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Comment étudier l’implication entre Philosophie et Littérature à l’époque moderne ?

1) La Philosophie dans la Littérature.


2) La Littérature dans la Philosophie.

I) La Philosophie dans la Littérature

 Il revient à la littérature comparée d’apprécier l’irradiation de la philosophie dans la


littérature, leurs influences conceptuelles et idéologiques. Il existe 3 niveaux d’étude :

- Il s’agit d’identifier les modèles épistémologiques latents, inconscients, dans les textes
littéraires. Exemples : étudier l’influence des théories bergsoniennes dans l’œuvre de
Proust, ou encore étudier les théories de l’inconscient dans le Surréalisme.
- On peut également chercher à dégager l’influence de tel ou tel philosophe sur tel
écrivain. Il s’agit alors de reconstruire le dialogue qui s’établit entre un philosophe et
un écrivain. Exemples : Schopenhauer en France de René-Pierre Colin ; étude du
rapport entre Nietzsche et Valéry d’Edouard Gaède ; Nietzsche et Artaud, pour une
éthique de la cruauté de Camille Dumoulié ; ou encore l’étude de la subversion de la
philosophie rationaliste de Descartes dans l’œuvre de Beckett.
- On peut aussi juger de l’irradiation de la philosophie dans la littérature en étudiant
l’hégémonie de l’idée sur le texte = la philosophie prend le pas sur le texte, elle fait du
texte littéraire le support d’un message philosophique. Exemple : le roman à thèse,
comme Voyage au bout de la nuit de Céline.

 La fonction philosophique de la littérature peut être également appréciée de façon plus


large, c’est-à-dire grâce aux études de réception de l’œuvre. Cette fonction, considérée de
manière plus large, découle de la définition moderne de la littérature. En effet, à l’époque
moderne, on considère que l’art littéraire peut mener à la connaissance. Le Romantisme avait
déjà remis en cause l’omnipotence de la raison quant à la recherche de la vérité → l’art peut
être + sincère que la science.
→ « L’imagination est la plus scientifique des facultés […] parce qu’elle seule comprend
l’analogie universelle » (Baudelaire, dans son essai sur Poe).
= potentialité du langage Poétique, analogique, qui outrepasse les capacités du langage
logique de la science et de la philosophie. Pour Baudelaire, tout artiste accompli établit une
méthodologie littéraire qui concurrence la méthodologie des philosophes, et qui cherche à
découvrir les lois secrètes du monde (les fameuses Correspondances de Baudelaire)
DONC : tous les artistes sont plus ou moins philosophes, pense Baudelaire → idée post-
romantique sur la capacité philosophique de la littérature.

Cette capacité philosophique de la Littérature provient de 2 aspects inhérents à la littérature :

- les potentialités du langage analogique, par rapport au langage scientifique, logique.


Cette idée est reprise par Prout, entre autre : dans Le Temps retrouvé, il explique sa
méthode : pour déchiffrer la vérité, Proust utilise un instrument = le principe de
l’analogie (=l’étude des ressemblances). Il ne cherche pas le rapport de cause et de
conséquence comme le fait la science, mais utilise plutôt une méthode littéraire. C’est
d’ailleurs pourquoi Barthes a écrit un essai sur La logique de l’inconséquence chez
Proust. Proust cherche les communications, pose les rapports d’analogie entre les
choses et les évènements. Pour Proust, l’analogie serait au langage poétique ce que le
rapport de la loi causale est au langage scientifique.
→ Le langage poétique (=analogique) entraîne une forme d’appréhension du monde,
qui outrepasse le langage logique.
→ La littérature devient un dispositif pour regarder le réel, et pour le regarder de
diverses manières
→ Proust parle « d’instrument optique », et Paul Ricoeur de « modèle heuristique ».
 Il y a donc une potentialité philosophique du langage poétique.

- Il y a aussi certaines conditions inhérentes à la situation de fictionnalité qui préside à


toute création poétique.
La Littérature en péril de Todorov : « La littérature est pensée et connaissance […]
mais une forme de connaissance spécifique » = car il ne s’agit pas, en littérature,
d’établir des propositions sans équivoque, des préceptes, comme le font les discours
philosophique et scientifique. Mais la littérature permet au lecteur de vivre des
situations , de se mettre à la place d’un personnage ou de l’auteur = la littérature
entraîne l’inclusion dans notre conscience de nouvelles façons d’être.
→ La littérature produit un élargissement intérieur (cf. article de Richard Horty :
Redemption from Egotism, dans la revue Thélos n°3)
 Une nouvelle idée de la vérité artistique se dégage : dans la littérature moderne, la
beauté de l’œuvre tient à la vérité qu’elle dégage
→ Beauté = Vérité (indistinction)
→ Dans la littérature : à la fois esthétisme et éthique (ex : Yves Bonnefoy)

II) La Littérature dans la Philosophie

 3 zones d’interférence entre littérature et pensée :

- La philosophie réfléchit sur la littérature


- La critique littéraire devient philosophique
- Les créateurs littéraires deviennent des théoriciens et des philosophes.

1) La philosophie réfléchit sur la littérature :

La philosophie a emprunté aux textes littéraires les concepts philosophiques. La littérature


devient un objet de réflexion pour la pensée philosophique. Naît alors une philosophie
littéraire, une lecture philosophique de la littérature (ex : les écrits de Bergson qui utilise des
textes littéraires ; les textes d’Alain qui a commenté en philosophe les romans de Stendhal et
de Balzac, etc.)
 La philosophie devient « parasitaire » du discours littéraire (Jacques Derrida)
= la philosophie devient l’instrument de la littérature, jusqu’à peut-être se confondre, se
nouer.

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