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Sommaire
Introduction
1 - Les Blancs, captifs et esclaves
La guerre pourvoyeuse de captifs (VIIe-Xe siècles)
Conquêtes en Espagne et en Italie : les rafles
En Orient : captifs grecs et perses
Les premiers grands marchés d’esclaves (IXe-Xe
siècles)
Esclaves saxons, marchands juifs et chrétiens
Les Russes et les Bulgares de la Volga
La ruée des Ottomans (XIIe-XVIe siècles)
2 - La chasse à l’homme chez les Noirs
La guerre sainte en Afrique
Contre le royaume du prêtre Jean
Les sultanats islamiques en Ethiopie (XIIe-XVe
siècles)
L’iman Gran et les Turcs (1529-1570)
Contre Tombouctou (1050-1080 et 1590-1600)
Hérétiques et rebelles
L’islam en Afrique noire. La conversion
Les pays du Niger, Mali et Songhaï
Le lac Tchad, Kanem et Bornou
Quel islam ? Bons et mauvais croyants
Les vertus des néophytes
L’Afrique des sorciers
Prétextes et mauvaises raisons
La guerre sainte au pays des Zendjs
Les fous de Dieu, chasseurs et trafiquants
d’esclaves
Sonni Ali, le tyran sanguinaire ?
Convertir ou asservir
Les razzias
Pièges et brigandages
La grande chasse
Les raids des musulmans : l’Egypte, le Maghreb
et les oasis
Les rois noirs et leurs guerriers
3 - Aventures et trafics
La quête de l’or. Musulmans et chrétiens
L’or du Soudan
Le commerce muet
Les marchands d’esclaves
Arabes dans la mer Rouge
Aventuriers, fugitifs, hérétiques
L’Afrique orientale
Les cités du désert
Postes de traite et villes du Soudan
Conquérants et soumis
Comptoirs maritimes d’Orient : métissages et
servitudes
Les oasis
Villes doubles, villes fermées
Les affaires, le troc
Les citadelles religieuses de l’islam
Caravanes du désert
Les routes : pèlerins et marchands
L’Egypte et l’Arabie
Le Sahara
L’eau, les guides, les périls
La mer rouge et l’océan indien
Les boutres arabes
Du golfe d’Oman à l’Inde et à la Chine
4 - L’homme de couleur mal aimé. Le mépris
Hommes et femmes en vente
Marchés de brousse et foires
Caravansérails, ruelles obscures, pavillons de thé
Guides, experts et maquignons
L’image du Noir
Noirs et métis, compagnons du prophète
Méprisés, humiliés
Les géographes et les climats
Fables et légendes
Racisme et ségrégation
Les voyageurs
Ce qu’ils ne veulent pas voir
L’Afrique noire, pays de l’autre
5 - Les Noirs, heureux de leur sort ?
La cour, le harem
Le luxe, l’apparat
Servantes et concubines
La femme cloîtrée
Les eunuques
Les armées
Blancs ou Noirs
Orient et Egypte
Maroc
Les casernements, la ville compartimentée
Menaces, troubles et conflits
Les durs travaux, la géhenne
Les mines dans le désert
Grands domaines esclavagistes
La canne à sucre et l’esclavage
Les champs de mil du Songhaï
L’infamie, la honte
Conclusion
Après l’interdiction
Le dépeuplement de l’Afrique
Portugais, Américains et Juifs
Les Noirs, trafiquants d’esclaves
Notes
Les états et les dynasties
Bibliographie
Index
Cartes
collection tempus
Jacques HEERS
PERRIN
www.editions-perrin.fr
do mesmo autor
No seu bolso
EAN : 9782262065836
AVENTURES ET TRAFICS
L’OR DU SOUDAN
Nos livres d’histoire ne disent que quelques mots de la
traite des Noirs à travers le Sahara mais, en revanche,
parlent volontiers des caravanes qui menaient l’or des
« mines du Soudan », situées en fait dans les pays de la
haute vallée du Sénégal et de ses affluents128, vers les
ports du Maghreb où les chrétiens offraient en échange
toutes sortes de produits. Les deux traites, celle de l’or et
celle des hommes, furent toujours étroitement liées et il
serait évidemment impossible de dire laquelle a précédé
l’autre, a suscité les premières grandes entreprises,
conquêtes, chasses aux marchés, circuits et réseaux,
laquelle a provoqué le plus fort afflux de richesses.
Les produits échangés variaient ici et là, les réseaux
pouvaient ne pas toujours se recouper ou se confondre,
mais les marchés demeuraient tous aux mains des
mêmes peuples, dirigés par des hommes maîtres de
quelques oasis du désert et de quelques cités du Soudan,
carrefours des pistes caravanières qui devaient leur essor
et leur richesse à l’une ou l’autre traite, parfois aux deux.
Les musulmans, Berbères ou Arabo-Berbères associés
aux souverains des pays des Noirs, islamisés ou encore
infidèles, avaient très tôt mis la main sur le négoce de
l’or de ces mines d’Afrique, de très loin les plus riches de
toutes celles régulièrement exploitées, les seules
capables d’alimenter un important trafic dans tout
l’Ancien Monde ; ils demeurèrent, pendant des siècles,
les seuls grands pourvoyeurs d’or pour le monde
méditerranéen et, aussi, les plus actifs marchands
d’esclaves d’Afrique.
Cependant, ces intermédiaires, les nomades du désert
puis les marchands des villes, Berbères ou Maures puis
Turcs, se montraient très exigeants, et la recherche des
routes vers ces mines d’Afrique ou des marchés aux pays
des Noirs où négocier à de meilleurs prix fut, pour les
nations maritimes de la Méditerranée, les Italiens et les
Ibériques surtout, une véritable obsession. Les grands
négociants et les banquiers de Gênes, de Venise et de
Florence, de Barcelone et de Séville, ont souvent lancé
leurs associés ou leurs commis à la découverte des pistes
et des oasis du désert. Ils s’informaient auprès des
marchands dans les ports du Maghreb et pouvaient,
parfois, interroger les caravaniers. En 1452, un Génois
témoigna par-devant notaire qu’il avait rencontré à Oran
un épicier maure qui fréquentait souvent les cités et les
peuples des pays des Noirs. Mais nous n’avons aucun
récit, même à l’état d’une mince ébauche, de l’aventure
d’un homme parti à la découverte de l’Afrique d’au-delà
du désert. Ne nous reste qu’une seule lettre, seule pièce
à verser à ce dossier, vraiment très mince et, au total,
décevante. Antonio Malfante, commis puis associé des
Centurioni, grande compagnie marchande et bancaire de
Gênes, avait séjourné dans tous les ports où l’on parlait
des Africains et de l’or : à Majorque, à Malaga et à
Honein. De là, en 1447, il se lança vers le sud et, par un
hasard vraiment exceptionnel, une des lettres envoyées
à ses patrons – celle écrite des oasis du Touat – nous est
restée. Il y dit être mieux renseigné sur la route à suivre
et sur la distance ou le temps qui le séparent encore de
ces villes fabuleuses où l’on trouve de l’or sur les
marchés. Il affirme pouvoir aller plus loin. Mais ensuite,
nulle nouvelle. Au-delà du Touat, rien de lui, aucun signe,
du moins pour nous aujourd’hui. A-t-il échoué ? Tué en
route ou fait prisonnier par des brigands, par des
hommes appliqués à défendre le secret des mines et des
transactions ? Egaré, mort de soif ? D’autres lettres de sa
main, écrites plus tard, plus loin, se sont-elles perdues ?
Non archivées ou détruites au cours des temps ? Celle-ci,
rédigée en 1447, ne fut pas du tout conservée à dessein,
dans un dossier adéquat, et n’a été découverte, dans les
fonds de l’Archivio di Stato de Gênes, que par un heureux
coup du sort129. Tous ont échoué et il semble bien que les
princes, les édiles municipaux et les hommes d’affaires
aient perdu tout espoir d’atteindre directement ces
mines ou même les postes de traite très proches.
Les réseaux du commerce de l’or du Soudan furent
découverts par une autre approche, toute différente. Ce
sont les Portugais qui, allant de plus en plus loin vers le
sud le long des côtes atlantiques du Maroc, de la
Mauritanie puis de l’Afrique noire, se sont trouvés au
contact des Berbères du Sahara et, dans un second
temps, des Noirs de la brousse, les uns et les autres
caravaniers bien au fait de ces trafics.
Les toutes premières expéditions le long des côtes de
l’Afrique occidentale, à l’initiative d’Henri le Navigateur,
ne cherchaient certainement ni à contourner le continent
africain par le sud ni à atteindre les Indes lointaines, mais
à reconnaître des ports ou des marchés d’où elles
pourraient ramener de l’or. En tout cas, la capture ou
plutôt le détournement des circuits transsahariens, aux
mains des tribus nomades, s’est d’abord amorcé,
en 1461, par la construction d’un château royal à Arguin,
site découvert et reconnu dès 1444, où les navigateurs
trouvèrent une île où « en beaucoup d’endroits, de l’eau
douce naît dans le sable ». C’est alors que des trafiquants
caravaniers, que les Portugais qualifiaient communément
et globalement d’« Arabes », abandonnèrent à
Ouadane130 leur piste habituelle qui, des pays du Sénégal
ou du Niger, allaient plein nord vers le Maroc, pour
gagner vers l’ouest ce rivage quasi inconnu d’eux et y
apporter d’importants charge ments de poudre d’or
(tibar ou auri tiberi) ; ils recevaient en échange du blé,
des manteaux blancs et des burnous.
Les capitaines d’aventure de l’infant du Portugal
échouèrent dans leurs tentatives de remonter le fleuve
Sénégal mais, à une date qu’aucun texte ne permet de
préciser, avant 1450 toutefois, ils reconnurent
l’embouchure de la Gambie et se hasardèrent à en
explorer le cours sur leurs caravelles et sur des
embarcations encore plus légères. Ce qu’ils ont écrit
alors est perdu et le premier récit qui nous soit parvenu
est celui du Vénitien Cà da Mosto qui, quelques années
plus tard, en 1455 et 1456, fit en leur compagnie deux
voyages au long de la côte d’Afrique et explora le fleuve
Gambie jusqu’à un poste de traite improvisé : « Nous
sommes restés là pendant quinze jours et de très
nombreux Noirs, des deux rives de la rivière, sont venus
dans nos vaisseaux, les uns pour simplement nous
observer, les autres pour nous vendre quelques produits
ou des anneaux d’or et de l’ivoire. Ils apportaient des
étoffes de coton, des vêtements tissés à leur façon, les
uns blancs, les autres à raies blanches et bleues, ou
rouges, blanches et bleues, très bien faits. Ils nous
présentaient aussi des singes et des babouins, des grands
et des petits, qui sont très communs dans ces pays. Nous
échangions cela contre des objets de faible valeur. Ils
nous offraient du musc, pour presque rien… et des fruits
de toutes sortes dont des petites dattes sauvages, pas
très bonnes131. » Diego Gomes, agent du roi de Portugal
qui, lui aussi, explora par deux fois la Gambie (en 1456 et
en 1458), est remonté plus en amont et s’est trouvé en
contact avec des hommes, marchands ou officiers des
chefs de ce pays, qui lui cédèrent enfin de l’or en bonne
quantité : « Nous vîmes des hommes ; nous allâmes vers
eux et nous fîmes la paix avec ces gens dont le chef
s’appelait Farisungul, grand prince de ces Noirs. Et là, on
échangea le poids d’or contre nos marchandises, à savoir
des étoffes et des manilles [bracelets de cuivre]132. » Les
Portugais s’établirent à Cantor, grand port fluvial et
centre de foires, où les Mandingues du Bambouk leur
apportaient l’or des mines, au prix de voyages de cinq à
six mois, aller et retour, à travers le désert. « Ces
marchands sont experts en toutes choses. Les bras de
leurs balances, légères mais très précises, très belles à
voir, sont en argent et les cordes en soie tressée. Ils
portent aussi avec eux de petits écritoires en cuir non
poli et dans les tiroirs, ils ont les poids, en cuivre, en
forme de dés133. » Ils échangeaient leur poudre d’or
contre des objets en cuivre, des chaudrons, des manilles,
des bassins pour faire la barbe et de petites théières, des
cotonnades et des pièces de toile, des perles de verre et
de corail, des coquillages, des parasols.
En 1471, deux chevaliers, capitaines de caravelles
armées à Lisbonne, atteignaient, bien plus au sud, une
côte où les marchands apportaient l’or d’autres mines,
dispersées dans de vastes régions, certaines proches du
littoral, d’autres situées loin dans l’intérieur, jusque vers
la Haute-Volta. Après un premier échec dû aux
intempéries, aux attaques des pirates et, plus encore
peut-être, à celles suscitées par les trafiquants du pays
qui craignaient de voir leur monopole battu en brèche, le
roi de Portugal fit, en 1482, construire de toutes pièces
une énorme forteresse. Neuf gros navires, non des
galères d’exploration mais de lourdes nefs, amenèrent
d’Europe des gens d’armes, une compagnie de cent
maçons et charpentiers, des blocs de pierre taillés prêts
pour la pose et des tuiles déjà cuites. Sorti de terre en
quelques semaines, ce « château », baptisé Saõ Jorge de
la Mina, reçut le statut de cité, preuve d’un peuplement
déjà notable. Ce fut, jusqu’à la découverte des mines
d’Amérique, le principal centre d’approvisionnement des
Ibériques en métal précieux134.
SOFALA ET LE MONOMATAPA
Conquérants et soumis
Caravanes du désert
L’image du Noir
La cour, le harem
Les armées
BLANCS OU NOIRS
Orient et Egypte
Les premiers successeurs de Mahomet n’avaient pour
protéger leur camp ou leur palais et les suivre au combat
que des fidèles, hommes libres, cavaliers pour la plupart,
en forte majorité des Arabes. Le recrutement
d’étrangers, en particulier d’esclaves, ne devint vraiment
appréciable que dans les années 750, après la victoire
des Abbassides sur les Omeyyades et le transfert de la
capitale de Damas à Bagdad. Les nouveaux califes,
souvent menacés par des partis ou des clans adverses,
par des révoltes populaires suscitées par les coptes
chrétiens et par certains musulmans hérétiques, devaient
nécessairement s’entourer d’hommes qui n’auraient
aucun lien de sang et ne pourraient manifester aucune
sorte de solidarité avec les populations. Ces hommes qui,
en toutes occasions, resteraient soumis à leur maître,
insensibles aux sollicitations des mécontents et des
rebelles, ne pouvaient être que recrutés très loin des
pays conquis par les armées de l’Islam. Ce n’était certes
nulle nouveauté : les califes de Bagdad ne faisaient, en
cela comme en tant d’autres domaines, que suivre
l’exemple des empereurs et des rois de l’Antiquité, en
Orient et à Rome, et l’exemple aussi, bien plus proche,
des empereurs byzantins de Constantinople.
A Bagdad, la garde prétorienne d’abord puis les
troupes ordinaires de plus en plus importantes
comptèrent alors de forts contingents où les clients
naturels, parents, membres du clan du calife, et même,
d’une façon plus générale, les Arabes n’étaient pas les
plus nombreux. Dès 766, quelques années seulement
après l’installation des Abbassides, un prêtre chrétien de
Syrie, en voyage en Irak, se plaignait de trouver partout
sur son chemin, dans les rues de la ville, « des essaims de
grandes sauterelles » aux bizarres harnachements,
soldats et officiers de tous rangs, tous barbares et tous
esclaves, Khazars, Alains et Sikhs de l’Inde366. Par la suite,
tous les califes, tous les gouverneurs de l’Egypte et de
l’Ifriqiya firent recruter, pour leurs gardes et celles de
leurs palais, des Slaves et des Turcs. Al-Mu’tasim,
huitième calife abbasside (833-843), lui-même fils d’une
esclave turque, fit enrôler, dit-on, quelque soixante-dix
mille esclaves tous achetés en Asie centrale.
Ce n’était pas assez et pas vraiment satisfaisant. Ces
Turcs, excellents cavaliers, guerriers redoutables, ne
semblaient plus, au fil des temps, aussi fidèles
qu’autrefois, aussi soumis aux ordres. Très vite, le même
al-Mu’tasim prit ombrage de leur réputation, douta de
leur loyauté et finit par craindre que, seules forces
notables de l’armée, ils ne s’emparent du pouvoir ou,
pour le moins, manifestent des désirs d’indépendance de
façon insupportable. C’est alors que, le développement
de la traite négrière lui en donnant l’occasion sans trop
grever ses fonds de trésorerie, il fit rechercher, tout au
moins pour son infanterie, des esclaves noirs367.
Le recrutement de ces nouveaux guerriers, capturés en
Nubie, dans les pays de la haute vallée du Nil, devint de
plus en plus aisé et de moins en moins coûteux au fur et
à mesure que les réseaux de trafiquants se mirent en
place et que l’on aménagea plusieurs pistes caravanières
qui, pour les plus fréquentées, furent tout simplement
celles des pèlerinages vers La Mecque par Le Caire. Dans
tous les pays d’islam, d’Orient en Occident, on compta
ces soldats noirs, esclaves, par milliers368.
Ibn Tulum, gouverneur de l’Egypte qui se rendit
indépendant du calife de Bagdad et régna de 835 à 884,
avait, affirment les chroniqueurs contemporains, acheté,
pour sa garde personnelle, quarante mille « Soudanais »,
en fait des Nubiens. Ces hommes constituèrent le fer de
lance de son armée et demeurèrent son principal soutien
contre ses adversaires et ses ennemis de l’extérieur. Son
fils, Khumarawaih, n’osait paraître dans Le Caire que suivi
d’une garde d’un millier de soldats esclaves, tous
africains, portant manteaux et turbans noirs.
Lorsqu’en 905 Bagdad mit fin à cette dynastie des
Touloumides, le général, turc d’origine, envoyé par le
calife pour qu’il y rétablisse son autorité fit massacrer
cette garde prétorienne de Noirs. Cependant, dès 935, le
nouveau gouverneur, Mohamed ibn Toughdj, pourtant
turc lui aussi, contraint de faire face, à l’ouest, aux
attaques des Berbères et des Fatimides, musulmans
chiites maîtres de l’Ifriqiya, enrôla de nouveau un grand
nombre de Noirs. De même les Fatimides qui, victorieux
enfin en Egypte en l’an 968 après deux assauts
infructueux, renforcèrent leurs troupes jusqu’alors levées
dans les tribus berbères par d’importants contingents de
Noirs. Sous leur règne, ces esclaves soldats ne venaient
plus seulement de Nubie mais du Soudan central,
notamment des pays du lac Tchad, conduits sur les
marchés du Caire par des marchands caravaniers,
berbères presque tous, établis dans l’oasis de Zaouila.
Bien plus tard, à partir du XIIIe siècle, d’autres esclaves,
des Blancs ceux-ci, originaires de pays situés très loin
hors du monde musulman, se comptèrent aussi de plus
en plus nombreux et de plus en plus puissants, capables
de peser d’un grand poids sur les destins du pays. Ils
finirent par s’imposer en maîtres absolus en Egypte. Ce
furent d’abord les Turcs, alors païens, infidèles, capturés
lors de fortes expéditions armées dans les steppes de
l’Asie centrale, menés soit sur les marchés de Samarkand
et de Boukhara, soit sur ceux du Khorassan369 et ensuite
redistribués selon les besoins vers différents centres de
la Mésopotamie et de l’Egypte. Mais, quelque temps plus
tard, les Turcs convertis et devenus de bons musulmans,
la traite de ces esclaves guerriers, de ces esclaves blancs
que l’on appelait communément des mamelouks, prit
d’autres directions et dévasta d’autres régions, traite non
plus aux mains des Arabes et des Juifs mais des
marchands italiens établis dans leurs comptoirs d’Orient.
Sur les rives de la mer Noire, en Crimée ou à Caffa, et
dans le fond de la mer d’Azov, à La Tana, ou même à
Pera, faubourg de Constantinople de l’autre côté de la
Corne d’Or, Génois et Vénitiens achetaient les Tatares et
les Russes à des trafiquants qui se hasardaient loin à
l’intérieur des terres, ou directement aux familles et aux
tribus qui, pressées par la famine et la misère, se
séparaient ainsi de bouches à nourrir contre une petite
somme d’argent ou quelques vivres et des pièces de
tissus. Les femmes étaient menées, une par une ou par
petits groupes, jusqu’en Italie où elles servaient de
domestiques dans les villes. Les hommes, de jeunes
hommes surtout, embarqués sur des navires portant
chacun plus d’une trentaine de « têtes », étaient
débarqués en Egypte où on les entraînait au métier des
armes.
Cette traite maritime qui, dans le même trafic,
associait chrétiens et musulmans, sans nul doute très
active mais connue seulement de façon très
approximative par des documents épars –
reconnaissances de dettes, quittances et règlements de
comptes entre particuliers –, s’est maintenue pendant
plus de deux siècles. La prise de Constantinople par les
Ottomans en 1453 et celle de Caffa en 1475 y ont mis fin.
Les trafiquants ne trouvant plus à importer aussi
facilement ces mamelouks de la mer Noire qu’ils
nommaient les Kipcak370 allèrent alors prospecter eux-
mêmes les marchés du versant nord du Caucase et en
ramenèrent d’autres esclaves, jeunes gens et enfants,
Circassiens, Tcherkesses, Mingréliens, Abkhazes, eux
aussi futurs guerriers371.
Maroc
Très tôt, dès le temps de leurs premières expéditions
au-delà du Sahara, les Almoravides du Maroc prirent des
Noirs, razziés ou achetés, chez les « Soudans » de
l’Afrique de l’Ouest. Youssouf ben Tashfin en fit venir
jusqu’à deux mille pour sa garde à cheval. Après lui,
toutes les troupes marocaines sans exception ont, tout
au cours des temps, compté de considérables
contingents de soldats noirs. Très tard encore, Moulay
Ismaïl (1672-1727) mit sur pied une formidable armée de
métier formée exclusivement d’esclaves du Soudan. Les
premiers, achetés aux marchands caravaniers, furent, par
milliers déjà, installés sur de petites exploitations
agraires en compagnie de jeunes Noires, esclaves elles
aussi. Leurs enfants recevaient, à l’âge de dix ans et
pendant cinq années, un enseignement religieux et un
entraînement militaire de tous les instants ; soumis à une
sévère discipline, ils formèrent bientôt une armée de
fanatiques de cent ou cent cinquante mille hommes. Les
docteurs de l’islam, les ulémas, affirmaient que c’étaient
là pratiques contraires à la Loi. Ils disaient surtout que
ces guerriers, hommes de métier, qui n’avaient jamais
connu qu’un total isolement, étrangers à la société,
séparés du peuple par des fossés infranchissables,
provoquaient trop souvent, dans les villes du Maroc
même, de graves colères et rébellions.
LES CASERNEMENTS, LA VILLE COMPARTIMENTÉE
Les chefs musulmans, dès les tout premiers temps, dès
Médine, furent des conquérants, maîtres bientôt d’Etats
territoriaux considérables. Les califes, leurs généraux puis
leurs gouverneurs ont pendant longtemps gouverné des
pays soumis par la force et vécu, avec leurs conseillers et
avec leurs troupes, parmi des populations où, étrangers
plus ou moins bien acceptés, ils ne comptaient d’abord
qu’un petit nombre de partisans. Leur pouvoir ne pouvait
s’appuyer que sur leurs troupes. S’établir, insérer leurs
cours et leurs administrations dans les capitales des
anciens Etats, villes populeuses qui avaient connu
d’autres maîtres, une autre religion et d’autres façons de
vivre chez eux et en société, paraissait hasardeux. La cité
musulmane fut alors, par essence, cité nouvelle et
d’abord camp militaire.
Omar (634-644), premier des grands conquérants de
l’Islam, a, en seulement quelques années, fondé de
toutes pièces plusieurs amsâr, ébauches de villes de
garnison où vivaient ses guerriers arabes avec leurs
familles. Chacune n’était d’abord qu’un simple camp aux
maisons de pisé, camp fortifié naturellement : trois
d’entre elles portaient le nom de Fustat, mot qui vient du
grec phossatum (latin fossatum) et évoque effectivement
le fossé défensif qui entourait le périmètre habité. De ces
premières cités, certaines furent vite abandonnées, mais
Kufa sur la rive droite de l’Euphrate en Irak, Bassorah en
basse Mésopotamie près du golfe Persique et Fustat en
Egypte donnèrent vite naissance à de véritables villes.
Bagdad, fondée par al-Mansur en 762, ne fut, dans les
premiers temps, rien d’autre que la principale base de
l’armée impériale, forteresse à l’écart des anciennes
capitales de l’Irak. Il en fut de même, au cours des temps,
en Egypte et en Ifriqiya, où là aussi le vainqueur, au
lendemain de son triomphe contre un parti adverse,
s’employait à dresser une nouvelle capitale pour vivre
plus à l’écart et n’avoir rien à craindre des humeurs et
mouvements de rue de l’ancienne cité où les fidèles de
l’ennemi demeuraient nombreux. La règle fut, en Afrique
comme en Orient, que chaque nouveau maître, chaque
chef d’une nouvelle dynastie en tout cas, délaisse la
capitale des vaincus pour s’installer, lui et ses guerriers
esclaves, dans ce qui n’était d’abord qu’un camp
retranché. Kairouan, fondée en 670 par Ukba,
conquérant de l’Ifriqiya, fut abandonnée par les princes
aghlabides qui, de 800 à 903, allèrent habiter le plus clair
du temps dans le château fortifié de Kasr Kadim puis
dans une autre résidence royale, à Rakkada. Obaïd Allah,
Arabe qui se prétendait descendant du Prophète et se
proclama Mahdi, envoyé de Dieu en pays berbère, prit
Kairouan en 904, enrôla, pour renforcer ses troupes, un
grand nombre d’esclaves et fonda une nouvelle capitale,
Mahdia (« ville du Mahdi »), base maritime creusée sur
une étroite presqu’île de la côte tunisienne, bientôt
nœud de corsaires. En Egypte, les Fatimides, vainqueurs
des forces du calife, fondèrent, en 969, tout près de
l’ancienne Fustat, la ville du Caire, cité fortifiée comptant
deux grands palais gardés de hautes tours, protégés par
des quartiers où l’on avait établi des casernes pour les
soldats et leurs officiers. Une autre dynastie, celle des
Zirides, qui régna dans le Maghreb de 972 à 1152,
s’installa d’abord dans la ville puissamment fortifiée des
Beni Hamad, en pleine montagne, puis dans Bougie, port
de la Méditerranée.
Ces villes nouvelles, nées d’une considérable extension
des amsâr ou construites de toutes pièces, répondaient,
elles encore, à de fortes contraintes et exigences. Ce
n’étaient pas seulement œuvres de prestige, dictées par
le souci d’exalter la personne du calife ou du sultan (elles
ne portaient pas leur nom). Elles n’auraient pas eu de
raison d’être si celui-ci, chef de guerre, n’avait pas dû,
pour sa garde et ses armées, recruter de forts
contingents d’esclaves. En fait, ce n’étaient d’abord que
des cités refuges. C’était, fruit de la conquête brutale et
des nécessités d’occuper un pays rebelle ou suspect de
l’être, partout la règle. Al-Mansur ne s’est établi à
Bagdad qu’après avoir triomphé de trois rébellions
ourdies contre lui. Les travaux qui mobilisèrent des
milliers d’ouvriers (un chroniqueur dit tout bonnement
qu’ils étaient cent mille !) furent interrompus pendant un
an par la révolte des chiites à Bassorah et dans le Hedjaz.
Pour comble de précautions, il choisissait tous les
gouverneurs des provinces dans sa famille mais ne leur
accordait aucune concession dans Bagdad et leur
interdisait même de posséder un palais au cœur de la
cité.
Dès sa fondation, la nouvelle cité musulmane,
résidence du souverain ou du gouverneur, ne se
présentait, en aucun des aspects de la vie publique et de
la vie privée, comme le reflet d’une communauté unie
mais comme une juxtaposition de sociétés, de peuples
mêmes nettement différenciés qui n’auraient pu
accepter de vivre dans un voisinage trop étroit. « Bagdad
comporte dix-sept quartiers ; chaque quartier est une
ville isolée où se trouvent deux ou trois bains et dans huit
de ces quartiers se dressent des mosquées où est
célébrée la prière du vendredi372. »
Le recrutement de guerriers – non plus seulement
arabes comme au temps des premières conquêtes mais
venus de lointains pays, complètement étrangers aux
populations – ne fit que rendre ce paysage urbain encore
plus compartimenté. Les troupes ne furent nulle part
rassemblées en un seul bloc. Faire vivre côte à côte des
hommes d’armes qui ne parlaient pas la même langue,
ne pratiquaient sans doute pas leur religion de la même
façon et se trouvaient liés au maître par des liens de
nature différente, fut de plus en plus difficile.
Dès le temps des grands califes abbassides, la
nécessité de prévoir et réserver campements et
garnisons pour les armées a partout présidé à
l’élaboration des plans, à l’organisation du tissu urbain et
à la répartition des pôles de vie. Les urbanistes et les
architectes responsables furent parfois même contraints
de procéder à d’importants remaniements des premiers
plans qui ne tenaient pas assez compte des
antagonismes entre ces hommes venus d’horizons
tellement différents.
Camps militaires, ces villes de garnisons s’entouraient
de hautes et puissantes murailles, dominées, de plus, par
un imposant réduit qui isolait complètement le chef de
guerre du reste de la population. A Bagdad, ce premier
noyau, siège de tous les pouvoirs, que l’on appelait « la
ville ronde », en forme de cercle effectivement mais d’un
cercle grossier tout de même, d’un diamètre d’environ
six cents mètres, protégé par un réseau de canaux, par
un profond fossé et par un double mur, abritait la
résidence du calife, la grande mosquée et un certain
nombre de bureaux. Les guerriers distingués parmi les
plus fidèles, au nombre d’un millier à chacune des quatre
portes de cette enceinte centrale, étaient, au temps d’al-
Mansur, des Arabes et des Khorassiens qui avaient
brillamment combattu contre les Grecs puis contre les
Omeyyades. Ils ne se mêlaient déjà pas entre eux, les
hommes du Khorassan, épine dorsale de ces troupes, ne
parlant pas l’arabe mais seulement le persan. Seule cette
garde était cantonnée dans la « ville ronde » ; les autres
compagnons (sahâba) d’al-Mansur, pourtant eux aussi
élites de l’armée, se contentaient de casernes situées
près des palais des trois fils du calife, au sud de la ville et
au-delà du Tigre. D’autres guerriers arabes furent aussi,
dès le tout début, établis en plusieurs quartiers qui
portaient le nom de leur tribu ou de la cité où ils avaient
tenu garnison373.
Par la suite, lorsque ces califes firent recruter des
esclaves, blancs puis noirs, de plus en plus nombreux,
jusqu’à former le plus gros des troupes, les oppositions
devinrent naturellement plus violentes. On achetait ces
hommes par plusieurs dizaines ou centaines à la fois et
on les gardait dans le même cantonnement, pour les
convertir ensemble à l’islam et les initier au métier des
armes. Isolés dans une ville dont ils ignoraient tout et
qu’ils ne pouvaient tout de suite connaître, doués d’un
solide esprit de corps, ils ne cessaient, loin, très loin, de
leur pays natal, de revendiquer leurs particularismes et,
en toutes occasions, d’afficher leurs solidarités. Très vite,
certains clamaient ne vouloir obéir qu’à leurs chefs et
refusaient, jusqu’à se révolter, de répondre aux
commandements et aux ordres venus d’ailleurs.
A Bagdad, dans les années 800, le calife donna l’ordre
formel à chaque corps de troupes ethnique d’habiter un
quartier séparé374. A Fustat, dressée face à l’ancienne
Babylone d’Egypte, Ibn Tulum fit très tôt construire et
aménager un cantonnement particulier pour sa garde
noire. De même pour les Blancs, esclaves et guerriers : au
Caire, bien plus tard, les mamelouks se regroupèrent
tout naturellement en clans, à vrai dire en peuples
nettement distincts, à tel point que ni le sultan ni les
citadins ne les nommaient de la même façon. Les
mamelouks turcs occupaient l’île de Rawda, le long du
bras oriental du Nil ; on les appelait les bahrites
(« hommes du fleuve »). Les Tcherkesses, Circassiens,
s’établirent dans une tour de la citadelle ; c’étaient les
burdjites (« hommes du fort »). Ils ne cessaient de
conspirer et de s’affronter, suscitaient sans cesse de
sombres querelles, complots et attentats, révoltes et
révolutions de palais pour imposer leurs chefs. De telle
sorte que, lorsque ces mamelouks prirent le pouvoir, l’on
eut successivement une dynastie turque puis une autre,
tcherkesse.
MENACES, TROUBLES ET CONFLITS
Cas sans doute unique, très particulier en tout cas,
dans l’histoire de l’Ancien Monde, les guerriers de
l’Islam, esclaves blancs ou noirs, exécuteurs souvent de
vilaines besognes, ont souvent pesé très lourd sur le sort
des Etats. Les califes et les sultans, les gouverneurs et les
généraux, les responsables de la paix dans les villes,
avaient sous leur commandement des hommes
totalement allogènes, incorporés de force, n’ayant
d’autre raison de servir que leur survie et quelques
profits, sur le moment. Non des parents, membres de
tribus depuis longtemps alliées, unis par une fidélité
ancestrale. Non pas même de véritables mercenaires
tenus en main par l’attente de fortes soldes et
l’assurance, victoires et âge venant, de bons
établissements, terres à cultiver sans trop de mal et
petits offices dans l’administration. Mais bien des
esclaves, la plupart sans aucun espoir de sortir de leur
condition, sans liens charnels avec le pays, sans
descendance non plus.
De la vie des guerriers blancs peu nous est dit. Nourris
et logés, vêtus et armés sans nul doute. Mais des soldes,
rien ou presque rien ; aucune idée du montant exact si
tant est qu’elles aient été effectivement versées de
temps à autre. Ce que l’on sait des mamelouks, en
dehors de leurs querelles et de la façon dont ils
s’emparaient du pouvoir, est, en somme, fort peu de
chose. Plus tard, dans Alger, les janissaires, eux aussi
arrachés enfants dans les pays des Infidèles, corps d’élite
eux aussi, guerriers redoutés tant sur terre que sur les
galères de combat, vivaient surtout de leur part du butin,
de ce qu’ils pouvaient prélever de façon plus ou moins
modérée mais jamais discrète sur les Maures des tribus
de l’intérieur, et surtout – par-dessus tout – des
exactions commises à longueur de journée dans la ville.
Par les rues, les cuisiniers de leurs casernes brandissaient
une hachette en entrant dans les boutiques pour piller
pain, œufs et viandes, « sans qu’aucune considération
puisse les obliger à lâcher prise ou à payer le prix ».
Nombre d’entre eux exerçaient de petits métiers,
misérables même. Ils traînaient, piliers des cafés,
s’enivraient de vin, coupables d’abus et craints de
tous375.
Les Noirs n’étaient certainement pas mieux lotis, plus
mal considérés sans doute et redoutés. On sait plus
d’une saison où, mécontents – car les vivres avaient été
confisqués en chemin par quelque officier avide de
profit –, affamés, criant leur misère et leur haine, on les
vit courir les rues de la cité pour piller, tuer, au mieux
rançonner. Au Caire, dans l’hiver 1036-1037, lors de la
grande famine, les Noirs de la garde mirent à sac les
entrepôts de grains et les magasins, firent main basse sur
les maigres réserves des habitants. Deux auteurs au
moins, tous deux témoins d’horribles carnages, évoquent
de terribles atrocités : « Ils attrapèrent les femmes avec
des crochets, leur arrachèrent des lambeaux de chair
pour les manger, sur le coup376. »
Noirs et Blancs ne se supportaient pas. L’opposition
raciale fut sans doute la cause immédiate de révoltes et
de conflits tout aussi décisifs que la lutte pour
l’émancipation et le refus d’une vie misérable. En Egypte,
les Noirs, soldats et domestiques, n’ont cessé de se
dresser contre les guerriers turcs ou tcherkesses.
En 1260, les garçons d’écurie, nubiens et soudanais,
ameutèrent d’autres Noirs, esclaves et soldats ; ils se
proclamèrent fidèles aux sultans que les mamelouks
venaient de supplanter, s’emparèrent de chevaux et
d’armes et, en pleine nuit, menés par un chef religieux
qui leur promettait des terres, allèrent par les rues piller
les maisons et tuer ceux qui traversaient leur route. Les
troupes de mamelouks, blancs donc, les cernèrent sans
mal et les firent prisonniers. Au petit jour, ils furent tous
crucifiés à l’une des portes de la ville.
Blancs contre Noirs : ce fut pour les maîtres une façon
d’assurer leur pouvoir en jouant des uns contre les
autres. En Egypte toujours, mais deux siècles plus tard,
alors que les factions des mamelouks ne cessaient
d’intriguer les unes contre les autres pour prendre le
pouvoir et que les sultans ne pouvaient tenir en place
que quelques mois, l’un d’eux, en 1498, tenta de secouer
cette insupportable tutelle des guerriers blancs, ses
frères de race pourtant. Il leur infligea une dure
humiliation en comblant de faveurs au-delà du
raisonnable et du tolérable un esclave noir, Farajallah,
chef des arquebusiers de la citadelle. Il lui fit épouser une
esclave circassienne du palais et lui fit don d’une tunique
à manches courtes, toute semblable à celles que
portaient les guerriers mamelouks. Ceux-ci répondirent
aussitôt à l’insulte avec une rare violence ; ils se
lancèrent à l’attaque, eurent vite le dessus, tuant au
moins cinquante Noirs dont Farajallah lui-même, et
mirent les autres en fuite. Le sultan, dûment sermonné
par ses proches, les émirs et ses parents, se vit contraint
de faire amende honorable.
Ces guerriers noirs, esclaves pourtant, n’étaient nulle
part de simples auxiliaires, méprisés. Nulle part non plus
seulement des soldats de parade exhibés lors des fêtes et
des réjouissances publiques, à la suite du maître, pour
faire nombre et frapper d’émerveillement. Tout au
contraire : ils maintenaient l’ordre, réprimaient les
colères des foules bien mieux que ne l’auraient fait tous
soldats plus proches du commun des habitants. Arrachés
à leurs pays d’Afrique, ils vivaient loin du petit peuple
dont ils ne parlaient pas bien la langue. Ils ne
partageaient ni les souffrances ni les inquiétudes des
sombres années. Mal aimés, venus d’un autre monde et
d’un univers peuplés d’hommes dont tant d’écrits et de
discours disaient la mauvaise nature, on les disait cruels,
prêts à servir le calife ou le sultan en tous moments et à
noyer les rébellions dans le sang. Ce n’étaient pas vaines
frayeurs. Déjà, en l’an 749, le calife Yahia avait chargé
son frère Abu Abbas, fondateur l’année suivante de la
dynastie des Abbassides, de châtier les habitants de
Mossoul révoltés ; il rassembla trois ou quatre mille
Noirs, originaires de l’Afrique orientale, recrutés tout
récemment, à peine pris en main, et les lança à l’attaque
de la ville désarmée. Ils la mirent à feu et à sang,
massacrant femmes et enfants377. En Egypte, al-Hakim
fit, en 1021, donner ses troupes de Noirs contre le
peuple de Fustat : incendies, orgies, viols et massacres.
Ces esclaves soldats firent constamment peser de
graves menaces sur le pouvoir. En 836, de crainte des
révoltes populaires et d’une rébellion fomentée ou
soutenue par la milice formée de Turcs et d’Iraniens,
pourtant recrutée par lui depuis peu de temps, al-
Mu’tasim fit transférer son palais et son gouvernement
de Bagdad à Samarra, ville nouvelle construite en hâte, à
soixante milles plus au nord, à l’écart de toute mauvaise
surprise. Partout, dans tous les pays de l’Islam, les
hommes de troupe exigeaient de se faire entendre
jusqu’à devenir les seuls maîtres et fonder même, en
plusieurs pays et à différentes époques, des dynasties,
manifestement d’origine servile et étrangère, plus ou
moins stables. En Egypte, certains esclaves turcs, les
mamelouks, connurent très vite d’étonnants destins,
hommes de guerre et de pouvoir auréolés d’un grand
prestige, chargés de hautes responsabilités. Un des bons
historiens de ce temps, Abu-i-Mahasim Yusuf, fils lui-
même d’un émir turc, leur consacre près de trois mille
notices biographiques dans son Dictionnaire. En 1250, le
Turc Aibek, mamelouk, exerça d’abord la régence au nom
d’un jeune prince incapable de se faire entendre et fut
proclamé sultan le 12 novembre 1251, le premier d’une
dynastie qui ne fut détrônée qu’en 1382 par Barbouk,
chef d’une autre faction des mamelouks, celle des
Tcherkesses, eux aussi esclaves guerriers ou anciens
esclaves. Avec, il est vrai, des fortunes diverses, chacun
de leurs sultans ne restant jamais bien longtemps en
place, ces mamelouks tcherkesses régnèrent en Egypte
jusqu’à la conquête du pays par les Ottomans, en 1517.
Et ces Ottomans s’empressèrent de recruter, pour leurs
armées d’Egypte et faire opposition aux esclaves blancs,
un grand nombre de Noirs.
Ce « phénomène mamelouk378 », montée au pouvoir
d’une société de guerriers, esclaves recrutés en de
lointains pays, n’est pourtant pas unique. On sait que
d’autres mamelouks, esclaves blancs, régnèrent un
temps au Yémen. En Inde, Mohamet Gori, sultan turc de
Ghor et de Gahzni, avait conduit raids et pillages dans le
Pendjab et jusqu’au Gange ; l’un de ses esclaves turcs,
Qutb ud-Din Aïbak, s’était emparé de Delhi en 1192. A la
mort de Mohamet, en 1206, une « dynastie des
esclaves » s’est établie dans Delhi.
L’Histoire ne parle généralement que de ces
mamelouks, esclaves et mercenaires blancs, mais l’on
sait que des guerriers noirs réussirent, eux aussi, à
prendre la tête d’une cour et même d’un pays. En 946,
au Caire, à la mort du calife Mohamed ibn Toughdj, un
eunuque noir, nommé Musc-Camphre ou Abou el-Misk
Kafour (Kafour : « le Noir »), chef de l’armée, auréolé de
retentissantes victoires sur les Fatimides et sur les
Berbères, exerça la régence, en fait tout le pouvoir,
pendant une vingtaine d’années sans soulever
d’opposition. En 946, le calife abbasside de Bagdad le
reconnut comme maître de l’Egypte379.
Dans aucun royaume ou empire, en Orient ou en
Occident avant ou après l’Islam, la fortune des
souverains ne fut soumise au sort des batailles de rues
entre des troupes d’esclaves soldats, le plus souvent les
Noirs contre les Blancs, comme elle le fut dans l’Orient
musulman et, plus encore, en Egypte. A longueur de
règnes, les guerriers, complètement étrangers au pays,
amenés de fort loin et mal ou pas du tout insérés dans la
population, furent arbitres lors des conflits, des querelles
entre les chefs ou les dynasties, sollicités, prenant
forcément parti pour les uns ou pour les autres, capables
d’emporter la victoire. Au Caire, les Noirs formaient,
en 1169, la principale force armée du calife fatimide al-
Adid380. Saladin, général d’origine kurde, envoyé à la tête
de Turcs et de Kurdes pour reprendre le pays en main, fit
emprisonner le chef des eunuques noirs, l’accusa de
comploter avec les croisés francs et le fit décapiter ; il
exigea ensuite la démission de tous les eunuques
africains du palais. Les Noirs de la garde, furieux à
l’annonce de la mort d’un homme qu’ils savaient leur
protecteur et leur porte-parole, emportés, aux dires
mêmes des chroniqueurs musulmans du moment,
« d’une vive solidarité raciale », prirent aussitôt les
armes. Pendant deux jours du terrible été, au mois
d’août, quarante ou cinquante mille hommes se
lancèrent à l’assaut. En vain : le calife, terrorisé et
indécis, déjà prisonnier des hommes de Saladin, refusa
d’aider ceux qui l’avaient pourtant fidèlement servi et fit
crier, par l’un de ses officiers, que le temps était venu de
chasser du pays « ces chiens d’esclaves noirs ». Saladin
envoya un fort détachement de cavaliers dans leurs
quartiers avec ordre de « tout brûler, leurs maisons et
leurs enfants ». Quelques jours plus tard, les poètes à sa
solde chantèrent cette « bataille des Blancs, bataille des
Noirs » et la victoire des Blancs qu’ils affectaient de voir
aussi glorieuse que celles remportées par ce même
Saladin en Terre sainte contre les Francs. L’historien al-
Makrizi décrit certes l’horreur de ces combats de rues,
massacres et mises à sac, mais c’est sans vraiment
s’attendrir et encore moins pour s’en indigner ; c’est,
pour lui, une bonne occasion de dire tout le mal qu’il
pense des Noirs et de fustiger leur arrogance : « Lorsque
leurs outrages et leurs méfaits devinrent insupportables,
Dieu les réduit à néant, pour leurs péchés381. »
L’infamie, la honte
APRÈS L’INTERDICTION
LE DÉPEUPLEMENT DE L’AFRIQUE
Abréviations
INTRODUCTION
3. AVENTURES ET TRAFICS
128 Cf. carte no 2, p. 311.
129 CH. DE LA RONCIÈRE, Histoire de la découverte…
130 Oasis sur la route entre Zemmour et Aoudaghost
dans le territoire des Lamtuna.
131 CÀ DA MOSTO, cité par R. JOBSON, The Golden
Trade…, p. 252-253.
132 DIEGO GOMES, De la première découverte…, p. 34-
36.
133 ANDRES ALVARES DE ALMADA 1584, cité par R.
JOBSON, The Golden Trade…, p. 275-276.
134 A. W. LAURENCE, Trade Castles and Forts of West
Africa, Londres, 1963. J. CORDEIRO PEREIRA, Le Troc de
l’or à Mina pendant les règnes du roi Jean III et du roi
Sébastien, Paris, 1990.
135 M. LOMBARD, « L’or musulman, du VIIe au XIe
siècle », Annales, 1947, p. 143-170.
136 Près de l’actuelle Quelimane.
137 Navigazioni de THOME LOPES, et récit de
BALTHAZAR SPRENGER, au service d’Anton Welser
d’Augsbourg. Voyage de Francisco de Almeida en 1505.
138 Monomatapa (« seigneurs des mines »), empire
bantou formé au IXe siècle qui contrôlait les routes des
mines, loin à l’intérieur du continent. Les Portugais ont,
de Sofala, signé des accords avec leurs chefs, obtenant
ainsi des avantages commerciaux et des privilèges fiscaux
pour le trafic de l’or.
139 AL’UMARI, cité par J.-M. CUOQ, Islamisation…,
p. 4-5.
140 AL-BEKRI, Routier…, p. 73.
141 Cité par R. JOBSON, The Golden Trade…, p. 261.
142 AL-SHARISHI, 1223, cité par CUOQ, p. 188.
143 YAKUT, 1220, cité ibid., p. 183-184.
144 MAS’UDI, 956-957, historien et géographe. Auteur
des Prairies d’or et du Livre de l’Avertissement, cité par
CUOQ, p. 60-61.
145 YAKUT : YAQUOUT ABU ABDALLAH (1179-1229),
esclave grec affranchi, grand voyageur, auteur d’une
Encyclopédie géographique.
146 J.-M. CUOQ, Histoire de l’islamisation… C.
MEILLASSOUX, Anthropologie.
147 R. MAUNY, « Le Périple de la mer Erythrée »,
Journal de la Société des Africanistes, 1968.
148 Calife abbasside (685-705) qui assura la dynastie
et réprima les révoltes des Arabes d’Arabie et de l’Irak.
149 Au nord de l’île de Pate. Cf. carte no 3, p. 307.
150 E. CERULLI, Somalia… . A. NÈGRE, Mogadiscio…
151 Chronique de Pate, citée par GUILLAIN,
Documents, t. I., p. 280 et par CUOQ, p. 65.
152 Quarmates : fidèles de la branche ismaïlienne,
secte de chiisme extrémiste qui prêchait l’égalitarisme
social, qui s’étaient emparés de Bahrein. Sur tout cela, cf.
également : J.S. TRIMINGHAM, Islam in East Africa,
Oxford, 1959.
153 Changa (Shunga) : île près de Kilwa.
154 Chronique de Kilwa, citée par R. CORNEVIN,
Histoire de l’Afrique…, p. 230. Mithkâl : unité de poids
généralement réservée à l’or. Les premières pièces d’or,
frappées par le calife omeyyade Abd al-Malik, avaient le
même poids d’or que le besant byzantin : 4,25 gr.
L’habitude fut de considérer ce poids comme l’étalon
d’or du dinar, le mitkhâl. L’équivalence avec le dinar fut
longtemps respectée. Mais, en 775, le mitkhâl fut porté
à 4,72 gr.
155 N. CHITIK, Kilwa and… E.A. ALPERS, The East
African Slave Trade, Berkeley, 1967. GUILLAIN,
Documents…
156 IBN BATTUTA, p. 607.
157 G.S.P. FREEMAN-GRENVILLE, The East African…,
IV, p. 131.
158 JOAÕ DE CASTRO (1500-1548) fut gouverneur et
vice-roi des Indes pour le roi de Portugal. Il écrivit lors de
son premier voyage, en 1538, le premier de ses trois
célèbres Roteiros.
159 G.S.P. FREEMAN-GRENVILLE, The East African…,
IV, p. 67. L’auteur affirme que ces « peuples de la mer »
doivent être des Japonais.
160 IBN BATTUTA, note p. 1171.
161 BOUTILLIER, Les Captifs…
162 M. LOMBARD, L’Islam dans sa première
grandeur…, p. 213.
163 Cité par LEVTZION, p. 128.
164 AL-BEKRI, Routier…, p. 78.
165 IBN BATTUTA, p. 1027. Mitkhâl : cf. supra, note 27.
166 IBN BATTUTA, cité par R. MAUNY, Extraits…, p. 73.
167 M. GORDON, L’Esclavage…, p. 130.
168 J. ILIFFE, Les Africains. Histoire d’un continent,
Cambridge, 1995, p. 79.
169 AL-BEKRI, Routier…, p. 42 et V.M. GODINHO, O
Mediterraneo…, p. 79. J. M. LESSARD, « Sijilmassa, la ville
et ses relations commerciales au XIe siècle d’après al-
Bekri », Hesperis-Tamuda, X, 1969.
170 IBN BATTUTA, p. 1027.
171 AL-BEKRI, Routier…, p. 53.
172 LÉON L’AFRICAIN, cité par MEILLASSOUX,
Musulmans de l’Afrique de l’Ouest, p. 246.
173 Le Tarik es-Soudan, repris par l’ensemble des
africanistes, situe la fondation de Djenné au VIIIe siècle
de notre ère ; cependant les travaux récents et les
fouilles, entreprises entre 1977 et 1981, ont fait
apparaître que Djenné existait déjà au IIIe siècle avant J.-
C., vers 250 environ. Cf. Z. DRAMANI-ISSIFOU, Islam et
société…
174 EL-SADI, Tarikh es-Soudan, cité par MAUNY,
Tableau géographique…, p. 200. CH. MONTEIL, Une cité
soudanaise : Djenné, métropole du delta central du Niger,
Paris et Londres, 1971.
175 IBN BATTUTA, p. 596
176 Ibid., p. 602 et 596.
177 Ibid., 597.
178 A. NÈGRE, Mogadiscio…, p. 11.
179 IBN BATTUTA, p. 604.
180 G.S.P. FREEMAN-GRENVILLE, The East African…,
IV, p. 163.
181 A. NÈGRE, Mogadiscio…
182 Identification incertaine. Hypothèse souvent
retenue : ruines de Koumbi-Dâleh, au sud de la
Mauritanie. Cf.V. MONTEIL, notes à AL-BEKRI, Routier…,
p. 109.
183 AL-BEKRI, Routier…, p. 72.
184 Au sud-ouest de Marrakech, sur la route de
l’actuelle Ouarzazate.
185 AL-BEKRI, Routier…, p. 47.
186 CUOQ, p. 259.
187 Cf. en particulier : F. HÉRITIER, Des cauris et des
hommes : production d’esclaves et accumulation de
cauris chez les Samo (Haute-Volta), in C. MEILLASSOUX,
1975.
188 IBN BATTUTA, p. 925.
189 J. CORDEIRO PEREIRA, Le Troc de l’or à Mina
pendant les règnes du roi Jean III et du roi Sébastien,
Paris, 1990.
190 PIGAFRETTA, Relationes del Reame… E.
DARTEVELLE, Les « Nzimbi », monnaie du royaume du
Congo, Bruxelles, 1953.
191 IBN BATTUTA, p. 927.
192 Ibid., p. 1029.
193 V. M. GODINHO, O Mediterraneo…, p. 101 sq.
194 B. ROSENBERG, « Tamdult, cité minière et
caravanière pré-saharienne (IXe-XIVe siècles », Hesperis-
Tamuda, 1970, p. 103-140.
195 Ce pays et ce peuple ne semblent pas avoir été
exactement identifiés. Cf. V. MONTEIL, Routier de AL-
BEKRI, p. 67.
196 V. M. GODINHO, O Mediterraneo…, p. 131-132.
197 IBN BATTUTA, p. 912.
198 IBN HAWQAL (en 967 ou 977), cité par LEVTZION,
p. 43.
199 IDRISI, cité ibid., p. 128.
200 IBN HAWQAL, 967 ou 977, ibid, p. 43 sq.
201 TARIKH AL-FATTACH, 1964, p. 313. Cité par Z.
DRAMANI-ISSIFOU, Islam et Société…
202 Pour tout cela cf. ibid.
203 T.E.S. cité ibid.
204 Royaume fondé par des Peuls qui, du Nord,
fuyaient les attaques des Almoravides au XIe siècle ; situé
à l’ouest du cours supérieur du Niger ; ville principale :
Macina.
205 C. MEILLASSOUX, Anthropologie…, p. 253.
206 R. MAUNY, Routier…, p. 244.
207 CORNEVIN, Histoire de l’Afrique…, p. 405.
208 IBN JOBAYR, p. 230-231.
209 Seule exception : les Ibadites. Cf.T. LEWICKI, Traits
d’histoire du commerce saharien… et « Quelques extraits
inédits relatifs aux voyages des commerçants ibadites
nord-africains au pays du Soudan occidental et central au
Moyen Age », Folia Orientalis, II, 1960, mais ces lettres
sont d’un intérêt limité et donnent peu d’informations
sur les trafics et les parcours.
210 AL-BEKRI, cité par N. LEVTZION p. 67.
211 IBN JOBAYR, p. 233.
212 YAKUT (1220), cité par CUOQ, p. 183.
213 IBN BATTUTA, p. 1025, ces bœufs sauvages sont
des antilopes addax.
214 Cf. supra, note 89.
215 IBN BATTUTA, p. 1037
216 IBN BATTUTA, cité par R. MAUNY, Extraits…, p. 73.
217 Tribu berbère, Touaregs, dans le pays des
Haoussas, au nord du Mali actuel.
218 Sur tout cela : AL-BEKRI, Routier… et IBN BATTUTA,
p. 1024-1027.
219 Chaîne de montagnes reconnue et nommée par
les navigateurs portugais, qui, en Mauritanie, domine le
haut plateau de l’Adrar.
220 IBN BATTUTA dans R. MAUNY, Extraits…, p. 79.
221 ALMADA, cité par R. JOBSON, p. 278.
222 LÉON L’AFRICAIN, éd. 1956, p. 473-474, cité par J.-
M. CUOQ, Musulmans en Afrique…, p. 244.
223 AL-QASTALANI, cité par V.M. GODINHO, O
Mediterraneo…
224 P. CHARLES-DOMINIQUE, Voyageurs arabes,
p. 1286.
225 Turc, né en 1791, mort en 1859 en Cyrénaïque. A
vécu à Fez et en Tripolitaine, puis à La Mecque,
de 1830 à 1843. A fondé cet ordre de confraternité
militaire en 1837, le siège de l’ordre étant d’abord à
Temessa, puis à Djaghbub (de 1855 à 1895) où la zawiya
était surtout peuplée d’esclaves libérés, enfin transféré à
Kufra.
226 Zawiya : lieu de prières, sorte de monastère
fortifié comparable aux ribats, sortes d’ermitage aussi,
autour d’une humble mosquée.
227 Cité par CUOQ, p. 122.
228 M. GORDON, L’Esclavage dans le monde arabe…,
p. 153.
229 MERCADIER, 1971, cité par C. MEILLASSOUX,
Anthropologie de l’esclavage…, p. 69.
230 M. GORDON, L’Esclavage…, p. 161.
231 IBN JOBAYR, p. 104-105.
232 Cité par B. LUGAN, Vérités et légendes…, cf. supra,
note 64 chap. II.
233 G. R. TIBBETTS, Arab Navigation… J.T. REINAUD,
Relations des voyages faits par les Arabes et les Persans
dans l’Inde et la Chine, Paris, 1845.
234 J. POUJADE, La Route des Indes et ses navires,
Paris, 1946.
235 M. GORDON, L’Esclavage…, p. 127.
236 Le Hudud al’Alam, trad. MINORSKY, 1937, p. 164,
cité par J.-M. CUOQ, L’Islam en Ethiopie.
237 Ville du Yémen, située au nord de Ta’if, grand
marché aux esclaves noirs.
238 J.-M. CUOQ, L’Islam en Ethiopie…, p. 48.
239 Port du golfe Persique situé à l’ouest d’Ormuz et
au sud de la ville de Shiraz.
240 IBN BATTUTA, p. 606-612.
241 IBN BATTUTA, p. 928
242 V. FAUREC, L’Archipel des sultans batailleurs,
1941.
243 G.S.P. FREEMAN-GRENVILLE, The Swahili Coast, 2nd
to 19th Centuries, Londres, 1988, p. 14. E. A. ALPERS, Ivory
and Slaves in East Central Africa, Londres, 1975.
244 M. GORDON, L’Esclavage…, p. 120.
245 D. K. BHATTACHARYA, « Indians of african
origine », Cahiers d’Histoire africaine, 1970, p. 579, et
article « Habshi », Encyclopédie de l’Islam, t. III. (1971),
p. 15-17, cités par F. RENAULT, Problèmes de recherche…,
p. 41.
246 Cité par GUILLAIN, Documents…, t. I, p. 160.
247 Cité par M. GORDON, L’Esclavage…, p. 128-129. E.
AXELSON, South-East Africa, 1484-1530, p. 194.
248 IBN BATTUTA, p. 971.
249 J. L. L. DUYVENDAK, China’s Discovery of Africa,
1964.
CONCLUSION
EN ORIENT
SOURCES
TRAVAUX
Bagdad : 15, 18-19, 55, 83, 87-88, 105, 120, 148, 153,
188, 191, 198, 204, 212, 232
Baguirmai : 61-62
Bahrein : 89, 137, 233, 235
Baju, île : 88, 91
Bambouk : 76
Barberousse, corsaire : 122
Barca : 120, 122
Barcelone : 74
Bari : 14-15
Bassorah : 83, 212, 228, 233
Al Bechri : 46, 95, 98, 125, 163, 166, 193, 200
Bédouins : 51, 92, 121, 133, 145, 235, 239
Bengale : 139
Beni Hamad : 213
Bénin : 71, 258
Berbera, peuple : 86
Berbères : 38-39, 46-47, 59, 73-74, 107, 130, 154, 255
Bila ibn Rabâh : 156
Bilma : 113
al-Birmi : 164
Bohême : 16
Bône : 122
Borgia, César : 45
Bornou, pays : 48, 50, 60, 99, 109, 111-112, 196, 206,
254-255
Bougie : 122, 213
Boukhara : 19, 210
Bujas, peuple : 54, 154, 199
Bulgares : 15, 18-20, 165
Bushire : 253
Busr ben Abi Artah : 29
Cà da Mosto : 241
Caffa : 210
Le Caire : 34-35, 41, 51, 66, 81, 85, 105, 121, 146, 177,
186, 192, 196, 216-217, 220
Camphre, eunuque, conseiller : 169, 220
Cantor : 76
Castro, João de : 91
Cavilha, Pedro de : 36
Cayor, pays : 71
Cervantes : 186
Ceuta : 160
Changa, île : 90
Charbonneau, Moreau de : 56
Chari : 62
Charleston : 260
Chesapeake, baie de : 260
Chine : 117, 136-137, 139-140
Choa, sultanat : 32
Circassiens : 211, 216, 253
Clément V, pape : 35, 44
Cochin : 36
Comores, îles : 92, 103, 138
Congo : 110, 262
Constantinople : 15, 18, 23, 41, 184
Cordoue : 13, 16, 46, 163, 169, 196, 198
Coromandel : 194-195
Crimée : 210
Curtis, famille : 252
Eda : 243
Egypte : 15, 27, 32, 60, 97-98, 114, 119, 189, 209, 218
Eskender, négus : 33
Ethiopie : 29, 66, 83, 202
Euphrate : 120, 212, 231
Gabès : 94
Galawdemos, négus : 37
Gallas, peuple : 119, 151, 202
Gama, Christophe de : 37
Gama, Vasco de : 78, 106
Gambie : 49, 76, 241
Gandia : 229
Gao : 39, 41, 47, 51, 59, 96, 111, 122, 172, 207
Gênes : 14, 74
Geniza, au Caire : 192
Géorgie : 151, 259
Ghadames : 94, 98, 123, 168
Ghana : 39-40, 64, 68, 107, 128, 132
Gomes, Diego : 76
Gondar : 37
Gondokoro : 203
Grégoire XI, pape : 44
Grenade : 14, 17, 20, 165, 229
Guadeloupe : 252
Guardafu, cap : 54
Guinée : 259
Gujarat : 78, 139
Gurma, pays : 68
Ibadites : 94
Ibn’Abd al-Barr : 159
Ibn al-Fakih : 12
Ibn’al-Hakam : 165
Ibn’Ali al-Sanusi : 133
Ibn Battuta : 24, 68, 103, 114, 124-125, 128, 140, 172-
173, 188, 193-194, 197
Ibn Butlan : 153, 249
Ibn Fodlan : 19
Ibn Jobayr : 54
Ibn Khaldun : 40, 175, 196
Ibn Khurdahbeth, géographe : 12, 20
Ibn Tulum : 209, 216
Ibrahim Pacha : 205
Idrisi : 55, 64, 95, 142, 160, 197
Ilorin : 61
Inde : 24, 31, 36, 55, 63, 90, 136, 171, 208, 220
Irak : 33, 55, 87, 137, 198, 235
Iran : 120, 228, 233
Ismaïl, askia : 70
Istambul : 205
Iznik : 189
Madère : 230
Mafia : 103, 105, 164
Mahdia : 14
Mahrates, peuple : 194
al-Makrizi, écrivain : 145, 196, 221
Malabar : 36, 78, 96
Maldives, îles : 194
Malfante Antonio : 74, 98
Mali : 48-49, 68-69, 80-81, 109, 111, 117, 130, 168, 172,
174, 189, 226
Malinde : 55, 79, 105-106, 250, 252
Mamelouks : 35, 149, 179, 216
Mami, caïd du Songhaï : 43
Manda, île : 90-91, 137
Mandingues : 76, 132
Mansa Mousa : 49-51, 80, 196, 226
al-Mansur, Maroc : 42-43
al-Mansur, calife : 88, 212-213, 215
Mantzikiert : 21
Mariland : 259
Maroc : 172, 190, 211
Marrakech : 38, 42, 60, 123, 190
Mascate : 137, 228, 253
Massaouahh : 30, 37
Massufa, peuple : 38, 95, 128, 130
Mauritanie : 111
La Mecque : 31, 37, 49, 119-120, 144-145, 198, 254
Médine : 37, 88, 103, 119-120, 127, 198, 204
Mingréliens, peuple : 211
Mogadiscio : 54, 86, 89-90, 101, 103-104, 114, 137, 169,
250
Mohamed Gori : 220
Mohammed, askia : 50-51, 68, 243-244
Mohammed Rimfa : 196
Moka : 155
Mombasa : 55, 79, 88, 91, 103, 106, 137, 250
Monomotapa : 77
Montalboddo, Francescanzano de : 78
Mossoul : 188, 219
Moulay Ismaïl : 211
Mourzouk : 203, 254
al-Muktadir, calife : 19
Munzer Jérôme : 14
al-Mutamid, calife : 238
al-Mu’tasim, calife : 208, 219, 235
al-Mutawakkil, calife : 233
al-Muwaffaq, général : 238
Rakkada : 213
Ratisbonne : 16
Rio Forcados : 258
La Rochelle : 247, 261
Roger II de Sicile : 160
Romain Diogène : 21
Rome : 14
Russes : 18-20
Saadiens : 42
Saïd ben Ahmad Saïd : 161
Saint-Louis, Sénégal : 61
Saint-Malo : 247, 264
Saladin : 221
Salah Raïs : 41
Samarkande : 19, 210
Samarra : 219, 235
Sanhadja, peuple : 47, 59, 127
São Jorge de la Mina : 77, 110, 257
São Tomé : 230
Sedrata : 95
Sélim Ier : 23
Sénégal : 39, 41, 47, 70, 76, 113, 143
Séville : 74, 163
Shiraz : 88-89, 137
Sierra Leone : 252
Sijilmasa : 40, 81, 94, 97-98, 114, 117, 123, 126, 128,
130, 132, 172, 200, 223
Sikks : 208
Sind : 171, 232, 253
Socotra, île : 36, 110
Sofala : 63, 77, 92, 103, 138
Sokoto : 61
Soliman le Magnifique : 23
Somalis : 34, 37, 54, 90, 101, 136
Songhaï : 41-42, 49, 58, 69, 109, 116, 190, 240
Soninkés, peuple : 93
Sonni Ali : 49, 190, 243
Souakim : 37-38, 103, 120
Sous : 98, 165
Sterne Thomas : 252
Sur : 253, 255
Tabriz : 193
Tadjoura : 202
Tadmakka : 123
Tafilalet : 98, 100, 132, 223
Tahert (Tiaret) : 94-95
Ta’if : 156
Takedda : 112, 226
Tamedelt : 112, 123
Tanger : 42, 46, 172
Tchad, lac : 29, 48, 50, 85, 97, 202
Tcherkesses : 149, 211, 216, 220
Tebelbelte : 98
Teghaza : 42, 100, 128, 134, 223
Tekrur, royaume : 41, 68, 144-145, 168
Tétouan : 14
Tiaret : 94
Tlemcen : 41, 97, 114, 123
Togo : 259, 261
Tolède : 161, 167
Tombouctou : 41, 49, 51, 58-60, 68, 99, 112, 116-117,
123, 126, 132, 134, 172, 190, 207, 254
Tondibi : 43
Touaregs : 49, 59, 99, 113, 117, 130
Touat : 74, 98, 100, 108, 223
Toubenae, secte : 57
Tracy, Laugier de : 184
Tunis : 24, 41, 109, 123, 253
Turcs : 22-23, 35, 37, 41, 208, 210, 216
Turquie : 253
Valence : 229
Venise : 18, 74, 109
Verdun : 16
Virginie : 260