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N3 °

LE MAGAZINE DU MANAGEMENT DURABLE

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n°3 – juin-juillet 2010

Agence de l'Environnement
et de la Maîtrise de l'Energie

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JUIN-JUILLET 2010
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 Durables marketer
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Faites-vous le plaisir
04’

par Ganaël Bascoul

professeur de marketing à
de consommer
durable !
l’ESCP, auteur de
« Marketing et
développement durable »,
Dunod, 2009.

« Ne consommez pas simplement ce produit parce qu’il est bon pour la nature, mais surtout pour
vous faire du bien ! » En quelques années le discours des marques, positionnées DD et équitables,
s’est transformé. Il a redonné une place centrale au plaisir de consommer.

Le discours initial des marques bénéfices clients et plaisir

dites alternatives a été principa-
lement axé sur la réduction des
impacts de nos choix de consom-
mation : sur les hommes et l’envi-
ronnement. Ce discours a parfois
flirté avec une posture moralisa-
trice. Ceci a permis dans un pre-
mier temps de convaincre une
niche de consommateurs,
particulièrement engagés
dans une démarche de
consommation respon-
sable. Et sans doute,
de sensibiliser le
grand public en lui
montrant que des
alternatives étaient
dès aujourd’hui
possibles.
décisionsdurables _ juin - juillet 10
de consommation.
En quelques années, l’idée que
les produits plus responsables
permettraient d’agir, mais pas de
se faire plaisir, s’est installée dans
l’esprit des consommateurs. Le
terrain était fertile :
dans les sociétés occiden-
tales, l’idée de plaisir est
rarement associée à celle
de responsabilité.
Le clivage que l’on a longtemps
observé dans le discours des
marques correspond à un cliva-
ge préexistant dans l’imaginaire
collectif : l’excès et la violation de
l’interdit contre la modération et la
mesure ; la consommation épicu-
rienne contre une consommation
raisonnée.

Marques
traditionnelles,
le retour
Ce discours aura du mal
à faire le poids face à celui
des marques traditionnelles
qui, depuis longtemps, ont
travaillé leur image autour des
notions de :
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Générosité bien ordonnée…
Dans la plupart des études, le
consommateur considère les ar-
guments DD (labels, certifications,
etc.) comme un tie-breaker. C’est-
à-dire que ces arguments feront
la différence dans le choix de
consommation. Ceci signifie que
 les produits DD doivent :
promettre un niveau de
satisfaction et un plaisir
de consommation au
moins identiques aux pro-
duits traditionnels, pour
être pris en considération
dans le choix final ;
permettre aux clients de
prendre une décision.
Ceci ouvre deux voies de déve-
loppement concurrentes. Celle de
marques orientées développement
durable qui auront su développer
un capital plaisir important (Véja,
par exemple), et celle de marques
traditionnelles ayant su développer
une crédibilité en matière de dura-
bilité (Decathlon).
Cependant, le fait que les produits
DD doivent valoriser le plaisir de
consommer ne signifie pas qu’ils
doivent utiliser les mêmes argu-
ments que leurs concurrents déjà
bien installés. Au contraire, en
créant de nouvelles sources de
satisfaction, ils se créeront une si-
tuation d’autant plus discriminante,
car ils satisferont de nouveaux be-
soins que ne pourront pas satis-
faire leurs concurrents.
Vous avez dit désirabilité ?
De nombreux experts insistent sur
le fait que le développement du-
rable doit être désirable et appor-
ter du plaisir au consommateur.
Quelles sont, donc, les ressources
de cette forme de développement
en termes de désirabilité ?
Quatre pistes semblent se déga-
ger :
1 L’innovation quotidienne :
des innovations fortes comme
le tri sélectif ou l’inter-modularité
des transports, nous amènent à
repenser nos gestes quotidiens.
Ces petits changements, sont
ceux qui, multipliés par leur répé-
tition et le nombre de personnes
les adoptant, peuvent avoir in fine
le plus grand impact sur notre
environnement. Ils nous amènent
et nous aident à avancer, à réin-
venter le quotidien, à lutter contre
la banalité. Une fois adoptés, ils
sont eux-mêmes amenés à évo-
luer, à se perfectionner, faisant du
quotidien une source d’innovation
et d’ingéniosité. Un exemple ? La
conduite d’une voiture hybride ou
électrique (le silence du moteur,
des sensations différentes à l’ac-
célération…) donne une nouvelle
dimension au plaisir de conduire.
2 La découverte
de l’ordinaire :
quelle réalité se cache derrière
ce pot de confiture, d’où vient ce
produit, quelle a été son histoire
avant d’atterrir dans mon linéaire ?
Ces sources de curiosité n’ont
pas souvent été exploitées par
le marketing. Une meilleure
connaissance des modes de
conception et de production des
produits les plus ordinaires peut
grandement en relever (en révé-
ler ?) l’intérêt. Il s’agit, par exem-
ple, de découvrir la structure de
prix d’un produit, comme ceci est
notamment proposé par la marque
Ethiquable. (photo ci-contre)
3 La reprise de contrôle,
aussi appelée « empowerment »
par les marketeurs anglo-saxons,
repose sur l’idée que les consom-
mateurs peuvent tirer une grande
satisfaction à reprendre le contrôle
sur leur mode de consommation,
à ne plus avancer à l’aveuglette
sur des sujets qui leur tiennent
bien plus à cœur qu’auparavant.
Connaître l’empreinte carbone d’un
produit, ou avoir accès à distance
et en temps réel à un graphique
de la consommation énergétique
de son habitation pourront, dans
un avenir très proche, donner une
mesure très efficace des impacts
de nos consommations, ainsi que
des moyens innovants et objectifs
de les contrôler.
Les charmes du DIY  («  do
4 it yourself ») : de plus en plus
de solutions DD amènent à
réduire la complexité des chaî-
nes de transformation et à reve-
nir à des fondamentaux. Dans le
cadre de l’alimentation, c’est le cas
des AMAP pour la production en
amont, et du retour du goût pour
les préparations culinaires à la
maison en aval (avec des émis-
sions comme « Top Chef » ou « Un
Dîner presque parfait »). En com-
paraison avec des plats préparés
proposés en hypermarchés, le
consommateur prend à sa charge
une plus grande part de l’approvi-
sionnement et de la production, ré-
duisant ainsi les impacts liés à son
mode vie. Ce qui lui procure un
grand plaisir.
40,3 %
Coopérative
de producteurs 0,88 €
25 %*
magasin
0,55  €
17,3 % *
Soutien aux producteurs, contrôle
qualité et commercialisation 0,38  €
10,8 %
Transport et taxe d’import 0,24  €
5,2 % T.V.A.
0,11  €
1,4 % Certification
Max Havelaar 0,03  €
* ETHIQUABLE et les magasins s’engagent à limiter
leur marge sur la vente des produits ETHIQUABLE 2,19  €
Ces pistes doivent être exploitées
par les marketeurs et les commu-
nicants, qui façonnent en continu
nos attentes et nos perceptions
en matière de consommation. À
l’avenir, les marques DD qui auront
su créer un réel capital plaisir, en
complément de leur crédibilité DD,
pourront aspirer au capital sympa-
thie (et par conséquent aux parts
décisionsdurables _ juin - juillet 10
de marché !) des marques les plus
installées.
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