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Les terrains naturels sont des milieux complexes, spécifiques et de caractéristiques variables
dans l'espace et dans le temps, composés de solides et de fluides qui y circulent ou les
imprègnent. L'identification de leurs propriétés, en termes de comportement mécanique et
hydraulique, est coûteuse, et donc nécessairement incomplète et incertaine. Les problèmes
posés sont variés, et leur résolution engage la responsabilité de l'ingénieur. On peut citer en
particulier: la conception, la construction et la maintenance d'ouvrages bâtis sur, dans ou avec
le terrain, dans des sites urbains ou extra-urbains; la stabilité de sites naturels ou construits;
l'étude de la circulation et de la qualité de l'eau souterraine ; l'exploitation des ressources
naturelles ...
Les instructions aux auteurs sont publiées dans le premier numéro de chaque année,
disponibles sur demande, et accessibles sur le site Internet des trois comités
(www.geotechnique.org).
Les manuscrits sont à envoyer en trois exemplaires (dont un original) et une disquette contenant
le fichier à l'un des rédacteurs en chef:
REVUE
FRANÇAISE
DE
GÉOTECHNIQUE
Rédacteur en chef: Pierre DELAGE (École nationale des ponts et chaussées)
Co-rédacteurs en chef: Françoise HOMAND, Jean-Paul TISOT (École de géologie de Nancy)
Comité de lecture: Gabriel AUVINET (UNAM, Mexico), Lucien BOURGUET (Hydrogéologue-
expert), Bernard CAMBOU (École centrale de Lyon), Roger COJEAN (École des n1ines de Paris),
Emn1anuel DETOURNAY (University of Minnesota, USA), Jean-Louis DURVILLE (CETE de Lyon),
Dominique FOURMAINTRAUX (TotalFinaElf), Alain GUILLOUX (Terrasol), Marc PANET (Expert),
Aurèle P.t\RRIAUX (École polytechnique fédérale de Lausanne, Suisse), Pierre VEZOLE (Eiffage),
Gérard VOUILLE (École des mines de Paris)
Revue trimestrielle
Abonnement 2003 (numéros 102 à 105) franco: 117 €
Prix au nU111éro franco: 38 € (valable également pour les numéros anciens)
La revue est expédiée par avion dans les D.O.M.-T.O.M. et à l'étranger.
S0111maires des numéros anciens sur demande.
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The Onsar Pass is a morphological accident separating the two
parts of the El Haouz limestone chain. The nature and origin of
this pass are related to the tectonic setting and the recent
geomorphological evolution. Through an intense deformation, it
constitutes a corridor of weakened materials which results in
phenomena of instability that range from sagging and rockfalls
in the karstic carbonate formations to creeping phenomena and
flows in the underlying schistouse and marly formations.
In this regard, a village bearing the same name as the pass
witnessed rockfalls in the winter of 1946 and 1963 which caused
the loss of life and goods. The basement of the village is an old
accumulation of blocks, and the presence of signs of instability
attests to the persistent risk in this site. This event as weIl as its
aftermath are not an isolated case. In fact, an inventory made in
the surrounding of the Onsar Pass has shown the presence of
numerous and varied slope movements. Therefore, this process
generalize this unstable environment to the entire area of the
pass, the origin and mechanism of which can be explained by
NDLE: Les discussions sur the geological context, which is particularly complex.
cet article sont acceptées
1 Key words : slope movements, rockfalls, strike-slip fault, Onsar
jusqu'au 1er novembre 2003
3
pass, Rif.
ESPAGNE t MalagJ..a~ ~. . . .
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Gibraltar 'Nfédi terranée
occidentale
Tanger
Tétouan Melilla
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DORSALE CALCAIRE s.s. Al Hosetma
984 !n MAROC HAOUZ MEDrAN
HAOUZ lvfERJDIONAL
Cluse de Tétouan
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bonatées massives succèdent, en continuité stratigra- de mouvements de masse, colluvions, cônes de déjec-
phique, aux grès et argilites rouges du Permo-Trias. tion) et sporadiquement par des travertins qui le plus
Cependant, la différence entre les différentes écailles de souvent s'observent au contact dorsale externe/Flyschs
la dorsale calcaire réside surtout dans leurs termes à Keddana.
Jurassico-Crétacé, constitués de quelques mètres de
séries condensées (calcaires lités à silex, radiolarites, cal-
caires marneux ... ). La couverture tertiaire de la Dorsale,
peu épaisse, est représentée par des marnes éo-oligo-
cènes jaunes à passées bioclastiques à nummulites. Ces Cadre structural
marnes affleurent par endroit en liserés entre les écailles
ou sous les massifs carbonatés sus-mentionnés. L'histoire structurale polyphasée du secteur s'éche-
lonne principalement du Secondaire au Tertiaire.
La nappe Ghomaride de Koudiat Tizian (Milliard in Cependant, ce sont les événements compressifs
Durand-Delga et al., 1962) affleure, à l'est de la Dorsale paroxysmaux de l'Aquitanien-Burdigalien qui ont mar-
calcaire, sous forme de schistes et grauwackes, plisso- qué l'essentiel de l'histoire géologique de la région. Ces
tés et schistosés, d'âge paléozoïque et de grès et argi- événements correspondent à des chevauchements à
lites rouges permo-triasiques. A l'ouest, les nappes de vergence ouest et à des rétrochevauchements associés
flyschs tertiaires qui supportent en contact sub-vertical vers l'est. Ils sont responsables des grandes structures
la Dorsale calcaire, sont formées d'alternances marno- sub-méridiennes, plissées, écaillées et disposées en
calcaires (nappe de Béni Ider, Durand-Delga et al., éventail, de la chaîne calcaire du Haouz (Raoult, 1966).
1962) et marno-gréseuses (le Prédorsalien, Durand- Un ensell1ble de failles et accidents à caractère décro-
Delga, 1972). chant dont celui de Onsar vient achever la structura-
Le Quaternaire y est représenté essentiellement par tion par l'individualisation des tronçons de la chaîne
des dépôts détritiques, produits du démantèlement des calcaire: direction sub-méridienne du Haouz médian
reliefs et de la dynamique des versants (éboulis, dépôts et NO-SE du Haouz méridional.
NW _ _ Coupe X _ SE
........... a
~b __ Coupe Y __
IY E
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J
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t:
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O.5km~/
sw - - Coupe Z -'- - NE
5
Schéma structural.
Faille décrochante (a), chevauchement (b), coupe géologique (c) ; Ghomarides (Gh) ; unités tectoniques de
la dorsale calcaire: Belouazen (BO), Uestia 1 (U1), Uestia 2 (U2), Uestia 3 (U3), Jbel Dersa (JD), Tarrant-EI
Keddan (TK) ; Prédorsalien (Pd) ; Béni Ider (FI) ; schistes et grauwackes (1), grès et argilites rouges (2),
dolomies (3), séries calcaro-dolomitiques (4), calcaires massifs (5), calcaires à silex (6), calcaires
organogènes (7), marnes et conglomérats éo-oligocènes (8), flyschs à alternance de grès quartzeux et
marnes (9), alternance de marnes et de bancs calcaires (10).
Structural scheme.
Strike-slip fault (a), thrust fault (b), geological section (c) ; Ghomarides (Ch) ; tectonic units of the Limestone chain:
Belouazen (BO), Uestia 1 (U1), Uestia 2 (U2), Uestia 3 (U3), Jbel Dersa (JD), Tarrant-EI Keddan (TK); Nappes of
flyschs : Predorsalian (Pd) ; Beni Ider (FI); schists and greywacks (1), red sandstones and clays (2),
massive dolomites (3), limestones and dolonlites series (4), massive limestones (5), limestones with silex (5),
bioclastic marly limestones (7), yellow marIs and conglomerates (8), marIs with sandstone (9), red nlarls with
limestone beds (10).
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C'est dans sa partie nord-est que le secteur montre sements dont les masses, très peu déplacées, se vident
une instabilité complexe et de grande ampleur, en rai- progressivement et alimentent les petits cônes de bas
son de la double influence structurale qu'a subie cette de pente. Par ailleurs, les témoignages des habitants
zone: un compartimentage décrochant compliqué par font état de petites coulées de débris sporadiques, par
le rétrochevauchement en relief accusé de la partie décollement de la partie superficielle altérée, formant
interne de la dorsale sur les Ghomarides, dont la limite de petits reliefs que les activités de labour estompent
est soulignée par les marnes éo-oligocènes jaunes de avec le temps. Des phénomènes de reptation se pro-
l'unité de Belouazen (BQ). Les résurgences, au niveau duisent également dans ces matériaux paléozoïques,
de ce contact, abaissent la résistance des marnes, et comme en témoignent les troncs déformés des figuiers.
leur infiltration dans les masses carbonatées affaissées
déstabilise de nouveau ces dernières, en les impliquant
dans des mouvements de type glissement rocheux-cou- j
lée de blocs et débris.
Les schistes et grauwackes paléozoïques se mon-
Écroulements du village de Onsar
trent relativement stables. Toutefois, les photographies En novembre 1945, des pluies exceptionnellement
aériennes de 1966 ont permis d'identifier d"anciens glis- importantes ont provoqué un mouvement complexe de
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N w Coupe 3JC J 1* w
s
soo b
Solifluxion dans la formation rouge permo-triasique sous un escarpement rocheux très diaclasé.
Bloc écroulé (B) ; familles « b » et « d » de diaclases (b) et (d) ; unité structurale U2 : calcaires massifs (1),
dolomies massives (2) ; unité structurale U1 : argilites et grès rouges (3).
Solifluxion in the red clays and sandstones formation under the active scarp of limestone.
Falled lin1estone block (B) ; « b)) and (c d)) joint fan1ilies (b) and (d) ; U2 structural unit: massive limestones (1), massive
dolon1ites (2) ; U1 structural unit: red sandstones and clays (3).
SSE NN\V
~ Coupe tlC2 11
~ S\V
type glissement-coulée dans les assises marneuses éo- ensevelissant une partie du village, entraînant la mort
oligocènes de l'unité BO, ce qui a placé l'escarpement de cinq habitants et des pertes matérielles importantes.
carbonaté de l'unité U1 en surplomb. Les habitants du Des chutes de blocs durant l'hiver pluvieux de 1962-
village ont pu observer le basculell1ent progressif et 1963 ont de nouveau causé des dégâts. Dans les deux
lent du pan rocheux en surplomb, mais l'écroulement cas, les conditions climatiques responsables sont des
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vés de la station météorologique de la ville de Tétouan s'ajoute le contact stratigraphique subhorizontal (légè-
(Fig. 7). Celle-ci, située à faible altitude, avait enregis- rement incliné dans le sens de la pente) entre les dolo-
tré, durant la saison hivernale (de novembre à février) mies grises et les calcaires massifs supérieurs. La zone
de ces deux années hydrologiques, des valeurs qui de rupture montre, par ailleurs, un pan rocheux tassé et
dépassent la moyenne annuelle calculée sur 82 ans. suspendu sous la niche d'arrachement principale. Les
Compte tenu de la moyenne mobile sur deux ans, ces assises marneuses jaunes de base, responsables du
deux événements coïncident avec des périodes bi- à tri- fluage basal, sont masquées par un cône d'éboulis dont
annuelles exceptionnellement pluvieuses. Notons, l'angle d'inclinaison est de 26,5° et sur lequel sont par-
enfin, que la relative sécheresse du climat que connaît semés des blocs de taille métrique. Des échantillons
récemment la région, illustrée par la moyenne mobile des marnes éo-oligocènes prélevés à l'est du village où
calculée sur dix ans, pourrait bien expliquer l'absence elles affleurent, montre les caractéristiques suivantes :
de réactivations constatées durant les trois dernières les deux échantillons de surface (à 0,30 m de profon-
décennies. deur) ont montré un comportement plastique dominant
Ces deux événements n'ont en fait concerné qu'une (teneur en eau naturelle W = 24 % et 21,5 0/0, limite de
partie de la zone de rupture totale qui dépasse 50 m de liquidité WL = 50,S % et 53 % et indice de plasticité
hauteur, 250 m de largeur et 80° d'inclinaison moyenne, IP = 27,4 % et 30,S 0/0) et une cohésion apparente, par
zone dont la morphologie est délimitée sensiblement l'essai de cisaillement direct, de 0,008 MPa et 0,017 MPa.
par les plans N50, NS et EO. L'examen détaillé, en En profondeur, à 1,85 m, les caractéristiques géotech-
arrière et au niveau de cette zone de rupture, montre niques s'améliorent notablement (W = 9 % et 5 0/0,
un découpage du massif rocheux par trois familles WL = 22 % et 35 0/0, IP = 16 et 23 0/0, C = 0,115 MPa et
principales de discontinuités (a, b et d) auxquelles 0,175 MPa). U
Jo
.......
S~ 1992-1993
Précipitation
(mm) 1987-1988
300 N
200
100 1977-1978
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SONDJFMAMJJO
1962-1963
II,. j i .,
-1 1972-1973
1962-1963
1957-1958
300
200 1952-1953
100
1947-1948
o +-....,..a....,.....,.......~".........~......,r--:r-'
SONDJFMAMJJO 1942*1943
1945-1946
1937-1938
1932-1933
1927*1928
1922-1923
J
~(2) \ (3)
1·
---+(4) 1917-1918
\
Précipitation (mm)
Évolution des précipitations annuelles et mensuelles entre 1912 et 1995 (station météorologique de
Tétouan) et la localisation temporelle des réactivations de l'écroulement de Onsar.
Moyenne annuelle (1), moyenne annuelle mobile sur 2 ans (2), moyenne annuelle mobile sur 10 ans (3),
localisation temporelle des réactivations de l'écroulement du village de Onsar.
Annual and monthly rainfall evolution between 1912 and 1995 (case of the meteorological station of Tetuan) and
references of Rockfall events of the Onsar village
Annual average (1), sliding average on 2 years (2), sliding average on 10 years (3), time localisation of the Onsar
rockfall events.
~ Coupe "C3" ~
450
4()(}
350
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1 mouvements sont relativement peu importants par rap-
port à d'autres du même genre qui ne concernent pas
Conclusion des lieux habités. Ils ne sont pas comparables aux
anciens mouvements de grande ampleur répertoriés
Le col de Onsar est affecté de nombreux mouve- dans le secteur. Cette étude a donc permis d'analyser
ments de versants favorisés, en périodes de pluies une situation qui existe depuis longtemps et qui semble
abondantes, par les conditions lithologiques et structu- à présent ne pas inquiéter les habitants du village. Ceux
rales régionales. Il faut remarquer une diversité typolo- ci, conscients des possibles réactivations futures, mais
gique résultant de mécanismes très différents, puisque considérant les ressources hydriques à proximité du
l'on observe séparément ou en concomitance: des cou- village préfèrent s'accommoder des risques d'éboule-
lées, des solifluxions, des glissements, des tassements ments. La prévention pourrait être améliorée par une
auxquels se surimposent des écroulements et des mise sous surveillance du site par GPS (Global Positio-
chutes de blocs. Le caractère catastrophique des évé- ning System) pour quantifier les déplacements du pan
nements du village de Onsar, survenus en 1946 et 1963, rocheux et de l'escarpement sommital. De là, se défini-
n'est dû qu'à la coïncidence de l'aléa et des enjeux, car, raient les propositions susceptibles de réduire le risque
de par le volume des blocs et la distance parcourue, ces au niveau du village.
Durand-Delga M. - cc La courbure de El Kharim Y., Hlila R., Darraz C. El Hajjaji Maate A. - Estratigraffa y evolucion paleo-
Gibraltar, extrémité occidentale des K. - cc Écroulements et mouvements geografica alpina deI dominio gonlaride
chaînes alpines, unit l'Europe et associés dans le col d'El Onsar (Rif, (Rif interno, Maruecos). Thèse de docto-
l'Afrique )). Ecologae. Geologica Helve- Maroc) )). Proceeding of the 11 Work- rat, Universidad Granada, 1996, 397 p.
tica, V. 65, n° 2,1972, p. 267-278. shop on Seismic Risk in North Africa, Margaa K. - Essai de cartographie des
Durand-Delga M., Hottinger L., Marcais J., Tétouan, 2001, p. 43-46. risques naturels: application à ranléna-
Milliard Y., Suter G. - cc Données Fallot P. - cc Essai sur la géologie du Rif gement de la région d'Al HoceiJTIa (Rif,
actuelles sur la structure du Rif )). septentrional )). Notes et Mémoire Ser- Nord-Maroc). Thèse de doctorat, Uni-
Mémoire hors série. Société Géologique vice Géologique du Maroc, 40, 1937, versité de Franche-Comté, 1994, 196 p.
de France, 1. 1, 1962, p. 399-422. 553p. MOPT - Ortoimagen a 1/100000 deI Estre-
El Mrihi A. - Structures alpines des zones Hlila R. - Étude des déformations miocènes cho de Gibraltar. LN.G. Espafia, MOPT.
externes et des nappes des flyschs à dans la chaîne calcaire du Haouz (entre Raoult J.F. - La chaîne du Haouz du col
rouest de la chaîne du Haouz (Rifsepten- Tétouan et le col du Drauy). Thèse de d'Azlu d'Arbia à Bab Aonsar. Notes et
trional, Maroc). Thèse de 3e cycle, Uni- 3 e cycle, Université Abdelmalek Mémoires. Service Géologique du
versité Mohamed V, Rabat, 1995, 155 p. Essaadi, Tétouan, 1994, 159 p. Maroc, n° 184, 1966, p. 61-148.
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Dimensionnement
des tranchées d'ancrage
en tête de talus
des dispositifs d'étanchéité
L. BRIANÇON par géomembrane
H.GIRARD
D. POULAIN llo~ Les dispositifs d'étanchéité par géomembrane sont
Cemagref E couramment utilisés dans les ouvrages hydrauliques et
Groupement de Bordeaux ~ les centres de stockage de déchets. Ces systèmes,
50/ avenue de Verdun llo~ lorsqu'ils sont disposés sur pentes, ne sont pas toujours
33612 Cestas Cedex et:= autostables et nécessitent un ancrage en tête de talus.
laurent.briancon@ L'objectif de cette étude entreprise par le Cemagref à la
demande du CETMEF (Centre d'étude technique
cemagreffr maritime et fluviale) est d'étudier, à partir d'une
hugues.girard@cemagreffr expérimentation, le dimensionnement des ancrages en
danie1.poulain@cemagref.fr tête de talus. Les essais d'ancrage présentés ont été
réalisés dans des massifs sableux et limoneux. Les
résultats des méthodes de calculs existantes ont été
confrontés aux mesures réalisées sur différents types
B. CHAREYRE d'ancrage permettant de mettre en évidence l'influence
LirigmUniversité de certains paramètres géométriques sur la capacité
Joseph-Fourier d'ancrage des tranchées étudiées.
38041 Grenoble Cedex 9
Bruno.Chareyre@ Mots clés: géotextiles, géomembranes, ancrage, essais,
ujf-grenoble.fr dimensionnement.
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1 -la première correspond à la mise en place du disposi-
tif sur une longueur plane en tête de talus, sans tran-
Introduction chée d/ancrage. Il s/agit d/un ancrage dit cc par recou-
vrement simple ))/ utilisé lorsqu/il y a une surface
Les dispositifs d'étanchéité par géosynthétiques disponible suffisante autour de l'ouvrage;
(DEG) sont employés couramment dans les ouvrages -la seconde consiste en la réalisation d/une tranchée
tels que les barrages, les canaux ou encore les centres d/ancrage en arrière d/une courte longueur plane. Ce
de stockage de déchets. Ils présentent une alternative dispositif est le plus répandu, il est employé principale-
intéressante par rapport à des solutions plus anciennes ment pour les réservoirs et les centres de stockage de
(argile, béton ... ). De tels dispositifs comportent une déchets. Les dimensions de la tranchée varient de 0/5 à
géomembrane assurant l'étanchéité de l'ouvrage; elle 0/7 m de large par 0/5 à 1 m de profondeur.
est généralement associée à des géotextiles et produits L/ancrage en tranchée peut être fait de deux
apparentés ayant pour fonctions principales sa protec- manières; on dispose le/Oes) géosynthétique(s) à
tion et/ou le drainage. Une couche de sol est mise en ancrer:
place sur le géotextile supérieur permettant dans cer-
tains cas la revégétalisation du talus. - soit sur le parement vertical uniquement et il s/agit
dans ce cas d/un ancrage dénommé cc fichage vertical )) ;
Devant des contraintes d'ordre essentiellement éco-
nomiques/ la tendance actuelle est à l'utilisation maxi- - soit sur le parement vertical et le fond de tranchée
male de l/espace disponible pour les ouvrages cités ci- dans le cas cc d/un ancrage complet )).
dessus, ce qui conduit à l'adoption de pentes raides La tranchée est généralement remblayée avec les
engendrant des problèmes de stabilité du DEG tels que matériaux excavés et compactés plus ou moins inten-
glissements à l'interface ou rupture de certains compo- sément. Il existe d/autres systèmes d/ancrage en tran-
sants du cc complexe géosynthétique )). chées/ moins utilisés, donnant aussi de bons résultats
Le complexe géosynthétique présente généralement mais qui nécessitent un terrassement plus contraignant
un plan de rupture préférentiel à l/interface cc géomem- et plus long, entraînant, de ce fait, un coût supérieur.
brane/géotextile )) (la géomembrane ayant un angle de Parmi ces ancrages, on retrouve la double tranchée, la
frottement faible avec les autres matériaux). Lorsque le tranchée réduite remplie de béton ou encore la tran-
dispositif n/est pas autostable par simple frottement, il chée en V.
est nécessaire d/ancrer le géotextile supérieur afin
d'éviter tout glissement et de reprendre les tensions i
induites par les sols de couverture reposant sur le com-
plexe géosynthétique et ainsi limiter les contraintes
dans la géomembrane. Cet ancrage peut prendre dif-
Méthodes de calcul
férentes formes (recouvrement simple ou tranchées de Nous avons répertorié trois méthodes de calcul
géométries diverses) en fonction des contraintes spa- nommées M 1, M2 et M3 par la suite. Elles sont basées
tiales de l'ouvrage. Une synthèse bibliographique dans sur des hypothèses différentes et donnent pour cer-
ce domaine a fait apparaître essentiellell1ent trois taines configurations de tranchée des résultats diver-
méthodes de calculs pouvant donner des résultats très gents.
différents pour une même configuration de tranchée.
A partir de ce constat, il nous est apparu intéressant de
concevoir un appareillage spécifique: un banc
d'ancrage permettant de modéliser en vraie grandeur
des tranchées d/ancrage afin de confronter les Méthode M1
méthodes de calcul et analyser les mécanismes de
l'ancrage. La première méthode de calcul est basée sur l'hypo-
L'expérimentation réalisée avec deux sols et avec thèse que les efforts au niveau de l'ancrage sont repris
deux géotextiles non tissés aiguilletés sur trois configu- uniquement par frottement sur les parties linéaires
sans aucun effet d/angle: elle est proposée par Hulling
rations d'ancrage a mis en évidence:
et Sansone (1997). Le calcul est présenté pour un
- l'influence des paramètres géométriques de la tran- ancrage complet en tranchée (Fig. 1) mais reste valide
chée; pour les autres configurations.
- l'influence de la nature du sol.
Les méthodes de calcul ont été mises en défaut sur
certaines configurations de tranchée d/ancrage. Une
instrumentation spécifique du géotextile dans le sol a
permis d/analyser les mécanismes de l'ancrage. A par- H
tir de cette analyse, de nouveaux éléments d/aide au
dimensionnement des tranchées d'ancrage en tête de
talus peuvent être proposés (Briançon, 2001). D
'1
Géométrie des ancrages B L
Il existe deux grandes familles d/ancrage qui ont des Application de la méthode de calcul Ml
sur une tranchée d/ancrage.
applications plus ou moins spécifiques, elles sont fonc- Application of design method M1 to an
tion du type de l'ouvrage, des matériaux rencontrés et anchorage trench.
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1
Dimensionnement d'une tranchée
d'ancrage.
Anchorage trench design.
Méthode M3
Enfin différents concepteurs (Guide technique"
2000) ont proposé une méthode de calcul prenant en Capacité d'ancrage (kN/m) 4,50 11,03 34,88
compte des effets d"angle; cette méthode M3 consiste
à majorer" à chaque changement de direction dans la
tranchée et à l"intersection entre le replat en tête de
talus et le parement la capacité d"ancrage évaluée sur
les parties planes (par la méthode M1) par un coefficient Expérimentations existantes
multiplicatif égal à eÀ.tanô" À étant l"angle du changement
de direction et tan<5le coefficient de frottement (Fig. 3). Parmi les quelques expériences répertoriées" on
Cette méthode est basée sur les lois du fil prenant peut citer les travaux réalisés par Imaizumi et al. (1997)
appui sur un cylindre de révolution (poulie avec frotte- sur des tranchées d"ancrage de géomembranes rem-
ment). Ainsi" à chaque changement d"angle" la capacité plies de béton.
d"ancrage passe de Tav avant le changement de direc- Pour cette expérimentation réalisée in situ, quatre
tion" à Tap après l"angle" avec la relation: Tap = Tav eÀ.tanô types de géomembrane ont été testés dans des tran-
chées de dimensions différentes (de 200 x 200 mm 2 à
L 600 x 600 mm 2).
<:
A partir des différents résultats obtenus" quatre
T 2 :: (T3 + T(2 ).e(1Y2)tanô mécanismes de rupture ont été proposés:
12 ~ ---;---------~ -le bloc de béton sort de la tranchée (pour la tranchée
TAI de dimensions 200 x 200 mm 2);
1
TI =(T2 + TAI).e~·tanô -la rupture se produit dans le talus (pour les tranchées
de dimensions 300 x 300 mm 2 et 400 x 400 mm 2);
Hl1
-la géomembrane est extraite de la tranchée (dans le
cas où un géotextile de protection est disposé entre la
géomembrane et le béton de grandes dimensions 500 x
_ .
_ .
T
_.
A3
_-
_-_
~
3 T =T
. 3 A3 .e(nl2)tanô 500 mm 2 et 600 x 600 mm 2);
...-- -la géomembrane se déchire.
< > Ces modes de ruptures sont donc fonction des
B dimensions des tranchées, de la nature des géomem-
Application de la méthode de calcul M 3 branes testées ou encore de la présence de géotextiles
sur une tranchée d'ancrage. de protection.
Application of design method M 3 to an
anchorage trench.
Une autre expérimentation concernant le dimension-
nement des tranchées d'ancrage a été réalisée par Koer-
ner (1991) pour quatre types de géomembranes (poly-
Dans ces conditions" la capacité d'ancrage TM3' don- éthylène haute densité" PEHD; polyéthylène chlorosulfaté,
née par la méthode M3, peut s'exprimer comme suit à CSPE rugueuse; polyéthylène basse densité" PEBD, poly-
partir des valeurs TA1 , TA2 et TA3 , définies par les rela- vinyle chloride" PVC) dans un appareillage de laboratoire
tions (1) à (3) : utilisé en général pour la réalisation d'essais d"extraction
TM3 = T1= (T2+ TA1)e~tanô de géosynthétiques. Les géomembranes utilisées ont été
avec: T3 = TA3 .e (n:/2).tanô et T2 = (T3 + TA2 ).e(n:/2).tanô testées pour un type d"ancrage (recouvrement horizontal
sur 1,,0 m et fichage vertical sur 0,3 m) en appliquant dif-
on obtient: férentes contraintes normales et différentes inclinaisons
TMJ = ((TA3 .e(n:/2).tanô + T A2 ).e(n:/2).tanô + T',LI,).ef3·tanô (5) de traction. Des jauges de déformations collées sur les
géomembranes permettaient de suivre la distribution de
contraintes au cours de l"extraction.
Ces essais ont montré que, pour les configurations
Mise en évidence des divergences d'ancrage testées et pour les matériaux utilisés, la force
d"extraction de la géomembrane était toujours infé-
des méthodes sur un exemple rieure à la tension de rupture de la géomembrane. Ces
Pour mettre en évidence les divergences des résultats essais n'ont pas montré d'influence de l'inclinaison de
obtenus par les trois méthodes de calcul (Tableau!)" appli- la traction appliquée à la géomembrane sur la valeur
quons-les à un exemple de tranchées d'ancrage corres- de la force d'extraction.
pondant à un fichage vertical du géotextile" le cas de Bien que nos essais ne portent pas sur l'ancrage de
l'ancrage complet n"étant pas traité par la méthode M2. géomembranes mais sur l"ancrage de géotextiles et que
Les caractéristiques géométriques (Fig. 1) de l"ancrage nos tranchées aient été remplies de sol et non de béton,
étudié sont: L = 1,1 m; H=O,3m; D = 0,,5m; B = 0 met les résultats des expériences de Imaizumi et al. (1997)
p= 22°; les caractéristiques mécaniques étant <p = 41 °; nous donnent une idée sur les mécanismes de rupture
<p = 41 <5 = 34° et y= 16,7 kN/m 3 .
0
; et sur l'ordre de grandeur des forces nécessaires pour
Sur un exemple simple" les trois méthodes de calcul obtenir cette rupture.
présentent de résultats très différents; en effet la capa- Les essais conduits par Koerner (1991) ont également
cité d"ancrage calculée avec la méthode M3 est huit fois été effectués uniquement sur des géomembranes et
W103
2e trimestre 2003
samment représentatifs des mécanismes développés dans traction. Les dimensions de la zone d'ancrage permet-
les tranchées d'ancrage en tête de talus car, en particulier: tent de réaliser une tranchée d'ancrage présentant une
-le massif de sol ne pouvait pas se déplacer; profondeur maximale (D + H) égale à 1,0 m et une lon-
gueur (L + B) pouvant atteindre 1,8 m. Une géomem-
-l'augmentation de force due à l'inclinaison de la trac- brane en polypropylène est fixée sur les parois
tion ne s'appliquait pas sur le sol mais sur l'appa- internes du banc d'ancrage pour diminuer le frotte-
reillage. ment entre le sol et les parois. Le dispositif de traction
Ces études ont été réalisées uniquement sur des est constitué d'un treuil de capacité maximale de 50 kN
géomembranes, in situ ou en adaptant des appa- et d'une poulie de renvoi d'angle permettant d'exercer
reillages de laboratoire existants. Pour notre part, des forces de traction sur le géosynthétique pour des
compte tenu des différentes méthodes de dimension- inclinaisons de talus comprises entre 0° et 35°. Ce dis-
nement existantes et le peu d'expérimentations réper- positif de traction est relié au géosynthétique par les
toriées, il nous est apparu nécessaire de concevoir un mors; ces mors ont été conçus dans le but d'exercer
appareillage spécifique: un banc d'ancrage, permettant de fortes tractions sur le géosynthétique sans l'endom-
de modéliser des tranchées d'ancrage de géosynthé- mager.
tiques en tête de talus afin de déterminer leur capacité
d'ancrage et d'analyser les différents mécanismes
régissant de tels systèmes.
1 Instrumentation
La traction F et le déplacement u en tête de la
Appareillage d'essai nappe géosynthétique sont mesurés lors de l'extrac-
tion par des capteurs fixés au système de traction: le
capteur de force (50 kN) est installé entre le mors
d'ancrage et le câble du treuil et le capteur de dépla-
Le banc d'ancrage cement est disposé entre un point fixe du châssis et le
câble du treuil. Dans la zone d'ancrage (Fig. 5), un dis-
Le banc d'ancrage (Fig. 4) est constitué d'une zone positif de mesure à câbles permet de suivre les dépla-
d'ancrage d'un mètre de largeur et d'un dispositif de cements u' du géosynthétique en certains points
~--.:l""-"---==1f---- =-----p-........C
..
LI
·"!4
. L2 mors d'ancrage
/
......_ _~\f~. F
âbles de géotextile
connexion
lecture des
dép]acemJ~~nts des
points connectés Ancrage c0111plet
17
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
(numérotés de C1 à C12 ). Les câbles coulissant dans des a : adhésion (kPa),
gaines souples sont fixés à la nappe et mis en tension 8 : angle de frottement à l'interface (0).
par des contrepoids. Un système de mesure gra- Les paramètres d'interface entre ces sols et les géo-
phique positionné à l'arrière du banc d'essai permet textiles ont été déterminés au plan incliné en respec-
la mesure des déplacements durant l'extraction. Dans tant la norme française (norme AFNOR NF 84-522,
certains cas, le déplacement final du sol a pu être 1994) et le projet de norme européenne (norme (projet)
observé grâce à des colonnes de sable coloré implan- prEN ISO 12957-2, 2000) sur la détermination des
tées avant essai dans la zone d'ancrage. Après extrac- caractéristiques de frottement d'interfaces géosynthé-
tion, un découpage minutieux de la zone de sol au tiques au plan incliné (Tableau III).
droit des colonnes de sable permet d'analyser les
mécanismes de rupture et de suivre les déplacements Paramètres d'interface entre les
du sol en fin d'essai. géotextiles et les sols utilisés.
Interface parameters between the geotextile
and the sail used.
Expérimentation
limon 1
Géométrie des ancrages étudiés
Pour cette étude, nous avons retenu les trois types
d'ancrage suivants parmi les nombreuses configura-
tions existantes:
-le recouvrement simple sur L;
-l'ancrage partiel ou fichage vertical sur (L + D);
-l'ancrage complet sur (L + D + B). Mise au point
Les différents essais de mise au point ont conduit à
modifier l'appareillage expérimental initial afin de
mieux modéliser les tranchées d'ancrage.
Matériaux utilisés La couche de sol reposant sur la longueur L a été
mise en œuvre à l'aide d'un coffrage retiré avant la
Les essais d'extraction ont été réalisés avec deux mise en traction du géotextile, ce qui a permis de sup-
géotextiles non tissés aiguilletés de la gamme Bidim: primer le frottement latéral difficile à estimer.
- un géotextile de protection GTX p ; La première configuration du banc comportait une
- un géotextile de renforcement GTX R ; paroi verticale, côté treuil, formant une butée qui per-
et une géolnembrane en polypropylène GMB pp de la mettait de limiter le volume de sol à mettre en place et
gamme Siplast (uniquement pour les essais de mise au de modifier la pente plus facilement. Des essais com-
point). paratifs avec et sans butée ont montré que celle-ci avait
un rôle important en augmentant la capacité d'ancrage.
Deux sols ont été utilisés: un sable et un sol limo- Cette paroi a donc été supprünée, ce qui a permis en
neux, mis en place sous deux états de teneur en eau outre d'observer des ruptures de sol au niveau du talus
(notés (c limon 1 )) et cc limon 2 ))). Le limon est peu plas- pour certaines configurations géométriques.
tique: w = 30 et w p = 22,5. Ces deux sols ont fait l'objet
d'une sé~ie d'essais géotechniques. Leurs caractéris- Les essais de mise au point ont été réalisés avec le
tiques principales sont données dans le tableau II. Les géotextile GTX p disposé sur une géomembrane GMB pp .
valeurs de densité et teneur en eau ont été déterminées Le faible angle de frottement à l'interface
cc GTX /GMB pp )) ne permettait pas d'obtenir des forces
tout au long de l'expérilnentation afin de vérifier que
ces caractéristiques ne varient pas avec le temps. de mi;e en traction du géotextile GTX p suffisamment
élevées et différenciées pour analyser les résultats.
On suppose que les interfaces suivent des lois de L'expérimentation a donc été réalisée sur des géotex-
frottement de type Mohr-Coulomb (1 = a + cr.tan8) à la tiles GTX p et GTX R sans géomembrane, un angle de
rupture, où : frottement plus élevé augmentant les écarts entre les
1 : contrainte de cisaillement, forces mesurées pour les différents cas testés, ce qui
crn : contrainte normale, rend l'interprétation des résultats plus aisée.
18
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
Il
Influence de la profondeur de fichage D
Influence des paramètres et de la largeur de fond de tranchée B
géométriques de l'ancrage L'influence de la profondeur de fichage a été obser-
L'influence des paramètres liés à la géométrie de vée sur des essais de fichage vertical réalisés avec le
l'ancrage a été vérifiée sur un seul sol: le sable. géotextile GTX p pour:
- une longueur L = 0,5 m et trois profondeurs d'ancrage
(0,3 m; 0,6 m; 0,9 m);
- une longueur L = 1,1 m et deux profondeurs (0,3 m et
Influence de l'angle d'inclinaison ~ de la pente 0,6m).
Tous les essais ont été doublés. Pour les essais de
L'influence de l'angle P de la pente et donc de fichage à une profondeur de 0,9 m, les forces mesurées
l'angle d'inclinaison de la traction appliquée au géo- ne correspondent pas aux forces d'extraction du géo-
synthétique a été vérifiée sur des essais de recouvre- synthétique car une rupture du sol situé entre le pare-
ment simple. Ces essais ont été réalisés pour sept ment du talus et le fichage du géosynthétique a été
angles de talus avec le géotextile de protection GTX p, observée; les valeurs expérimentales sont donc à
pour une longueur d'ancrage L égale à 1,5 m et une prendre en compte, dans ce cas, comme des valeurs
épaisseur H de sol reposant sur le géosynthétique égale par défaut de la capacité d'ancrage.
à 0,25 m. Pour plus de précision sur la contrainte nor- L'influence de la profondeur du fichage et de la lar-
male appliquée sur le géosynthétique, le sol reposant geur du fond de la tranchée a été examinée sur des
sur le géosynthétique a été pesé après chaque essai et a essais d'ancrage complet. Pour une longueur L (1,1 m)
été mis en œuvre de telle sorte qu'il n'y ait aucun frot- et pour chaque largeur B de fond de tranchée B (0,3 m
tement latéral avec les parois du banc d'ancrage lors et 0,6 m), deux profondeurs D (0,3 m et 0,6 m) ont été
de son déplacement au cours de l'essai (coffrage enlevé testées (Fig. 7). Toutes ces valeurs expérimentales
avant essai). seront comparées aux valeurs déterminées par les dif-
Au cours de l'essai, la force appliquée au géosyn- férentes méthodes de calcul (§ 7).
thétique atteint un maximum T correspondant à la La rupture du massif de sol observée au cours de
capacité d'ancrage à la rupture du dispositif étudié; la l'essai de fichage vertical (L = 0,5 m et
comparaison entre les différents essais est faite sur D = 0,9 m) fait apparaître l'existence d'une longueur
cette force maximale. La mise en œuvre ne permettant minimum L . assurant la stabilité du massif de sol
pas d'appliquer rigoureusement la même quantité de entre la tra~2hée et le parement du talus. Des essais
sol sur le géosynthétique pour chaque essai, les complémentaires ont été entrepris pour déterminer la
mesures des forces maximales appliquées au géosyn- surface de rupture dans le massif pour une configura-
thétique sont corrigées pour un poids de sol moyen tion de tranchée donnée.
égal à 5,29 kN.
D'après ces résultats (Fig. 6), exception faite de la
mesure faite pour l'inclinaison de la pente égale à 7°, il
apparaît que la force maximale appliquée au géosyn- Stabilité du massif en tête de talus
thétique augmente sensiblement en fonction de l'incli-
naison de la pente; cette augmentation n'est pas négli- Des essais complémentaires ont montré que pour
geable: elle atteint 22 % entre un essai de traction le certaines géométries de tranchée (fichage vertical:
long d'une pente de 30° d'inclinaison et un essai de L = 0,5 m et D = 0,9 m; ancrage complet: L = 0,5 m,
traction horizontale. D = 0,6 m et B = 0,3 m), il y a eu rupture du massif de
20 D
18 D,3m
4,4
1 ~ ...•..., -• 16 O,6m
!
4,2 '·I~~·w,~,_~"~,_,~,,, • ~ 14·~ O~9m
! • Z 12
1
.,-.. ~
z 4 1 • ~10 ,j
~ a;".JÏt
~
........, 1 •
><
tU 3,8
1
6j
....' 1
~L 11
E 1
1- t
3,6
!1
L: O,5m
1 _
1,1m 1.1m 1,1m
3,4 f
B: Om Om O,3m O,6m
0 5 10 15 20 25 30 Fichage vertical Ancrage complet
angle de traction (0)
Résistance maximale pour différents
Influence de l' angle ~ de la pente. ancrages.
Effect of slope angle ~. Maximum strength for different anchorages.
19
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
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2e trimestre 2003
sol situé entre le parement du talus et le fichage du les résistances au cisaillement peuvent être attribuées à
géosynthétique. Les résultats de ces essais ont mis en l'existence d'un phénomène d'adhésion entre le géo-
évidence, pour une configuration de tranchée donnée textile et le limon; cette adhésion est difficile à mesu-
(D et B fixées), l'existence d'une longueur L minimale rer avec précision;
assurant la stabilité du massif de sol situé entre la tran- - des mécanismes de rupture différents (mise en butée
chée et le parement du talus. Suite à la rupture de ce du massif de sol, cisaillement: cf § 8).
massif pour un essai d'ancrage complet (L = 0,5 m;
D = 0,6 D1 et B = 0,3 m), nous avons entrepris de déter-
miner la ligne de rupture dans le massif de sol. Le 1
lTIême essai a donc été répété deux fois en disposant
préalablement des colonnes de sable coloré à l'intérieur Comparaison
du D1assif; à la suite de sa rupture, par découpage du
massif de sol dans le plan des colonnes de sable coloré, entre les valeurs calculées
nous avons pu observer le déplacement des colonnes
et leur fractionnement et ainsi déterminer, pour cette
à partir des trois méthodes
configuration, une ligne de rupture principale et
l'amorce d'une seconde ligne de rupture (Fig. 8).
et les valeurs mesurées
Les trois méthodes de calcul proposent le dimen-
sionnement d'une tranchée d'ancrage avec un sol pul-
vérulent et n'abordent pas le cas des sols cohérents. La
comparaison entre les résultats expérimentaux et les
Influence de la nature du sol valeurs calculées à l'aide des trois méthodes réperto-
riées est donc limitée au cas du sol sableux.
Cette étude a été réalisée avec le géotextile GTX R sur
quatre types d'essais d'extraction conduits pour les
deux sols (sable et limon) :
-des essais de recouvrement seul sur une longueur L (=
l,lm) avec traction horizontale du géosynthétique; Recouvrement simple
- des essais de recouvrement seul sur une longueur L La comparaison entre les valeurs mesurées et cal-
avec traction le long de la pente pour une inclinaison ~ culées dans le cas d'un recouvrement simple et pour
= 20°;
différents angles ~ (Fig. 10) permet de faire les obser-
- des essais de fichage vertical pour une longueur L et vations suivantes (pour une longueur d'ancrage de
une profondeur d'ancrage D (= 0,5 m) avec traction sur l,SOm) :
le géosynthétique le long de la pente;
- des essais d'ancrage complet pour une longueur
d'ancrage L, une profondeur D et une largeur de fond
de tranchée B (= 0,5 m) avec traction sur le géosynthé-
tique le long de la pente.
Les résultats obtenus sont donnés à la figure 9; ~ 25
Z
celle-ci illustre que la capacité d'ancrage dans le limon
est environ deux fois plus grande que dans le sable
e )(
20
20
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2 e trimestre 2003
J'
20
18
.•0'., 16
, ......
••••••. -0 •• , •••• , •• 0 14
.. ~ ",." ~
•••• < 0'" c .•.. ···~···_o. ...---.~. T Z12
exp
e, 10
.... J'MI 1- 8
..........._.._--,.....---,---r-................ 6
o 369 12 15 18 21 24 27 30 4
2
o
D=Om D=O,3m D=O,6m
Comparaison entre les valeurs calculées et
mesurées dans le cas du recouvrement
simple. Comparaison entre les valeurs mesurées et
Graph comparing the experimental and calculées par les trois méthodes de calcul
calculated values for simple run-out. dans le cas du recouvrement et du fichage
vertical.
Graph comparing the experimental and
calculated values with the three design
-les valeurs calculées avec la méthode M 2 divergent methods for the cases of vertical embedding
des valeurs expérimentales et la différence augmente and simple run-out.
avec ~;
-les valeurs calculées avec les méthodes M 1 et M 3 enca-
drent les valeurs expérimentales, la méthode M 1 ayant alors qu'il est faible dans le cas du recouvrement siD1ple
tendance à sous-estimer les valeurs expérimentales pour cette inclinaison de talus (~ == 22°). La méthode M 1
alors que la méthode M 3 les surestime; l'écart par rap- sous-estime les valeurs mesurées lorsque la profondeur
de fichage augmente (D == 0,6 m); ceci peut s'expliquer
port aux mesures croît avec ~.
par le fait que cette méthode prend en compte unique-
Aucune des trois méthodes de calcul ne permet ment le frottement sur les parties linéaires et utilise
d'expliquer complètement les résultats expérimentaux. l'hypothèse des terres au repos pour calculer la
contrainte horizontale appliquée sur le géosynthétique
dans le fichage (sur la partie verticale D).
Fichage vertical
Les valeurs calculées avec les trois méthodes de cal-
cul sont confrontées aux valeurs mesurées pour diffé-
Ancrage complet
rentes configurations de fichage vertical (Tableau IV et Ce cas n'est pas traité pas la rnéthode M 2 . Les
Fig. 11). valeurs calculées avec les méthodes de calcul M 1 et M3
Les valeurs obtenues avec les méthodes de calcul sont comparées aux valeurs D1esurées pour différentes
M 2 et M3 sont nettement supérieures aux valeurs mesu- configurations de l'ancrage complet (Tableau V). La
rées et l'écart augmente avec les dimensions du fichage méthode de calcul M 1 donne des résultats proches des
2,18
3,83
7,57
7,71
21
*Rupture de massif.
8,30
9,58
15,84
valeurs expérimentales. Comme pour les configura- nature du sol permettent d'obtenir d'une part les
tions d'ancrage précédentes, la méthode de calcul M 3 courbes:
donne des valeurs très supérieures aux valeurs mesu- -des efforts en tête T en fonction du déplacement u du
rées. câble du treuil;
D'une manière générale, la comparaison entre les - des déplacements u' de certains points du géosynthé-
résultats expérimentaux et ceux calculés par la tique en fonction de u;
méthode M 1 (Fig. 12) montre que la capacité d'ancrage
et d'autre part les déplacements à la rupture dans le
de la tranchée seule (D + B) représente entre 75 et 90 0/0
massif de sol situé entre le parement du talus et le
de la capacité totale à la rupture du dispositif en tête de
fichage du géosynthétique (colonnes de sable coloré).
talus (L + D + B). On en déduit que les paramètres géo-
métriques prépondérants à prendre en compte lors du Nous détaillons les résultats obtenus pour l'essai
dimensionnement de telles tranchées sont la profon- d'ancrage complet avec les deux sols (sable et limon 1).
deur de la tranchée D et la largeur du fond de la tran- La capacité d'ancrage à la rupture de la tranchée est
chée B ; la longueur L est essentiellement à prendre en différente selon le sol utilisé:
compte pour assurer la stabilité du massif de sol situé
Tsable < Tlimon1·
entre la tranchée et la pente.
D'après des différentes mesures des déplacements
des points du géosynthétique connectés (Figs. 13 et 15)
18
au dispositif de mesure, nous pouvons essayer de dis-
16 tinguer les deux mécanismes suivants:
14 56o/et
~ "" -mobilisation du frottement le long du géosynthétique
12 dans la tranchée;
D,6m
Z10 680/0 -réaction du massif de sol à la force appliquée au géo-
~
......... 8 synthétique.
t-
e
4
2 120/0 ~'*' 14CY(lt
o exp M1 Ancrage complet dans le sable
D=O,3m D:O,6m
La courbe (Fig. 13) représentant le déplacement du
Comparaison entre les valeurs mesurées capteur C4 en fonction du déplacement u du câble du
et calculées par la méthode de calcul M 1 treuil est constituée de trois segments de pentes diffé-
dans le cas d'un ancrage complet.
Graph comparing the experimental and
rentes entre le début de l'essai et l'instant où la force
calculated values with the design method M1 maximum a été mobilisée; l'analyse de cette courbe
for the case of complete anchorage trench. met en évidence les différentes étapes de mobilisation
du frottement le long du géosynthétique dans la tran-
chée:
- étape 1 - 0 mm < u < 30 mm : pas de déplacement du
:1 point C 4 , cette étape correspond à la mobilisation du
frottement sur la longueur L;
Observation -étape 2 - 30 mm < u < 120 mm: mise en mouvement
des mécanismes d'ancrage du point C4, la pente de ce segment est faible, le point
C6 reste immobile; cette étape correspond au début du
Les mesures complémentaires (Fig. 5) effectuées au tassement de l'angle de la tranchée et à la mise en
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2e trimestre 2003
40 C4 200 200
l/ C4 40 Ca
"}
30 150 30 C 150
-.J ..~ 4 Ê
Ê .-.
Z20 E .......-/ 100.§.
100 ~ 20
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--"':~----r----"--r<=-.:;.J.-..~-~-- .........--+ 0 ~--<::::':"-r------F~~~-~~-r--........,-----t. 0
o 50 100 150 200 250 300 350 o0 50 100 150 200 250 300 350
u(mm) u(mm)
Briançon L. - Stabilité sur pentes des dis- Geomembranes/ vol. 15, 1997, p. 403- report 4th: Geomembrane/ Identification
positifs géosynthétiques. Caractérisation 417. and performance testing, Rollin A. and
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concerns and performance of geomem- membrane anchorage behavior using European Committee for standardisa-
N° 103
2e trimestre 2003
Caractérisation
hydrodynamique de mâchefers
d'incinération
d'ordures ménagères
D.FRANÇOI5 utilisés en construction routière
J. AUZIZEAU
,~ Les propriétés hydrodynamiques des mâchefers
G. RAIMBAULT E d'incinération d'ordures ménagères (MIOM), bien que
Laboratoire central ~ déterminantes pour la durabilité mécanique et
des ponts et chaussées ,~ l'écocompatibilité des ouvrages routiers construits avec
Centre de Nantes ~ ces matériaux, sont encore mal connues. Une étude de
caractérisation de deux matériaux représentatifs des
Route de Bouaye
deux principaux modes de production des MIOM en
BP 4129 France a été conduite. La perméabilité des MIOM,
44321 Bouguenais Cedex compactés selon les spécifications utilisées en
denis.francois@lcpc.fr construction routière, a été mesurée et comparée aux
jocelyne.auzizeau@lcpc.fr rares références existantes. Les courbes de rétention
georges.raimbatl1t@lcpc.fr d'eau de ces MIOM (s = f(w) ; s = f(S)), à deux âges, ont été
établies. Elles s'apparentent à celle d'un limon. Les
MIOM semblent présenter des propriétés drainantes et
des teneurs en eau volumiques d'au moins 20 % dans les
conditions hydriques courantes des ouvrages routiers
des régions tempérées.
Hydrodynamic characterization
of municipal solid waste incinerator
bottom ashes used in road construction
Municipal solid waste incinerator (MSWl) bottom ash
hydrodynamic properties/ although decisive for the durability
and the eco-compatibility of road structures built wioth this
materiaL are still badly known. A characterisation study of two
materials representative of the two main MSWI bottom ash
production processes in France has been carried out. The
permeability of MSWI bottom ash/ compacted according to the
specifications used in road construction/ has been measured and
compared to the scarce existing references. Water retention
curves of these materials (s = f(w) ; s = f(S)t at two ages/ have
been plot. They resemble to a silt one. MSWI bottom ash seen1S
to have draining properties and volume water contents of at
least 20 % under common hydrie conditions of roat structures in
temperate regions.
NDLE: Les discussions sur Key words : hydraulic conductivity/ road construction/ density/
cet article sont acceptées municipal solid waste incinerator bottom ash/ hydrodynamic
jusqu/au 1er novembre 2003 properties/ silt sand/ water retention/ suction/ water content.
25
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e tri mestre 2003
'1
Introduction Matériel et méthodes
La politique de préservation des ressources natu-
relles conduit à optimiser le recours aux matériaux de
substitution dans le domaine de la construction routière
(terrassements, chaussées). Optimiser signifie utiliser le Origine des matériaux
plus largement possible ces matériaux tout en restant
garant de la durabilité des ouvrages et de leur éco- Le type de bassin de production des ordures ména-
compatibilité, tant à long terme qu'à court terme. gères et leur mode d'incinération - les deux étant liés
par la capacité d'incinération des fours d'incinération
Or, les revêtements routiers ne sont pas imper- (en tonne/heure) - sont susceptibles d'avoir une
méables aux eaux de pluie (Van Ganse, 1978; Raimbault influence sur les propriétés des mâchefers (Chandler
et Silvestre, 1990) et l'état hydrique des matériaux de sub- et al., 1997). Aussi, deux matériaux, représentatifs des
stitution placés dans les ouvrages routiers, les vitesses
deux principaux types de production' en France, ont-
de percolation à travers les couches des chaussées, vont
déterminer les réactions chimiques et les flux de matière ils été choisis pour cette étude. Ces deux mâchefers
à partir de ces couches. Il est donc important de sont valorisables selon les critères définis par la circu-
connaître les caractéristiques hydrodynamiques de ces laire 94-IV-1 (classe V) et couramment utilisés en
matériaux pour apprécier la signification des paramètres construction routière. Les caractéristiques réglemen-
des essais de caractérisation environnementale (lixivia- taires de ces deux matériaux sont présentées dans le
tion, percolation), voire pour en développer de nouveaux, tableau 1.
plus représentatifs des conditions réelles. Ces facteurs Le premier matériau est représentatif des mâchefers
peuvent aussi avoir des effets sur les propriétés méca- produits en zone urbaine dans des fours à grilles de
niques des matériaux et sur leur évolution. Enfin, leur grande capacité. Il provient de l'usine d'incinération
meilleure connaissance permet d'envisager la modélisa- d'Ivry-sur-Seine (2 fours de 50 tonnes/heure) en région
tion mathématique du comportement des matériaux de parisienne. Les mâchefers étudiés ont été produits en
substitution en scénarios d'utilisation routière. février 1998.
Les mâchefers d'incinération d'ordures ménagères Le second matériau est représentatif des mâchefers
(MIOM) sont des matériaux particulièrement réactifs produits en zone rurale, dans des fours oscillants, de
(Bodénan et al., 2001) dont les teneurs en métaux lourds plus faible capacité. Il provient de l'usine d'incinération
(cadmium, cuivre, plomb, zinc, chrome, mercure, nickel) des Rosiers d'Égletons (1 four de 5,3 tonnes/heure)
peuvent être importantes (Chandler et al., 1997) et pour par- dans le département de la Corrèze. Les mâchefers étu-
tie solubilisées par les eaux d'infiltration dans les chaussées. diés ont été produits en janvier 1998.
Aussi, bien que la circulaire 94-N-1 du ministère de l'Envi-
ronnement recommande d'une façon générale de limiter La maturation des stocks de mâchefers modifiant
les contacts des MIOM avec les eaux, la connaissance des leurs propriétés physico-chimiques, pour en apprécier
propriétés hydrodynamiques de ces matériaux n'en est pas les effets éventuels sur les propriétés hydrodyna-
moins nécessaire. Or peu de données ont été rassemblées à miques, les deux matériaux choisis ont fait l'objet d'une
ce jour sur ce sujet (Hartlen et Elander, 1986; Geoteknisk première caractérisation hydrodynamique après
Institut, 1992 ; Radenberg, 1994). L'objectif de ce travail a quelques mois, puis d'une seconde après un an et demi
été de mesurer la perméabilité de MIOM compactés en de vieillissement en tas à l'extérieur. Pour chaque phase
éprouvette selon des références utilisées en construction de caractérisation les mâchefers ont été compactés
routière, et d'établir la relation succion-teneur en eau dans des conditions analogues à celles pratiquées en
(dite courbe de rétention d'eau) de ces matériaux. application routière.
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N° 103
2e tri mestre 2003
(non publiée), l'absence d'évolution granulométrique
des mâchefers en cours de maturation a été observée.
Préparation des échantillons pour essais Dans le cadre de cette étude l'analyse granulométrique
des MIOM n'a donc pas été répétée sur les matériaux
Les distributions granulométriques des deux MIOM vieillis.
étudiés sont présentées dans la figure 1. Les courbes Afin de mettre les mâchefers dans des conditions de
sont très proches. L'analyse granulométrique a été réa- compacité analogues à celles pouvant être recherchées
lisée selon le protocole de la norme NF P 18-560 à sur chantier routier, ceux-ci ont été compactés suivant
l'exception de la phase de lavage. Contrairement aux la norme NF P 98-230-1, au compacteur d'éprouvettes
granulats naturels, les mâchefers sont un mélange de par vibrocompression (VCEC - matériel LPC) dans des
composés variés (verre, métaux, imbrûlés, cendres), moules cylindriques en PVC (<1> = 16 cm ; h = 32 cm) fen-
pour partie indépendants, mais aussi pour une part dus sur toute leur hauteur. La vibrocompression a été
importante, faiblement liés entre eux. Le lavage des préférée à la compression statique, plus énergique,
MIOM jusqu'à l'obtention d'eaux de lavage claires mais susceptible de modifier fortement la granulomé-
(comme préconisé par la norme) conduit à la désagré- trie des échantillons. L'hypothèse a été faite de consi-
gation du matériau qui n'est plus alors représentatif de dérer ces mâchefers comme utilisés en couche de fon-
celui qui est mis en œuvre. Pour cette raison il a été dation. Les conditions de confection suivantes ont donc
décidé de ne pas laver les MIOM avant tamisage. Les été choisies pour les éprouvettes:
classes cc graviers )) (fraction 2-20 mm), et cc sables gros-
- teneur en eau pondérale: 2 % inférieure à la teneur
siers )) (0,2-2 mm) (Soltner, 1981), sont semblables
en eau à l'optimum Proctor modifié (norme NF P 94-
quantitativement (Tableau Il). Pour le matériau d'Ivry, 078);
la classe cc graviers )) représente 67 % de la masse, la
classe cc sables grossiers )) représente 21,7 0/0, et l'infé- - compactage de qualité q2 : 97 % de la densité à l'opti-
rieur à 200 ~m, 9,3 0/0. Pour le matériau d'Égletons, les mum Proctor modifié (OPM).
valeurs sont respectivement 640/0, 25,8 % et 8,2 0/0. Tou- Les références de compactage ont été déterminées
tefois, les courbes montrent une répartition sensible- en mai 1998. Elles sont présentées dans le tableau III.
ment différente des éléments à l'intérieur de la classe La première série d'éprouvettes a été préparée en mai
des cc graviers )), ces derniers apparaissant plus fins 1998 (matériau jeune), la seconde en août 1999 (maté-
dans les MIOM des Rosiers d'Égletons que dans ceux riau mûri). L'homogénéité du compactage des éprou-
d'Ivry-sur-Seine. Dans le cadre d'une étude antérieure vettes a été vérifiée par auscultation de leur masse volu-
100
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80
70
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Références de compactage (OPM) des
deux mâchefers. Charge
Compaction references (MPO) of both bottom hydraulique
ashes. constante
Moule
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Pour les mâchefers des Rosiers d/Égletons/ ces deux
Manomètre phases ont eu lieu respectivement en octobre 1998 et
juillet 1999.
Réservoir
d~eau
EchantiUon Perméabilité
La perméabilité des éprouvettes de MIOM étudiés
Céramique va de 1/8.10- 5 à 3/3.10- 4 mis (Tableau V). Il n/y a pas de
différence notoire entre les perméabilités des deux
Joint mâchefers. La perméabilité ne semble pas non plus
varier significativement avec le mûrissement des maté-
riaux. La perméabilité du mâchefer d/Ivry mûri est légè-
rement plus forte. A robservation des éprouvettes/ il
Principe de l'essai en chambre de pression. semblerait que la teneur en morceaux de verre gros-
Pressure chamber test principle.
siers de ce matériau/ plus importante que dans réprou-
vette de matériau jeunet puisse en être la cause.
Dans la chambre de pression/ les tranches revenues à Perméabilité des mâchefers.
température ambiante/ sont placées sur une plaque en Bottom ash permeability.
céramique perméable à r eau et imperméable à r air (pres-
sion d/entrée d/air == 300 kPa). On applique une pression
d/air dans la chambre/ avec laquelle la teneur en eau du
Ivry jeune 6,0.10- 5 0,16.10- 5
matériau se met à réquilibre. La pression maximale appli-
quée/ de 100 kPa/ couvre largement la gamme des pres- Ivry mûri 3,3.10- 4 0,14.10- 4
sions généralement rencontrées dans les corps de chaus- Égletons jeune 8,0.10- 5 0,66.10- 5
sées en région tempérée (Silvestre/ 1986; Raimbault 1986).
Pour une pression donnée/ lorsque la teneur en eau atteint Égletons mûri 1,8.10- 5 0,09.10- 5
un équilibre/ la pression imposée est égale en valeur abso-
lue à la succion du matériau à cette teneur en eau. Pour Ces résultats peuvent être comparés à différentes
chaque pression appliquée dans la chambre/ la teneur en références. D/après ces valeurs/ les mâchefers s/appa-
eau d/équilibre atteinte par r échantillon est mesurée. rentent à des sols cc assez perméables )) à cc perméables ))
A partir d/échantillons saturés/ on réalise dans un pre- (Tableau VI) et à des sols naturels sableux (Tableau VII).
mier temps la courbe de drainage en appliquant des Les résultats obtenus sont comparables à ceux don-
pressions croissantes/ et dans un second temps la courbe nés par rinstitut géotechnique danois (Geoteknisk Ins-
d/humidification avec des pressions décroissantes. titut 1992) car une différence d/un seul ordre de gran-
A chaque palier de pression/ le temps d/atteinte de deur peut être considérée comme minime lorsqu/on
r équilibre est de deux jours et demi. La chambre peut prend en compte le faible taux de compactage (900/0)
recevoir deux échantillons à la fois. Chaque point des
courbes (une douzaine par courbe) est la moyenne de Échelles de perméabilité
quatre mesures. (d'après Soltner, 1981).
Les courbes de rétention mesurées seront comparées Permeability scale (from Soltner, 1981).
à celles de matériaux naturels (sable et limon).
Imperméables 10- 7
Peu perméables 10- 6
Résultats et interprétation Assez perméables 10- 5
Pour les mâchefers d/Ivry-sur-Seine/ la première Perméables 10- 4
phase d/ essai a été conduite en août 1998 (matériau
Très perméables 10- 3
jeunet la seconde en septembre 1999 (matériau mûri).
Références de perméabilité.
Permeability references.
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des échantillons étudiés. Un léger accroissement du teneur en eau (W OPM = 12,5 0/0) se situe en limite infé-
taux de compactage peut avoir un effet important sur la rieure des teneurs en eau mesurées sur ce matériau
perméabilité (Croney et al., 1958). durant les essais de succion, c'est-à-dire qu'elle corres-
pond aux fortes forces de succion (Fig. 4). Au contraire,
pour le matériau des Rosiers d'Égletons, cette teneur
en eau (W OPM = 19,00/0) est proche du centre de la
gamme des teneurs en eau mesurées sur ce matériau
Courbes de rétention d'eau (15 à 26 0/0) et correspond à des tensions inférieures à
15 kPa (150 cm d'eau).
Ce genre de considérations peut avoir des consé-
quences sur le comportement à court terme des MIOM
Rétention en fonction de la teneur en eau pondérale (w) après leur mise en œuvre. Les matériaux sont généra-
Les courbes de rétention (D et H) des deux mâche- lement mis en œuvre à une teneur en eau de W OPM
fers, aux deux âges Ueune - J ; mûri - M), ainsi que les - 2 0/0. S'il est mis en œuvre à une teneur en eau corres-
courbes de rétention d'un sable et d'un limon sont pré- pondant à une tension interstitielle élevée par rapport à
sentées dans la figure 4. son environnement proche (sol sous-jacent, autres
couches de la chaussée), le matériau va avoir tendance
Ces courbes montrent que les propriétés des MIOM à équilibrer son potentiel avec son environnement,
se rapprochent plus de celles du limon que du sable, donc à augmenter sa teneur en eau. Ceci se fera à par-
en particulier dans le cas du matériau des Rosiers tir des couches environnantes ou grâce à l'infiltration
d'Égletons. à l'occasion des premiers événements pluvieux. Or les
Le tracé révèle aussi que pour les deux mâchefers, propriétés de portance des MIOM sont très sensibles
avec le vieillissement, les courbes de rétention se dépla- aux variations de teneur en eau (François et al., 2000).
cent vers des teneurs en eau plus fortes. Pour une suc- Après leur mise en œuvre, la portance des couches de
cion donnée, la teneur en eau est ainsi de 1 à 3 % supé- MIOM pourrait donc varier à court terme sous l'effet
rieure pour le matériau mûri dans la zone des fortes de ce rééquilibrage des potentiels hydriques.
succions (partie verticale des courbes), mais la diffé-
rence est bien supérieure aux faibles succions,
lorsqu'on se trouve plus proche de la saturation. Avec
le vieillissement, les· MIOM semblent retenir davantage
l'eau. Les MIOM ne subissant pas d'évolution granulo-
Rétention en fonction de la teneur en eau volumique (8)
métrique entre deux âges (cf. préparation des échan- La densité sèche des deux mâchefers étant connue
tillons), ceci peut donc être imputable à leur évolution (Tableau IV), les courbes de rétention en fonction de la
physico-chimique. Par contre, la forme générale des teneur en eau volumique peuvent en être déduites (Fig.
courbes de succion ne semble pas évoluer. 5).
Le matériau d'Ivry-sur-Seine, qui est le plus dense La représentation des courbes de rétention en fonc-
des deux et celui qui, à pression donnée, retient le tion la teneur en eau volumique confirme le rapproche-
moins d'eau, est celui qui présente la plus faible évolu- ment entre les MIOM et le limon. Elle aboutit à une
tion entre les deux âges. moins grande dispersion des caractéristiques que
Le glissement de la courbe des mâchefers des l'expression précédente. Le rapprochement des courbes
Rosiers d'Égletons mûris est tel, que le matériau appa- est tel que les caractéristiques des matériaux cc Ivry
raît plus hydrophile que le limon. mûri )) et cc Égletons jeune )) sont similaires.
La teneur en eau à l'optimum Proctor Modifié (W OPM ) Pour les deux matériaux on observe encore le dépla-
a été mesurée pour confectionner les éprouvettes cement des courbes avec le vieillissement (1 à 3 % aux
(Tableau III). Pour le matériau d'Ivry-sur-Seine, cette fortes succions, et plus aux pressions faibles).
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Teneur en eau massique - W (0/0)
Courbes de rétention selon la teneur en eau pondérale.
Retention curves as a function of the weight water content.
30
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100 .
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0
0 10 20 30 40 50
Teneur en eau volumique • e (Ok)
Courbes de rétention selon la teneur en eau volumique.
Retention curves as a function of the volume water content.
La densité sèche réelle de chaque matériau est On voit que les teneurs en eau des MIOM peuvent
connue (Tableau IV), ainsi que la teneyr en eau à l'OPM atteindre le tiers de leur volume. Les teneurs en eau
des matériaux cc Ivry jeune )) et cc Egletons jeune )) cc difficilement échangeable )) des MIOM sont d'envi-
(Tableau III). Si l'on calcule la teneur en eau volumique ron 20 0/0.
de ces derniers matériaux à l'OPM (8 0PM )' on peut La teneur en eau résiduelle dépend de la granulo-
observer sa situation par rapport à leurs courbes de métrie des matériaux (Hillel, 1988) et de leur densité
succion. Pour (c Ivry jeune )), 80PM vaut 20 % (12,5 % x sèche. Plus un matériau est fin, plus sa teneur en eau
1,61), ce qui correspond aux fortes sl}ccions et faibles résiduelle sera grande. Plus un matériau sera com-
teneurs en eau du matériau. Pour cc Egletons jeune )), pacté, plus sa teneur en eau résiduelle sera grande
8 vaut 27,5 % (19,0 % x 1,45), ce qui correspond à (Croney et al., 1958). Les deux mâchefers étudiés
d~~Mpressions plus faibles, inférieures à 15 kPa. avaient des distributions granulométriques proches
La teneur en eau résiduelle (notée 8R) est la teneur (Fig. 1). Leurs taux de compactage étaient voisins.
en eau du matériau en dessous de laquelle il est diffi-
Grâce aux mesures de teneur en eau pondérale et
cile de descendre. On peut l'évaluer en soumettant le
de masse volumique sèche, réalisées en place sur des
matériau à une pression de 1 600 kPa (pF == 4,2) (Solt-
MIOM extraits de deux chaussées (François et al., 2000),
ner, 1981 ; Badjer, 2000). Le dispositif utilisé dans cette
leurs teneurs en eau volumiques réelles ont pu être esti-
étude ne permettait pas d'atteindre une telle pression.
mées. Elles vont de 14,8 à 20,4 % dans un cas, et de 24,2
Toutefois, la forte pente des courbes de succion, dès
à 27,6 % dans l'autre. Dans le premier cas le MIOM
30 kPa (300 cm d'eau), permet d'exprimer une valeur
avait un taux de compactage de 90 0/0, dans le second
tendant vers la teneur en eau résiduelle, que l'on appel-
de 97 0/0. Le premier matériau s'apparentait à une grave
lera teneur en eau cc difficilement échangeable )) (8 100),
non traitée 0/31,5 mm, le second à une GNT 0/20 mm
Cette approximation se justifie aussi par le fait que hors
(AFNOR, 1995). Selon les caractéristiques des MIOM et
conditions extrêmes (périodes de gel, périodes très
leurs conditions de mise en œuvre, leurs teneurs en eau
sèches ou zones arides), les forces de succion dans un
pourront donc fortement varier.
corps de chaussée restent dans la gamme de pression
appliquée ici (Silvestre, 1986 ; RaÎll1bault, 1986). Les
teneurs en eau de saturation (8 s ) des différents maté-
riaux ainsi que 8100 sont présentées dans le tableau VIII.
Conclusion
Cette étude visait à compléter le peu d'éléments
rassemblés jusqu'à ce jour sur les caractéristiques
Teneur en eau résiduelle et en eau « diffi-
cilement échangeable » des mâchefers. hydrodynamiques des mâchefers, ces dernières étant
Bottom ash residual water content and cc hard to déterminantes pour la durabilité physique et l'éco-
exchange )) water content. compatibilité des ouvrages routiers.
Les coefficients de perméabilité mesurés sur les
mâchefers étudiés correspondent à un sol naturel
Ivry jeùne 30 20 sableux. Les MIOM, compactés selon des références
rencontrées dans des cas réels, apparaissent comme
Ivry mûri 29 21 cc assez perméables )) à cc perméables )). Par ailleurs, ces
Égletons jeune
Ég letons-mûri
33
37
21
24
mêmes matériaux présentent des courbes de rétention
d'eau s'approchant beaucoup plus de celle d'un limon
que de celle d'un sable. La courbe de rétention des
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mâchefers des Rosiers d'Égletons est la plus proche de Cette évolution, notamment minéralogique, pou-
celle du limon. Ils diffèrent des MIOM d'Ivry par une vant se poursuivre à l'intérieur même des structures
fraction cc graviers )) moins grossière. La compréhen- routières, et les particules les plus fines pouvant être
sion de l'influence de la granulométrie des mâchefers amenées à migrer sous l'effet de l'infiltration, une évo-
sur leurs propriétés hydrodynamiques est à approfon- lution des propriétés hydrodynamiques des MIOM en
dir, de même que celle de leur taux de compactage. Des place pourrait s'ensuivre. Afin de mieux représenter les
essais identiques, sur des MIOM compactés à des taux conditions de succion susceptibles d'apparaître dans
supérieurs, plus proches de l'optimum Proctor, seraient les ouvrages routiers en région tempérée, des études
nécessaires. complémentaires seraient nécessaires, plus spécifique-
Néanmoins, les mâchefers compactés apparaissent ment dans une gan1me de succion inférieure à 10 kPa
comme des matériaux aux propriétés drainantes au tra- (1 m d'eau). Pour l'appréciation des effets du gel, des
vers desquels l'eau peut s'infiltrer assez facilement. En succions de plusieurs mètres seraient nécessaires. Par
outre, il semblerait qu'aux faibles tensions interstitielles rapport à ce risque particulier, les bonnes propriétés
généralement rencontrées dans les corps de chaussées drainantes des MIOM apparaissent intéressantes.
(moins de 10 kPa de succion), ils puissent renfermer
une relativement forte teneur en eau (plus de 20 % en
volume).
Les deux mâchefers étudiés montrent une tendance
à retenir davantage d'eau en vieillissant. Le glissement
de la courbe de rétention d'eau vers des teneurs en eau Cette étude a été cofinancée par la Commission européenne
plus forte a été observé pour les deux matériaux. (DG VIl) dans le cadre du projet Alt-Mat (programme Transport).
L'explication de ce phénomène est peut-être à recher- Les auteurs remercient le conseil général de la Corrèze et la société
cher dans l'évolution physico-chimique des mâchefers. Ypréma pour leur collaboration.
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32
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2e trimestre 2003
,
Etude des phénomènes
de transfert de métaux lourds
dans une smectite
Les argiles gonflantes compactées utilisées comme
barrières ouvragées de fond de stockages de déchets
urbains, doivent prouver leur efficacité en terme de
rétention de polluants tout en respectant la
C. POTHIER réglementation en matière de perméabilité. Afin
A. JULLIEN d'aborder les problèmes inhérents à la prédiction du
comportement à long terme de ces matériaux, deux axes
C. PROUST d'étude ont été abordés successivement: i) la réalisation
P. LECOMTE d'essais d'infiltration à pression constante de solutions
polluantes modèles (nitrate de cuivre) permettant de
E5EM, Université d'Orléans déterminer les paramètres du transfert de masse en
45072 Orléans Cedex 2 conditions polluées, ii) l'utilisation d'un code de calcul du
Chantal.Proust@ transfert de masse en phase liquide pour prédire les
univ-orleans. fr durées de saturation d'un massif pollué avec différentes
concentrations en nitrates de cuivre. Les résultats
expérimentaux, obtenus pour l'argile Fo-Ca, ont montré
qu'un échange cationique s'était produit engendrant des
modifications tant au niveau de la microstructure de
l'argile, du volume de la phase poreuse que de son
comportement macroscopique, mais que même pour de
fortes concentrations en polluant, l'aptitude au
gonflement de la Fo-Ca n'était pas totalement inhibée.
Les simulations de la réponse à l'infiltration dans un
massif d'argile gonflante en conditions polluées ont mis
en évidence la très forte diminution du temps de
saturation en surface du stockage.
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1 métalliques polluants tels que Pb2+ (Delattre-louvel et al.,
1993), Nï2+ (Singhal et al., 1976), Zn 2+ (BrandI, 1992) ont
Introduction montré la capacité des montmorillonites calciques ou
sodiques à la rétention des polluants. D'ailleurs, il est
Les sols argileux sont COUramlTIent utilisés comme admis dans la littérature que le gonflement, la perméa-
barrières passives ou actives dans les centres d'enfouis- bilité et également la compressibilité des argiles sont
sement techniques recevant les déchets ménagers, liés aux caractéristiques microscopiques telles que:
dans le but de ralentir et de limiter la diffusion de pol- -la composition minéralogique de l'argile;
luants issus de la dégradation des déchets vers le sol et
les nappes phréatiques. La loi française impose actuel- -la valence des cations et la capacité d'échange catio-
lement de respecter une valeur maximale de perméa- nique (Bradbury et Baeyens, 1999) ;
bilité de 10- 9 mis en fond de décharge. La perméabilité - la structure à l'échelle atomique (orientation des
est donc un paramètre conservatif permettant l'évalua- feuillets de l'argile) ;
tion de la sûreté d'un stockage de surface. En fond - la texture à l'échelle des agrégats de par la distribu-
d'alvéole de stockage, le sol est compacté in situ par tion des pores et des grains (Benzel et Graf, 1984;
temps sec, afin d'optimiser la perméabilité en surface. Veniale,1985).
Par la suite, lors de l'exploitation du site, si aucun géo-
Dans ce contexte, ce travail avait pour objectif l'étude
textile n'est déposé en fond d'alvéole de stockage, ou si
des effets couplés chimio-hydromécaniques produits
ce géotextile est perforé, l'infiltration de l'eau ayant per-
lors de la percolation de solutions contenant des
colé au travers des déchets dans l'argile (lixiviats)
métaux au travers d'une argile gonflante et d'en éva-
devient possible. Ces lixiviats peuvent contenir diffé-
luer les conséquences sur ses propriétés de confine-
rents éléments dont certains sont toxiques, essentielle-
ment. Une étude expérimentale a d'abord été réalisée
ment les métaux lourds en solution, et indésirables
pour mettre en évidence les phénomènes et résultats
pour les nappes phréatiques. Dans le cas où l'argile
significatifs. Afin de contrôler les paramètres de l'étude
constituant la barrière ouvragée est gonflante, c'est-à-
et de mette en évidence les effets produits, la Fo-Ca une
dire d'un grand intérêt car faiblement perméable, un
smectite calcique fortement gonflante et des solutions
problème supplémentaire celui de son rôle en tant que
de nitrates de cuivre de concentration croissante, pré-
barrière active susceptible de piéger des polluants, est
parées en laboratoire, ont été utilisées. Deux techniques
à étudier. Durant la mise en place de la barrière, puis
d'injection de ces solutions dans l'argile ont été succes-
la mise en service du stockage, le degré de saturation
sivelllent mises au point, permettant d'injecter soit un
augmente au fur et à mesure de l'infiltration par le sol.
mélange air/solution soit la solution seule. Les compor-
Dans le cas de l'infiltration d'un lixiviat en provenance
tements chimio-hydromécanique de l'argile à court
de la surface, des réactions physico-chimiques pro-
terme et à moyen terme ont ensuite été analysés
duites lors du contact de l'argile sont susceptibles de
d'après les mesures à différentes échelles macrosco-
modifier les caractéristiques microstructurales de cette
pique et microscopique. Puis, les paramètres néces-
dernière et donc la cinétique de transfert de masse
saires à la simulation du transfert de masse en phase
macroscopique. De plus, dans le cas du stockage des
liquide au travers de l'argile ont été déterminés après
déchets municipaux, le ruissellement de l'eau de pluie,
l'injection des polluants. Une étude prédictive du trans-
associé à la dégradation exothermique des déchets et
fert de masse d'eau dans un massif de Fo-Ca polluée a
aux variations climatiques, peut conduire à l'infiltration
ensuite été effectuée pour mettre en évidence l'évolu-
d'une mixture biogaz-lixiviat, ce qui ajoute à la com-
tion des temps de transfert selon différentes concen-
plexité du problème à analyser.
trations de polluant.
Ainsi, les performances de confinement de la barrière
argileuse liées au ralentissement du transfert des pol-
luants doivent être garanties, quels que soient les effets ·1
couplés entre les transferts de masse et de chaleur, la chi-
mie de l'eau interstitielle et les contraintes appliquées. Étude expérimentale du transfert
Dans le cadre d'études de sites réalisées en France,
Pronost et Marejka (2000), et au Maroc, Hakkou et
de masse
al. (2000), font état de la composition de lixiviats
recueillis en fond de décharge, dans lesquels on
constate généralement que le pH varie entre 4,5 et 7
pour des lixiviats jeunes (de moins de cinq ans) et entre Dispositifs d'injection des solutions
7 et 9 pour des lixiviats stabilisés (de plus de 10 ans).
Les analyses réalisées sur ce type de lixiviat ont montré Les dispositifs développés pour réaliser ce type
la présence de différents ions métalliques tels que le d'essais comportent deux éléments principaux qui sont
zinc, le plomb ou encore le cuivre. Selon Mertens et al. la cellule œdométrique et le système d'injection (Fig. 1).
(1995), la concentration en cuivre dans certains lixiviats Le problème à résoudre concernant l'injection de solu-
de décharge de déchets ménagers et assimilés peut tions polluées se posait dans les termes suivants:
atteindre 5,4.10- 3 mollI. Bien que ce polluant ne soit pas - nécessité d'injecter des solutions chimiquement
le plus toxique, son aptitude à s'échanger avec les ions agressives dont la nature corrosive conduirait à la dété-
alcalins et alcalino-terreux contenus dans l'argile et sa rioration du corps de pompe dans le cas de l'adapta-
grande mobilité comparativement à d'autres métaux tion d'une technologie classique du commerce;
est bien connue (Wu et Li, 1998). - nécessité de contrôler avec une très grande précision
Par ailleurs, des études portant sur les mécanismes les volumes de solutions entrant dans l'argile ce que
de diffusion d'ions radioactifs (Kozaki et al., 1999), de n'aurait pas forcément permis une pompe comme celle
cations alcalins et alcalino-terreux (Shainberg et al., utilisée pour le contrôle de la mise en charge du piston
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2 e tnmestre 2003
D'où, des contraintes de conception qui ont été - œdomètre à seringue: système permettant d'effectuer
résolues en développant une technique d'injection spé- seulement l'injection de la solution au moyen d'un piston.
cifique.
D'où, ces deux systèmes permettent de simuler un
Les cellules œdométriques (Fig. 1, repère A) d'un ensemble de conditions d'infiltration représentatives des
diamètre de 40 mm, ont été usinées en matériau inoxy- conditions in situ de stockage de déchets municipaux. Le
dable, afin de pouvoir résister aux solutions chimique- réservoir et la seringue, usinés dans des matériaux trans-
ment agressives qui sont injectées dans les échantillons parents et chimiquement inertes, sont instrumentés de
d'argile et à l'argile elle-même lorsque sa capacité manière à permettre la mesure du volume injecté. Cette
d'échange est importante. Les cellules sont équipées en mesure est obtenue après lecture directe de la hauteur
partie basse d'un piston pour contrôler la contrainte de solution sur une échelle graduée sur la paroi exté-
mécanique axiale imposée à l'échantillon. Les déplace- rieure du réservoir ou après lecture sur un comparateur
ments du piston sont mesurés avec un comparateur. des déplacements du piston de la seringue.
Lorsque le piston est ramené en position basse la hau-
teur totale de la cellule est de 40 mm. Des disques Ainsi, quelle que soit la technique d'injection, la
poreux en bronze surmontés d'un anneau en téflon pression d'injection de la solution est contrôlée séparé-
sont disposés en haut et en bas de la cellule pour per- ment de la contrainte mécanique appliquée à l'échan-
mettre le passage du liquide et de l'air au travers de tillon d'argile ce qui donne une souplesse supplémen-
l'échantillon. taire dans l'utilisation de ces appareils.
La conception et la mise au point des deux systèmes
d'injection se sont déroulées en deux étapes conduisant
à la fabrication de deux prototypes. Un premier dispo-
sitif appelé cc œdomètre à réservoir )) (Fig. 1, repères A Matériau et solutions
et B) a été développé et la faisabilité des essais démon-
trée. Puis afin de mieux contrôler les conditions d'injec- Le matériau utilisé pour cette étude, l'argile gon-
tion, notamment les mesures du volume de solution flante Fo-Ca est une argile naturelle contenant 80 % de
entrant dans l'argile, un deuxième dispositif désigné smectite dont les compositions chimiques (exprimée en
par cc œdomètre à seringue )) (Fig. 1, repères A et C) a pourcentage en masse d'oxyde correspondante) et
été finalisé (Jullien et Lecomte, 2000). Ces deux sys- minéralogique sont reportées dans le tableau 1. Ses
tèmes d'injection sont respectivement caractérisés par: propriétés géotechniques, indiquent qu'il s'agit d'une
- œdomètre à réservoir: système permettant de réaliser argile très plastique, avec une lilnite de plasticité de
l'injection d'un mélange d'air et de solution puisque de 52 % et une limite de liquidité de 120 0/0. Les solutions
l'air comprimé à pression contrôlée est directement mis retenues pour l'infiltration sont: soit de l'eau pure (eau
en contact avec la solution; distillée), soit des solutions contenant différentes
P3
Pl
Schéma de principe des différents appareillages: CD argile; ® solution; ® piston de la cellule; 0 piston de
la seringue; ® gaz (P3, pression appliquée pour l'injection du mélange air-solution) ; ® gaz (P2, pression
appliquée pour l'injection de la solution) ; (}) gaz (P1, pression de gaz permettant d'appliquer une
contrainte mécanique) ; ® et ® mesure du volume de solution injectée.
Schematic view of the equipment: CD clay; ® solute; ® cell piston; 0 syringe piston; ® gas (P3, gas pressure for gas-
solute mixture injection); ® gas (PZ/ gas pressure for solute injection); (}) gas (Pt gas pressure for mechanical stress
control); ® & ® dial indicator measure of the injected solute volume.
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Composition chimique et composition analysé par spectrométrie d'absorption atomique pour
minéralogique de la Fo-Ca. déterminer l'évolution en fonction du temps des
Chemical and mineralogical composition concentrations de différents ions tels que Cu 2+(solution
of Fo-Ca.
injectée) et Ca 2+, Na+, Mg2+, Fe 2+, cations compensateurs
de l'argile considérée et qui par réactions d'échanges
physico-chimiques peuvent être relargués dans les per-
Si0 2 44f87 argile 86 f2 colats; ces échanges ayant lieu dans l'espace basal de
Al 20 3 22 f33 quartz 6 l'argile. De plus, comme les différents cations concer-
Fe 20 3 8f68 goéthite 6 nés ont des rayons ioniques et des charges différentes,
MnO <L.D. calcite t4
MgO 0,92 gypse Of4
on peut s'attendre à observer des modifications des
distances basales en fonction de la nature et de la quan-
CaO 2f69 tité d'ions échangés, d'où une étude des distances
basales par diffraction des rayons X.
Na 20 0,35 Smectite 80
K20 0,16 Kaolinite 20 Pour compléter cette approche, à la fin des essais,
Ti0 2 t27 les galettes saturées en solution cuivrique ont été
P20 S Of1 CEC* D1eq/100g 98 échantillonnées en camemberts puis dans l'épaisseur.
Pertes au feu 18f43 Surface spécifique** 715 Les échantillons obtenus ont permis de déterminer:
(éthylène glycol) m_/g
Total 99 f8 - la teneur en eau et la porosité totale en fin
~, Méthode de Mantin 1., 1969. C.R. Acad. Sc., Paris, 269, 815-818.
d'essai après un passage à l'étuve des échantillons à
H Méthode d'Eltantawy LM., Arnold P.M., 1974. J. Soil Sc., 25, 99-110. 105 oC pendant 24 heures;
- le degré de saturation de l'argile en fonction de la
concentrations de nitrate de cuivre CU(N0 3 )2' Les pression de succion en réalisant des isothermes
nitrates ont été préférés aux chlorures et aux carbo- d'adsorption, les échantillons ont ainsi été placés dans
nates car ils sont moins agressifs vis-à-vis des maté- des dessiccateurs étanches à humidité relative contrô-
riaux constituant le corps des cellules œdométriques. lée grâce à des solutions salines saturées (humidité
Des solutions de nitrate de cuivre ont été préparées aux relative comprise entre 11 % et 98 0/0) ;
différentes concentrations suivantes: 10- 3 10- 2, 3.10- 2 et
10- 1 mollI. Cette gamme de concentrations, couvre une - l'évolution de la distance basale de l'argile en fonc-
large plage de composition de lixiviats de décharge. tion de la concentration en cuivre par diffraction des
rayons X entre la face infiltrée et la face opposée, les
diagrammes de diffraction ont été enregistrés avec un
diffractomètre Siemens D500 doté d'une anticathode au
cuivre pour des échantillons préalablement passés à
Conditions et procédures d'essais l'étuve à 105 oC pendant 24 heures puis broyés.
La méthodologie d'essais à conduire a ensuite été
Pour être en accord avec les conditions de compac- mise au point. Une première série d'essais a été réalisée
tage in situ de la barrière argileuse, dans le cas d'un site avec l'œdomètre à réservoir pour les différentes solu-
technique d'enfouissement de déchets ménagers une f
tions préparées. Les résultats ont permis de constater
pression de consolidation de 0,5 MPa a été retenue qu'il fallait plusieurs dizaines d'heures de percolation
pour ces essais de laboratoire. Le poids volumique ini- pour obtenir un percolat et que même après 500 h, la
tial des galettes de Fo-Ca ainsi compactées est de concentration en cuivre dans le percolat restait en des-
12 kN/m 3 . Des essais préliminaires d'injection d'eau sous de la limite de détection de l'appareillage. Par la
pure à volume constant dans l'argile compactée à l'état suite, des essais courts (quelques dizaines d'heures)
de poudre puis entièrement déchargée ont mis en évi- avec le réservoir et la seringue, puis longs (plusieurs
dence la génération d'une pression de gonflement centaines d'heures) uniquement avec la seringue, ont
acceptable. Enfin l'épaisseur des galettes a été minimi- été réalisés pour aborder respectivement:
sée pour permettre de rendre les essais de percolation
des solutions aussi courts que possible. - l'étude des régimes transitoires et permanents obte-
nus par effet de couplage chimio-hydromécanique et
D'où, chaque essai a ensuite été réalisé avec une l'évaluation des paramètres de transfert de masse;
masse initiale de 10 g de poudre, d'une teneur en eau
initiale de 12,5 0/0. Le cornpactage a été effectué par - l'analyse phénoménologique des couplages pour
paliers de contrainte jusqu'à 0,5 MPa et suivi d'une interpréter le comportement macroscopique observé;
décharge totale. L'injection de la solution a ensuite été - les cinétiques de rétention des métaux polluants par
réalisée à pression constante de manière à se placer l'argile Fo-Ca.
dans des conditions de stockage conduisant à une infil-
tration une fois les déchets en place. L'infiltration a
donc été imposée avec une pression d'injection
constante en face supérieure de la galette d'argile de
0,3 MPa. La mesure du volume de solution entrant dans Étude des effets couplés
la galette d'argile a été effectuée régulièrement, de chimio-hydromécaniques
même que celle de la déformation axiale de l'argile au
cours de la saturation en solution puis tout au long des
essais. Parallèlell1ent, le percolat (solution ayant tra-
versé le matériau argileux), a été récupéré dans des Régimes transitoires et phénomènes observés
tubes inertes chimiquement. La fréquence d'échan-
tillonnage du percolat a été fixée à 48 heures, de façon à La figure 2a présente les mesures du volume de
obtenir une quantité suffisante de celui-ci à chaque pré- solution injectée, de la déformation due au gonflement
lèvement. Il a systématiquement été acidifié à l'acide en fonction du temps, pour un essai d'infiltration réa-
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5 5 80 rr==============::::::::::::::::::===:::;-----i 200
1...... Volun1e de solution înj ectée (ml) ...... Dé fotmation (<X» 1 ....- Volume de solution injectée (ml)
....... [Cu] dans le percolat i
-. 60 - I50!
!
~
-;
'0
~
(J
:5 40 100 l
~
ë= !if}
;
Q 50 oc
;> 20
-=
U
o ~-.-......~.......~~~-=-..;-~--r-~---:--.....-~, 0
5 10 15 20 200 400 600 800 1000 1200 1400
Temps (h) Temps (h)
Réponse de l'argile Fo-Ca à l'injection d'une solution à 10- 1 mollI de nitrate de cuivre en fonction du
temps avec l'œdomètre à seringue: a) évolution du volume injecté et de la déformation de gonflement
axiale; b) évolution du volume injecté et de la concentration en cuivre dans le lixiviat.
~n example of solute intake with [Cu 2 +] = 10- 1 mollI versus time using the syringe oedometer: a) evolution of solute
Intake and swelling axial strain; b) evolution of solute intake and copper concentration in leachate.
nitrate de cuivre de concentration 10- 1 mollI pendant une abscisse graduée en 28 (8, angle de diffraction). Les
environ 18 heures. Le gonflement microscopique des spectres obtenus après injection de polluant, présentent
premières couches d'argile nécessite une quantité suf- un décalage de la raie (001) vers les grands angles, par
fisante d'eau pour que le gonflement macroscopique rapport à la position de la raie de l'argile non polluée.
soit mesurable. Ceci se traduisant par un plateau, Ces résultats indiquent une diminution de la distance
durant les trois premières heures d'imbibition, sur la basale due au remplacement des ions compensateurs
courbe de déformation en fonction du temps (Fig. 2a). par des cations Cu 2+ totalement fixés dans la structure
La déformation et le débit d'injection sont constants au de l'argile. Un décalage plus important est observé pour
bout de quelques heures, dès la sortie du percolat en un échantillon prélevé en face supérieure, ce qui prouve
bas de l'échantillon. Les régimes permanents méca- l'existence d'un gradient de concentration en Cu 2+ entre
nique et hydraulique sont donc atteints très rapide- le haut et le bas de l'échantillon, gradient observé même
ment. Durant cet essai, le volume de percolat recueilli pour un essai d'injection du polluant de courte durée.
n'etait pas suffisant pour permettre une analyse chi- De plus, dès lors que le matériau se trouve en suspen-
mique. La figure 2b présente les résultats d'un essai sion, les échanges cationiques sont quasi instantanés
réalisé dans les mêmes conditions mais pour un temps alors qu'ils ralentissent très fortement pour un matériau
beaucoup plus long, d'environ 1 360 heures. La courbe compacté puisque sa surface d'échange avec la solution
de déformation en fonction du temps n'a pas été repor- diminue en fonction du compactage. Ainsi se crée un
tée sur cette figure, du fait qu'aucune variation de gradient de concentration entre la face injectée au
déformation n'est observée après 15 h d'injection. La contact avec la solution entrante et la face opposée. Il
courbe du volume injecté présente une rupture de est donc clair que si les régimes permanents hydrau-
pente, inhabituelle lors d'une infiltration à l'eau pure, lique et mécanique s'établissent après quelques heures,
après 450 heures de percolation, qui correspond à une le régime cc chimique )) s'établit longtemps après.
augmentation significative de la concentration en
cuivre dans le lixiviat. Ainsi, la perméabilité a une valeur Fo..Ca
de 2,1 10- 12 mis jusqu'à 450 heures, puis augmente et se
stabilise à 2,4 10- 12 mis entre 450 et 1 360 heures. Par
ailleurs, les analyses chimiques réalisées sur le perco-
lat obtenu après 48 h d'infiltration n'ont pas révélé la
présence de Cu 2+ ni même jusqu'à 400 heures d'injec-
tion du polluant. Ainsi au début de la percolation tout le
cuivre injecté est retenu par l'argile puis progressive-
ment une partie du cuivre se retrouve dans le percolat.
Bas
On peut estimer qu'il faut attendre plus de trois mois
pour que l'argile ne retienne plus du tout le cuivre.
Haut
Le cuivre n'étant pas, au début de la percolation,
relargué dans le percolat, il a été nécessairement fixé 3 5 7 9 Il 13 15
par la phase solide, ou ralenti à la traversée du squelette Angle (28)
argileux. Pour étayer l'une ou l'autre des deux hypo-
thèses, des comparaisons entre face infiltrée et face Évolution des spectres de diffraction des
rayons X de la Fo-Ca après 1 360 heures
opposée des galettes ont aussi été réalisées en fin d'infiltration par une solution de nitrate
d'essai à partir des spectres de diffractions des rayons X. de cuivre à 10- 1 mollI en fonction de la
La figure 3 représente l'évolution de la raie d(001) dis- zone de prélèvement en comparaison avec
tance basale de l'argile (Caillère et al., 1982) en fonction le spectre de la Fo-Ca matérialisé par une
de la zone de prélèvement après infiltration d'une solu- droite d'abscisse 5,7 degré en 28.
tion de nitrate de cuivre pendant 1360 heures. La raie Evolution of the X-ray diagrams on Fo-Ca
sample soaked with 10- 1 mollI copper solution
d(001) de l'argile Fo-Ca avant infiltration est aussi repor- during 1,320 hours, at the top and at the bottom
tée sur cette figure comme référence: elle est symboli- in comparison with pure Fo-Ca represented by
sée par une barre verticale positionnée à 5,7 degré pour a line a 5.7 degrees in 28.
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soit la concentration en cuivre, la perméabilité de
l'argile obtenue avec l'œdomètre à réservoir est supé-
Détermination des paramètres du transfert de masse rieure d'un ordre de grandeur à celle obtenue avec
l'œdomètre à seringue. La figure 5 présente les courbes
Les résultats des essais réalisés ont été exploités de rétention d'eau de l'argile Fo-Ca, après pollution au
dans le cadre d'une approche simplifiée au seul pro- nitrate de cuivre ainsi que celle obtenue pour une argile
blème du transfert de masse en phase liquide. Les non gonflante (la kaolinite). L'effet de la pollution se tra-
équations du transfert de masse en phase liquide et les duit par un décalage de la courbe de rétention vers les
différents paramètres associés sont présentés ci-des- faibles degrés de saturation et vers l'origine des pres-
sous. sions capillaires. Cette tendance rapproche la Fo-Ca
Le mouvement de l'eau est gouverné par la loi de polluée d'une argile non gonflante et montre qu'il y a
Darcy: bien modification du pouvoir gonflant de l'argile lors
de la percolation du nitrate de cuivre. Enfin, la porosité
~=-~~([gr;d(Pf-Pa)]+pfggr;d(Z)) (1) finale a été déterminée pour chaque concentration
(Tableau II) : elle est peu différente pour toutes les
avec: kr == ks.k rr concentrations en nitrate de cuivre utilisées.
v:la vitesse de Darcy (mis) ; kr : le coefficient de per-
méabilité au fluide (mis) ; Pr : pression du fluide; Pa:
pression atmosphérique ; z : la cote de l'échantillon;
k : la perméabilité relative et ks : perméabilité à satura- ~ ..... à saturation 1
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sante sont les mêmes. Pour s'affranchir d'un couplage
supplémentaire et éviter de prendre en compte la com-
Discussion sur les phénomènes observés pressibilité sur le débit, l'étude a été poursuivie par des
essais d'infiltration par la technique de la seringue, afin
Pour affiner l'interprétation des résultats précé- d'étudier uniquement le transfert en phase liquide.
dents, les mesures de déformation de gonflement au
cours de la saturation de l'argile et en fin d'essai après Afin de compléter la caractérisation du con1porte-
décharge totale du matériau ont été reportées en ment à la percolation de l'argile, la figure 7 récapitule
figure 6 pour les essais avec la seringue. Les tracés, l'évolution du cumul des concentrations des ions Ca 2+,
reportés en fonction de la concentration en cuivre Na+, Mg2+ et Cu 2+relargués, en fonction du temps, dans
montrent que: le percolat. La courbe relative au calcium présente une
discontinuité après 500 heures qui coïncide avec celle
du cuivre (Fig. 7). En ce point d'inflexion, la concentra-
~ ....- à saturation -... après la décharge tion en calcium dans le lixiviat (exprimée en meq pour
~
0,6
a...
U"J
OA
0
0 20 40 60 80 100 120 140 160
Pression capillaire Pc (MPa)
Exploitation des paramètres mesurés pour la Fo-Ca en vue d'une modélisation du transfert de masse:
a) exemple de lissage de courbe de rétention par une fonction hyperbolique pour la Fo-Ca infiltrée à
l'eau; b) évolution du coefficient de la loi en fonction de la concentration en cuivre.
Evolution of the Fo-Ca parameters for mass transfer modelling: a) example of retention curve fitted by an hyperbolic
function for Fo-Ca soaked with water; b) evolution of coefficient of the Sr = f(Pc) curve versus copper concentration.
Wl03
2c tnmestre 2003
[Cu] = 0 [Cu] = 0,61 molli
1 1
0,9 0,9 -
0,8 0,8
Sr Sr
0,7 0,7 on
0,6 0,6 -
0,5 0,5
0 1 2 3 0 1 2 3
Distance (m) Distance (m)
0,9 0,9 -
0,8 0,8
Sr Sr
0,7 0,7 -
0,6 0,6 -
0,5 0,5
0 l 2 3 0 1 2 3
Distance (m) Distance (m)
+: 1 an Il : 2 ans . : 5 ans
: 10 ans o: 15 ans 0: 20 ans
Simulations de la cinétique de saturation en eau à l'échelle d'un massif d'argile de 3 m de longueur après
pollution avec des solutions de nitrate de cuivre.
Simulation of the water saturation kinetics trough a 3 mr long clay polluted (with copper nitrate solutions) medium.
simulations montrent que la profondeur d'argile saturée Ces résultats mettent en évidence l'utilité d'étudier
après 20 ans est quatre fois plus grande dans le cas d'une les variations des paramètres de transfert de masse
pollution au nitrate de cuivre de concentration 0,1 mol/l produites par la percolation de polluants car les consé-
que dans le cas non pollué. De plus, l'accélération de la quences à l'échelle d'un stockage peuvent être signifi-
saturation est nette, y compris pour la concentration la catives. L'étude prédictive ci-dessus a été axée sur le
plus faible de 0,01 mol/l. Ces résultats prédictifs reflètent, transfert d'eau en fonction du temps dans un massif de
bien sûr, le choix d'un modèle de transfert simplifié mais Fo-Ca préalablement polluée au nitrate de cuivre, ce
aussi le fait que les évolutions des paramètres avec la qui constitue un cas extrêmement sévère par rapport à
concentration en polluant se cumulent: une situation de stockage. Dans l'hypothèse où l'argile
- la sensibilité de ce type de modèle aux paramètres est serait polluée au fur et à mesure de la saturation en lixi-
telle que la perméabilité intrinsèque a une grande viat dans un stockage, le temps de transfert des pol-
influence sur le volume entrant dans l'argile et donc sa luants serait progressivement ralenti et l'évolution des
cinétique de saturation; c'est l'effet le plus important; propriétés de l'argile s'effectuerait en conséquence, ce
-l'évolution des propriétés de rétention après pollution qui donnerait lieu à des temps de saturation plus faibles
agit dans le même sens. que ceux prédits ici. Par ailleurs dans ce contexte, la
Quant à la porosité, choisie constante dans le viscosité du lixiviat devrait être, en toute rigueur, déter-
modèle, elle a en général, vu les plages de variations minée, bien qu'elle doive être, a priori, très peu diffé-
obtenues, moins d'influence dans ce type de modèle. rente de celle de l'eau.
41
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~I -la dissolution de la calcite, ri
- les échanges ioniques entre les cations compensa-
Conclusion teurs de l'argile et le cuivre qui engendrent une dimi-
nution de l'espace interfoliaire sans modification du
Ce travail avait pour objectif de déterminer l'effica- volume macroscopique;
cité de confinement, en terme de rétention de polluant, - les processus chimiques ont un effet significatif sur
d'une argile gonflante compactée pouvant servir de les propriétés de rétention du sol.
barrière ouvragée dans un site de stockage. Parallèle-
ment à des essais d'infiltration de solutions polluantes Pour simuler uniquement la réponse à l'infiltration
qui ont nécessité un développement technologique d'eau dans un massif d'argile gonflante préalablement
approprié, permettant ainsi de déterminer des para- pollué avec des nitrates de cuivre, un jeu de paramètres
mètres nécessaires aux simulations, un code de calcul correspondant à chaque concentration a été déterminé
du transfert de masse en phase liquide a été utilisé pour et un modèle simplifié de stockage utilisé. La présence
prédire les durées de saturation en eau d'un massif pol- du cuivre montre en première approximation, lors de
lué avec du nitrate de cuivre de différentes concentra- la saturation en eau une forte augmentation de la per-
tions. méabilité en présence de cuivre induisant une exten-
sion significative de la zone saturée du stockage, ce qui
Les résultats expérimentaux obtenus ont montré est relativement néfaste à son rôle.
qu'un échange cationique s'était produit et engendrait
des modifications tant au niveau de la microstructure Enfin, bien que la perméabilité augmente fortement
de l'argile (diminution de la distance basale), du volume suite à une pollution, la Fo-Ca reste dans une gamme
de la phase poreuse que de son comportement macro- de perméabilité bien inférieure à celle d'un stockage de
scopique : gonflement, preméabilité et aptitude à la surface et il serait intéressant de transposer les résul-
rétention, totale, en début d'infiltration. De plus, ces tats obtenus à ceux d'un stockage de déchets à grande
résultats ont permis de mettre en évidence que: profondeur.
- les échanges cationiques sont indépendants des
conditions d'injection du nitrate de cuivre sous forme
soit d'une solution soit d'un mélange solution-gaz;
- même pour de fortes concentrations en polluant,
l'aptitude au gonflement de la Fo-Ca n'est pas totale-
ment inhibée; Ce travail a été réalisé avec le soutien financier de rANVAR et la
collaboration d/élèves ingénieurs de rESEM/ G. Biron/ M. Fritzin-
- il existe simultanément deux processus chimiques qui ger/ J. Herbert A. Lede/ L. Massard et S. Thevenin/ que les auteurs
contribuent à l'augmentation de la perméabilité: tiennent à remercier tout particulièrement.
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2e trimestre 2003
Adaptation
du mode opératoire
pour la réalisation d'essais
• •
en compreSSIon «vraIe »
A. EL BIED, J. SULEM sur les roches
CERMES
École nationale des ponts
et chaussées/LCPC
6-8, avenue Blaise-Pascal "'e.J Sur la base d'une étude approfondie de la littérature et
Cité Descartes E d'un programme d'essais sur le grès de Fontainebleau,
Champs-sur-Marne ~ les artefacts expérimentaux rencontrés dans la
77455 Marne-La-Vallée, "'e.J réalisation des essais de compression triaxiale sont
Cedex 2 I:t:: analysés. En particulier, on montre que le frettage à
sulem@cermes. enpc.fr l'interface de l'éprouvette et des plateaux de chargement
modifie l'allure des courbes contrainte-déformation,
affecte le mode de rupture ainsi que les caractéristiques
des bandes de cisaillement (orientation, épaisseur). Un
protocole d'essais visant à supprimer ces artefacts est
proposé et validé. Celui-ci consiste en une lubrification
efficace de l'interface associée à la mise en place d'une
protection imperméabilisante permettant d'éviter la
pénétration du lubrifiant dans la roche.
Adaptation
of the procedure for the realization
of tests of cctrue)) compression on rocks
On the basis of a literature review and a testing program on
Fontainebleau sandstone, experimental artefacts as encountered
in triaxial compression tests are analysed. In particular, it is
shown that the friction at the interface between the loading
platens and the specimen modify the stress-strain curves, the
failure mode, and the shear-bands characteristics (orientation
and thickness). A testing procedure is proposed and validated
for suppressing these artefacts. Tt consists in an efficient
lubrication of the interface associated with an impervious
protection to avoid the penetration of the lubricant into the rock.
NDLE: Les discussions sur Key words : rock mechanics, rock testing, uniaxial compression
cet article sont acceptées test, triaxial cOlllpression test, stress, Fontainebleau sandstone,
jusqu'au 1er novembre 2003 friction, interface, faîlu!:,e.
43
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'1
Description
Introduction du dispositif expérimental
L'essai de compression triaxiale axisymétrique est
couramment utilisé en mécanique des roches pour la Matériau et préparation des échantillons
caractérisation du comportement d'un matériau. La
réalisation expérimentale de cet essai est cependant
délicate et peut donner lieu à une grande dispersion
des résultats en fonction du mode opératoire choisi. Choix du matériau
Certains auteurs (Bernaix, 1969) attribuent la disper-
sion des résultats expérimentaux au caractère hétéro- Le matériau de référence choisi pour notre étude est
gène des roches, ce qui pose la question de la possibi- le grès de Fontainebleau. Cette roche granulaire a déjà
lité de considérer l'essai triaxial comme un essai été utilisée en laboratoire (Bourbie et al., 1987 ; Ikogou,
élémentaire. Les effets de taille et de forme rapportés 1990 ; Sayehi, 1992 ; Haïed et al., 1997). Elle est initiale-
dans la littérature sont-ils dus au comportement ment isotrope, ce qui permet d'obtenir des déforma-
intrinsèque de la roche ou aux artefacts expérimen- tions d'échantillon les plus homogènes possibles dans
taux? la phase qui précède la localisation des déformations.
Elle est composée à plus de 99,8 % de quartz pur, ce qui
est un avantage pour l'étude microscopique du phéno-
La nature du contact à l'interface entre l'échan- mène de la localisation des déformations. En effet, le
tillon de roche et les plateaux de chargement de la grès de Fontainebleau (comme d'autres grès) présente
presse influence de manière sensible la réponse en sous fortes déformations un changement de coloration
déformation de l'échantillon, la contrainte au pic de au niveau de la bande de cisaillement, qui est dû au
chargement, le mode de rupture de l'éprouvette broyage et à la décohésion des grains de quartz carac-
ainsi que les caractéristiques des bandes de cisaille- térisant la localisation. Une coloration blanche est net-
ment observées sous confinement (orientation, tement visible à l'œil nu au niveau de la bande, ce qui
épaisseur). permet d'évaluer de façon précise l'épaisseur et l'orien-
tation des bandes de cisaillement. Le diamètre moyen
des grains de quartz est d'environ 230 pm.
L'objet de cet article est d'analyser, à partir d'une
étude approfondie de la littérature et d'une campagne
d'essais sur une roche modèle présentant des pro-
priétés mécaniques homogènes et isotropes (grès de Carottage
Fontainebleau), l'influence des conditions d'essais sur
la réponse expérimentale. En particulier, nous souhai- Une fois les roches mères prélevées, ces dernières
tons promouvoir l'idée que la réduction du frottement sont traitées avec le plus grand soin au sein du labora-
à l'interface roche-plateaux est indispensable pour toire, à l'abri de chocs mécaniques (secousses), ther-
assurer une bonne homogénéité des déformations de miques (soleil), chimiques (pluie) ou de moisissures. Les
l'échantillon dans la phase prélocalisation et étalon- essais de compression sont réalisés sur des cylindres
ner correctement une loi de comportement intrin- droits à bases circulaires. Le diamètre de l'échantillon
sèque de la roche. Nous présentons dans cet article doit être au moins 20 fois celui du grain le plus grand.
une étude bibliographique du problème du contact (Fairhurst et Hudson, 1999). On choisit un diamètre
roche-plateaux. Celle-ci inclut l'influence du frettage d'échantillon de 40 mm. Les normes de la SIMR sont
sur les modes de rupture et la description des tech- donc respectées. L'élancement d'un échantillon est par
niques d'antifrettage par modification de la géométrie définition son rapport hauteur/diamètre. Une fois le
des éprouvettes ou par la mise en place d'inserts carottage effectué sur ces roches, les éprouvettes sont
solides ou fluides à l'interface. Les inconvénients des taillées pour trois valeurs de l'élancement 1, 1,5 et 2.
différentes techniques sont discutés. Pour réduire les
effets du frottement à l'interface, la technique de la
lubrification (Papamichos, 1992 ; Labuz et Bridell,
1993 ; Pellegrino et al., 1997 ; Bésuelle, 1999) apparaît Rectification
comme la plus efficace, une fois résolu le problème de
la pénétration du lubrifiant dans l'échantillon et de la Les différentes faces de l'échantillon sont rectifiées
fragilisation de la roche qui en résulte. Ceci est en sous l'eau dans une rectifieuse plane avec meule pour
effet le principal inconvénient de cette technique et les rendre planes et parallèles. La tolérance des imper-
l'argument majeur mis en avant par la Société Inter- fections du polissage des surfaces de chargement lors
nationale de Mécanique des Roches (SIMR) pour de la confection des éprouvettes est très stricte.
recommander d'éviter tout insert fluide entre les pla- L'erreur de parallélisme entre les deux surfaces de
teaux et la roche (Fairhurst et Hudson, 1999). Un mode chargement planes ne doit pas dépasser 0,03 mm pour
opératoire est proposé et validé sur une campagne une hauteur d'échantillon de 60 mm, si l'on se réfère
d'essais triaxiaux. Celui-ci combine l'utilisation d'un aux recommandations de la SIMR (Fairhurst et Hud-
lubrifiant et d'une protection imperméabilisante adap- son, 1999) pour les tests de compression. Les faces
tée. Les questions de l'influence de la géométrie et de extrêmes de l'échantillon ont également été vérifiées au
la taille des éprouvettes sont également abordées dans niveau de l'orthogonalité par rapport à la face latérale
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des échantillons est cruciale pour obtenir des condi- de chargement. Dès le début du chargement, un état
tions de chargement homogènes. Torrenti et Boulay non uniforme de contraintes et de déformations à
(1993) ont mis en évidence l'effet d'une mauvaise recti- l'intérieur de l'échantillon se développe dû à la pré-
fication des échantillons de béton sur la résistance. La sence de frottement à l'interface entre le système de
résistance moyenne obtenue sur cinq éprouvettes bien chargement et les faces extrêmes de l'échantillon. Un
rectifiées est de 102 MPa, celle obtenue sur cinq éprou- grand nombre de chercheurs ont souligné ces pertur-
vettes mal rectifiées est de 82 MPa. bations induites par le frottement à l'interface (Mohr,
1900; Filon, 1902 ; Pickett, 1944; D'Appolonia et New-
mark, 1951, Conway, 1963 ; Kirkpatrick et Belshaw,
1968 ; Brady, 1971b ; Hudson et al., 1971 ; Vutukuri et
al., 1974 ; AI-Chalabi et Huang, 1974 ; Deman, 1975 ;
Matériel de mise en pression Drescher et Vardoulakis, 1982 ; Hettler et Vardoulakis,
La cellule triaxiale utilisée est de type Hoek. Une 1984 ; Read et Hegemier, 1984 ; Vardoulakis et Dres-
presse hydraulique asservie permet d'assurer le char- cher, 1985 ; Vinegar et al., 1991 ; Papamichos, 1992).
gement axial. La surface des plateaux de charge de la Les contraintes de frottement à l'interface tendent à
presse dont on vérifie précisément le parallélisme est empêcher l'expansion radiale d'un échantillon en com-
rectifiée et polie afin de minimiser la résistance frot- pression. L'échantillon cylindrique est alors mis en
tante avec l'échantillon. Par ailleurs, il est préférable tonneau. En raison des contraintes de cisaillement,
que la surface des plateaux de charge soit plus grande l'axe de contrainte principale ne coïncide pas avec
que la surface de base de l'échantillon (Fairhurst et l'axe de l'échantillon. L'effet du frottement à l'interface
Hudson, 1999). Grâce à cette géométrie particulière, fait augmenter la résistance de la roche dans cette
lors de l'écrasement, la force axiale reste correctement région. Cette dernière s'étend à l'intérieur de l'échan-
appliquée sur les faces supérieures et inférieures de tillon sous la forme d'un cône.
l'échantillon même si ce dernier voit son diamètre aug- Cette non-uniformité des déformations a déjà été
menter lors de l'essai en raison de la déformation mise en évidence par différents moyens d'investiga-
radiale. On évite ainsi les problèmes de bords liés à tions. La tomodensitométrie au scanner permet par
l'effet de poinçonnement des plateaux de même dia- exemple de détecter ces effets de bords. Les images
mètre. scanner, que Colliat et al. (1988), Desrues et Mokni
(1991), Mokni (1992) ont obtenu sur des échantillons
i de sable comprimés au triaxial, montrent l'effet de
cône de frettage. Sobolev et al. (1978) ont testé des pla-
Le problème du contact teaux de pyrophillite sous conditions biaxiales. L'inter-
féromètre holographique a révélé qu'au-delà de 50 0/0
roche-plateaux de la résistance ultime, l'échantillon développe une
croix joignant les quatre coins du plateau et subissant
de grandes déformations, tandis que les zones situées
près des plateaux subissent de plus faibles déforma-
tions.
Observations La forme conique de l'échantillon après rupture est
Le contact direct entre les extrémités de l'échan- due non pas au comportement réel et aux caractéris-
tillon et les plateaux de chargement est la condition tiques intrinsèques de la roche, mais plutôt aux
limite la plus communément utilisée au sein des labo- contraintes de cisaillement à l'interface. Les résultats
ratoires. Toutefois, ce problème des conditions limites expérimentaux sont largement influencés par les
doit être considéré avec beaucoup de prudence. défauts dans le système de chargement (Rice, 1980 ;
L'interprétation des essais est classiquement basée sur Drescher et Vardoulakis, 1982). Les écarts souvent
les hypothèses suivantes : l'échantillon matériel est observés dans les résultats de l'essai triaxial obtenus
homogène, la distribution de contrainte uniaxiale est par différents expérimentateurs sont le plus souvent
uniforme à l'intérieur des échantillons, l'état du champ dus aux conditions expérimentales mises en œuvre et
de déformation de l'échantillon est homogène, il n'y a aux défauts indésirables introduits durant les tests
pas de changement significatif de la géométrie de (Hegemier et Read, 1985 ; Santarelli, 1992 ; Brady et
l'échantillon durant le test et les surfaces de charge- Brown, 1985 ; Vardoulakis et Sulem, 1993, 1995). Dans
ment sont toujours les plans principaux. ce cas, le comportement mesuré des échantillons de
Comme le font remarquer Peng et Johnson (1972), laboratoire dépend du système expérimental et comme
il est évident que l'utilisation d'un critère de rupture
la réponse observée est due aux conditions limites
ou de constantes dérivées, appliqués à des conditions inconnues, les données expérimentales obtenues ne
de contraintes connues comme étant non uniformes et peuvent être utilisées pour l'étalonnage d'une loi
en supposant malgré cela, une distribution de constitutive (Hegemier et Read, 1985).
contrainte uniforme, serait tout à fait trompeur. Néan- Un autre mode de rupture en compression uniaxiale
moins, ajoutent-ils, c'est exactement ce qui arriva pen- a également été observé dans la littérature, une rupture
dant des années. Même si le souci principal de l'expé- de cisaillement locale et macroscopique de l'échantillon
rimentateur concerne l'uniformité des champs de testé le long d'un seul plan oblique. Ce mode de rup-
contraintes et de déformations imposés à l'éprouvette, ture est comme la rupture en cône étroitement lié aux
cette condition d'uniformité n'est généralement pas problèn1es de frottement à l'interface roche-plateau
respectée durant le chargement de compression. Il est (Bieniawski, 1967 ; Vardoulakis et al., 1998). Paul et Gan-
reconnu, au moins depuis un siècle (Mohr, 1900), que gal (1966) affirment que cette rupture ne serait rien
la distribution des contraintes dans les échantillons d'autre qu'une rupture en cône particulière où les
cylindriques est non uniforme et dépend des condi- macrofissures se joignent aux deux extrémités. Notons
tions limites à l'interface entre la roche et les plateaux que ce mode de rupture peut égalell1ent se produire
45
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dans le cas où le chargement axial est non uniforme. La
rupture oblique est due alors à un défaut dans les
conditions d'essai, soit à une mauvaise préparation au Simulations numériques
niveau de la rectification, en termes de planéité et de
parallélisme des surfaces de contact, soit à un mauvais Des analyses théoriques et numériques ont été réa-
centrage de l'éprouvette par rapport aux plateaux de la lisées dans le but de mieux comprendre les effets du
presse. Hardy (au 8th Symposium de mécanique des frettage à l'interface roche-plateau (Filon, 1902 ; Pickett,
roches, 1966) partage ce point de vue puisqu'il affirme 1944; D'Appolonia et Newmark, 1951 ; Kotte et al.,
qu'il y a deux facteurs d'importance dans le charge- 1969 ; Brady, 1971a-c ; Hawkes et Mellor, 1970 ; Peng,
ment de compression de l'échantillon: les forces frot- 1971; AI-Chalabi et Huang, 1974; Drescher et Vardou-
tantes dans les surfaces extrêmes de l'échantillon et lakis, 1982; Bordia, 1971).
l'uniformité du chargement axial dans ces surfaces Avec le logiciel de calcul par éléments finis CESAR,
extrêmes. Ces deux facteurs, selon lui, influencent le Pellegrino (1995) a testé trois conditions de contact
mode de rupture de l'échantillon. Hardy ajoute que les entre la roche et les plateaux de chargement, le contact
ruptures obliques sont dues à un chargement non uni- direct roche-acier, une interface de contact lubrifiée et
forme ou à une orientation préférentielle de plans exis- enfin un glissement libre de la roche par rapport aux
tants de faiblesse (weakness) dans la roche anisotrope. plateaux sans aucune contrainte de frottement. Les cal-
Hawkes et Mellor (1970) pensent que la rupture oblique culs montrent que les éprouvettes solidaires des pla-
est due à la rotation ou à la translation relative des pla- teaux développent toujours un cône élastique de frot-
teaux. Selon eux, ce type de rupture est caractéristique tement au contact des plateaux (Drescher et
du système de chargement. Vardoulakis, 1982). En cas de lubrification, le frettage
Notons que l'effet sensible du frottement à l'inter- partiel produit un petit cône élastique. Pour des éprou-
face sur le pic de résistance a souvent été constaté vettes cornprimées dans des conditions d'expansion
(Hawke et Mellor, 1970 ; Labuz et Bridell, 1993 ; Pelle- libre, le cône ne se forme plus et l'échantillon présente
grino, 1995). Znanski (1954) a réalisé des tests de com- une plastification uniforme. Des résultats similaires ont
pression sur des échantillons d'argilite d'élancement 2 été obtenus avec le programme ABAQUS par Sheng
avec et sans frottement aux extrémités et a trouvé que et al. (1997).
la résistance en compression avec frottement est de
107 MPa et sans frottement de 50 MPa. Brown (1974)
montra que l'utilisation de système à peignes réduit la
résistance maximum. Il étudia sur du marbre le rapport
entre la résistance maximum mesurée dans le test
Les techniques antifrettage
biaxial et la résistance en compression uniaxiale Différentes techniques d'antifrettage ont été déve-
conventionnelle. Pour un plateau solide, le rapport est loppées pour éliminer ou au moins atténuer le frotte-
de 1,39 et pour un plateau avec système à peigne, le ment à l'interface. Mise à part l'utilisation d'une
rapport est de 1,19. Papamichos et al. (2000) ont réalisé pression de fluide, c'est-à-dire d'un chargement
des essais de compression triaxiale conventionnels, hydraulique aux extrémités de l'échantillon (Schock et
d'extension triaxiale et de compression biaxiale (en Duba, 1972 ; Handin, cité par Hardy au 8th symposium
déformation plane) sur des échantillons de grès rouge de mécanique des roches, 1966), on peut distinguer
de Wildmoor. Ils montrent que la résistance au cisaille- deux modes différents de conception du système anti-
ment du grès est indépendante de la contrainte princi- frettage: soit modifier la forme géométrique de l'échan-
pale intermédiaire et suit un critère de résistance de tillon, soit placer au niveau de l'interface roche-plateau
type Mohr-Coulomb, ce qui suggère aussi qu'en condi- un matériau solide ou fluide de nature et de forme géo-
tions de contact lubrifié, les valeurs de résistance obte- métrique variables.
nues expérimentalement ne correspondent pas seule-
ment à un type de test sur un échantillon donné mais
représentent les valeurs de résistance intrinsèques de
la roche. Par ailleurs, Paul et Gangal (1966) affirment
que la valeur de résistance à la compression est plus Modification de la géométrie
grande dans le cas d'extrémités non lubrifiées. En réa- des éprouvettes
lisant des tests sur le calcaire d'Indiana, ils ont obtenu
une résistance à la compression de 37 MPa pour les Les effets de frettage peuvent être réduits si on
extrémités lubrifiées et de 78 MPa pour les extrémités adopte un élancement assez grand. Quand la longueur
non lubrifiées. Peng et Johnson (1972) ont comparé la de l'échantillon augmente, une plus grande proportion
résistance à la compression d'échantillons de granite du volume d'échantillon dans la partie centrale de ce
de Chelmsford pour différentes conditions limites dernier est sujette à un état approximativement uni-
imposées. Ils ont obtenu que la résistance de cette forme de contrainte uniaxiale (Hawkes et Mellor, 1970).
roche dépende des conditions limites. Les cinq condi- C'est pour cette raison essentielle que la SIMR (Fai-
tions limites sont présentées dans un ordre décroissant rhurst et Hudson, 1999) prescrit d'utiliser dans l'essai
de résistance atteinte: confinement parfait, contact de compression des cylindres circulaires droits avec un
direct, chargement uniforme, inserts de téflon et inserts rapport entre la hauteur et le diamètre compris entre 2
de néoprène. Suivant les conditions limites imposées, et 3. L'utilisation d'inserts fluides ou solides (capping
on peut obtenir pour le cas uniaxial une résistance à la materials) ou de tout traitement de surface d'extrémité
compression qui varie du simple au double. Le rapport autre que la rectification sont exclus dans les recom-
entre les valeurs de résistance en compression obte- mandations de la SIMR. Un élancement dans la gamme
nues en conditions cc confinement parfait)) et en condi- moyenne de 2,5 à 3 pour des mesures faites dans les
tions cc inserts néoprène )) est de l'ordre de 2 en com- portions centrales de l'échantillon est également
pression uniaxiale, et tend à diminuer lorsque le recommandé par Vutukuri et al. (1974). Il faut toutefois
46 confinement augmente.
N° 103
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grand peut mener à des instabilités telles que le flam- Huang, 1974). Parmi les lubrifiants couramment utili-
bage, qui font rompre prématurément l'échantillon sés, on peut citer le graphite, le tungstène disulfide,
(Sulem, Vardoulakis, 1990). De plus, comme le font l'huile de paraffine, le molybdenum disulfide (poudre
remarquer Vutukuri et al. (1974), il est très difficile grise), le téflon, le spray de silicone et l'acide stéarique
d'obtenir des échantillons avec ce rapport pour des (acide gras) mélangé avec de la vaseline ou du talc.
roches tendres et friables. Pour mesurer le coefficient de frottement, Labuz et
On peut mentionner également le choix de géomé- Bridell (1993) ont utilisé un appareil de double cisaille-
tries particulières d'échantillons comme le double T ment direct et ont réalisé également des tests de com-
pour les essais en déformation plane (Brace, 1964a ; pression uniaxiale sur différentes roches. Le plus
Brace, 1964b ; Mogi, 1966, Tillard, 1992) ou le cylindre à faible coefficient de frottement (de l'ordre de 0,02) a
section centrale réduite (Mure Il, 1965 ; Brace, 1964b ; été mesuré pour l'acide stéarique de formule chi-
Hoek 1965). Cependant, cette technique présente de Inique (CH 3 (CH 2 )16 CO 2 H mélangé en quantité égale
nombreux inconvénients liés à l'hétérogénéité du avec de la vaseline.
champ de contraintes à l'intérieur de l'échantillon et à Papamichos (1992) a réalisé des essais de compres-
la difficulté de préparation des échantillons, ce qui sion en déformation plane sur du grès de Berea. Il a
conduit à une mauvaise répétabilité des essais. procédé à la lubrification de toutes les surfaces
d'échantillon en contact avec les plateaux. Le lubri-
fiant est composé d'un mélange d'acide stéarique et
de vaseline non polarisée à proportions massiques
égales de 1:1 pour une application facile dans les sur-
Mise en place d'inserts solides ou fluides faces de frottements. Ce mélange est préparé en pla-
çant une quantité égale de cristaux d'acide stéarique
et de vaseline dans un four chauffant à 70 oC, qui est la
température de mélange des cristaux d'acide stéa-
Jeux d'inserts ou embases spéciaux rique. En fait, nous conseillons de chauffer le mélange
à 75 oC pour faciliter et accélérer la réaction. Dans ce
Les perturbations induites par le frottement à but également, il n'est pas inutile de mélanger
l'interface peuvent être éliminées en insérant une quelques fois la préparation, l'acide a en effet ten-
plaque de matériau souple entre l'échantillon et le pla- dance à se déposer en bas du flacon. Le mélange est
teau. De nombreux matériaux ont été utilisés comme le total dès qu'on obtient un liquide incolore et homo-
téflon, le bois, l'aluminium, l'acier. Cependant l'utilisa- gène. Après mélange complet, la surface extérieure du
tion d'inserts souples tend à promouvoir la rupture en gobelet est refroidie rapidement avec de l'eau pour
clivage axial par le phénomène d'extrusion (Brady, que les molécules d'acide stéarique ne se séparent pas
1971b; Peng et Johnson, 1972, Vinegar et al. 1991). Cer- de la vaseliné. On laisse refroidir le lubrifiant jusqu'à
tains expérimentateurs (Cook, 1962; Hallbauer et al., solidification complète. Cela donne un mélange uni-
1973 ; Hoek, 1965 ; Peng et Johnson, 1972) ont choisi forme solide gras à température ambiante. C'est une
des matériaux ayant le même rapport viE que la roche substance de couleur blanche avec une texture savon-
afin d'assurer une expansion radiale uniforme. Une fois neuse. Notons que ce lubrifiant a été utilisé depuis par
que la fissuration commence dans l'échantillon, le Pellegrino (1995) et Bésuelle (1999). La technique de la
module d'élasticité E et le coefficient de Poisson v chan- lubrification semble être d'un très grand intérêt. Elle
gent. Par conséquent, la condition d'égalisation n'est ne présente aucun des inconvénients majeurs relevés
plus satisfaite. Il n'est donc pas possible d'étendre ce pour les autres techniques antifrettage présentées.
concept à la région ductile de la courbe contrainte- Nous allons dans la suite de l'article valider cette tech-
déformation (Wawersik et Fairhurst, 1970). On peut nique en comparant les résultats obtenus pour le cas
également mentionner les systèmes à peignes (brush des essais frettés et lubrifiés.
platensJ faits d'une assemblée d'épingles flexibles en
acier de faible section (Brown, 1974; Brown et Conano,
1974 ; Brady et Brown, 1985. Ces systèmes présentent
de sérieux inconvénients. Ils sont trop difficiles à pré-
parer pour être utilisés dans des tests de routine. De Étude expérimentale
plus, ils peuvent conduire à des problèmes d'indenta-
tion de l'échantillon en fonction du type de roche et du de la lubrification
niveau de contraintes. du contact roche-plateaux
Lubrification
Description des essais réalisés
La lubrification de l'interface reste un problème
ouvert en mécanique des roches. Vicat (1834), Foppl Des essais de compression uniaxiale et triaxiale à
(1900), Mohr (1900) (cités par Vardoulakis et al., 1998) faible pression de confinement ont été réalisés sur le
ont abordé ce problème et étaient favorables à la grès de Fontainebleau. Ils ont été effectués sur des
lubrification des plateaux pour éviter le frottement. échantillons secs d'élancement 1, 1,5 et 2 prélevés
Toutefois, au sein des laboratoires et suivant les dans trois blocs de roche notés B (porosité 14-15 0/0), F
recommandations de la SIMR, les essais sont le plus (porosité 14-15 0/0) et K (porosité 21-22 0/0). Les essais
souvent frettés. La littérature montre qu'un état de ont été effectués en chargement monotone ou
déformation homogène peut être obtenu en utilisant cyclique et en conditions frettées ou lubrifiées en uti-
un lubrifiant approprié (Mohr, 1900 ; Foppl, 1900 ; lisant le mélange d'acide stéarique et de vaseline pro-
Hardy, 1966 ; Hawkes et Mellor, 1970 ; AI-Chalabi et posé par Papamichos (1992). Papamichos et al. (2000)
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Wl03
2e trimestre 2003
recommandent l'utilisation d'une faible quantité de
lubrifiant afin d'éviter une trop grande pénétration de
celui-ci à l'intérieur de la roche poreuse. Cependant,
comme l'a observé Pellegrino et al. (1997), sans une
quantité suffisante de lubrifiant, le frottement résiduel
reste encore important. Nous avons tenté de résoudre
ce point par l'utilisation d'une protection imperméa-
bilisante insérée entre le lubrifiant et l'échantillon. Dif-
férents types de protections imperméabilisantes ont
été testés. Les essais réalisés ont pour but de choisir la
meilleure protection imperméabilisante et d'évaluer la 40. 60 ou 80 mm
performance du lubrifiant en tant que réducteur du
frottement. On contrôle l'homogénéité des déforma-
tions radiales en plaçant des jauges sur deux sections.
Trois jauges radiales sont placées à mi-hauteur de
l'éprouvette le long de trois génératrices espacées à
120°. Trois autres jauges radiales sont placées sur les
mêmes génératrices mais très près d'une des extrémi-
tés de l'éprouvette, au voisinage des plateaux. Trois
jauges de déformation axiales sont également placées
au niveau de ces trois génératrices, à mi-hauteur de
l'éprouvette.
40 mm
Cette disposition des jauges (Fig. 1) permet d'étu-
dier en détail l'effet du lubrifiant et de la protection Disposition des jauges de déformations
imperméabilisante sur l'homogénéité de la déformation radiales et axiales.
Position of radial and axial strain gages.
de l'échantillon. En suivant les recommandations de
Labuz et Bridell (1993) et Papamichos et al. (2000), nous
effectuons au début de chaque essai trois petits cycles La liste des essais réalisés dans le but de valider le
de charge-décharge à 8 MPa pour éliminer l'excès de procédé de la lubrification et de choisir un élancement
lubrifiant et pour cc mettre en place )) la rotule. d'échantillon optimal est présentée dans le tableau 1.
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Il apparaît nécessaire d'utiliser une protection imper-
méabilisante qui bouche les pores des faces de l'échan-
Artefacts induits par l'utilisation tillon et empêche le lubrifiant de pénétrer. Nous avons
testé différentes protections imperméabilisantes: du
d'une lubrification latex, du spray de graisse silicone, une plaque de téflon,
un film plastique, du mastic rubson blanc, une plaque
d'aluminium, du spray de téflon, une double plaque de
téflon (sans lubrifiant entre les plaques), un carton.
Le problème de la pénétration du lubrifiant
La nature et l'amplitude des contraintes locales
autour des défauts microscopiques sont fortement
affectées par tout fluide ou matériau sous pression qui Choix de la protection imperméabilisante
a accès à ces défauts. C'est le cas lorsque la pénétra-
Le critère essentiel pour le choix de la protection
tion du lubrifiant à l'intérieur de l'échantillon et sa
rnise en pression interstitielle peut induire dans les imperméabilisante optimale est la réduction de
l'influence des défauts de préparation de la surface de
pores du matériau des contraintes de traction suffi-
l'échantillon, en termes de rectification et de parallé-
santes pour permettre la propagation des fissures pré-
existantes. Ce type de rupture s'apparente à la rupture lisme et cela dans le but d'obtenir une distribution du
par intrusion décrite par Brace (1964a) lorsque la mem- chargement la plus uniforme possible.
brane entourant un échantillon pénètre à l'intérieur de Les protections autres que le latex conduisent à une
celui-ci. Pour cette raison, la Commission sur les grande dispersion des mesures des différentes jauges
méthodes d'essais de la SIMR (Fairhurst et Hudson, axiales et radiales, ce qui traduit que ces inserts indui-
1999) a recommandé d'éviter tout traitement des extré- sent une mauvaise répartition de l'effort axial. Il en
mités de l'échantillon autre qu'une simple rectification résulte un champ de déforlnation non-uniforme dans
(voir aussi Hawkes et Mellor, 1970 ; Jaeger et Cook, l'échantillon. Sur la figure 3 on donne l'exemple de la
1979). réponse obtenu avec une protection en graisse de sili-
Dans les essais que nous avons réalisés sur le grès cone (essai B36). En comparaison, on présente sur la
de Fontainebleau, nous avons effectivement observé figure 4 la réponse de l'échantillon B80 testé avec une
dès la 111ise en place du lubrifiant sur les extrémités de protection en latex. Ces graphes montrent une bonne
l'échantillon une forte pénétration de celui-ci à l'inté- uniforll1ité des mesures des jauges.
rieur de la roche. Cette pénétration est encore plus Le pic de résistance en compression uniaxiale pour
marquée lorsque l'échantillon est mis en charge, et les essais lubrifiés sans protection (B13.1 et B12.2) a une
l'effet du lubrifiant sur la réduction du frottement s'en valeur moyenne de 40,9 MPa. Pour les essais lubrifiés
trouve diminué. Cela peut conduire comme l'a observé avec une protection en latex (B80, B43, B6.2, B26, B32 et
Pellegrino (1995) à des 1110des de rupture combinant la B13.2) cette valeur est de 50,7 MPa. La pénétration du
formation d'un cône de frottement et un clivage axial lubrifiant affecte donc de façon sensible la résistance
de l'éprouvette. On observe également, à cause de la apparente de la roche. Cette influence n'est pas due à
pénétration du lubrifiant, une rupture précoce de une réaction chimique entre l'acide stéarique et la silice
l'échantillon et une perturbation des mesures des liant les grains du grès de Fontainebleau. Elle est due à
jauges proches du plateau due au contact des circuits une pression interne exercée par le lubrifiant fluide à
de la jauge avec le lubrifiant (Fig. 2). l'intérieur de la roche.
déformation radiale
déformation axiale
35 .centrale et au plateau
"<//.-....~''':::::::::::::~.::::._._ ..._--
-100 o 100 200 300 400 500 -2000 *1500 *1000 ·500
daforrnation {microde1ormetion)
0 500 1000
deformation jauges (microdeformation)
Essai B13.1, lubrifié directement sans Essai B36, lubrifié avec une protection en
protection sur un échantillon spray graisse silicone et réalisé sur un
d'élancement 1,5 : perturbation des jauges échantillon d'élancement 1,5.
de déformation radiale près du plateau Comparaison des réponses au centre de
due à la pénétration du lubrifiant. l'échantillon et près des plateaux.
Test B13.1, direct lubrication with no protection Test B36, lubricated with a protection of a
on a sample with a 1.5 slenderness. spray of silicone fat on a sarnple with 1.5
Perturbation of the electric circuit of the radial slenderness. Comparison of the response of the
strain gages close to the platen due to the strain gages at the centre of the sample and
penetration of the lubricant. close to the platens.
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2e tri mestre 2003
1958 ; Grosvenor, 1963 ; Wawersik, 1968 ; Kartashov et
al., 1970 ; Brady, 1971b ; Peng et Johnson, 1972 ; Jae-
60 gel", cité par Fairhurst, 1966).
Ce phénomène d'extrusion n'a été observé sur
aucun des tests que nous avons réalisés en utilisant le
lubrifiant composé d'acide stéarique et une protection
imperméabilisante autre que la plaque de téflon. Dans
'~,_. déformation radiales 1
~ centrales et au Piateaul le cas où une double plaque de téflon est utilisée, on a
observé que la plaque de téflon en contact avec le pla-
teau subit de très grandes déformations alors que
l'échantillon reste apparemment intact. Dans le cas
d'une protection en latex, on observe une rupture ver-
·2000 ·1500 ·1000 -500 0 500 1000 1500
ticale en clivage axial suivant trois axes symétriques à
déformation (microdaformation) 120 (Fig. 7). Dans le cas d'une lubrification directe sans
0
RG.S Essai B23.2 ; rupture au niveau des extrémités d'un échantillon testé en conditions lubrifiées avec une
protection en plaque de Téflon.
Test B23.2; Failure at the ends of a lubricated sample with a protection of Teflon.
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2c trimestre 2003
(a) (b) (c)
Échantillons de grès de Fontainebleau chargé en compression uniaxiale en conditions lubrifiées. Rupture
en clivage axial suivant trois axes symétriques à 120 (a) et (b) échantillon B80, (c) échantillon F21.1.
0
:
Samples of Fontainebleau sandstone loaded in uniaxial compression with lubrication; Axial splitting along three
symmetrical axes with an angle of 120°; (a) & (b) sample B80, (c) sample F21.
<ù
Cl..
~
4,)
ë
~c
Déformabilité des échantillons 8 -80
• Uniformité de la déformation radiale dans l'axe de ~100 -
l'échantillon
La figure 8 présente la comparaison de la réponse ·120
moyenne des jauges de déformation radiale placées au Effets de la lubrification sur les
centre de l'échantillon et au voisinage du plateau de déformations radiales.
chargement pour des essais réalisés sur des échan- Effect of lubrication on radial strains.
tillons d'élancement 1,5 lubrifiés avec une protection en
latex (B80) et non lubrifiés (B15.1). On constate que,
pour l'essai non lubrifié, les déformations radiales au
niveau des plateaux sont moins importantes que celles
de la partie médiane de l'échantillon.
En revanche, quand on applique le lubrifiant avec
la protection en latex, les déformations radiales cen-
trales et au niveau du plateau se superposent bien. La
lubrification de l'interface améliore nettement l'homo-
généité de la déformation de l'échantillon en éliminant
les contraintes de frottement. Le coefficient 8 est défini nontubrifié
comme le rapport de la déformation radiale mesurée 1
au milieu et à l'extrémité. Ce coefficient est tracé en
fonction de la contrainte axiale (Fig. 9). Il est proche de
l'unité quand on applique le lubrifiant, les échantillons
gardent donc leur forme originale durant le charge-
----
O-t---.------r----.r---r---r--~--..._____-....,........-__1
"'.',Ubrifié
o 10 20 30 40 50 60 70 80 90
ment. contrainte axiale (MPa)
....."....
non lubrifié
nOrl lubrifié
i
-3000 -2000 -1000 o 1000 2000 ·300 1
Deformation axiale et radiale (microdeformatton)
C 14 MPa.
oo
Comparison of the response of radial and axial
strain gages at the centre of samples with 1.5
\. t slenderness in lubricated conditions (F13.2) and
non lùbrifié non Îubrifié non lubricated conditions (F26.2) for a
confining pressure of 14 MPa.
deformation aXiale et radiale(déformation)
B80 58/8
B43 6t2
lubrifié avec latex B6.2 46/9 50/7
0
B26 48/5
B32 44/5
B13.2 43/7
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- - -
uniaxiale. La surestimation d'un facteur deux de la 1970 ; Hakami, 1988 ; Santarelli et Brown, 1989).
résistance apparente dans le cas d'une compression Comme le fait remarquer Wawersik (Wawersik et Fai-
uniaxiale est également rapportée par Mohr (1900), rhurst, 1970 ; Wawersik et Brace, 1971), c'est un mode
Vardoulakis et Sulem (1993), Pellegrino (1995), Papami- intrinsèque de rupture dans les matériaux fragiles en
chos et al. (2000). Ces derniers ont montré également réponse à une contrainte compressive macroscopique-
dans le cas de plateaux non lubrifiés et d'un élancement ment homogène. Les macrofissures se forment avec
égal à 2, ce qui correspond donc aux recommandations une densité uniforme à peu près partout dans l'échan-
de la SIMR, que la valeur de la résistance en compres- tillon et elles s'alignent dans l'axe du cylindre. Comme
sion uniaxiale du grès rouge de Wildmoor déduite des le notent Paul et Gangal (1966), ces macrofissures
essais à faibles pressions de confinement est suresti- s'unissent finalement pour former une rupture macro-
mée de 40 % tandis que celle déduite des essais à fortes scopique par séparation le long d'une surface plane
pressions de confinement n'est que de 15 0/0. normale à la direction de contrainte principale
Pour des essais de compression triaxiale avec une mineure. Vutukuri et al. (1974) parlent de façon simi-
pression de confinement de 14 MPa en conditions non laire d'un développement d'une ou plusieurs fissures
lubrifiées (F26.2), le pic de résistance obtenu est de majeures (principales) parallèles à la direction d'appli-
255,4 MPa. Pour des conditions lubrifiées avec une pro- cation de la force compressive résultant en une sépa-
tection en latex (F13.2), le pic est de 199,7 MPa. En pré- ration de l'échantillon en colonnes. L'échantillon se
sence d'un confinement, le rapport entre les pics de fragmente dans la direction de l'axe de chargement le
résistance correspondants au cas lubrifié et non lubrifié long de plans axiaux. Ce type de rupture est appelé
est plus faible. slabbing (Fairhurst et Cook, 1966), axial cleavage frac-
ture, vertical splintering (Rinehart, 1966; Wawersik et
En conclusion, nous observons que le frottement Fairhurst, 1970), axial splitting (Paul et Gangal, -1966),
entre l'échantillon et les plateaux a une influence extension fracture (Griggs et Handin, 1960 ; Paterson,
notable sur la résistance mécanique apparente des 1978). Ce phénomène est connu sous le nom de rupture
échantillons. La présence du frottement aux plateaux en clivage axial (axial splitting) ou encore rupture en
exerce un léger confinement radial aux extrémités des extension. Ce qui est en accord avec la classification
éprouvettes conduisant à une valeur plus importante classique de Jaeger et Cook (1979) communément
de la contrainte au pic de résistance. Quand on acceptée pour la rupture macroscopique des roches
applique une pression de confinement, le frettage a un par rapport à la pression de confinement, où en com-
effet moins marqué sur la résistance de l'échantillon pression uniaxiale et en compression triaxiale pour une
testé. La pression de confinement a tendance à réduire pression de confinement très faible, on a une rupture
l'influence du frottement. Comme l'expérimentateur axiale. Par exemple, Paul et Gangal (1966) affirment que
dans un essai de compression uniaxiale réalisé en si les extrémités des échantillons de calcaire d'Indiana
conditions non lubrifiées ne contrôle pas l'intensité du sont soigneusement lubrifiées pour prévenir la forma-
frettage, cette dernière peut être plus ou moins impor- tion de forces de frottement latérales, l'échantillon se
tante d'un essai à un autre (et a fortiori d'un laboratoire rompt en compression par clivage axial. Bieniawski
à un autre). Cela est une des causes de la grande dis- (1967) a obtenu également une rupture en clivage axial
persion des données de résistance souvent observée dans des tests uniaxiaux sur la norite et le quartzite réa-
dans l'essai de compression uniaxiale. Comme l'a lisés avec des plateaux de chargement égalisés de
observé Bernaix (1969) cette dispersion observée en même diamètre que celui de l'échantillon testé. Paul
compression uniaxiale tend à disparaître pour les essais (cité par Fairhurst, 1966), en utilisant deux plaques
confinés. Cela peut être attribué aux effets sensible- minces de téflon avec de la graisse entre les deux, a
ment réduits du frettage pour les essais sous pression observé systématiquement une rupture axiale (split-
de confinement. ting). Peng et Johnson (1972) ont réalisé des essais sur
le granite de Chelmsford en utilisant une technique
d'inserts égalisés pour obtenir un chargement uni-
forme. Ils ont observé que les fissures sont orientées
Mode de rupture parallèlement à l'axe des échantillons et que ces der-
niers se rompent typiquement par clivage longitudinal.
La géométrie de la rupture dépend fortement de la Ils ont affirmé également que les positions et le nombre
pression de confinement et du type de roche testée. A de séparations (splits) sont variables d'un échantillon à
partir des observations des éprouvettes rompues, il a un autre. Les échantillons se fendent typiquement le
été possible de distinguer différents types de rupture long d'une ou plusieurs ruptures verticales. Fairhurst
dans la gamme étudiée de pression de confinement. et Cook (1966) ont également rapporté que les échan-
L'examen visuel des échantillons testés confirme le fait tillons cylindriques se rompent selon la direction verti-
que les conditions d'interface jouent un rôle fonda- cale et se fendent en colonnes. Kondo et al. (1988) ont
mental dans le processus de rupture. Suivant l'intensité observé des ruptures axiales dites cc en colonnettes ))
du frettage, différents modes de rupture peuvent se qui se développent parallèlement à la direction de
produire pour une même pression de confinement. contrainte principale majeure. Ces ruptures s'accom-
pagnent d'une forte dilatance dans le matériau. Santa-
relli (1987) observe également une rupture verticale
• Essai de compression uniaxiale avec formation de colonnettes. Haïed et Kondo (1997)
Quand on élimine les effets de frottement par l'utili- ont observé un clivage axial en réalisant des essais
sation d'un système antifrettage efficace, l'échantillon uniaxiaux sur des échantillons prismatiques de grès de
est théoriquement dans un état homogène de com- Fontainebleau.
pression pure. De nombreux auteurs observent un Dans le cas des essais que nous avons réalisés avec
développement de fissures parallèles à la direction de une protection en latex, on observe une rupture verti-
contrainte maximale appliquée (Griggs, 1936 ; Terzaghi, cale en clivage axial suivant trois axes symétriques à
1945 ; Griggs et Handin, 1960 ; Wawersik et Fairhurst, 120 (Fig. 7).
53
0
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REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
ment et une formation de cônes rigides (Fig. 16).
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Mode de rupture mixte en Y pour un échantillon (B18.2) testé en compression triaxiale à une pression de
confinement de 4 MPa en conditions lubrifiées avec une protection en latex.
Failure mode in Y for a sanlple (818.2) tested in triaxial compression with a confinenlent of 14 MPa in lubricated
conditions with a latex protection.
A B
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d'élancement 1,5 et 2 donnent des réponses semblables
tant pour le pic de résistance (Tableau III) que pour les
L'essai triaxial peut-il être considéré déformations. Les déformations axiales sont bien
superposées pour les élancements 1,5 et 2 mais l'échan-
comme un essai élémentaire? tillon d'élancement 2 développe des déformations
radiales importantes pouvant être attribuées à une
L'essai triaxial sur un échantillon de roche peut-il instabilité par flambement (Sulem et Vardoulakis, 1990 ;
être considéré comme représentant le comportement Chau, 1993).
d'un élément de volume représentatif du matériau ?
Les effets de la géométrie et de la taille des éprouvettes
sur leur réponse en chargement triaxial sont largement ~'OOO ~2500 ·1500 -1000 -500
\
"'''''-'''''.''''''''N···,·-----l20
déformation axiale (mîcrodeformation) (a)
Effets de l'élancement
Jaeger (1973) et Jaeger et Cook (1976) ont montré les
effets de l'élancement sur la résistance sous différentes
conditions de chargement non uniforme. Ils ont mis
-120 .
-100
//HlO=1.5 H/D=2
ainsi en évidence que la raison de l'influence de l'élan- 'l-80
cement est très clairement liée aux perturbations du 6
~ -60
champ de contrainte par les effets des contraintes de c
"ni
frottement au contact avec les plateaux. Historique- E -40
ment, les essais étaient réalisés sur des échantillons 8
d'élancement 1 (Evans et Pomeroy, 1958). Toutefois, il -20
est clair que le comportement des échantillons courts
est fortelTIent affecté par le contact avec les plateaux de o
o 500 1000 1500 2000 2500 3000
chargement. Filon (1902) montra que pour des ~éformatÎon radiale (microdeformation)
cylindres d'élancement 1 la concentration de contrainte (b)
au contact est d'un rapport de 1,69. Comparaison de la réponse des jauges de
Augmenter l'élancen1ent de l'échantillon revient à déformations axiales (a) et radiales (b)
din1inuer le rôle du frottement. Ceci a été couramment pour les essais en conditions non
observé dans des essais de cOlTIpression uniaxiale pour lubrifiées sur des échantillons
lesquels aucune technique antifrettage n'est utilisée d'élancement 1 (B9), 1,5 (B1S.1) et 2 (BiO).
Comparison of the response of axial (a) and
(Obert, Windes et Duvall, 1946 ; Hobbs, 1964a ; HereI, radial (b) strain gages for tests with no
1966 ; Mogi, 1966a ; Bordia, 1971 ; Green et Perkins, lubrication on samples with a slenderness of 1
1972 ; Starfield et Wawersik, 1972 ; Dhir et Sangha, (B9), 1.5 (B15.1) and 2 (B10).
1973 ; Hawkes et Mellor, 1970 ; Vukuturi et al., 1974 ;
Ikogou, 1990). Nous pouvons également mentionner les
travaux historiques de Vicat (1834). Pour les essais lubrifiés (Tableau IV) les échantillons
Nous avons testé en conditions non lubrifiées des d'élancement 1 et 2 montrent clairement une résistance
échantillons d'élancements 1, 1,5 et 2. Les réponses plus faible. Les échantillons d'élancement 2 sont plus
présentées sur la figure 17 et le tableau III montrent sensibles à un mode d'instabilité par flambement qui
que pour l'élancement 1 (B9), la rigidité apparente est se traduit ici par une résistance plus faible. Ce phéno-
plus faible et la contrainte de pic plus forte (114,6 MPa). mène est plus marqué lorsque l'interface est lubrifiée
Ces effets peuvent être attribués à l'action plus sensible car la hauteur libre de l'échantillon est plus grande que
du frettage pour un faible élancement. Les échantillons lorsqu'il y a frettage.
Pic de résistance pour des essais non lubrifiés réalisés sur des échantillons de différents élancements.
Peak strength for non lubricated tests performed on samples with various slenderness.
56
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
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Pic de résistance pour des essais lubrifiés avec une protection de latex sur des échantillons
de différents élancements.
Peak strength for lubricated tests with a latex protection on samples with various slenderness.
B57 26,1
B60 lubrifié avec
0 22,45 23,3
latex
B70 21,32
58 p.209-310.
N° 103
2e trimestre 2003
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60
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Stabilité du front de taille et
prévision des tassements sur
le tunnel VL1 SOCATOP A86
Le présent article a pour objet d'exposer la démarche
suivie dans le cadre des études de la stabilité du front de
taille et de prévision des tassements de surface en
préalable au creusement du tunnel VL1 du projet
B.DEMAY SOCATOP (bouclage souterrain de l'A86 dans l'Ouest
parisien).
B.lEROI On rappelle tout d'abord les principales caractéristiques
du projet SOCATOP qui voit le creusement au tunnelier
Service Géotechnique d'un tunnel de 11,60 m de diamètre à travers la géologie
Direction des Innovations" tertiaire du Bassin Parisien aux environs de Paris, dans
Techniques un environnement particulièrement sensible.
et Connaissances L'article expose ensuite la méthode employée pour l'étude:
GYM-Construction - dans un premier temps étude de la stabilité du front de
61, avenue Jules-Quentin taille en combinant différentes méthodes de calcul de la
92003 Nanterre pression de confinement du front souhaitable;
- ensuite prévision des tassements susceptibles d'être
produits par le passage de la jupe du tunnelier et lors de
la mise en place de l'anneau de voussoirs.
Le programme de calcul aux éléments finis PLAXIS avec
son option « contraction )) constitue un apport précieux à
une simulation réaliste des phénomènes de resserrement
du terrain autour de la jupe tronconique, qui à l'analyse
se révèlent être la cause majeure des tassements, dès lors
que la stabilité du front est assurée.
Le bilan comparatif définitif entre prévisions et
observations réelles est évidemment à poursuivre mais
les premiers résultats dans l'argile plastique (10 à 20 mm
de tassements en surface) confortent les prévions. Sauf à
remettre en cause le dimensionnement des voussoirs de
telles amplitudes semblent inévitables.
61
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1
Préambule
Le présent article a pour objet d'exposer la
démarche effectuée dans le cadre des études de la sta-
bilité du front de taille et des tassements de surface en
préalable au creusement du tunnel VL 1 du projet
SOCATOP.
Nous rappellerons tout d'abord les principales
caractéristiques du projet SOCATOP qui voit le creuse-
ment au tunnelier d'un tunnel de plus de 11 mètres de
diamètre à travers les formations tertiaires du Bassin
parisien aux environs de Paris, dans un environnement
particulièrement sensible. Les problèmes usuels de sta-
bilité du front de taille et de maîtrise de tassements y Le projet SOCATOP.
sont posés avec une acuité particulière. SOCATOP project.
La machine conçue pour réaliser ce creusement
offre de larges possibilités en termes de maîtrise du
confinen1ent et des tassements (fonctionnement mixte
en pression de terre/pression de boue, injection laté-
rale de bentonite le long de la jupe, injection de mor-
tier de bourrage en queue de jupe); il s'agissait donc Le bouclage de l'A86 à l'ouest s'effectue dans le
de lui donner avec toute la précision souhaitable tous cadre d'une concession accordée par l'état à la société
les éléments nécessaires à son pilotage. COFIROUTE pour une durée de 70 ans. A l'heure
La méthode employée a consisté: actuelle, COFIROUTE a confié la réalisation des travaux
- dans un premier temps à étudier la stabilité du front du Tunnel VL à SOCATOP, groupement d'entreprises
de taille en combinant différentes méthodes de calculs impliquant:
de la pression de confinement du front souhaitable; - le groupe VINCI (entreprises Campenon-Bernard,
- ensuite à prévoir les tassements susceptibles d'être Dumez-GTM, GTM-Construction, entreprise Jean
produits sur le passage de la jupe du tunnelier et lors Lefebvre) à hauteur de 66 % ;
de la mise en place de l'anneau de voussoirs, sachant - le groupe EIFFAGE (entreprises Fougerolle-Borie,
que dans la conduite pratique du tunnelier on peut Quillery) à hauteur de 17 % ;
jouer sur les paramètres complémentaires à disposi- - le groupe Bouygues (entreprise Colas) à hauteur de
tion, c'est-à-dire la pression d'injection de bentonite le 17 0/0.
long de la jupe et la pression du mortier de bourrage;
- au final, le régime optimal de fonctionnement est
déduit de ces calculs par le critère de limitation des tas-
sements de surface à une valeur jugée acceptable et par
le niveau de sollicitations induites dans le revêtement. Le tunnel Est
Le projet SOCATOP '. Le tunnel Est, appelé par la suite tunnel VL, com-
prend deux tronçons:
- VL1, long de 4500 mètres, entre Rueil-Malmaison et
l'autoroute A13 ;
- VL2, long de 5 500 mètres, entre l'autoroute A13 et
Vélizy.
Ce tunnel est circulaire et est creusé au tunnelier
Généralités depuis Rueil-Malmaison en direction de l'A13 (tunnel
VL1), et depuis Pont-Colbert jusqu'à l'A13 après
Le projet SOCATOP (SOciété pour la Construction démontage et transfert du tunnelier (tunnel VL2) :
de l'Autoroute de la Traversée de l'Ouest Parisien) ou
cc A86 à l'ouest )) consiste à établir le bouclage en sou-
- diamètre d'excavation: 11,58 m ;
terrain de l'autoroute A86 autour de Paris. - diamètre intérieur: 10,40 m.
Il se compose principalement de deux tunnels indé- Le tracé et les profils retenus représentent une géo-
pendants: métrie caractérisée par un rayon de courbure en plan
de 800 mètres et une pente maximale (montante ou
1) un tunnel orienté nord-sud reliant Rueil-Malmai-
descendante) de 4,5 0/0. Le revêtement en voussoirs sur
son à Vélizy, long de 10 kilomètres. Ce tunnel (appelé
lequel le tunnelier prend appui est constitué d'anneaux
Tunnel Est ou encore Tunnel VL) sera réservé aux véhi-
universels de longueur unitaire 2 mètres et d'épaisseur
cules légers et comprendra deux niveaux dotés chacun 42 centimètres.
de trois voies de circulation;
Les structures intérieures sont constituées:
2) un tunnel orienté nord -est/sud -ouest reliant
Rueil-Malmaison à Bailly, long de 7,5 kilomètres. Ce - de deux planchers de roulement (dalle basse et dalle
tunnel (appelé Tunnel Ouest ou encore Tunnel TT) est médiane de 30 centimètres d'épaisseur;
accessible à tous types de véhicules et comprendra une - d'un plancher haut (dalle haute de 15 centimètres
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63
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Dans le Bartonien, on notera l'absence des masses • Les marnes et caillasses, d'épaisseur moyenne
et marnes du gypse ainsi que des sables et calcaires 3 mètres, présentent quelques bancs siliceux plus durs,
(Ducy, Mortefontaine, Saint-Ouen) situés à la base du elles sont probablement fracturées en blocs.
niveau. Dans l'Yprésien, les sables du Soissonais • Les sables de Beauchamp peuvent présenter des
(Sables de Cuise) habituellement rencontrés sous le cal- niveaux gréseux indurés; bien que la couche soit peu
caire grossier sont absents. épaisse en moyenne (3 mètres), elle est le siège d'une
nappe en charge (nappe du Bartonien).
• Les marnes supra-gypseuses sont compactes et le
gypse a disparu de ces formations.
Principales caractéristiques des terrains rencontrés • L'argile verte, le calcaire de Sannois, les marnes à
huîtres se présentent sous la forme d'une alternance de
D'une manière générale, les couches présentes dans
marnes et calcaires marneux constituant le mur imper-
la zone sont moins puissantes que dans d'autres secteurs
méable de la nappe du Stampien qui baigne les sables
de la région parisienne, ce qui implique que la section de Fontainebleau sus-jacents.
du tunnel intersecte souvent plusieurs couches à la fois.
• Les sables de Fontainebleau se présentent sous la
• Les craies du Campanien sont des craies tendres avec forme de sables fins (0-300 microns) devenant des
peu de silex. Le tracé du tunnel sera hors nappe compte sables argileux sur les dix derniers mètres à la base de
tenu du rabattement provoqué par l'exploitation de la la couche. Ce sable très fin est dense et présente un
nappe aquifère dans la zone du méandre de Rueil-Mal- caractère marqué de dilatance. Il est boulant sous
maison/Bougival/Croissy-sur-Seine. nappe.
• Les marnes de Meudon et les argiles plastiques sont On voit donc que les couches interceptées sont très
assez compactes et cohérentes, au moins à court terme. variables et le tunnelier doit être capable de creuser
• Les sables d'Auteuil ne semblent pas représenter une aussi bien dans des roches tendres comme le calcaire
couche continue, ils se présenteraient sous forme de grossier que dans des terrains boulants et aquifères
lentilles sableuses intercalées entre l'argile plastique et comme les sables de Fontainebleau, sans parler des
les fausses glaises sus-jacentes. Ces lentilles sableuses formations plastiques argileuses et marneuses.
sont apparemment le siège d'une charge hydrostatique.
• Les fausses glaises d'épaisseur 5 mètres en moyenne
se présentent sous la forme d'argiles sableuses noi-
râtres avec des traces de lignite (lignites du Soissonais).
Hydrologie
• Les calcaires grossiers présentent globalement une
résistance peu élevée, la partie inférieure de la couche Il est admis que les différentes nappes évoquées
étant un calcaire sableux glauconieux. L'épaisseur précédemlTIent (Campanien, Lutétien, Bartonien, Stam-
totale de la couche est en moyenne de 11 mètres. La pien) ne génèrent pas des charges d'eau supérieures à
moitié inférieure de la couche environ est le siège de la 20 mètres par rapport à l'axe du tunnel sur l'ensemble
nappe du Lutétien. du tracé.
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Il est également admis que, compte tenu de la litho- On peut retenir les formules suivantes dans le cas
logie décrite précédemment présentant une alternance du tunnel soutenu immédiatement à front (Peck et al. ;
de couches perméables et imperméables, ces diffé- Davis et al. :
rentes nappes ne sont a priori pas en communication
entre elles, ni ne le seront suite au creusement du tun-
nel ou à l'exécution des puits profonds des secours ou 2n
siH >2D N
de ventilation. (PECK)
1 + D
(2)
6H
i
Calcul de la stabilité du front de taille si H < 2D N
2% + n - 1 (3)
1 + D
6H
Méthode « Atkinson»
Les méthodes utilisées Cette méthode ne s'applique qu'aux terrains pure-
ment frottants. Elle a néanmoins l'avantage de prendre
explicitement en compte la pression hydrostatique.
Méthode du nombre de stabilité A faible profondeur, une relation a été déduite des tra-
vaux d'Atkinson (cf. [3]) pour la pression de confinement
Cette méthode ne s'applique qu'aux terrains pure- p assurant la stabilité latérale d'un tunnel circulaire:
ment cohérents. Le creusement d'un tunnel circulaire
dans des matériaux cohérents à court terme se déroule LyD == K K2 -1 avec K
p
== tg2 (!!.- + cp J (7)
sans instabilité du front si le rapport (facteur de p 4 2
p
charge) :
<p étant l'angle de frottement intergranulaire avec
N == yH +q - Pa D == diamètre du tunnel et y == densité du sol.
(1)
Cu La prise en compte d'une pression hydrostatique
(niveau de nappe supérieur à l'axe) se fait en appliquant
est inférieur à une valeur dont l'expression varie selon cette relation à la contrainte effective et en y ajoutant la
les auteurs [3, 9, 10] en fonction de la distance au front pression hydrostatique à l'axe:
non soutenue et de la configuration géométrique de la
section étudiée (longitudinale ou transversale). K
p == y' D. p +U (8)
Dans cette expression: K p2 -1
H == C + R == profondeur à l'axe du tunnel
y densité du sol; avec y' == y - Yw == y -10 kN/m 3 .
q == surcharge uniformément répartie à la surface du On obtient ainsi une valeur moyenne de pression à
sol; répartir entre la voûte et le radier en fonction de la
Pa == pression de confinement exercée sur le front; variation de pression hydrostatique sur la hauteur de
Cu == cohésion à court terme (non drainée). la section.
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Après élimination de la réaction du massif entre les
deux équations, la poussée due au confinement peut
Méthode du « coin de terrain» s'écrire:
(stabilité au glissement d"un prisme de terrain devant le
front de taille) p == l:Wi(sinf3 - tgcpcos 13)+ Utgcp - C (9)
Cette méthode, développée dans [10], est une tgcp sin 13 + cos 13
méthode d'équilibre limite qui étudie la stabilité d'un
volume prismatique devant le front de taille sous l'effet Une valeur minimale de P est obtenue après dériva-
du poids des terrains sus-jacents. Elle s'applique au cas tion de l'expression de la poussée P considérée comme
d'un terrain à la fois cohérent et frottant surmonté de une fonction de l'angle p. Une valeur moyenne de la
terrains sans cohésion, ce qui correspond au cas sou- pression de confinement est ensuite obtenue en divi-
vent rencontré du creusement dans une formation sant cette valeur de poussée minimale par la surface
donnée (terrain meuble ou rocheux) recouvert par des frontale du tunnel.
remblais ou des terrains alluvionnaires. Cette méthode, à cause de l'importance des
La modélisation comprend deux couches de terrain volumes mobilisés (simplification de l'effet tridimen-
situées au-dessus du tunnel et il est possible d'affecter à sionnel), donne généralement des valeurs élevées
la couche inférieure une cohésion que l'on doit en fait pour la pression de confinement en comparaison des
considérer comme une résistance au cisaillement verti- autres méthodes; mais elle a une réalité physique
cal, venant s'opposer au poids des terrains. dans le cas où le tunnel est surmonté de terrains bou-
La surface de rupture à la base du prisme est plane lants sans cohésion dont le mécanisme de rupture est
et fait un angle p avec la génératrice inférieure du tun- celui de l'effondrement d'une cheminée sub-verticale
nel (P == n/2 - ru sur la Fig. 5). Sur cette surface de rup- jusqu'en surface (fontis). Elle a, par contre, le désa-
ture s'exercent la cohésion c et, éventuellement, la vantage de ne pas prendre en compte les effets de
sous-pression hydrostatique. voûte susceptibles de se produire dans le terrain;
c'est pourquoi elle ne doit être utilisée qu'avec pru-
dence dans les cas de tunnels situés à une profondeur
M conséquente (H/D > 2).
L
,.~.~ .... K Méthode de la spirale logarithmique
/~'.
." \
~
l
mais un développement tridimensionnel est possible,
tenant compte de la forme réelle de la surface de rup-
!
(
\B~
\ . z~ .J b ture. La méthode 2D présente dans l'absolu une sécu-
rité intrinsèque par rapport au risque réel d'instabilité
\ dans la mesure où elle néglige la cohésion sur les faces
~x
\ A
1 latérales de la surface de rupture réelle tridimension-
\~-_/.,. ~ nelle. Les résultats obtenus en 2D conduisent donc à
--
66 rupture (2 équations).
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Si la somme des moments moteurs est supérieure liquide ou pâteux (pression de boue ou pression de
au 1110ment résistant, il y a tendance à l'éboulement du terre, avec adjuvants (mousse et/ou polymères)).
front et donc nécessité d'exercer une pression de confi- Il est également possible de calculer la pression de
nement. Cette pression de confinement ajoute le com- confinement nécessaire à l'obtention d'un facteur de
plément de moment résistant nécessaire à l'équilibre sécurité donné (par exemple F == 1,2).
des moments. L'équilibre exact donne la pression mini-
male, c'est-à-dire celle pour laquelle le coefficient de
sécurité F est égal à 1.
La pression de confinement, dont le diagramme est
trapézoïdal lui aussi sur la hauteur de la section, est Méthode développée par E. Leca
nécessairement positive ou nulle en voûte (il ne peut y Le détail de la méthode est exposé dans [6J. L'appli-
avoir de pression négative). En fonction de la densité cation en est faite ici pour estimer la cc borne infé-
du fluide dans la chambre (12 kN/m 3 en pression de rieure)) donnant à la fois la pression minimale pour
boue), le programme utilisé recalcule les deux extrémi- assurer la stabilité du front et une pression maximale
tés du diagramme de pression, la pression en voûte correspondant au risque de rupture par explosion
étant soit nulle (diagramme de pression triangulaire), (blow-up).
soit positive (diagramme de pression trapézoïdal).
Les formules utilisées sont les suivantes ([6J, p. 11,
Le diagramme de pression recalculé donne un gra- § 4.1) appliquées au terrain à la fois cohérent et frot-
dient de pression de confinement le long de la hauteur tant.
de la section, donc une densité moyenne réellement
nécessaire.
Si cette densité est inférieure à 10 kN/m 3, le confine- (10)
ment réalisé peut être obtenu grâce à l'air comprimé,
la pression à exercer devant être supérieure en tout
point de la section (donc notamment en radier) à la
pression moyenne déstabilisante résultant des
moments moteurs. O"r:S: Kp·O"s +( K p . ~)rD+o"c =
(11)
Si cette densité est supérieure à 10 kN/m 3, le confi-
nement doit nécessairement être un confinement
Kp(Œ S +Œv A
vaute
)+ Œe
TN
> ~ •. ~, ~, •••• ,~ ,. • • • • • • • • • • •
a
o.:
B
.;.-----;.
.
D
........ ~. ~.,.._ ...... .. ..
(" ~ ~~ ... .., ......... ......---"
~
14\
:44------..o-----~
1".
La méthode de la spirale logarithmique.
Logarithmic spiral method.
67
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
avec (Js == surcharge L'amplitude des tassements observés dépendra très
directement de la qualité du fonctionnement du tunne-
K;1:A = coefficient de buté%oussée lier:
- qualité du confinement influant sur l'amplitude des
K;1:A = contrainte verticale en radier ou en voûte tassements en avant du front;
- optimisation du pilotage du tunnelier (surcoupe, gui-
et == résistance à la compression donnée par
(Je dage ... ) ;
2c cOSqJ - bon fonctionnement de l'injection du mortier de
(je ==--~ (12)
1- sin qJ bourrage et de l'injection de bentonite le long de la
jupe, visant à limiter la contraction du terrain autour de
La prise en compte de la présence de la nappe se la jupe, contraction liée à la conicité de celle-ci.
fait en utilisant ces formules en contraintes effectives Les calculs ont pour objectif de définir une plage
et en y ajoutant la valeur de la pression hydrostatique de pressions (confinement à front injection le long de
à l'axe. la jupe, injection de morteir de bourrage) minimisant à
chaque étape du creusement les tassements de sur-
face.
Ceci dit la modélisation 2D est une représentation
Choix d'une plage de pressions simplificatrice pour rendre compte de tous ces phéno-
mènes et il y a lieu de considérer les résultats des cal-
de confinement culs comme des données approchées à partir des-
Dans chaque section étudiée, on applique quelles on peut agir sur les cc réglages )) des outils à
l'ensemble des méthodes exposées ci-dessus, dans la disposition: la pression de confinement la pression
d'injection de bentonite le long de la jupe, la pression
mesure où elles sont applicables.
d'injection du mortier de bourrage.
Le choix du niveau de pression de confinement se
L'estimation des tassements, sur la base des erre-
fait en définissant un intervalle de valeurs de pression à
ments habituels, peut se faire au travers de trois types
l'axe vers lesquelles convergent les méthodes, et en
de méthode:
tenant compte:
- les méthodes empiriques (par exemple approche par
- de l'influence la plus probable de la pression hydro- la formule de Peck) ;
statique, en relation avec la perméabilité;
- une méthode analytique sur la base du calcul des
- des terrains et la rapidité de rétablissement de la déplacements dans le massif à l'aide du concept
pression hydrostatique dans la chambre; convergence-confinement;
- de la position de la section étudiée par rapport à - une méthode numérique par étude d'une section
l'environnement (bâtt ouvrages existants); transversale à l'aide des éléments finis (2D).
- du degré d'approximation propre à chaque méthode.
Pour les sections jugées les plus représentatives,
une étude de sensibilité à la valeur de la pression de
confinement à l'intérieur de cette plage est ensuite Méthodes empiriques
entreprise pour les tassements de surface.
Il s'agit notamment des méthodes décrites dans les
recommandations AFTES [1]. Nous avons laissé le plus
souvent de côté dans cette étude d'exécution l'utilisa-
tion des méthodes empiriques, dans la mesure où
Calcul des tassements celles-ci sont réservées aux estimations sommaires
d'avant-projet.
Généralités
Méthode analytique
Dans le cas des travaux réalisés au tunnelier, les tas-
sernents finaux, après passage du tunnelier dans une Cette méthode, initialement développée dans [4]
section donnée, sont la somme de plusieurs tassements et complétée par les fondamentaux de la méthode
élémentaires qui surviennent chacun à différentes en convergence-confinement contenus dans [7L est
phases du creusement: une méthode analytique basée sur la relation pres-
sion/déplacement au sein du massif de sol dont le com-
- ceux liés aux déplacements du massif dans la zone du portement ici choisi est élasto-plastique parfait.
front et en avant de celui-ci;
L'isotropie du changement est supposée dans le
- ceux liés aux déplacements du massif dans l'espace plan transversal et l'on utilise les critères de Tresca
annulaire autour de la jupe du tunnelier (influence pour les sols purement cohérents et de Mohr-Coulomb
d'une éventuelle surcoupe et de la conicité de la jupe) ; pour les solds cohérents et/ou frottants.
- ceux liés à la mise en place du mortier de bourrage et La méthode donne le calcul du déplacement radial
à la pose du revêtement; d'un point du massif à une distance r de l'excavation.
- ceux liés à l'ovalisation de l'anneau et au passage des Le déplacement radial à l'axe du tunnel dans un plan
caractéristiques court terme du couple terrain-revête- vertical (r == R + C, e == 90°) est donc, sous certaines
réserves, comparable au tassement vertical smax.
68 ment à ses caractéristiques long terme.
70
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
la conicité de la jupe). Ce point a été confirmé lors du
creusement, le tunnelier pouvant se positionner quasi
librement dans l'excavation. Il n'est pas nécessaire Analyse par convergence-confinement
d'injecter de la bentonite sous pression entre la jupe et On constate ici que les déplacements radiaux autour
le terrain afin de limiter l'amplitude des tassements de de la jupe dépassent très nettement l'espace annulaire
surface. Quant au mortier de bourrage il doit remplir disponible autour de la jupe et donc les mouvements
tout le vide annulaire pour assurer un contact immé- du terrain sont, à terme, bloqués par la machine. Dans
diat entre le terrain et le revêtement, avec une pres- ce cas, la pression pouvant s'exercer sur le revêtement
sion seulement nécessaire au bon remplissage de ce est importante (+ de 500 kPa ou 5 bars).
vide. Ce cas de figure est obtenu pour une configuration
L'analyse détaillée des tassements par la méthode standard de la tête de coupe sans surcoupe addition-
aux éléments finis confirme qu'il n'y a pas nécessité nelle, c'est-à-dire un espace annulaire de 50 mm autour
de la jupe. Afin d'éviter d'infliger une pression trop
d'appliquer un confinement pour limiter les tasse-
importante au revêtement, il est possible d'augmenter
ments, les tassements observés en surface étant très le diamètre d'excavation par une surcoupe addition-
faibles « 2 mm). nelle (atteignant 60 mm sur le rayon).
Le fait d'augmenter le diamètre d'excavation auto-
rise un plus grand déplacement radial possible et donc
une détente plus importante des terrains autour de la
Dans l'argile plastique jupe, ce qui a pour effet d'abaisser la pression finale à
l'équilibre sur le revêtement. Malheureusement cette
détente plus importante des terrains s'accompagne de
déplacements dans le massif et donc de tassements de
surface plus importants.
Stabilité du front A titre d'exemple, les calculs analytiques faits au
Jusqu'au PM 850 environ, les calculs donnent un PM 842 montrent que le fait de surcouper de 60 mm
faible niveau de pression de confinement (moins de permet de réduire la pression sur le revêtement de
100 kPa ou 1 bar) obtenu facilement par un fonctionne- 200 kPa (2 bars) en moyenne mais multiplie par 2.5 la
ment à pression d'air comprimé, bien adapté à l'argile valeur du tassement en surface.
plastique étanche.
Au-delà, le passage des lentilles de sables d'Auteuil
et des fausses glaises conduit à un niveau de pression Calculs éléments finis
plus élevé (environ 150 kPa ou 1,5 bar) obtenu par un La cuvette de tassement observée est très large ce
remplissage progressif de la chambre amenant à un qui n'induit pas de tassement différentiel significatif. Le
fonctionnement en pression de terre. Ce mode de fonc- radier remonte sous l'effet de la décompression de
tionnement n'est a priori plus nécessaire lorsque la sec- l'argile plastique. Les calculs effectués montrent que (à
tion se trouve inscrite, majoritairement ou en totalité, pression de confinement constante de l'ordre de
dans le calcaire grossier. 100kPa - 1 bar), dans l'argile plastique sous 50 m de
71
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
Wl03
2e trimestre 2003
couverture, une réduction significative des efforts sur Les sections étudiées par la méthode convergence-
le revêtement peut être obtenue par une surcoupe de confinement dans le calcaire grossier se situent sous
40 mm au prix d/une multiplication par 2/5 des tasse- une couverture de 50 à 70 m. Les valeurs de pression
ments/ de 11 à 26 mm. sur le revêtement obtenues montrent qu/il n/est pas
On peut ainsi mesurer l'influence de l'utilisation de nécessaire de surcouper pour la diminuer: 60 à 100 kPa
la surcoupe sur les sollicitations s/exerçant sur le revê- (0/6 à 1 bar) en moyenne, alors que le terrain ne vient
tement. pas au contact de la jupe du tunnelier.
Les tassements de surface seraient inférieurs au mm
(sans tenir compte de l'ovalisation de l'anneau de vous-
soirs).
Comparaison avec la réalité
A la date de rédaction de cet article (septembre
2001) le tunnelier a creusé environ 1 000 m et a traversé
la craie, le marno-calcaire de Meudon et évolue dans
l'argile plastique. Les tassen1ents observés en surface Dans le sable de Fontainebleau
au droit des sections dans l'argile plastique atteignent
effectivement les valeurs annoncées dans le calcul
comme en témoigne la figure ci-après. La pression de
confinement est comprise en moyenne entre 50 et Stabilité du front de taille
100kPa (0/5 à 1 bar), et la surcoupe est minimale.
Des disparités importantes existent suivant les
méthodes utilisées. Les pressions calculées s/échelon-
PM 850 Cuvette de tassements Argile nent entre 100 et 300 kPa (1 à 3 bars) suivant la hauteur
plastique de couverture et la charge hydrostatique, lesquelles
diminuent progressivement en allant vers A13. La
-60 -50 M40 M30 ~20 -10 0 10 20 30 40 50 60 méthode Leca donne des résultats très proches de la
valeur moyenne tant que le niveau d'eau est supérieur à
l'axe du tunnel. La méthode dite du (( coin de terrain ))
prend ici tout son sens, vu la configuration géologique.
Elle donne par contre des résultats significativement
plus élevés que la valeur moyenne dès que l'on est en
présence d/eau. Au final, la méthode la plus fiable sem-
blerait être celle de la spirale logarithmique car ses
distance par rapport à 11 axe (m)
résultats sont toujours proches de la valeur moyenne
toutes méthodes confondues.
Cuvette de tassement observée dans
l'argile plastique.
Settlements trough in plastic clay.
Tassements
On observe également une cuvette de tassement
d/étendue très importante, comme la modélisation par Comme on pouvait s/y attendre dans ce matériau
éléments finis le laissait supposer. sans cohésion, le déplacement radial du terrain est blo-
qué par la jupe du tunnelier et les pertes de volume
après équilibre s/échelonnent entre 1 et 1/2 0/0. Les cal-
culs empiriques [8] et analytiques prévoient des tasse-
ments à l'axe compris entre 5 et 12 mm, ce tassement
Dans le calcaire grossier augmentant lorsque la couverture diminue.
Le calcul conclut, comme on pouvait s/y attendre, à Une zone plastique apparaît systématiquement
l'absence de pression de confinell1ent. Compte tenu de autour de l'excavation, son épaisseur varie de 0/80 m à
l'hétérogénéité du calcaire grossier et de la nature 2/30 m. Les pressions moyennes sur le revêtement
sableuse présentée par le faciès dans la partie infé- s/échelonnent entre 220 et 80 kPa (2/2 à 0/8 bar) ce qui
rieure de la couche, laquelle est baignée par la nappe, il est a priori tout à fait acceptable pour le revêtement
sera néanmoins souhaitable de maintenir une pression envisagé. Il n/y a donc pas nécessité d/utiliser une quel-
d/air comprimé à front. Ceci limitera d/éventuelles conque surcoupe.
venues d/eau circulant dans les fractures préexistantes Les calculs aux éléments finis donnent les résultats
au sein de la couche. suivants (pression de confinement = 100 kPa - 1 bar) :
72
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2c trimestre 2003
Dans le cadre du fonctionnement en configuration
de base, la cuvette de tassement observée est très pro-
noncée et le tassement en surface dépasse les 30 mm.
On mesure ainsi très directement l'influence de la coni-
Conclusion
cité de la jupe sur le tassement. Les problèmes de stabilité de front de taille et de
maîtrise des tassements sont récurrents sur tous les
chantiers de tunneliec particulièrement ceux de grand
diamètre comme SOCATOP.
L'approche qui en est faite dans cet article est une
tentative d'analyse complète de la question intégrant
une réponse simultanée aux phénon1ènes se produisant
à front et le long du tunnelier.
Elle démontre que si les problèmes de stabilité du
front de taille peuvent être approchés de manière satis-
faisante par des calculs manuels, une prévision sérieuse
des tassements atteints ne peut se faire que par une
analyse aux élélllents finis. A ce titre, le prograrnme
PLAXIS au travers de son option cc contraction )) consti-
tue un apport précieux à une sin1ulation réaliste des
phénomènes de resserrernent du terrain autour de la
jupe, phénomènes que les praticiens connaissent bien.
, -r, Cette option cc contraction)) permet d'éviter les utilisa-
l:J.l'Otm.q UUt.
(:0"11,,"'. ~~'lH;f"*VlK.m.ttt ~{!,4!"ltl
..•
'" tions abusives et erronées du concept du taux de
~tf''*I>$l;''.It\~!t*$u*<! ~p~il.l.)l> 1,l'1>#S,*'1
déconfinement que l'on voit hélas trop souvent.
Tassements dans les sables de Fontainebleau. Par ailleurs, cet article démontre que, dès lors que la
Settlements within the Fontainebleau sands.
stabilité du front est assurée, la cause majeure des tas-
sements provient de la conicité de la jupe et de la pos-
sibilité qu'a ou non le terrain de se refermer autour de
celle-ci. Tout calcul prévisionnel de tassements qui
n'intégrerait pas la forme spécifique et les dimensions
Pour réduire le tassement en surface, la solution du tunnelier doit donc être considéré comme irréaliste.
théorique consiste à empêcher le terrain de suivre, lors Le bilan comparatif définitif entre prévisions et
de sa détente radiale, le profil tronconique de la jupe observations réelles des tassements sur le chantier
du tunnelier. Ceci s'obtient en réduisant l'amplitude de SOCATOP est évidemment à poursuivre, mais les pre-
la contraction dans le programme PLAXIS. Les résul- miers résultat montrent que dans des formations très
tats de calcul en termes de contrainte (en voûte, en sensibles comme l'argile plastique des tassements de
radier et aux naissances par exemple) permettent 10 à 20 mm - conformes aux prévisions - sont inévi-
d'estimer le niveau de contre-pression théorique tables, tout au 1110ins dès lors que l'on ne remet pas en
d'injection de bentonite à exercer le long de la jupe. question le dimensionnement des voussoirs.
[1] AFTES - Les tassements liés au creuse- analytiques et nunlériques. Thèses ENS [8] Peck et al. - (( Design of tunnels liners
nlent des ouvrages en souterrain. Mines de Paris, 1990. and support systems )). Rapport NITS
Reconlmandations AFTES, 1999. [5] Davis et al. - (C The stability of shallow n° 183799,1969.
[2] Aristaghes P., Autuori P. - c( Calcul des tunnels and underground openings in [9] Pera J. - cc Présentation générale des
tunnels creusés au tunnelier )). Jour- cohesive material )). Géotechnique 30, boucliers à pression de boue )), § 4 : Sta-
nées techniques AFTES, 1996, p. 145 à n° 4,1980, p. 397-416. bilité d'ensemble du front de taille.
150. [6] Leca E., Panet M. - (( Application du cal- AFTES, Le creusement des tunnels en
[3] Atkinson, Potts - (( Stability of a shallow cul à la rupture à la stabilité du front de terrains Ineubles et aquifères, 1984.
circular tunnel in cohesionless soil )). taille d'un tunnel )). Revue française de [10] Sternath R., Baumann Th. - (( Face
Géotechnique, vol. 27, n° 2, 1977, p. 203- géotechnique, n° 43, 1990. support for tunnels in loose ground )).
215. [7] Panet M. - Le calcul des tunnels par la Tunnels for people, Golser, Hinkel and
[4] Corbetta F. - Nouvelles méthodes méthode convergence-confinenlent. Schubert eds, Rotterdam, Balkerna,
d'étude des tunnels profonds. Calculs Presses de l'ENPC, 1995. 1997.
73
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
Champ de contrainte
dans les argilites
de Tournemire. Mesures
in situ et interprétation
Cette étude présente deux campagnes de mesures de
A. REJEB contraintes par la méthode de fracturation hydraulique
Institut de Radioprotection en forages dans les argilites du Toarcien du site de
et de Sûreté Nucléaire Tournemire (Aveyron). On montre que cette méthode,
BP17 basée sur la détermination des contraintes normales
agissant sur un certain nombre de fractures
92262 Fontenay-aliX-Roses
d'orientations connues, s'applique bien dans les milieux
Cedex argileux malgré la finesse des fractures préexistantes.
amel.rejeb@jrsn.fr Cependant, cette étude démontre l'importance et en
même temps la complexité de l'interprétation de ces
M. TIJANI mesures. En effet, l'interprétation de mesures identiques
obtenues lors des deux campagnes d'essais, donne deux
École nationale supérieure champs de contraintes géostatiques probables dans le
des mines de Paris site. Par ailleurs, les résultats des modélisations par
35,. rue Saint-Honoré éléments finis permettent d'une part de déterminer le
77305 Fontainebleau champ de contrainte compatible avec les équations
tijani@cges.ensmp.fr d'équilibre et les mesures in situ et d'autre part de
quantifier l'influence de la topographique sur ce champ
de contrainte dans le massif de Tournemire.
lOUD Hmu
m
ID
S N
9Otl. 9(}{}
706 700
6tlo 600
500 SOO
4-00 400
~tl{}
300
100
100
T
Forages
200
IOU
1990
J Cabr(y.m
0 f 1 6
0 1000 1500 1900 ln
76
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N° 103
2" trimestre 2003
Une campagne de huit forages rayonnants autour de 516 NGF alors que la cote de la surface du sol au
de l'axe du tunnel a été réalisée en 1994 (Fig. 2). Cette droit du site est estimée à 751 NGF, soit 235 m au-des-
campagne a mis en évidence la présence d'une faille sus des têtes de forages (Fig. 1). Il est ainsi important
principale avec une fracturation associée d'origine tec- de noter la topographie du site de Tournemire.
tonique affectant le milieu argileux ainsi que la pré-
sence d'eau dans quelques fissures. Suite à ces consta-
tations, deux galeries de 30 m de long, dites Est et
Ouest, ont été creusées en 1996 perpendiculairement à
l'ancien tunnel (Fig. 2). L'implantation de ces deux gale- Rappel des méthodes
ries a été judicieusement choisie, afin que la galerie
Ouest intercepte la faille principale et la galerie Est soit de mesures de contraintes
dans une zone saine. par fracturation hydraulique
Les premiers essais de fracturation hydraulique en
forage ont été mis en œuvre dans le but d'accroître la
productivité des puits pétroliers. Il s'agissait d'aug-
menter la perméabilité de l'encaissant par rupture de
la roche en injectant des fluides dans une portion de
forage isolé (Clarck, 1949). Fairhurst (1964) fut parn1i les
premiers à préconiser l'utilisation de la fracturation
hydraulique comn1e méthode de déterll1ination du ten-
seur des contraintes locales. Cette méthode est actuel-
lement la plus courante pour estimer l'état des
contraintes en grande profondeur, particulièren1ent
dans les milieux cristallins.
On distingue la méthode de fracturation hydrau-
lique classique (HaiIl1son et Fairhurst, 1969) et la
méthode HTPF (Hydraulic Tests on Pre-existing Frac-
tures) développée par Cornet et Valette (1984). La
méthode HTPF est une généralisation de la méthode
classique. Ces méthodes ont été déjà décrites dans plu-
sieurs références et notamment dans les thèses de Bur-
let (1991) et de Willeveau (1997) et ne sont que briève-
ment rappelées ici.
Pf: pression de
fermeture - 41~70 m
1 Pressîon
~~
4 " I~ 1111~ t
~
... _ .... ~
-..,.-
.....
Débit ---.. 1
2 4
1
Temps (mn)
Exemple d'une courbe pression-débit-temps avec l'empreinte de la fracture testée au cours de la
campagne d'essais de 1995 à Tournemire.
Example of pressure-flow rate-time curve and the trace fracture tested during the 1995 test series at Tournemire site.
78
conséquent, la précision du champ de contrainte cal- faible perméabilité des argilites de Tournemire, a per-
40
1nterprétation 80
assin1ile les couches calcaires à une plaque rigide char- de 10° avec la verticale;
geant les argilites et les marnes du Toarcien, il appa- ()H == 4,0 ± 2,0 MPa, orientée N 162° ± 15° E.
raît, selon les principes classiques de la mécanique des
L'amplitude de la composante verticale inférieure
sols, que la distribution de contrainte verticale à la base
aux poids des terres (6 MPa) ainsi que son inclinaison
de l'Aalénien ne peut être évaluée simplement (Craig,
reflètent probablement les effets de la topographie du
1987). De plus, pour ce qui concerne les variations spa-
site de Tournell1ire.
tiales du chalnp de contrainte, il a été montré qu'en
milieu sédÏll1entaire ces variations peuvent ne pas être La direction de la contrainte horizontale majeure
linéaires avec la profondeur (Evans et al.? 1989 ; Cornet observée, est significative des contraintes tectoniques
et Burlet, 1992). Dans le cas du site de Tournemire, cette régionales, du fait de l'absence de structure significa-
non-linéarité ne permet pas d'interpréter les l11esures tive au voisinage du site. Cependant, l'absence d'essais
selon la méthode HTPF avec une inversion globale des HTPF sur des fractures préexistantes d'orientations suf-
données. fisamment différentes n'a pas permis de déterminer de
façon précise ramplitude de la contrainte horizontale
Pour circonvenir l'ensemble de ces difficultés,
majeure.
rinterprétation des mesures de cette deuxième cam-
pagne a été l11enée pas à pas en combinant la méthode
de fracturation hydraulique classique et la méthode
HTPF tout en considérant les données les plus cohé-
rentes et les 1110ins ambiguës. Comparaison
des deux campagnes d'essais
Les deux campagnes d'essais pour les mesures des
Résultats contraintes dans le site de Tournemire s'accordent bien
en ce qui concerne les amplitudes des contraintes nor-
La figure 5 donne la variation des trois composantes males s'exerçant sur les fractures testées et diffèrent
principales des contraintes avec la profondeur dans notablement en ce qui concerne les orientations de ces
rintervalle testé. On ne peut pas mettre en évidence fractures et le champ de contrainte autour du tunnel.
une augmentation ou une diminution systématique des
contraintes principales horizontales avec la profon-
deur ; les variations latérales dominent ces résultats.
Ces variations peuvent être attribuées à la présence de
fractures préexistantes remplies de calcite entre les Contraintes normales locales
profondeurs 30 m et 50 m. Le gradient vertical de la
composante verticale représentée sur la figure 5 est Le tableau l regroupe les résultats des mesures des
d'environ 0,026 MPa/m ; il convient d'éviter d'extrapo- contraintes normales (()n) obtenues lors des quatre
ler cette valeur au-delà des profondeurs testées du fait essais réalisés pendant les deux campagnes de 1995 et
du changement de nature du matériau dans le massif 1999. La cote Zo représente la profondeur par rapport à
et de la topographie. la tête du forage. Ces résultats nous permettent de
constater que la technique des essais hydrauliques
pour déterminer l'an1plitude de la contrainte normale
Contrainte (MPa)
o -1 5
supportée par les fractures dans les argilites s'est révé-
(} +------+-------+----~.-!- ..- + "'..---r__-........._r_--i-·-~-- ..···· ··.i· ·.. · · l lée tout à fait fiable. En effet, avec du matériel et des
équipes différentes, à des périodes différentes, on
retrouve des amplitudes identiques avec une légère
40 .l-----I---.....-----;---.."'--..·.·.-.... ~ ....·-·....·......·...... l...... ·..·.... ··B
......... j..·...."'......---"'-..--f---t-----;---·---·-~
variabilité de 0,2 à 0,3 MPa. Cependant, des résultats
différents ont été obtenus pour les orientations des
î 6{)-··---·-·-- quatre fractures testées durant les deux campagnes
~ d'essais; ce qui peut influer considérablement la déter-
\00
~ 80 ,...~...-"'..-.....-
mination du champ de contrainte.
~
~ 100 j.•.. --- ~"'~ "' wl· ..· ··..·..·..+- _ -t--_·.._..---l--..· w _ + t--~-----l---<
Données géométriques
Intérêt de la modélisation
La figure 6 présente la coupe verticale considérée et
Afin de vérifier l'influence de la topographie du site montre les divers faciès ainsi que l'emplacement des
sur les contraintes mesurées à Tournemire, une modé- points de mesures où on a déterminé les contraintes.
lisation par éléments finis a été réalisée. Cette modéli- Cette coupe s'étend horizontalement sur 4 km et verti-
sation perlTIet d'estimer un champ de contrainte pro- calement sur 2 km ; dimensions suffisantes pour repré-
bable, compatible avec les équations différentielles senter l'infini. En revanche, on n'a pas modélisé le tun-
d'équilibre, et qui sera comparé aux champs de nel qui est suffisamment loin des points de mesure
contraintes proposés par les deux précédentes CalTI-
pagnes d'essais.
Bajocien Bathollien
Le champ de contrainte dépend de la rhéologie, de
la genèse, de l'hétérogénéité, de l'anisotropie, de la DomérieH
topographie du site ... La modélisation du site de Tour-
nemire a permis d'étudier l'influence de chacun de ces
paramètres. Dans cet article, n'est présenté que l'effet
de la topographie sur le champ de contrainte à Tour-
nemire.
Héttallgiell
Synthèse bibliographique
Amadei et Stephansson (1997) ont présenté une
revue bibliographique, bien fournie, sur les travaux de - 250m
modélisations numériques et analytiques de l'effet de
Données géométriques des modélisations
la topographie sur le champ de contraintes. Les princi- numériques.
pales caractéristiques de ces modélisations sont résu- Geometrical data for the numerical simulations.
mées ici:
81
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
Wl03
2e trimestre 2003
pour négliger l'effet de sa présence sur les contraintes. inférieur, l'effort horizontal et le déplacement vertical
Plus précisément, le rapport entre le rayon du tunnel sont nuls. Sur les deux bords verticaux, l'effort vertical
et la distance séparant le tunnel du point de mesure le et le déplacement horizontal sont nuls. La continuité
plus proche est un nombre très petit vis-à-vis de 1 pour des déplacements est imposée entre les différentes
être autorisé à négliger l'effet de structure. D'ailleurs, couches.
cette hypothèse est largement confirmée par les
mesures mentionnées dans le paragraphe 6.1.
Principaux résultats
L'état de référence Il est intéressant de représenter graphiquement
l'effet de la topographie par la densité ou le poids volu-
Dans le premier modèle, l'état de référence est relâ- mique apparent. Le poids volumique apparent est, au
ché (approche classique). Le second modèle corres- signe prés, la dérivée de la contrainte verticale par rap-
pond à un schéma par lequel on imagine un état de port à z. La différence entre les poids volumiques réel
référence sans relief avec des contraintes initiales et apparent est la dérivée du cisaillement par rapport à
connues puis une création du relief par érosion. L'état la coordonnée horizontale x.
de contraintes de référence pour ce deuxième modèle Avec les deux modèles, on remarque les mêmes
est caractérisé uniquement par trois composantes: une phénomènes déjà observés par d'autres auteurs (Stur-
contrainte verticale (j et deux contraintes horizontales guI et al., 1976). Sous une montagne, on a une densité
(jh et (jH' Ces trois comVposantes, variant linéairement en
apparente plus faible que la densité réelle et ce parce
fonction de la profondeur, ont été déterminées en ajus- que la montagne s'appuie sur le reste du massif
tant les contraintes obtenues à l'état final par le modèle rocheux au niveau de ses extrémités; une sorte d'effet
sur les mesures des deux campagnes d'essais 1995 et de voûte.
1999.
Les figures 7 à 9 illustrent les résultats du premier
modèle. On trouve respectivement les zones d'intensité
de la contrainte verticale (Fig. 7) et de l'écart entre den-
sités réelle et apparente (Fig. 8) ainsi que le profil le
Les matériaux
Le massif rocheux de Tournemire est constitué de
7faciès. Mis à part, l'argilite du Toarcien, les six autres
matériaux sont élastiques et isotropes. Dans le premier
modèle, on a utilisé les masses volumiques et les para- .!\:l
1'5.5
1:
Champ de contrainte
o.s,
Les modélisations bidimensionnelles réalisées ne
permettent évidemment pas de nous renseigner sur
ol+----+----.-~I--..........--+-...............--+-......-+--~--+---+-- .............
........j- l'orientation du repère principal des contraintes par
o 200 400 600 &00 1000 1200 1400 rapport au Nord puisque par construction d'un modèle
Profondeur (m) en déformations planes l'une des directions principales
est orthogonale au plan du modèle.
Densités réelle et apparente en fonction de Cependant, comme le montre la figure 10, qui
la profondeur (modèle 1).
Actual and apparent densities versus the depth
représente l'évolution des contraintes principales le
(modeI1). long du forage ID 180 déduite du modèle réduit, les
deux composantes sub-horizontales sont pratiquement
confondues. Dans ce cas, toutes les orientations' par
:1 rapport au nord sont valables.
Par ailleurs, la comparaison avec les résultats de la
Comparaison des calculs campagne d'essais de 1995 (Fig. 4) montre que le
aux mesures dans le site modèle 1 réduit permet de retrouver assez correcte-
ment les contraintes principales crv et aH' En revanche
une grande divergence existe en ce qui concerne la
contrainte sub-horizontale mineure qui est décrois-
sante sur la figure 4 et croissante sur la figure 10.
Contraintes normales locales Un autre accord encourageant concerne l'inclinai-
L'analyse des résultats des contraintes le long du son par rapport à la verticale de la contrainte principale
forage ID 180 obtenus par le premier modèle montre majeure av qui est de l'ordre de 10° dans les deux cam-
que la contrainte verticale calculée peut aller jusqu'à pagnes de mesures et de l'ordre de 14° dans les résul-
8MPa à la profondeur 104 m. Cette valeur est bien trop tats du modèle (valeur pratiquement uniforme le long
élevée par rapport aux mesures des contraintes nor- du forage ID 180 entre les profondeurs de 40 à 140 m).
males dans le site (voir tableau 1, essai n° 3). Cela nous
conduit alors à réduire les densités avec un rapport de
l'ordre de 0,75 (modèle 1, réduit).
V 4
M 95 - 5,8 8,3 6,2 5,9
3.5
M95-4,4 5,8 4,4 3,4
3 '-------'--. ~"""-<"_ _""""""'_----'--_~
__ """""""_""""""'_---J
M 95 -4,5 4,4 3,3 4,5 o 60 86 100 120 14() 160
Profondeur (m)
M 99- 3,5 6,6 5,0 3,9
M 99- 6,1 8,3 6,2 5,9 Contraintes principales en fonction de la
profondeur (modèle 1 réduit).
M 99- 3,8 6,1 4,6 4,6 Principal stresses versus the depth (reduced
M 99-4,7 4,8 3,6 3,9 mode] 1).
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REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
N° 103
2e trimestre 2003
-1 mesures in situ. Cependant ces calculs numériques
n'ont pas permis de cc trancher)) entre les résultats dif-
Conclusion férents des orientations des fractures testées et aussi
entre les deux directions de la contrainte horizontale
A l'issue des deux campagnes d'essais menées sur majeure données par les deux campagnes d'essais à
le site de Tournemire, la dispersion et l'imprécision des cause du caractère bidimensionnel du modèle déve-
résultats des mesures de contraintes semblent être une loppé.
réalité du terrain. En effet le fait de ne pas disposer Par la présente étude on a cherché aussi à souligner
dans les forages testés de fractures préexistantes que malgré les progrès de la géotechnique et malgré
d'orientations différentes, ne permet pas d'avoir une les efforts non négligeables des divers spécialistes des
meilleure précision sur les amplitudes des contraintes mesures in situ et des modélisations théoriques et
même si on avait réalisé plus d'essais hydrauliques. Par numériques les informations qu'on peut obtenir sur le
ailleurs, l'existence de couches à différentes rigidités champ des contraintes dans un massif rocheux restent
ainsi que la topographie marquée du massif ne facili- encore trop incertaines eu égard à la grande impor-
tent pas l'interprétation des mesures. . tance qu'ont de telles données lors de la modélisation
Par ailleurs, les calculs des contraintes dans le mas- de l'évolution de ces ouvrages et particulièrement
sif de Tournemire soumis à la gravité ont permis de lorsqu'il s'agit d'ouvrages pour le stockage de déchets
confirmer et de quantifier l'effet de la topographie sur nucléaires.
le champ de contrainte. Ces calculs ont montré l'impor-
tance des poids volumiques des divers faciès sur les
résultats obtenus. Il convient de noter que les valeurs
des densités obtenues par essais de laboratoire et utili-
Bertrand et Ouvry dlANTEA et messieurs
sées dans les calculs surestiment les contraintes. Ce qui Bert et Cornet de rIPGP et Wileveau de GEOSTRESS ont réalisé
démontre que la prise en compte de l'effet d'échelle sur les mesures in situ qu lils en soient vivelnent remerciés. Nous
l
ces paramètres est souvent indispensable pour avoir le remercions également messieurs Cabrera et Boisson qui ont suivi
meilleur accord entre les résultats théoriques et les ces deux campagnes dlessais du côté IRSN.
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1 1
Wl03
2e trimestre 2003
Modélisation numérique du comportement différé
des cavités souterraines
Éric BOIDY
Thèse soutenue le 12 avril 2002 sous la direction de Frédéric Pellet,
Université Joseph-Fourier, Grenoble
85
REVUE FRANÇAISE DE GÉOTECHNIQUE
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l'étude de situations plus complexes comme le bâti ancien, les Mots clés: expérimentations in situ, vulnérabilité sismique,
interactions entre bâtiments, l'interaction sol-structure (échelle bâti existant, bruit de fond, excitation harmonique, choc, interac-
locale) ou site-ville (échelle globale) comme facteurs aggravants tion, homogénéisation, structures discrètes.
ou modérateurs de l'action sismique.
Les maçonneries en ETC (blocs de terre comprimée) permet- d'information sur ces mortiers à forte teneur d'argile (entre 5 et
tent de construire des habitats individuels à un faible coût envi- 20 % d'argile). Nous faisons un bilan des procédures d'essais
ronnemental (et économique pour les pays du sud) car on utilise appropriés à ces types de mortier. Il en ressort l'impossibilité
des matériaux locaux. De plus cette démarche a un impact socioé- d'utiliser le maniabilimètre Afnor, la possibilité d'utiliser le cône
conomique positif puisqu'elle favorise le travail humain direct de d'Abrams et la nécessité d'appréhender le comportement d'inter-
construction contrairement à la filière actuelle basée sur l'indus- face ETC-mortier. Enfin, des échantillons de maçonnerie de for-
trialisation de la production du matériau. L'architecture utilisée mulations différentes, d'environ 1 m_ de surface et des triplets de
est adaptée au matériau qui ne doit travailler qu'en compression. ETC maçonnés avec du mortier de terre sont testés en compres-
Cette thèse s'inscrit dans un contexte de formalisation du sion simple. Une différence de 38 % au maximum des résistances
comportement en compression des maçonneries en ETC. Nous en compression entre ces deux types d'échantillons a été obser-
avons pour cela effectué e étude de comportement des maçonne- vée. Par ailleurs, l'application de la formule de l'Eurocode G(ECG)
ries en ETC sous compression simple verticale. Le ETC est la relative aux maçonneries conventionnelles conduit, d'une
composante principale de la maçonnerie. Ainsi une analyse de manière générale, à la sous-estimation de la résistance en com-
son comportement en compression simple est faite. Les diffé- pression des maçonneries ETC par rapport aux valeurs expéri-
rentes procédures d'essais de compression utilisées jusqu'à main- mentales. Les rapports entre la résistance à la rupture calculée
tenant sur ETC sont présentées et critiquées. Nous arrivons à la par la formule ECG et la valeur expérimentale varient entre 44 et
conclusion que l'essai sur demis blocs maçonnés (l'un au-dessus 72 0/0.
de l'autre) est pertinent. Il est aussi démontré que l'essai de flexion
en trois points peut donner la résistance en compression de ETC Mots clés: blocs de terre comprimée (ETC), compression
avec une précision de l'ordre de 20 % . La seconde composante simple, fissuration, mortier de terre, flexion, stabilisation, rupture,
de la maçonnerie est le mortier de terre (à plus de 88 % en poids homogénéisation, modélisation, essai à l'échelle 1, essai in situ,
sec de terre) stabilisé au ciment. La littérature n'apporte que peu maçonnerie, terre crue.
Le diagnostic et l'analyse de risques sont des missions essen- présentant des données insuffisantes, lors de diagnostics prélimi-
tielles pour assurer la sécurité des barrages en service. Pour réa- naires ou en synthèse d'analyses approfondies, il est nécessaire
liser ces tâches, des méthodes puissantes ont été développées et de recourir au jugement des experts. À partir de leurs connais-
apportent une aide précieuse aux ingénieurs spécialisés: modèles sances et de leur expérience, ces derniers vont fournir alors une
physiques, calculs numériques, statistiques, fiabilité ... Toutefois, interprétation, un avis ou une recommandation à la question
Wl03
2e trimestre 2003
- - - - - -~~~~~~~~~-----------------------------
Cette recherche propose des méthodes d'aide au diagnostic et - une méthode qualitative pour constituer des historiques de
à l'analyse de risques dans le cadre d'une approche par expertise. vieillissement et pour représenter les lois d'évolution des pertes
Elle vise à assister les ingénieurs spécialisés lors d'analyses préli- de performance;
minaires et rapides ou en synthèse d'études approfondies. La - des méthodes qualitatives pour évaluer la criticité des pertes
démarche adoptée met à profit les connaissances et le retour de performance des barrages et de leurs composants.
d'expérience des experts. Elle comporte trois étapes: La première partie d'une base de connaissances relative à la
- un modèle fonctionnel de vieillissement, bâti à partir de pathologie des barrages est réalisée et concerne les scénarios de
l'Analyse des Modes de Défaillance et de leurs Effets (méthode vieillissement des ouvrages poids.
AMDE) adaptée au domaine des barrages, et utilisant une repré- Après la présentation de différentes applications sur des
sentation sous forme de graphes orientés. Il permet de construire mécanismes de vieillissement (alcali-réaction; suffusion interne)
des scénarios de vieillissement en enchaînant des séquences suc- et sur des ouvrages représentatifs de ces mécanismes, nous pro-
cessives de défaillances; posons divers développements et perspectives.
La thèse est répartie en quatre parties. La première présente cou, Bishkek (capitale du Kirghizistan) et Grenoble. Ces études
une vue d'ensemble de la problématique des glissements de ter- sur le terrain ont montré pour la première fois que le taux d'alté-
rain déclenchés par tremblements de terre: quelle est l'origine ration des roches ou la présence de couches molles le long de la
du risque, quels peuvent être les impacts sur la population. pente peuvent être responsables d'une forte amplification du
La deuxième partie analyse la situation du Kirghizistan en mouvement sismique du sol.
Asie centrale en apportant deux résultants principaux - la pre- Dans la quatrième partie, ces amplifications ont été testées
mière carte d'aléa sismique probabiliste pour le Kirghizistan (qui numériquement. Ces calculs en 2D et 3D ont confirmé le lien
est un des pays les plus sismiques au monde) et l'application de direct entre lithologie et effets de site (les amplifications locales).
techniques probabilistes à l'aléa régional de glissements de ter- Des calculs ont ensuite été poussés pl us loin pour voir si les effets
rain déclenchés par des tremblements de terre. de site peuvent influencer le déclenchement de grands glisse-
Dans la troisième partie sont décrits les résultats de trois cam- ments de terrain comme ceux qu'on a étudiés au Kirghizistan.
pagnes géologiques, géophysiques et sismologiques menées sur Finalement, la conclusion reprend les principaux résultats
quatre sites de grands glissements de terrain (quelques millions obtenus, établit un modèle conceptuel pour les glissements de
de m_) au Kirghizistan. Ces campagnes ont été l11enées en 1998, terrain sismiques et énonce quelles implications l'étude peut avoir
1999 et 2000, en collaboration avec des instituts de Tervuren, Mos- pour des analyses de risque futures.
Université de Liège
(robert.charlier@ulg.ac.be)
Ce travail s'intéresse à la modélisation des sols et des roches L'une des caractéristiques de cette craie est de présenter une
tendres partiellement saturés, en traitant plus particulièrement les compaction lors de l'injection d'eau dans un échantillon. Cette
couplages apparaissant dans ces matériaux. L'objectif est de sensibilité à ]' eau peut être comparée aux observations effectuées
mieux comprendre le comportement des barrières d'étanchéité sur des sols partiellement saturés, pour lesquels la succion per-
pour le stockage de déchets et celui des couches de craie, réser- met d'expliquer les différents comportements observés.
voirs pétroliers en mer du Nord. L'approche de Barcelone est ainsi introduite dans le modèle à
Deux lois constitutives sont développées: la prenlière est un chapeau de craie non saturée ".
JI
modèle d'écoulement multiphasique anisotherme avec change- Les deux lois constitutives développées sont enfin validées et
ment de phase; elle permet de quantifier les flux des différents utilisées dans des exemples d'application. Dans le cadre du stoc-
fluides en conditions non-saturées et l'évolution de la tempéra- kage de déchets nucléaires, ces calculs confirment l'importance
ture. Ce modèle prend en compte les différents couplages entre des couplages entre les écoulements de fluides et les transferts
l'écoulement de fluides et le transfert de chaleur. La deuxième loi de chaleur. Il est également nécessaire de prendre en compte les
constitutive est un modèle de comportement de la craie de Lixhe. transferts d'eau en phase vapeur. Les modélisations de la craie
Les différents mécanismes plastiques du matériau sont représen- prouvent la capacité du modèle mécanique à reproduire les défor-
tés à l'aide de lois élastoplastiques : le critère de Van Eekelen (frot- mations observées lors d'injections d'eau dans ce matériau. La
tement interne), un modèle de la famille CamClay (pore collapse) succion permet donc d'expliquer certaines compactions obser-
87
et un critère de limitation des contraintes de traction. vées dans les réservoirs pétroliers.