quelques remarques sur son
emplacement, ses dimensions et sa date », dans V. Christides (éd.), Interrelations
between the Peoples of the Near East and Byzantium in Pre-Islamic Times, Semitica
Antiqva 3, Córdoba, Oriens Academic (2015), p. 105-129.
23. Ch. J. Robin, « Quel judaïsme en Arabie ? », dans Ch. J. Robin (éd.), Le judaïsme de
l’Arabie antique, Actes du colloque de Jérusalem (février 2006), Judaïsme ancien et
origines du christianisme 3, Turnhout, Brepols (2015), p. 122-126.
l’arabie à la veille de l’islam 307
24. Ch. J. Robin, « Sheba. II. Dans les inscriptions d’Arabie du Sud », dans Supplément
au Dictionnaire de la Bible, Fascicule 70, Sexualité – Sichem, Paris (Letouzey et
Ané) (1996), col. 1085-1087.
26. Ch. J. Robin, « Les anges (shams) et autres êtres surnaturels d’apparence humaine
dans l’Arabie antique », à paraître.
28. Ch. J. Robin, « ʿAmmīʾanas, dieu de Khawlān (Yémen) », dans M.-A. Amir-Moezzi,
J.-D. Dubois, Ch. Jullien et Fl. Jullien (dir.), Pensée grecque et sagesse d’Orient,
Hommage à Michel Tardieu, Histoire et prosopographie – Bibliothèque de l’École
des Hautes Études, Sciences religieuses 142, Turnhout, Brepols (2009), p. 537-560.
29. Al-Azraqī, Akhbār Makka, éd. Malḥas, p. 139 (éd. Wüstenfeld, p. 90).
31. J.M.
Fiey, « Diocèses syriens orientaux du Golfe Persique », dans Mémorial Mgr
Gabriel Khoury-Sarkis, Louvain (1969), p. 177-219 ; reprise dans J.M. Fiey,
Communautés syriaques en Iran et en Irak des origines à 1552, Londres (Variorum
Reprints) (1979), II ; Y. Calvet, « Monuments chrétiens dans la région du Golfe »,
L’Arabie chrétienne, Dossiers Archéologie et sciences des origines 309 (décembre
2005-janvier 2006), p. 36-41.
l’arabie à la veille de l’islam 309
dans les petites bourgades de Makka et d’al-Ṭāʾif. Toutes les autres mentions de
temples ou de divinités se rapportent à des zones écartées du désert et de la steppe,
ou à la sphère privée. Le polythéisme n’avait évidemment pas disparu, mais il était
presque partout marginalisé.
L’auteur qui détaille l’image que les traditionnistes se faisaient des « idoles »
(p. 212-223) se pose naturellement la question de la place de l’iconisme en Arabie.
Mais son traitement de l’archéologie, qui apporte des éléments de réponse, est
déficient.
Dans le passé, nombre de savants qui accordaient un grand crédit à la tradition
savante de l’Islam ont supposé (sans la moindre preuve) que toute représentation
humaine ou animale découverte en Arabie était une idole. On a interprété comme
des images de divinités les stèles funéraires anthropomorphes de l’âge du bronze,
les stèles « à la déesse » de Qatabān, les grandes statues de bronze de Sabaʾ ou
encore des statues de pierre de Dédān ; dans la plupart des cas, il est désormais
assuré ou très probable que ces images représentent des êtres humains, souverains,
membres du clergé, dédicants ou défunts. En Arabie, la tendance à interpréter les
images comme des idoles est encore plus forte qu’en Europe. Les chercheurs
saʿūdiens qui ont travaillé à Qaryat, notamment l’auteure de la thèse citée par Aziz
al-Azmeh, en offrent une bonne illustration.
Mais, si on inverse le propos, en se demandant quelles sont les images
humaines ou animales explicitement identifiées avec une divinité, il apparaît qu’il
n’y en a guère et qu’elles présentent un caractère marginal 32. Ce sont tout d’abord
les personnages assis sur des trônes dans une série de vignettes qui s’inspirent des
images funéraires de la Syrie du nord, avec des noms qui les identifient comme
les Grands Dieux du Jawf. Mais ces vignettes, qui sont gravées sur deux piliers
à l’entrée d’un temple édifié vers 700 avant l’ère chrétienne, aux origines de la
civilisation sudarabique, sont une innovation qui n’a pas eu de suite.
Un deuxième exemple de divinités représentées sous forme humaine ou
animale est l’ensemble des messagers (entre les mondes supérieur et inférieur),
des intercesseurs et des protecteurs des individus et des biens. Dans cet
ensemble, on possède des images des « Filles de Īl » et des shams, représentés
sous l’apparence de jeunes filles (avec des ailes pour les shams, à la manière des
Nikès méditerranéennes) ; quant aux protecteurs, ils prennent la forme d’animaux
fantastiques 33. Dans ce cas, les divinités représentées occupent une position
inférieure dans les hiérarchies divines.
32. Ch. J. Robin, « Matériaux pour une typologie des divinités arabiques et de leurs
représentations », dans I. Sachet avec la collaboration de Ch. J. Robin (éds), Dieux
et déesses d’Arabie, images et représentations, Actes de la table ronde tenue au
Collège de France (Paris) les 1er et 2 octobre 2007, Orient et Méditerranée 7, Paris,
De Boccard (2012), p. 7-118.
Dans la fouille des temples, aucun fragment de statue cultuelle n’a été
retrouvé et aucun emplacement ayant reçu assurément une statue cultuelle n’a
été reconnu. Pour autant qu’on puisse en juger aujourd’hui, les divinités vénérées
n’étaient pas représentées ou l’étaient peut-être par un trône vide.
Avec les noms donnés à Dieu dans le Coran, on arrive au cœur de la thèse.
Aziz al-Azmeh en fait une excellente présentation (notamment p. 306-315). Mais
son propos n’est pas parfaitement clair sur l’origine (et donc la signification)
des deux principales, Allāh et al-Raḥmān. Il y a enfin une donnée nouvelle,
déjà suspectée depuis longtemps, mais confirmée désormais par une série de
documents : pour les chrétiens de langue arabe, le nom de Dieu n’était ni Allāh ni
al-Raḥmān, mais al-Ilāh.
35. Il est préférable de ne pas renvoyer aux éditions de ces textes qui sont très datées.
36. L’affirmation de l’auteur selon laquelle « Allāt, or rather ʾlt … is a name not
epigraphically attested in this form » (p. 297) n’est plus exacte.
312 c.j. robin
sud de Qaryat al-Faʾw) vers 400-500 de l’ère chrétienne (date très approximative
d’après la graphie). Il semblerait qu’il ait aussi existé un dieu homonyme dans
le nord du Ḥijāz et le sud du Levant si l’on se fonde sur l’onomastique des
inscriptions nabaṭéennes, nabaṭéo-arabes et thamūdéennes ḥismāʾites. Enfin,
dans les inscriptions ṣafāʾitiques de Syrie et de Jordanie, de très nombreux textes
invoquent un dieu Lāh (Lh) et une déesse Lāt (Lt), apparemment sans l’article
défini, qu’il est possible d’identifier avec al-Lāh et al-Lāt.
La paire al-Lāh et al-Lāt (ou Lāh et Lāt) n’est pas aussi étrange qu’on
pourrait le penser : chez de nombreux peuples, on a divisé en deux un être divin
pour donner naissance à une divinité masculine et à une divinité féminine 37.
Une dernière donnée récemment mise en lumière est que les chrétiens de
langue arabe, avant l’Islam, appelaient Dieu « al-Ilāh ». On le suspectait depuis
longtemps grâce à l’inscription chrétienne de Zabad et à celle du monastère de
Hind bint al-Ḥārith à al-Ḥīra 38. On en a maintenant trois nouvelles attestations
en contexte chrétien, puisqu’il s’agit de textes flanqués par une croix. Ce sont
notamment, à Ḥimà, près de Najrān, un chrétien qui s’appelle Marthad al-Ilāh,
parfaite transposition en arabe du sabaʾique ḥimyarite Marthadʾīlān 39 ; à Dūma,
la formule dhikr al-Ilāh dans une inscription datée de 443 (ère d’Arabie), soit
548-549 de l’ère chrétienne 40 ; et à Qaṣr Burquʿ, en Jordanie, à nouveau la même
formule dhikr al-Ilāh 41. On peut encore ajouter deux attestations en contexte
incertain (les anthroponymes Brʾlʾlh à Dumat al-Jandal et ʿbdʾlʾlh à Umm al-Jimāl,
37. H. Petersmann, « Le culte du Soleil chez les Arabes selon les témoignages gréco-
romains », dans T. Fahd (éd.), L’Arabie préislamique et son environnement historique
et culturel, Leyde, E.J. Brill (1989), p. 406.
38. Ch. J. Robin, « La réforme de l’écriture arabe à l’époque du califat médinois », MUSJ
59 (2006), p. 336-338 et Ill. 4, p. 357 ; « Les Arabes des “Romains”, des Perses et de
Ḥimyar (iiie-vie s. è. chr.) », Semitica et Classica 1 (2008), p. 185-186.
40. L.
Nehmé, « A “Transitional” Inscription from Dûmat al-Jandal », dans G. Charloux
& R. Loreto (éds), Dûma 2. The 2011 Report of the Saudi-Italian-French
Archaeological Project at Dûmat al-Jandal, Saudi Arabia (Series of Archaeological
Refereed studies No. 41), Riyadh, Saudi Commission for Tourism and National
Heritage, (2016 [1437 h.]), p. 231-233, pour la publication princeps ; L. Nehmé,
« New dated inscriptions (Nabataean and pre-Islamic Arabic) from a site near al-
Jawf, ancient Dūmah, Saudi Arabia », Arabian Epigraphic Notes 3 (2017), p. 121-
164, p. 130-131, pour la lecture [ḏ]kr.
41. Y.
al-Shdaifat, A. Al-Jallad, Z. al-Salameen & R. Harahsheh, « An early Christian
Arabic graffito mentioning ‘Yazid the king’ », Arabian Archaeology and Epigraphy
28 (2017), p. 315-324.
l’arabie à la veille de l’islam 313
Une troisième faiblesse de l’ouvrage résulte du fait que son auteur ne prend
pas en compte le progrès des études. Il se réfère indifféremment à des thèses
anciennes et aux conclusions les plus récentes, sans percevoir que ces dernières
annulent et remplacent les précédentes, du fait des révisions radicales de la
chronologie et de l’histoire politique, intervenues durant les dernières décennies,
à la suite de l’augmentation énorme de la base documentaire et de l’amélioration
des connaissances géographiques. Sauf exception, les publications antérieures aux
années 1980 sont dépassées et ne peuvent être utilisées qu’avec prudence.
Par exemple, les références multiples d’Aziz al-Azmeh à la contribution
importante que Sydney Smith avait consacrée à la chronologie en 1954 42 sont
source de confusion puisque les découvertes épigraphiques ont non seulement
radicalement modifié ce qu’on savait de Ḥimyar, mais encore induit de nombreuses
réinterprétations des sources manuscrites, tout particulièrement celles relatives au
massacre de Najrān, qui, par ailleurs, ont souvent fait l’objet d’une réévaluation
systématique 43. Même l’ouvrage qu’Iwona Gajda a consacré à Ḥimyar en 2009 44
doit déjà être révisé et complété sur de nombreux points puisqu’il est antérieur à
la publication de toute une série de découvertes importantes comme les nouvelles
inscriptions de Murayghān 45, de Maʾsal 46 ou de Najrān 47.
Plusieurs des importantes révisions de l’histoire préislamique récemment
proposées ont ainsi échappé à Aziz al-Azmeh. Il s’agit tout d’abord de l’extension
du royaume de Ḥimyar qui n’est pas confiné au Yémen comme il le croit, mais
englobe alors la plus grande partie de l’Arabie déserte. Au moment de sa plus
grande extension, entre 552 et 565, il incluait Hagar (auj. al-Hufūf), Khaṭṭ (al-
42. S. Smith, « Events in Arabia in the 6th century A.D. », BSOAS 16 (1954), p. 425-468.
43. Voir en dernier lieu J. Beaucamp, Fr. Briquel-Chatonnet et Ch. J. Robin (éds), Juifs
et chrétiens en Arabie aux ve et vie siècles : regards croisés sur les sources, Collège
de France – CNRS, Centre de recherche d’histoire et civilisation de Byzance,
Monographies 32, Paris, Association des amis du Centre d’histoire et civilisation de
Byzance (2010).
45. Ch. J. Robin et S. Ṭayrān, « Soixante-dix ans avant l’Islam, l’Arabie toute entière
dominée par un roi chrétien », CRAI (2012), p. 525-553.
47. Robin et alii, « Inscriptions antiques récemment découvertes à Najrān », op. cit., n. 2.
l’arabie à la veille de l’islam 315
ʿUqayr sur la côte de Golfe), Ṭayy, Yathrib et Juzām (arabe Judhām), dont une
inscription d’Abraha mentionne explicitement l’allégeance 48.
Concernant le judaïsme de Ḥimyar, après la découverte et la première analyse
d’une série d’inscriptions ḥimyarites, qu’Aziz al-Azmeh connaît et mentionne, la
conviction s’est progressivement imposée que le royaume a été officiellement juif
pendant près de 150 ans 49.
Prétendre qu’« au Yémen, il se confirme que le judaïsme tout comme le
christianisme ont été relativement éphémères (shortlived) » (p. 265) ne s’accorde
pas avec les sources puisque le judaïsme est encore la religion d’une grande partie
de la population au xiie s.
Il faut ajouter enfin deux découvertes récentes déjà évoquées ci-dessus.
L’usage de l’écriture arabe est attesté bien plus tôt qu’on ne le pensait, puisqu’une
inscription de la région de Najrān est datée de 470. Par ailleurs, deux inscriptions
(celle datée de 470 et une autre datée de 513) révèlent que le calendrier de l’Arabie
déserte n’était pas celui de Makka, mais celui commençant par le mois d’al-
muʾtamir, que les traditionnistes attribuent aux Arabes des temps très anciens.
Le postulat de la centralité de Makka et de son temple avant l’Islam, qui est
naturellement celui de l’auteur, comme de tous ses devanciers, paraît infondé tout
au moins jusqu’à la fin du règne d’Abraha (vers 565). Mais il s’agit de découvertes
remontant à 2014 que l’auteur ne pouvait pas prendre en compte.
De manière plus générale, il faut garder à l’esprit que les sources
épigraphiques et les traditions sont radicalement hétérogènes parce qu’elles n’ont
pas le même point de vue : les inscriptions reflètent une version officielle édictée
par les autorités, alors que les traditions rapportent des situations et des évènements
souvent mineurs relatés par des particuliers et conservés dans la mémoire familiale
pendant des générations.
L’auteur ne se résout pas à hiérarchiser ses sources. Quand les données tirées
des textes épigraphiques contredisent celles de la tradition savante musulmane,
il conclut que l’on a deux versions différentes entre lesquelles on ne saurait
choisir (voir par exemple p. 113, à propos de la « migration » de Kinda ; voir aussi
p. 151, où cette « migration » devient une certitude). Or ces données n’ont pas le
même poids. L’auteur d’une inscription qui mentionne, par exemple, la présence
d’une tribu en un lieu donné à une certaine date enregistre un fait dont la valeur
historique est élevée, parce que ce genre d’information n’est guère affecté par le
caractère propagandiste des textes épigraphiques ; par ailleurs, les inscriptions, qui
peuvent passer sous silence des informations gênantes, ne contiennent jamais de
contrevérités qui ruineraient la crédibilité de leur auteur.
48. Ch. J. Robin et S. Ṭayrān, « Soixante-dix ans avant l’Islam, l’Arabie toute entière
dominée par un roi chrétien », CRAI (2012), p. 525-553.
49. Voir G.W. Bowersock, The Throne of Adulis. Red Sea Wars on the Eve of Islam,
Emblems of Antiquity, Oxford, Oxford University Press (2013).
316 c.j. robin
Remarques diverses
– Les dates de la période préislamique
Aziz al-Azmeh, en bon pédagogue, donne de nombreuses dates qui aident à
organiser les événements dans le temps. On ne peut que l’approuver. Il aurait été
judicieux, cependant, de mieux distinguer les dates solidement fondées (avec une
petite incertitude éventuellement) de celles qui sont hypothétiques 50 et enfin de
celles qui sont fantaisistes, résultant de reconstructions extrêmement fragiles ou
d’hypothèses infondées 51.
Pour l’ère ḥimyarite, il se réfère soit à la vieille thèse qui situe son début
en 115 52, soit à la nouvelle qui propose 110 53. Quant au calendrier ḥimyarite, il
renvoie à Jawād ʿAlī qui se fonde sur les données disponibles de l’entre-deux
guerres, ce qui manque de sérieux (p. 139, n. 245).
Concernant la date de l’inscription arabe du jabal Usays, une faute de frappe
a transformé 528-529 de l’ère chrétienne en 523-529 (p. 121). La lecture de
l’année mentionnée par le texte, 423 de l’ère de la province d’Arabie, soit 528-529
50. Voir par exemple 599 pour l’établissement du gouvernement direct des Perses sur
le Yémen, alors que cet événement n’est connu que par des traditions fort confuses
(p. 120).
51. Voir la date de 6-9 de l’ère chrétienne pour l’inscription de ʿĒn ʿAvdat, proposée par
Bellamy, alors que ce texte est probablement beaucoup plus tardif (p. 149).
52. Voir la date de la deuxième lettre attribuée à Siméon de Beth Arsham : juillet 519
(p. 139, n. 244).
de l’ère chrétienne, doit être désormais corrigée en 427, soit 532-533. De même
faut-il sans doute corriger la date de l’inscription d’al-Namāra de 223 de l’ère de
la province d’Arabie en 227 (ce qui donne 332 de l’ère chrétienne à la place de
328) 54.
– p. 120-121, Abraha : Aziz al-Azmeh réduit le traitement du règne d’Abraha
à quelques considérations générales (voir aussi p. 156 et 160). Le propos est
tellement allusif qu’il mentionne dans une même phrase qu’« une expédition fut
envoyée en Arabie centrale et occidentale (probablement au nord-ouest) et qu’une
révolte de Kinda au Ḥaḍramawt fut réduite ». C’est à la fois exact et trompeur. Un
texte daté de 548 (CIH 541) rapporte en détail la réduction d’une révolte de Kinda
au Ḥaḍramawt, puis la réfection de la Digue de Marib, la consécration d’une église
à Marib et la tenue d’une conférence diplomatique à laquelle ont participé des
délégués de Rome, de la Perse, d’al-Mundhir (d’al-Ḥīra) et des frères al-Ḥārith
et Abīkarib fils de Gabalat (de Syrie). Un second texte (Ry 506 = Murayghān 1)
rapporte une expédition contre Maʿadd et leurs princes les banū ʿAmr (à savoir les
princes kindites qui descendent d’al-Ḥārith le Roi b. ʿAmr le Diminué b. Ḥujr le
Mangeur d’herbes amères b. ʿAmr) en 552 qui se termine par un succès ; à la suite
de cette expédition, ʿAmr fils d’al-Mundhir est chassé d’Arabie et cinq nouvelles
régions font allégeance à Abraha (Murayghān 3). L’omission de ces événements
considérables ruine évidemment la crédibilité de la reconstruction de l’auteur.
Il est tout aussi étonnant qu’Aziz al-Azmeh évite de faire la moindre allusion à
l’expédition d’Abraha contre Makka à une date qui est appelée traditionnellement
« l’année de l’éléphant » et sert de pivot pour toutes les reconstructions
chronologiques des traditionnistes. La victoire remportée par les Mecquois
sur Abraha serait, selon les traditionnistes, le point de départ de la suprématie
mecquoise. Il est vrai que les historiens ont toujours nourri de sérieux doutes sur
la réalité historique de cette expédition qui serait une amplification de la sourate
105 intitulée « L’Éléphant » (al-Fīl). En passant sous silence cet épisode, Aziz al-
Azmeh veut sans doute montrer qu’il ne retient que les faits avérés et fait preuve
d’une grande exigence méthodologique. Pourtant, les mentions de l’éléphant et
d’Abū Yaksūm (surnom d’Abraha qui avait effectivement un fils nommé Aksūm,
comme en atteste l’inscription CIH 541) dans la poésie préislamique incitaient
déjà Uri Rubin à considérer que l’historicité de l’expédition était probable. La
découverte de dessins d’éléphants à 100 km au nord de Najrān (donc entre Najrān
et Makka) est un nouvel indice favorable à l’historicité 55.
– p. 130, ḥmt : contrairement à ce qui est affirmé, ce terme n’est pas le
correspondant sabaʾique de l’arabe ḥimà. Il se trouve dans deux inscriptions, dont
54. Robin, « Die Kalender der Araber vor dem Islam », op. cit., n. 7, p. 376-377 et 378.
55. Ch. J. Robin, « L’Arabie dans le Coran. Réexamen de quelques termes à la lumière
des inscriptions préislamiques », dans Fr. Déroche, Ch. J. Robin et M. Zinc (éds),
Les origines du Coran, le Coran des origines, Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres, Actes de colloque, Paris, Diffusion De Boccard (2015), p. 36-48.
318 c.j. robin
les auteurs sont des gens originaires du golfe Arabo-persique, qui offrent au dieu
Shams une ḥmt de pierre :
Ry 547 / 11, …]hqnyw S²ms¹ ḥmt blqʾ ḏʾt (w)-ms¹n[dn…,
RES 4763 / 13, … hqnyw S²ms¹ [ḥ](mt)[blqʾ]ḏʾt w-ms¹nd[n…,
« …]ont offert à Shams cette ḥmt de pierre et cette inscrip[tion …] » 56
Le sens de ḥmt, qui est inconnu, n’a rien à voir avec la zone protégée de
l’Arabie déserte. En revanche, le toponyme Ḥimà (qui dérive peut-être de ḥimà)
dans la région de Nagrān est attesté dans les inscriptions sous la forme Ḥm Ngrn,
« Ḥimà de Nagrān » 57.
– p. 140, n. 249, ʿAmr b. Hind : ce souverain succède effectivement à son
père al-Mundhir sur le trône d’al-Ḥīra en 554. Les inscriptions de Murayghān
mentionnent que, chargé du gouvernement de Maʿadd, il a été chassé d’Arabie par
Abraha en 552. C’est donc avant cette date qu’il arbitre la querelle entre Bakr et
Taghlib au marché de dhū ʾl-Majāz.
– p. 156, Macoraba mentionné par Pline : lire Ptolémée VI, 7, 42.
– p. 171, « Zeus Safathenos [lire Saphathenos] at Buṣra, … a syncretised
version of Baalshamīn, worshipped by Safaitic residents of and visitors to the
city ». Saphathenos ne peut pas avoir le moindre rapport avec les « Safaitic
residents » puisque « Ṣafaitic » est une création du xixe s. Pour nommer l’écriture
des textes rupestres découverts dans la région du jabal Ṣafā, on s’est alors référé
à cette montagne du désert de Syrie. En fait, les textes ṣafāʾitiques se trouvent
en grande majorité dans des régions plus méridionales. Il s’agit donc d’une
appellation conventionnelle pour des textes écrits dans une certaine écriture. Il
n’est pas sûr que les gens du désert qui écrivaient en ṣafāʾitique aient appartenu à
un même ensemble tribal, ni qu’ils aient tous parlé exactement la même langue.
Il vaut mieux éviter d’employer le terme « Ṣafāʾitiques » pour désigner un groupe
humain 58. Quant à l’épithète de Zeus, il est possible qu’elle renvoie au jabal Ṣafā,
à supposer que cette montagne ait été appelée ainsi dans l’Antiquité.
– p. 171, Muʿāwiyat b. Kaʿb. « A similar situation arises in the evanescent
presence at Qaryat al-Fāw of Hellenistic, Egyptian and Mesopotamian divine
iconographies associated with Isis and with the local chieftain Muʿāwiyat b. Kaʿb
[avec renvoi en note à al-Ansary, Qaryat al-Faw, Riyadh, 1982, p. 23 et 85]. Here
there was clearly some importation of idols ». Le nom de Muʿāwiyat b. Kaʿb n’est
pas attesté à Qaryat, mais seulement celui de « Muʿāwiyat b. Rabīʿa, du lignage
56. Pour ces deux textes, se reporter à Ch. J. Robin et A. Prioletta, « Nouveaux
arguments en faveur d’une identification de la cité de Gerrha avec le royaume de
Hagar (Arabie orientale) », Semitica et Classica 6 (2013), p. 168-170.
57. Biʾr-Ḥimà Sab 1 / 3-4 (Robin et alii, « Inscriptions antiques récemment découvertes
à Najrān », op. cit., n. 2, p. 1078-1083 et fig. 22, 23 et 24).