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LA TRACTION ÉLECTRIQUE FEROVIAIRE

En 1879, Siemens réalise un ensemble génératrice, voie et motrice pour convoyer


les visiteurs dans l’enceinte de l’exposition de Berlin. Cette démonstration marque
les débuts de la traction électrique. Le tramway électrique fait son apparition en 1881
à Berlin et à Paris.

Des lignes sont établies dans toutes


les villes importantes et même en
milieu rural. Baltimore est traversée par
un tunnel. Son franchissement avec
des machines à vapeur pose de gros
problèmes. Ce tronçon est électrifié en
courant continu 600 V. Trois
locomotives sont commandées. Mises
en service dès 1895, elles apportent la
preuve que la traction électrique peut
assurer un trafic lourd. En France, les Compagnies de l’Ouest et du Paris-Orléans
s’inspirent de cet exemple pour électrifier des lignes de banlieue.

Le développement tout récent du courant alternatif offre de nouvelles perspectives.


En milieu ferroviaire, un circuit de traction pose deux problèmes : le transfert de
l’énergie jusqu’à la locomotive qui par définition est en mouvement et l’utilisation de
cette énergie. En cette fin de XIXème siècle, le moteur série à courant continu est la
meilleure solution pour répondre au deuxième problème mais le transfert de ce
courant se heurte à l’impossibilité d’employer des tensions supérieures à 3 000 V.
Les partisans du courant alternatif qui éprouvent des difficultés à réaliser de bons
moteurs de traction peuvent électrifier de longues distances grâce à l’emploi de
transformateurs. Jusqu’à l’apparition de l’électronique de puissance, toute l’histoire
de la traction électrique ferroviaire est contenue dans ce dilemme.

Rapidement, les ingénieurs découvrent


les grandes potentialités du courant
triphasé. En 1903, une automotrice
Siemens atteint 206 km/h et celle
d’AEG 210 km /h. L’Italie choisit le
courant triphasé déjà utilisé par la
Suisse pour le franchissement du
tunnel du Simplon. Les machines sont
dotées d’un ou deux moteurs
asynchrones à rotor bobiné. Ces
moteurs ont plusieurs couplages de
pôles qui donnent autant de vitesses de synchronisme. Le principal inconvénient du
triphasé est la complexité des lignes aériennes.

Le courant monophasé à la fréquence de 16 2/3 Hz est testé presque simultanément


en France, en Suisse et en Allemagne. La Compagnie du Midi électrifie une ligne
entre Perpignan et Villefranche-de-Conflans avec un courant monophasé de 12 000
V, 16 2/3 Hz. Le Midi commande six prototypes entraînés par des moteurs
monophasés à collecteur. Ces
derniers, issus des moteurs série à
courant continu, posent de gros
problèmes. Ils sont sujets à des
phénomènes de commutation
d’autant plus importants que la
fréquence est élevée.

En Suisse, les Chemins de Fer


Fédéraux commencent leur
électrification en 1912. Le courant
monophasé à la fréquence de 16 2/3
Hz est adopté par l’Autriche, la
Suède et la Norvège. L’alimentation en une fréquence spéciale impose la
construction d’un réseau de distribution spécifique ou l’emploi de sous-stations
dotées de groupes convertisseurs de fréquence.

Les Américains emploient tous les procédés sans le moindre esprit d’unification. Les
différentes Compagnies utilisent du courant continu de 600 à 3000 V et du
monophasé de 11 000 V et 25 Hz. Dans les années 1920, apparaissent des
machines dotées de groupes tournants de type mono-triphasé et mono-continu. Ces
machines disparaissent durant les années 1950 après l’abandon de la traction
électrique au profit du diesel.

En 1918, la France envoie des


missions aux USA, en Angleterre et
en Suisse. Il est décidé que
l’électrification des lignes françaises
se fera en courant continu 1 500 V.
Ce choix est motivé par la simplicité
de l’équipement des motrices,
l’efficacité du moteur série et par les
faibles perturbations subies par des
lignes téléphoniques. Les réseaux
mettent en service deux types de
machines : des BB à quatre moteurs
destinées au trafic marchandises et
omnibus, des 2D2 pour les express
voyageurs. L’Italie choisit le courant
continu 3000 V au début des années
1920. La Belgique, l’Espagne et
l’URSS adoptent également la
tension de 3 000 V alors que la
Hollande et le Danemark s’équipent
tardivement en 1500 V.

La SNCF décide d’électrifier la ligne


Aix-les-Bains à La Roche-sur-Foron
en 20 puis 25 kV et 50 Hz. Plusieurs
machines sont commandées à
l’industrie française et helvétique. Seule une automotrice équipée de redresseurs
alimentant des moteurs à courant continu connaît une descendance. L’électrification
de la ligne à fort trafic lourd Valenciennes – Thionville débute en 1952. Quatre séries
de machines sont mises en service. Les BB 12 000 de type mono-continu avec des
redresseurs à ignitron s’avèrent la plus réussie. Ces machines conjuguent les
avantages du monophasé associé avec des moteurs série à courant continu.

Au Japon en 1964, la première ligne


du Sinkansen entre en service. La
ligne à voie normale du Tokaido relie
Tokyo à Osaka. Elle est parcourue à
la vitesse maximale de 210 km/h par
des rames à motorisation répartie.
Ces trains connaissent un succès
commercial immédiat. La crise du
pétrole de 1973 relance l’intérêt des
décideurs pour le rail. La saturation
de la ligne classique Paris – Lyon ne
peut être résolue que par la construction d’un nouvel itinéraire direct à grande
vitesse. Le TGV Sud-Est entre en service en 1981 après avoir battu le record du
monde de vitesse sur rail avec 381 km/h.

Les thyristors font leur apparition


dans les circuits secondaires. Les
Suisse et les Allemands sont les
premiers à les intégrer dans les
chaînes de traction. Les moteurs
triphasés sont de type synchrone.
Cette chaîne de traction est utilisée
en France avec l’importante série de
Sybic (SYnchrone BICourant) et le
TGV Atlantique. La mise à disposition
de thyristors GTO permet l’emploi de
moteurs triphasé asynchrones. Les
Astride (ASynchrone, TRIcourant, Européen) sont des machines tricourant aptes à
circuler en France et en Italie.

Cela correspond aux tendances


actuelles. Les administrations
ferroviaires font construire des
machines spécialisées pour le fret,
moins sophistiquées donc moins
chères. Le trafic voyageurs est confié
à des trains à grande vitesse ou à
des rames de type TER.

La mise en service récente du TGV


Est marque une nouvelle étape.
Outre un fabuleux record du monde
de vitesse sur rail à 574 km/h, ces nouvelles rames intègrent plusieurs
caractéristiques novatrices. Un des bogies des remorques est équipé de nouveaux
moteurs synchrones triphasé à aimant permanent. Actuellement, seule la France sait
réaliser des TGV à deux niveaux circulant au quotidien à 320 km/h.

Avec la raréfaction des carburants classiques, l’impossibilité pour l’aviation d’offrir


des relations plus rapides, le chemin de fer, économe en énergie, en espace et
pénétrant au cœur des villes, possède des atouts de premier ordre pour assurer les
transports à moyenne distance.

C’est sans doute le moyen de transport de l’avenir.

Jean CUYNET

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